Qui veut acheter les Etats-Unis ?
Avec un montant total de 529 milliards de dollars sur les neuf premiers mois de l’année 2009, les ménages Américains - échaudés par la crise et donc en mal d’investissements sécuritaires - se sont révélés les plus gros consommateurs de Bons du Trésor de leur pays, raflant ainsi 45% de toutes les nouvelles émissions de papiers valeurs US et contribuant de manière décisive à maintenir les rendements sous pression. Quant à la Réserve Fédérale US, elle s’est montrée l’an dernier championne toutes catégories dans l’acquisition d’obligations émises par des instituts proches de l’Etat Fédéral (comme Fannie Mae et Freddie Mac entre autres) puisqu’elle a effectivement dépensé plus de 800 milliards de dollars à cet effet sur la même période alors que les investisseurs étrangers, eux, ont pour solde écoulé pour quelques 110 milliards de dollars de ces obligations...
Certes, les Etats-Unis - et avec eux le reste du monde - doivent-ils à ces baisses de taux quantitatives - et donc en partie aux ménages Américains - d’avoir pu maintenir leurs taux proches du zéro et d’être ainsi en mesure d’injecter force liquidités dans leur système financier au bord de la banqueroute. Pour autant, ces ménages - et ce consommateur - US représentent pour Wall Street une proie facile à convaincre - et à plumer - dans une conjoncture où la Trésorerie Américaine éprouve une peine dramatique et sans précédent à écouler ses Bons en direction de son marché traditionnel, à savoir à l’étranger.
Il est effectivement de notoriété publique que c’est l’appétit de l’investisseur non Américain - privé, institutionnel et Gouvernemental - qui a autorisé la Trésorerie US à procéder ces vingt dernières années à des levées massives de fonds ayant financé tout à la fois le train de vie du Gouvernement (guerres comprises), la consommation caricaturale du citoyen moyen et au passage quelques bonnes bulles spéculatives... Les autorités Américaines ont néanmoins trouvé aujourd’hui une parade bien pratique pour contourner cette volte face des investisseurs étrangers.
En effet, la Fed imprime des dollars qui permettent l’acquisition de Bons émis par le Trésor et par les agences affiliées ! La Banque Centrale Américaine procède tout bonnement à des simulacres d’émissions obligataires réussies mettant en scène des Bons qui « trouvent » toujours des acheteurs et ce au nez et à la barbe d’un marché complaisant qui applaudit de toutes ses mains car seulement préoccupé par les apparences.
Aujourd’hui, en 2010, les Etats-Unis d’Amérique, leur notation AAA, leur devise et même leur mode et train de vie se retrouvent le dos au mur car, en l’absence d’une amélioration rapide de leur balance commerciale et d’un rétablissement de leur croissance, il leur sera impossible de poursuivre le financement des baisses de taux quantitatives, c’est-à-dire de ces achats de Bons du Trésor et autres obligations plus ou moins corrélées à l’Etat, par l’intermédiaire de ménages pressés comme des citrons ou par une planche à billets ayant craché tout ce qu’elle avait dans le ventre ! Cet électrochoc à répétitions des baisses de taux quantitatives - simple manipulation consistant à comprimer les taux d’intérêts au possible - n’a en réalité fait qu’amplifier des comportements peu scrupuleux - voire pervers - préalables à la crise et ayant débouché sur cette même crise.
Une occasion unique a été grossièrement ratée par l’ensemble des dirigeants Occidentaux qui, saisissant l’opportunité d’une accalmie grâce aux baisses de taux quantitatives, auraient pu corriger et purifier les distorsions du système financier tout en équilibrant le processus de distribution des ressources dans nos sociétés et en assainissant un commerce international dominé par les déséquilibres...
Par quel miracle les ménages Américains continueront-ils en 2010 à épargner (c’est-à-dire à thésauriser des obligations d’Etat) tout en consommant suffisamment pour faire progresser leur P.I.B. ... le tout dans un contexte de marché immobilier toujours déprimé et de revenus stagnants ? Subsidiairement, pourquoi le monde serait-il plus attiré aujourd’hui par les exportations Américaines ?
En réalité, les USA sont proches du point de rupture à moins que Bernanke et ses acolytes n’aient un plan B ou que l’Administration actuelle ne mise sur un facteur exogène - comme une guerre ? - qui doperait la relance. A mon sens, les dirigeants Américains sont saisis par le déni pendant que leur Empire sombre.
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