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Roberto Saviano : « c’est l’argent de la drogue qui sauve les banques »

« Zéro zéro zéro », le nouveau livre de Roberto Saviano, passionnant mélange de pamphlet et de roman sur le trafic international de cocaïne, avec un focus particulier sur le Mexique. « L’ensemble du narcotrafic représente la première industrie au monde, devant celle du pétrole – nous explique Robert Saviano. Le marché de la cocaïne n’a jamais connu de crise depuis la Seconde Guerre mondiale. C’est un bien qui ne subit pas de cycle, il se porte bien même quand l’économie va mal ».

Dans le livre, Saviano avance que l’argent du trafic de la drogue envahit le monde entier. « 97 % de l’argent de la drogue – explique l’écrivain durant l’interview – est recyclé par les banques américaines et européennes. L’économie du narcotrafic soutient l’économie légitime  ». Il reprend les propos d’Antonio Maria Costa, ex-directeur de l’Office de l’ONU contre la drogue et le crime organisé, qui déclarait en 2009 que «  les milliards d’euros du narcotrafic ont sauvé les banques européennes. »

Et de conclure par un surprenant Made in Italy qui a la côte dans le monde entier : «  les mafias italiennes sont faites de règles, et leur know-how est exporté chez les grands cartels mexicains et russes ».


Roberto Saviano : "L'argent de la drogue sauve... par IlFattoQuotidiano

 

Transcription de l’interview
 

Fabio Fazio (Rai3) : Le voilà, "000", le deuxième et très attendu livre de Saviano paru chez Feltrinelli. La couverture représente bien le contenu, dont nous parlerons dans un instant. Fruit de 7 ans de travail, la première chose qui m’a frappé en lisant les critiques ces jours-ci est l’accueil favorable pour la qualité littéraire, chose plutôt inattendue.

Roberto Saviano : C’est ce qui m’a le plus touché, car le grand défi était d’assembler les faits que j’ai relevés dans les actes judiciaires, dans les écoutes téléphoniques, les entretiens, et donc les faits objectifs, officiels, tout cela, avec la narration. Adopter le style du roman, appliqué à la vérité des faits, et les mettre ensemble. Y mettre ma douleur, ma stupeur. Montrer que ces choses existent, objectivement.

FF : On le lit dans les journaux…

RS : …mais on n’y prête que peu d’attention, on ne fait pas le lien.

FF : On entend ces choses, mais sans les relier entre elles. Disons que ce n’est pas un livre sur le "monde de la cocaïne". C’est bien plus que ça. C’est le monde vu à travers la cocaïne. Comme si, en suivant la route de la cocaïne… Je voulais savoir, quel monde apparait, et surtout quelle proportion du monde apparait ?

RS : Ce qui m’a impressionné, au cours de ces années, c’est la quantité d’argent issue du trafic de la cocaïne. Un chiffre, que je répète ces jours-ci, un chiffre impressionnant : 1000 euros mis dans une action Apple, l’année où Apple a sorti l’iPad par exemple, après 1 an, seraient devenus 1600 euros, qui est déjà un gain énorme. Mais 1000 euros investis dans la cocaïne, après 1 an, seraient devenus 182 000 euros. Rien au monde ne génère un gain aussi gigantesque.

FF : Et cela implique des moyens tout aussi gigantesques pour contrecarrer ces gains énormes

RS : Bien sûr, car cette gigantesque masse d’argent ne permet aucune tolérance vis-à-vis des concurrents. Tu deviens très puissant en peu de temps. Car cet argent se transforme en restaurants, en hôtels.

FF : Cet argent est réinvesti partout dans le monde, par les banques.

RS : Partout, surtout par les banques.

FF : Et ainsi, se crée l’obligation de stopper tout concurrent potentiel.

RS : Oui, et je raconte comment cette férocité entre cartels, ces massacres, ces attentats, sont le résultat d’une logique mathématique visant à exclure les autres. Tous voudraient investir, enfin, certaines personnes voudraient bien investir dans le narcotrafic. Et donc les cartels utilisent une violence gigantesque comme moyen de dissuasion et pour garder le monopole.

FF : On peut dire beaucoup de choses sur ce livre de quelque 400 pages, très détaillé, et, comme je l’ai déjà dit à Roberto, presque difficile à lire au début, car on fait tout de suite face à une… peut-être suis-je naïf, mais à une incroyable cruauté. La première chose que l’on pense en le lisant est : "je pensais que la cocaïne provenait des feuilles de coca, alors qu’en fait, elle nait de la disponibilité, non pas au mal, mais à la cruauté, qui est surprenante et presque surnaturelle."

RS : C’est exactement ça. J’ai souvent du mal à raconter les histoires, comme dans ce livre…

FF : D’ailleurs tu reviens demain soir sur Rai 3 pour raconter deux de ces histoires, à l’émission "Che Tempo che fa".

RS : …car la première réaction est de se dire : "Non, ça ne peut pas être vrai".

FF : On n’y croit pas.

RS : Exactement, et d’ailleurs j’ai presque eu envie d’écrire un polar, un thriller, en m’inspirant de ces histoires, une oeuvre de fiction. Mais je n’ai pas pu, car la réalité est tellement puissante, que je veux que le lecteur se dise, "Non, ce type est un mythomane, je n’y crois pas, c’est impossible", et qu’il cherche à comprendre, à vérifier, à approfondir ces histoires. La cruauté est incroyable. Et pour comprendre comment elle nait, il faut regarder le parcours économique. Par exemple : partons de la Colombie. 1 kg de coca vaut 1500 $. Direction le Mexique : le kilo de coca, les grossistes l’achètent à 25000 $. Maintenant, aux USA. On monte à 47 000 $. Il arrive en Italie, à 57 000 $. Puis à Londres, le kilo passe à 77 000 $. Voilà pour les renchérissements. Gigantesques. Ça signifie que les organisations, les cartels, sont disposés, comme je le raconte…

FF : …sont prêts à tout pour contrôler cette manne, Tu dis que globalement, c’est en substance la plus grande compagnie au monde, économiquement parlant.

RS : Oui, même si les données sont variables. Disons que si l’on compte l’ensemble du narcotrafic, et pas seulement la coca, on serait face à la "World Company", devant Toyota, devant General Motors, devant le pétrole chinois. Il s’agit donc d’un problème qui aurait dû mobiliser, qui devrait mobiliser tous les jours les gouvernements et l’opinion publique, mais qui reste secondaire, marginal, ça concerne juste la plèbe, les toxicomanes. Alors qu’en réalité, c’est le coeur de l’économie, en Occident et ailleurs.

FF : Ces d’histoires, comme le disait Roberto, sont proprement incroyables et sont autant de mondes qui s’imbriquent comme des poupées russes. Ce livre traverse l’ensemble du monde, en racontant via le marché de la cocaïne, de l’Amérique du Sud jusqu’à nous, en Italie. L’Italie tient d’ailleurs un rôle majeur dans ce narcotrafic.

RS : Absolument, et il y a cette expression qui m’a beaucoup plu et que j’ai reprise : la feuille de coca nait en Amérique du Sud, mais les racines de la plante sont en Italie.

FF : C’est-à-dire ?

RS : C’est-à-dire que les règles des grands cartels internationaux sont inspirées des règles italiennes. Et les organisations italiennes, la Camorra, l’Andrangheta, Cosa Nostra, ont toujours investi dans le narcotrafic, ce sont les mafias les plus anciennes et les plus entreprenantes au monde. Par exemple, l’organisation russo-ukrainienne ultra-puissante de Mogilevic est structurée comme celle italienne. Même chose au Mexique. Tous ces cartels essaient d’être en contact avec les organisations italiennes. Mais aussi l’antimafia, la meilleure jurisprudence antimafia au monde est celle italienne. Tous les pays désireux de contrecarrer les organisations se tournent vers la culture antimafia italienne. Ici on en parle, dans les émissions, les journaux télévisés, ce n’est pas le cas ailleurs, ou rarement.

FF : Ils pensent que le problème n’existe pas.

RS : Exactement.

FF : C’est un peu grâce à ton roman "Gomorra", qui a éveillé les consciences.

RS : Je me souviens bien du procurateur antimafia de l’époque, Franco Roberti, qui me racontait en détail à quel point la structure des ports maritimes européens était poreuse, et permettait l’arrivée de tonnes de coca. Salerne, Livourne, l’Espagne, la Grèce, pays qui après la crise est devenu pratiquement une colonie des organisations criminelles. Le problème a toujours relevé de l’urgence quotidienne, mais il n’est perçu qu’à travers les homicides ou les attentats, quand le sang est versé. Du sang versé dans des lieux qui le rendent particulièrement insupportable, car celui versé dans le sud de l’Italie et dans d’autres parties du monde reste très bien toléré.

FF : Nous continuons de penser que le pays le plus lié à la cocaïne est la Colombie, or c’est faux.

RS : Oui, c’est le Mexique qui est au centre du narcotrafic de cocaïne. Car le Mexique pompe à l’intérieur des États-Unis, qui sont le plus grand marché au monde, avec l’Europe pour la consommation de coke, pompe continuellement de l’argent et de la cocaïne. Regarder le Mexique, qui est très lié à l’Italie, à l’Europe, permet de comprendre les dialectiques contemporaines.

FF : Le premier chapitre est vraiment impressionnant. Saviano y raconte combien le problème de la coke est proche de chacun de nous, avec un chiffre – c’est écrit dans un style captivant dont vous aurez un exemple demain soir, – un chiffre que je te demanderai de confirmer. Nous sommes environ 200 dans cette salle. Et d’après cette donnée, au moins 8 d’entre nous ont déjà gouté à la cocaïne. C’est ce que disent les chiffres.

RS : Oui.

FF : Et cela touche des personnes autour de nous.

RS : En effet

FF : Sans que nous le remarquions.

RS : Non, parce que le problème est que cette substance n’est pas comme l’héroïne, qui affiche immédiatement son utilisation. La cocaïne est une drogue performante. On n’a parfois même pas la sensation d’être drogué, c’est comme prendre un apéro.

FF : …avant que le cerveau n’éclate,

RS : Exactement, avant qu’elle ne te détruise. Elle désinhibe, elle enleve tout sentiment de limite, permettant une sorte d’hyper-communication. Ce n’est plus la drogue des élites comme dans les 1980 – 1990. Les mafias italiennes ont compris très tôt que c’était une drogue de masse, utilisée surtout pour travailler : le concierge, le camionneur, le pilote d’avion, le chirurgien. Souvent on ne se sent même pas coupable, car on se dit : "ça me permet de travailler plus, d’améliorer la vie de ma famille, de faire des heures sup’, de me sentir mieux." C’est cela, le drame de cette substance.

FF : Quelle sorte de marchandises est la cocaïne, que l’on appelle souvent par d’autres noms, il y a toute une liste de noms dans tous les pays, sauf "cocaïne".

RS : Oui, c’est presque amusant : toutes les langues du monde utilisent plein de mots, mais jamais "cocaïne". C’est par exemple, la "vitamine C" ou d’autres mots commençant par "C", comme "Candy", ou bien "24/7" parce qu’elle est toujours disponible. En Italie, c’est la "cocco", ou bien l’"autoroute" parce que ça te blanchit les narines. Autant de termes pour désigner la cocaïne, ce qui montre bien la quotidienneté, le rapport substantiel qu’elle a avec la vie des gens.

FF : Enrico Deaglio dans "La Repubblica" dit qu’en choisissant de raconter le monde à travers la cocaïne, tu as fait une opération "marxiste" au sens philosophique : en choisissant la "marchandise", ce qui aujourd’hui est la "marchandise par excellence" qui domine absolument tout, et cela montre un aspect terrible du capitalisme. On en revient toujours là : l’argent généré par le trafic de drogue ne reste pas sous le matelas des trafiquants, il finit dans les banques, les entreprises.

RS : Ce qui est intéressant pour un écrivain, c’est de trouver une clef pour raconter le monde, un chemin, une voie. Ma clef à moi, ce sont les "marchandises". Quand on regarde les marchandises, elles paraissent froides, distantes, mais raconter toute la filière d’un objet, ses voyages en bateau, les ports ou il débarque, la contrebande, le passage des douanes, les taxes, la distribution dans les supermarchés, permet de raconter le monde. La marchandise "cocaïne", si impalpable, avec cette couleur et cet aspect si innocents, de la poudre, m’a permis d’observer la transformation, et de voir physiquement ce que Antonio Maria Costa dénonçait, en 2009. C’était le directeur de l’Office de l’ONU contre la drogue, et il a déclaré aux tout débuts de la crise économique, quand des géants financiers étaient en train de s’écrouler, que les milliards d’euros du narcotrafic avaient sauvé les banques européennes. Cette déclaration est parue dans différents journaux, mais elle est passée presque inaperçue, elle n’a pas levé de signaux d’alarme particuliers, peu de commentaires. Pourtant c’était une déclaration énorme : il disait que le flux de liquidités – car la force du narcotrafic, ce n’est pas seulement l’argent, mais la liquidité -, la force de cette liquidité pénètre les banques. Ces banques, lorsqu’elles financeront, leur structure de crédit sera conditionnée par le narcotrafic. Et donc, cette marchandise, pour moi, ne se limite plus à la toxico-dépendance, mais devient le capitalisme vivant, et transforme l’ADN du capitalisme et des démocraties, pour toujours. Et aujourd’hui, nous devrions réécouter les paroles de Costa, car l’Europe se trouve dans une situation extrêmement difficile, où la liquidité préoccupe tout le monde. L’Espagne, le Portugal le savent bien, la Grèce.

FF : Celui qui dispose de liquidités…

RS : commande. Comprendre cela permet de mesurer combien la métamorphose de cette marchandise est dangereuse, et devient quotidienne. Je tente de répondre à certaines questions que je me posais quand j’étais tout jeune devant un supermarché qui surgissait sur un territoire peu développé, ou devant l’apparition de richesses inexpliquées. C’était tout simplement du recyclage. De l’argent qui arrive sans créer de développement, c’est la chose la plus grave que fait le narcotrafic. 

FF : Une autre chose qui m’a impressionné à la lecture du livre, c’est la quantité de cocaïne qui passe par l’Afrique. Le continent le plus pauvre est littéralement traversé par le "pétrole blanc".

RS : Toute la cocaïne qui arrive ici à Milan, à Rome, en France, à Berlin, passe par l’Afrique équatoriale occidentale, qui est devenue une sorte de plaque tournante. La coke arrive d’Amérique du Sud en Afrique, et ces pays, devenus bien souvent des narcoÉtats, Guinée-Bissau, Libéria,…

FF : Qu’est-ce qu’un narcoÉtat ?

RS : Il arrive tellement d’argent dans ces pays, que la classe dirigeante, les militaires, sont littéralement achetés par les cartels. Et malheureusement pour l’Occident, cela a créé une espèce de tolérance : l’Occident a toléré cela. Pourquoi ? Quand la coke est arrivée en Afrique, elle a rééquilibré le jeu du pouvoir. Celui qui possédait les matières premières n’était plus en conflit avec celui qui n’en avait pas. Ces derniers s’occupent de la cocaïne. Et donc, paradoxalement, la coke aujourd’hui dans ces pays a créé une sorte d’équilibre pacifique, terrible, en détruisant et en vidant ces pays. La coke arrive là pour repartir vers l’Italie, l’Espagne, et dans toute l’Europe. Et voir la transformation de ces pays permet de regarder celle des personnes. Pendant toutes ces années, obsédé que j’étais par l’envie de raconter toutes ces choses, j’étais prêt à faire du porte-à-porte, dans chaque journal, chaque studio télé, pour raconter ces histoires, je me suis rendu compte que les organisations savaient parfaitement comment transformer les individus. J’essaie de le raconter dans le 1er chapitre. Ils te montrent que leur philosophie est celle du malheur. Ils t’amènent à comprendre que ceux qui te trahiront sont tes proches,

FF : …que tu ne peux avoir confiance en personne.

RS : - Personne.

FF : Pas même en ton meilleur ami, qui te trahira à coup sûr.

RS : Je décris comment un boss éduque un nouvel arrivant, à travers des récits que j’ai entendus.

FF : Ah bon ? Je pensais que c’était une pure invention !

RS : Non, on me l’a raconté personnellement, c’était une sorte de critique des pratiques des organisations criminelles, que j’ai utilisée pour montrer ce que j’avais toujours senti : la première chose que t’enseigne un boss, c’est que le pouvoir, ça se paie. Si tu veux avoir du pouvoir, avoir plus de richesses, tu dois le payer. Par la trahison, par les homicides, par la prison. Et surtout, on te dit que ceux qui pensent que les choses peuvent changer, qui croient dans une juste distribution des richesses…

FF : …ces grands naïfs !

RS : Exactement, ou bien ce sont des gens très riches qui peuvent faire comme ils veulent, ou alors ce sont des personnes tristes et incapables de prendre ce qu’ils désirent.

FF : En gros le monde vrai, c’est celui-là.

RS : Ils t’enseignent ces règles : tu veux une chose, tu vas la prendre. Crime ou pas crime. Ce qui rend une chose juste ou pas, c’est l’argent. En avoir ou pas. Si tu n’en as pas, tu t’es trompé.

FF : Une critique impitoyable du capitalisme. Je voulais en cinq minutes de demander deux choses : ce qui m’a frappé c’est cette sensation diffuse d’impunité : c’est comme dans des films d’action, les méchants se déplacent avec la cocaïne, on imagine qu’ils le font en cachette, mais non : ils utilisent des sous-marins, des cargos, des flottes aériennes, des moyens loin d’être discrets ou invisibles, ce qui implique des complicités, des protections.

RS : La majeure partie de la cocaïne navigue sur de gigantesques cargos. Comme cette histoire avec Mogilevich, un puissant boss ukrainien, qui se met d’accord avec les narcotrafiquants sud-américains, et échange la cocaïne contre des armes, et leur fournit des sous-marins de l’ex-armée rouge. Des sous-marins, utilisés pour emporter la drogue aux USA. C’est un exemple. Mais dans cette histoire, ce qui est frappant, c’est de trouver immédiatement un lien avec Naples. On a d’un côté des sous-marins de l’armée rouge, qui vont aux narcotrafiquants colombiens, et tout cela ressort à Naples. Car celui qu’on appelle "Tarzan", qui négocie les sous-marins avec les Sud-Américains, tu le retrouves en train de travailler avec un boss russe qui ouvre un magasin de meubles à Naples pour détruire la concurrence des magasins de meubles napolitains. C’est ça qui m’intéresse, reconstruire les connexions…

FF : …les réseaux.

RS : Et si le lecteur pense que c’est de l’histoire lointaine, alors j’aurai totalement échoué.

FF : C’est ce qui est surprenant, car on commence le livre en pensant que ce sont des choses lointaines, ça débute en Amérique du Sud, et au fur et à mesure, ce livre pénètre au plus profond de toi. Une dernière considération : en lisant ton livre, on en vient à penser que c’est le Mal qui fait tourner le monde. Si dans "Gomorra" on trouvait quand même une espérance, ici on se retrouve complètement désarmé face à une telle puissance criminelle.

RS : Je l’avoue dans le livre : personnellement tout cela m’a vidé, tous ces mondes. Mon espoir, c’est le lecteur.

FF : Connaître les choses.

RS : Oui. La connaissance.

FF : Ne plus pouvoir dire, "je ne savais pas".

RS : Étudier, raconter, prendre le temps d’approfondir, changer d’idée, y revenir, prendre le temps de comprendre le quotidien, comment le monde fonctionne. J’ai confiance dans le lecteur, beaucoup plus qu’en moi-même, en mon existence ou en mes capacités. Ces histoires m’ont en quelque sorte privé de toute possibilité d’espoir. Mais j’ai une totale confiance dans la capacité du lecteur à connaître, et donc à influer sur le cours des choses.

FF : Il y a un dernier chapitre, je le dis avant qu’on se retrouve demain soir, un chapitre qui modifie complètement le rythme de la lecture, ton écriture change, ce sont des pages de littérature qui rappellent les plus grands écrits, quand on se retrouve devant le problème du Mal. Tu dis très honnêtement, très clairement, et avec un certain désespoir que tu ne t’aimes plus, que ce travail t’a changé en mal, tu te qualifies de "monstre", et tu dis qu’"étudier les pouvoirs criminels t’enseigne à prendre la mesure, mais pas les distances, et que le risque n’est plus que tu rentres dans les histoires, mais que ce soient elles qui rentrent en toi." Un jugement très généreux sur toi même, qui considère seulement un aspect de toi-même, nous, nous en voyons d’autres, mais qui aborde un thème gigantesque, celui de la cohabitation avec le Mal.

RS : A un moment, je cite Nietzsche : "Si tu plonges longtemps ton regard dans l’abîme, l’abîme te regarde aussi." Être scruté par l’abîme signifie que le regard que tu portes sur le monde te transforme pour toujours, tu commences à comprendre ce qui se passe dans un pays, et que ce qui compte, ce ne sont ni les débats, ni les déclarations, et que ce qui arrive au gens en réalité nous échappe. Et tu en arrives presque à ressembler aux personnages que tu décris, à devenir méfiant comme eux, à considérer les gens seulement en fonction du pouvoir qu’ils expriment, à identifier leurs faiblesses. Tu commences à raisonner comme eux, et cela mène à une solitude terrible.

FF : Pourquoi "000" ?

RS : C’est le nom de la farine la plus pure, la plus blanche, celle pour les gâteaux. La farine avec laquelle ont fait la pâte, et pour moi, la pâte du monde se fait aussi avec la farine "000", la cocaïne.

FF : Ce livre "000", tu le dédies aux carabiniers avec lesquels tu as passé plus de 38 000 heures de ta vie.

RS : En effet, j’ai voulu le dédier aux carabiniers, et à toutes ces années sous escorte, en rêvant, comme tous ceux dans la même situation que moi en Italie, que la démocratie de notre pays puisse un jour nous redonner la liberté. Elle nous protège, au nom de la liberté de la presse, mais que cette protection puisse advenir sans gardes armés. Et pour m’encourager, j’ai mis au début du livre une phrase merveilleuse de Blaga Dimitrova, une poète qui m’a donné mon courage, celui de continuer à me rouler dans cette boue : "qu’aucune peur ne me baillonne, une fois piétinée, l’herbe devient un sentier".

FF : Merci Roberto. "000", aux Éditions Feltrinelli, le nouveau livre de Roberto Saviano qui revient à l’antenne demain soir.


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32 réactions à cet article    


  • Gollum Gollum 20 avril 2013 10:22

    « je pensais que la cocaïne provenait des feuilles de coca, alors qu’en fait, elle nait de la disponibilité, non pas au mal, mais à la cruauté, qui est surprenante et presque surnaturelle. »


    Eh oui... La logique satanique est telle que le diable va finir par bientôt se montrer à découvert ce qui sera à contrario la meilleure preuve de l’existence d’une Transcendance absolue.. 

    Ce que le bon sens populaire dit : « Le diable porte pierre ».. ou de façon plus sophistiquée, Eckhart : « celui qui blasphème Dieu, loue Dieu »..

    • herbe herbe 20 avril 2013 13:02

      Conserver ce qu’on appelle de bonnes valeurs c’est dur mais ce serait plus que jamais nécessaire :


      • gaijin gaijin 20 avril 2013 16:28

        oui +++++++++++++++++++++++
        mais quand on lit :
        « L’économie du narcotrafic soutient l’économie légitime  ». »
        il faut entendre l’économie du narcofic contrôle l’économie légitime 

        il n’est pas nécessaire de faire des enquêtes ou quoi que soit c’est logique ! structurel !
        la mafia est la forme la plus aboutie du capitalisme : un monde sans loi, dérégulé et régit par la loi du marché. c’est a dire la loi du plus fort ......


        • MARMOR 20 avril 2013 17:20

          la loi du marché n’est pas la loi du plus fort, mais la loi de l’offre et la demande, tout simplement.

          La loi du plus fort c’est exactement ce que ça veut dire, je suis plus fort donc j’impose ma loi.

        • perlseb 20 avril 2013 18:19

          La loi du marché sélectionne par l’offre des intervenants et les rend plus forts. Une fois plus forts, ils peuvent imposer leur loi (formation de cartels, etc...) et se soustraire de la loi de l’offre et de la demande pour se rendre toujours et encore plus forts.
           
          Donc la loi du marché conduit d’une façon évidente à la loi du plus fort. Les libéraux sont vraiment trop naïfs (ils s’imaginent qu’une sacro-sainte concurrence loyale et non faussée est possible).
           
          La première chose que cherche un investisseur (ou entrepreneur), ce n’est pas de satisfaire au meilleur prix des clients, mais bien de faire un maximum de profits, la morale n’étant qu’un frein : ceux qui en sont pourvus, un jour ou l’autre, se retrouve totalement dépassés et éliminés.


        • Xenozoid 20 avril 2013 23:58

          je rejoin gajin, le system capitalisme n’est que maffia, et j’ajoute que tout systeme ne jouant qu’avec le pouvoir avant tout est maffiosi,c’est le pouvoir qui est maffieux et les esclaves qui l’acceptent, n’oublions pas, le pouvoir a besoin d’esclaves, pas l’inverse


        • tesla_droid84 22 avril 2013 14:42

          @MARMOR :


          « Le libéralisme, c’est plus de choix et des meilleurs prix pour le consommateur »

          FAUX : Selon le dogme libéral lui-même, le libéralisme ne peut fonctionner que si il existe une concurrence suffisante de l’offre. Or dans les faits, le capitalisme libéral tend vers la concentration et la formation de monopoles qui éliminent toute concurrence, réduisent le choix du consommateur et font monter les prix (ou baisser la qualité).

          Dans le domaine des services publics comme la distribution d’eau, la poste, ou les chemins de fer, leur privatisation s’est toujours traduite par une augmentation des coûts pour l’usager, une diminution du service, et une réduction des investissements dans l’entretien des infrastructures. Un exemple parmi d’autres : dans les années 90, le FMI et la Banque mondiale ont obligé les Philipines à privatiser la gestion de l’eau. Au début, les prix ont baissé de 20%, une baisse utilisée par la propagande libérale pour démontrer l’utilité des privatisations. Mais 10 ans plus tard, le prix de l’eau a été multiplié par 5.

          Quant aux systèmes de retraites privés (les fonds de pension), ils consistent à priver les salariés de toute sécurité, en les livrant aux incertitudes de la gestion des organismes financiers. En cas de faillite de ces derniers, les salariés se retrouvent sans retraite malgré des années de cotisation. C’est ce qui s’est passé aux Etats-Unis en 2002 avec la faillite d’Enron.


          « Le libéralisme, c’est le libre-jeu du marché »

          FAUX : Toujours selon le dogme libéral, le libre-jeu du marché nécessite la transparence du marché et de l’information.
          En réalité, à cause des pratiques d’opacité et de l’inégalité dans l’accès à l’information, le consommateur ne peut choisir en connaissance de cause.

           

          « Je décrirais plutôt la globalisation comme la liberté pour mon groupe d’investir où il veut pour le délai qu’il veut, de produire ce qu’il veut, de rechercher ses matières premières où il veut et de vendre ses produits où il veut, en s’embarrassant le moins possible des droits des travailleurs et des accords sociaux. »

          Percy Barnevik
          PDG de ABB, membre du groupe de Bilderberg et de l’European Round Table


        • soi même 20 avril 2013 17:03

          Il y a un truc que je comprend pas, si une banque prête de l’argent qui n’a pas, comment se fait il une banque se retrouve en faillite, puisqu’il prête du vent ?


          • Captain Marlo Pilou Camomille 20 avril 2013 18:01

            Par soi même,

            Pour continuer à fonctionner, elle a besoin que les créances soient remboursées....
            Si l’entreprise ou l’ Etat , brefs, les emprunteurs, font défaut, elles se retrouvent dans les choux, comme les banques qui ont prêté de l’argent à la Grèce ou à Chypre....


          • rotule 21 avril 2013 10:20

            @soi même

            Lisez donc le livre de Paul Jorion « argent mode d’emploi » et vous y verrez que les banques ne créent pas d’argent, mais qu’un jeu d’écriture fait que l’argent passe de l’un à l’autre, en laissant des créances et des dettes, illusions de monnaies mais pas réellement identiques à de la monnaie, à de l’argent.
            C’est que ce que les Chypriotes viennent de comprendre et que tous les européens devraient comprendre assez vite.
            Quand vous déposez vos sous à la banque, c’est la banque qui en devient propriétaire, vous recevez une reconnaissance de dette de la part de la banque (votre compte est crédité, vous avez l’impression que votre argent est à vous et est disponible). Cela marche plutot bien en temps de normal, mais en temps de crise, ... méfiance !


            Tout cela est bien trop simple pour être compris de la majorité, qui préfère ne rien savoir ! Ou en rester à ses légendes et erreurs.

            Terminez donc par une saine lecture sur les confiants
            .... et les désenchantés. C’est gratuit mais pas sans valeur !


          • simplesanstete 22 avril 2013 12:53

            Les banques créent de l’’argent avec le crédit et les dettes, et...... des GUERRES ce que ne dit pas l’enfoiré mignon de Jorion, WASP sous traitant d’Attali, elles mises sur tous les conflits d’intérêts, c’est son intérêt et ils sont très nombreux, c’est la foire d’empoigne en sous main et même en sous marin, la guerre larvée quotidienne de Pompidou des sous. L’argent en lui même est une drogue douce, à l’usure et pas un outil neutre, c’est le crime parfait et le plus universellement admis, une seconde nature de l’échange. / La coca c’est extra, Saviano dit qu’elle stimule la capacité de........ travail, en avant toute. Les US of A ne sont pas un état de droit mais une administration des biens, sa monnaie bien pourrie est garanti par 800 bases militaires à travers le monde, c’est ce qui garanti sa crédibilité, un certain rapport A pas DE, la force. La France et l’europe est devenue graduellement mais surement une sous traitance du dollar et elle sous traite ses guerres. Un autre point capital est dans les religions, le fumeux aspect dit vie privée et qu’est ce qu’on y trouve la deddans des centres névralgiques de névroses sous contrôles US. Israel/ Jérusalem, la Mecque et même le Daily Lama. Le grand positionnement dans leurs subdivisions est clairement sur le mot usure, ribba. Les catholiques nous font un beau retour d’âge en ce moment.


          • Laulau Laulau 20 avril 2013 17:29
            Il semble que cela ne sera pas suffisant pour sauver les banques, ci dessous le début du dernier communiqué du GEAB (15 avril)

            Commentaire de dernière minute !
            Depuis le bouclage du contenu de ce numéro du GEAB avant-hier soir, notre équipe observe de près l’inhabituelle coïncidence de l’effondrement de tous les indicateurs : bourses européennes, américaines et asiatiques, matières premières… et même et surtout or. Nous n’avons malheureusement pas le temps de nous étendre sur ce phénomène. Nous l’interprétons de toutes manières dans la droite ligne de tout ce que nous décrivons dans le présent numéro. Mais là où ce numéro décrit les choses encore assez calmement, comme encore à venir, nous nous demandons si ces prémisses ne sont pas celles de l’effondrement que nous anticipions pour la période de mars à juin 2013.

            Je viens de lire un article qui dit à peu près la même chose sur Atlantico. J’ai aussi écouté BFM (radio) hier et les commentateurs, tous économistes libéraux et bien pensant m’ont paru très très très inquiets, un peu comme si la terre venait de trembler sous leurs pieds.


            Laulau

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            • Captain Marlo Pilou Camomille 20 avril 2013 18:04

              Laulau,

              Pour l’instant, c’est la BCE qui allonge 200 milliards pour sauver les banques françaises...


              • Captain Marlo Pilou Camomille 20 avril 2013 18:42

                Il n’y a aucun moyen légal d’enrayer le phénomène, parce qu’il y a complicité et entente entre les fournisseurs et les utilisateurs pour niquer la police et la justice, pour lesquelles ils ont tous le plus profond mépris.

                Le seul moyen efficace serait que les consommateurs cessent d’acheter.
                Pas de demande, pas de marché, pas de trafic...

                Mais chaque fois qu’on parle de drogue, quelle qu’elle soit, c’est la même histoire, on se garde bien de parler de la responsabilité des acheteurs.

                Les vendeurs, mais quels mafieux !
                Mais les acheteurs, tous des gentils, de pauvres victimes, ayant perdu leur libre arbitre....
                Mon oeil !

                Ils savent très bien ce qu’ils font et se flattent d’avoir des comportements « rebelles »..., pour un peu, ils se prendraient pour des révolutionnaires, ces connards !

                Allergiques à toute forme d’autorité, ils fonctionnent exactement sur les mêmes valeurs que les fournisseurs, « Jouissons sans entrave », « Un pour tous, et tous pour moi », et « Pousse toi que je m’y mette... »

                De la toute puissance infantile et narcissique à perte de vue....

                Mais sur ces comportements, à part les psychiatres débordés par tant d’infantilisme, personne ne se penche, personne ne met en cause leur lourde responsabilité, parce que c’est leur demande qui fait tourner la boutique mafieuse et pas l’inverse.


                • Le Grunge Le Grunge 20 avril 2013 21:21

                  de la a dire que c’est les narcotrafiquants qui ont financé la campagne de sarko 2007, il n’y a qu’un pas...que je franchirais volontiers.


                  • Loup Rebel Loup Rebel 20 avril 2013 21:32

                    La finance exerce une telle fascination sur les esprits que (presque) personne ne s’aperçoit du gigantisme des escroqueries.

                    Chacun se dit : c’est trop énorme pour être vrai. Et pourtant si, l’industrie bancaire a pris le pouvoir absolu sur les démocraties qui n’en sont plus.

                    @ Pilou Camomille :

                    Bien sûr que votre vision est pertinente. Les acheteurs participent à perpétuer les agissements des criminels des narcotrafiquants. Comme disait Coluche : il suffirait que les gents n’achètent pas. Mais peut-on transformer les victimes en responsables ? Si vous avez un tant soit peu approché la dégénérescence de l’addiction, vous savez que c’est une pathologie au moins aussi malfaisante que le cancer.

                    Le livre de Roberto Saviano est le mieux documenté que je n’ai jamais lu, du moins sur les aspects économiques et financiers du sujet. C’est une véritable guerre mondiale qui se déroule là, avec la complicité des politiques laxistes depuis plus de 30 ans.

                    On connait les ravages de l’alcool sur les populations et ses conséquences, notamment sur les plus faibles. Comparativement à la dévastation liée à la cocaïne, on n’a encore pas vu le pire (en France).

                    Le monde où vivra notre descendance a de quoi terrifier les rares individus qui le regardent en face, les yeux grand ouverts. Si terrifiant que le plus grand nombre refuse de le regarder... et de se révolter.


                    • Captain Marlo Pilou Camomille 21 avril 2013 07:45

                      Loup Rebel,

                      Il n’y a ni guerre ni laxisme. Il n’y a que des policiers, des douaniers, des juges, des thérapeutes, des familles qui mènent une guerre perdue d’avance.

                      Aucune guerre ni révolte contre la drogue n’a de chance d’aboutir, parce qu’il y a accord entre les parties. La situation au Mexique est dramatique. Les vendeurs et les acheteurs se protègent mutuellement.

                      Les banques se contentent de ramasser l’argent, l’argent n’a pas d’odeur, pas plus celui de la drogue que celui de la corruption, de l’évasion fiscale ou des dictateurs.

                      Pour qu’il y ait une intervention de l’ Etat et de ses services efficace , il faudrait qu’il y ait des victimes qui s’insurgent. Ce qui ne sera JAMAIS le cas. Les acheteurs ne portent jamais plainte contre les vendeurs.

                      Dans le cas de la drogue, les victimes collaborent avec les vendeurs contre la police et la Justice. C’est insoluble comme situation.

                      Addiction ? A l’héroïne sûrement. Pas à la cocaïne ou au haschich.

                      S’il y a une chance d’aboutir, c’est du côté des consommateurs, ils savent tous parfaitement que derrière les vendeurs il y a des réseaux et du crime organisé.

                      Ce n’est pas pour « détention de drogues » que les acheteurs devraient être condamnés, mais pour « entrave à la Police et à la Justice », et pour « soutien actif , collusion et complicité avec des bandes mafieuses organisées. »

                      Mais du moment où les consommateurs sont considérés comme des victimes, ils ne sont plus responsables de rien....

                      Parce que la réalité est là, ils sont complices. Ce qui va sans dire irait encore mieux en le disant. Cette propension à voir des victimes partout et des responsables nulle part, devient fatigante.


                    • rotule 21 avril 2013 10:24

                      Il y a quand même des alternatives .... dépénaliser, légaliser le commerce !
                      Ce qui permettrait de contrôler la qualité des produits.
                      Peut être difficile à envisager pour la cocaïne, un peu moins pour l’herbe.
                      Cela s’est bien fait pour l’alcool et le tabac.


                    • Loup Rebel Loup Rebel 21 avril 2013 12:45

                      Cher Pilou Camomille, ça m’ennuie de vous contrarier, mais mon activité professionnelle m’a conduit à une certaine expertise dans ce domaine.

                      La cocaïne est un alcaloïde extrait de la coca.
                      Psychotrope, elle est un puissant stimulant du système nerveux central.

                      Pourquoi sa consommation est-elle addictive ?

                      La cocaïne a des effets nooanaleptiques majeurs similaires à ceux des amphétamines, notamment à ceux de la méthamphétamine. C’est un stimulant.
                      Elle agit sur le système nerveux central, en bloquant la recapture des monoamines dans l’espace synaptique.
                      Son effet est attribué au fait qu’elle bloque la recapture de la dopamine et entraîne donc une augmentation de la concentration du neurotransmetteur dans diverses régions du cerveau notamment le nucleus accumbens. Elle bloque aussi le transport de la sérotonine et de la noradrénaline (ces mécanismes ne sont toutefois pas considérés comme appartenant aux effets psychostimulants).
                      Elle constitue également un vasoconstricteur périphérique. Elle est classifiée comme stupéfiant par la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 de l’ONU. Illégale dans tous les pays, elle est cependant dépénalisée dans quelques pays comme la République tchèque et le Portugal.

                      Les relations du consommateur (acheteur) avec son fournisseur relève de mécanismes psychologiques qui semblent vous échapper. Elles s’apparentent — un degré au-dessus — aux méthodes utilisées par les racketteurs pour bâillonner leurs victimes... qui portent rarement plainte, sauf à prendre le risque du pire.

                      J’ai précisé « un degré au-dessus », car ici, oui, vous avez raison, le consommateur sait bien qu’il est complice du trafic et des criminels qui l’organisent. Ce qui ajoute à la pression psychologique qui lui impose le silence, « un degré au-dessus » du silence observé par la victime de racket.

                      D’où le débat sur la pénalisation ou non de la consommation.
                      La dépénalisation va dans le sens d’un encouragement à la dénonciation par le consommateur qui souhaite sortir de son addiction.
                      La pénalisation enferme le consommateur qui se sait condamné s’il cherche à sortir de son addiction en SE dénonçant.

                      Fort heureusement, les soignants sont protégés par le secret professionnel. Mais cela implique le revers de la médaille : la non-dénonciation des fournisseurs. Ces derniers nous considèrent comme leurs ennemis, puisque nous les privons des clients/consommateurs soignés ; nous leur volons des parts de marché...

                      Alors si, malheureusement, c’est la guerre, comme vous le dites, une guerre menée par la force publique... et les soignants. Alors que d’habitude, c’est aux militaires qu’il incombe de faire la guerre.

                      La puissance financière des narcotrafiquants est telle qu’aujourd’hui les États abdiquent. Marc Chinal n’a pas tort de dénoncer la civilisation de la monnaie. Les gangsters de la finance et les criminels du narcotrafic sont les deux têtes d’un même monstre.

                      Voir aussi cet autre billet qui dénonce les abus des banques : L’argent dette, un système de blanchiment de fausse monnaie 100% légal.


                    • Captain Marlo Pilou Camomille 22 avril 2013 17:33

                      Loup Rebel,

                      Ce que je constate, c’est que depuis 30 ans, les discours portent toujours sur les risques pour la santé, rien d’autre. Votre dernier commentaire n’y fait pas exception.

                       Jamais sur la collaboration active avec des réseaux mafieux. Le discours ambiant ne porte jamais sur la responsabilité des acheteurs.

                      ** Vous achetez un objet volé, on va vous accuser de recel, vous avez intérêt à prouver votre bonne foi.

                      ** Vous conduisez trop vite, sanction, un PV.

                      ** Vous achetez de la drogue, vous enrichissez des escrocs, vous collaborez à une entreprise mafieuse, il ne vous arrive rien. C’’est pour votre conso perso, donc c’est normal.

                      Le discours ambiant ne porte jamais sur la responsabilité, parce que nous vivons dans un monde qui conforte l’individualisme et l’irresponsabilité.

                       Un monde où il est plus important de « s’éclater » que d’avoir des comportements citoyens.

                      Parmi tous ceux qui râlent contre le racket bancaire, j’aimerais bien savoir combien il y en a qui trouvent normal d’enrichir les réseaux et les mafias ? ? 

                      Le billet demande qu’on se révolte, mais contre quoi, si tout le monde trouve normal de s’éclater plutôt que de ruiner les cartels en ne consommant pas ?

                      Les réseaux, sitôt démantelés, se reconstruisent aussitôt...

                      Changeons d’objectif, au lieu de parler de santé à propos des drogues, ce que tout le monde sait depuis longtemps, ruinons les cartels !

                      Faisons-en un objectif citoyen, mais vous allez être obligé de changer vos discours victimaires..., et sans doute perdre votre boulot, alors surtout, ne changeons rien !


                    • morice morice 20 avril 2013 23:21

                      ça ça ne fait que 5 ans que je le dis ici... amusant.


                      j’ai un long article qui en précise les méandres.

                      bloqué en parution par des gens qui vont venir applaudir ici cet article qui dit la même chose....

                      • baldis30 21 avril 2013 21:32

                        lorsqu’on lit plusieurs fois par semaine la presse du groupe L’Espresso/La Repubblica, où s’exprime notamment R. SAVIANO on est surpris de la qualité des informations y compris sur des aspects de la politique française . En fait il y a nettement moins d’hypocrisie dans la grande presse italienne qu’elle soit ou non inféodée à un groupe de pensée . Et du fait qu’il y a un moteur comme celui signalé dans ma première phrase les autres doivent faire attention .

                        R ;SAVIANO a raison lorsqu’il dit que le modèle de lutte contre les mafias est le modèle italien. Il y a de bons exemples, d’abord structurels comme par exemple la Guardia di Fnanza, gendarmerie fiscale impitoyable, puis des moyens légaux comme l’article 416 bis sur les actions mafieuses , et enfin des moyens d’investigation . Et cela va bien plus loin lorsqu’on se réfère à des actes qui ne sont plus mafieux et où les méthodes conduisent à des procès-types comme par exemple les deux procès de Turin relatifs
                        -l’un au problème de l’amiante
                        -l’autre à l’incendie de la fonderie Thyssen ( située dans le boulevard prolongeant le Corso Margherita)...
                         la méthodologie d’enquête qui semble avoir été appliquée est la même que celle appliquée pour les anquêtes mafieuses... d’où les résultats, dont personne ne veut parler en France.

                        Autre exemple inimaginable en France celui du procès de la Commission « grands risques »
                        qui n’a pas réagi correctement sur le problème sismique de l’Aquila. Certains scientifiques étrangers crient « au charron » en raison des condamnations... Non pas du tout ! il y avait des signes précurseurs, sérieux, reconnus et concordants et un grand mépris ... donc .... on pouvait éviter des morts .

                        Autre exemple purement scientifique : l’annonce des neutrinos supraluminiques ... La Repubblica l’annonça, sans arrière-pensée antisémite - ce qui n’est pas le cas de bien d’autres journaux -, mais en même temps elle annonça le désaccord d’une trentaine de scientifiques essentiellement travaillant au Gran Sasso, refusant de signer ...
                        A-t-on lu la même chose dans la presse française ?

                        C’est une autre presse que nos journaux totalement aseptisés qui perdent de jour en jour leur notoriété notamment dans les chancelleries.


                      • Marc Chinal Marc Chinal 21 avril 2013 01:16

                        *- A votre avis, que deviendraient les mafias si nous étions dans une civilisation qui n’utilise plus la monnaie ?
                        .
                        *- ça fait quoi de savoir que l’argent que vous avez dans votre poche est le même que celui des mafias ? Complicité ?
                        .
                        *- Sachant que vous êtes conscient de cette équation, vous sentez-vous coupable de laisser faire ou vous dédouanez-vous en disant que l’argent n’est qu’un moyen ?


                        • Raymundo007 Raymundo007 21 avril 2013 03:48

                          Mais tout cela tout le monde le sait et depuis fort longtemps... 7 ans pour écrire de telles banalités... ! bigre...
                          Et la réalité est bien au delà de cela....

                          Tout cela ne fait pas avancer le schimlblick d’un millimètre...
                          On veut des noms, des quatités, des dates... et elles existent. Certains journaux en ont publié déjà. Ici, on ne voit rien ... que du bla bla.
                           smiley


                          • chmoll chmoll 21 avril 2013 08:40

                            c’est pas une nouveauté ,si il voulait bloquer les comptes de l’argent blanchie la plupart des banques déposent le bilan ,effet boule de neige les entreprises avec ,donc des 10zaines de millions de chomeurs
                            donc même si les flics de la planète savent ,ils ne peuvent plus rien faire la gangréne est belle et bien installée ,à part quelques actions ,histoire de de donner un semblant de lutte
                            tins la mafia vas blanchir dans les nouvelles tours du strade center


                            • aura aura 21 avril 2013 11:19

                              JE SUIS EBAHIE par ces informations... tout autour de moi j’observe des jeuns qui sont «  »« dans la lune »«  » mais j’ai l impression des fois que je suis moi dans la lune, autant il y a des jeuns et que c est incroyable ;

                              QUE SE PASSE T IL DANS NOTRE MONDE ???
                              J AI UNE FILLE MAIS JE NE SERAIS PAS HEUREUSE SI JE SAVAIS QU ELLE CONSOMME DES STUPEFIANTES...

                              NOUS AVONS TOUS PERDU LE NORD ???

                               J AI TROUVE MEME DE LA COCAINE DANS LE SAVON (je ne peux pas dire le marque, je suis deja en danger pour dautre denonciations) ... j’ai deja jete une bonne dizaine des savons a cause de cela mais UN JE LE GARDE POUR UNE PREUVE, CAR C EST DIFFICILE DE DIRE QUE NOUS SOMMES EN DANGER QUAND NOUS NOUS LAVONS...

                               C EST AHURISSANT... CETTE SITUATION DEPASSE TOUTE IMAGINATION... C EST DE LA DESTRUCTION DE L HUMANITE EN BLOC ???


                              • Robert GIL ROBERT GIL 21 avril 2013 21:51

                                constatant qu’il fallait les mêmes compétences pour devenir un millionnaire escroc et un millionnaire honnête, Lucky Luciano ajoutait : « De nos jours, il faut une autorisation pour voler son prochain. Si c’était à refaire, je commencerais par chercher à obtenir cette autorisation. »

                                voir : LA MAFIA VOUS SALUE BIEN


                                • Ruut Ruut 22 avril 2013 07:16

                                  Si la drogue était aussi taxé que les autres produits, elle ne serait pas aussi rentable.
                                  Si les employés des narcotrafiquants avais leur salaire amputé comme l’est les salaires des autres travailleurs, la drogue ne serait pas aussi rentable.

                                  N’oublions pas que en moyenne 80 % des salaires déclarés retournent dans les caisses de l’état.
                                  Du moins pour la France et la Belgique.


                                  • eau-du-robinet eau-du-robinet 22 avril 2013 11:21

                                    « L’ensemble du narcotrafic représente la première industrie au monde, devant celle du pétrole – nous explique Robert Saviano.

                                    97 % de l’argent de la drogue – explique l’écrivain durant l’interview – est recyclé par les banques américaines et européennes. »

                                    Ma conclusion est la suivante :
                                    En partent de ses constatations je déduit qu’aucun état au monde na réellement déclaré la guerre à la drogue ! D’ailleurs les arrestations donc on parle par fois dans les médias sont souvent des petits trafiquants, insignifiantes comparé aux grands patrons de la drogue.

                                    La Chine prend un rôle de plus en plus important sur la marché international en ce qui concerne les drogues synthétiques.... en tout légalité (durant un temps limité).

                                    Je m’explique : il suffit de changer une molécule dans une drogue, par fois plusieurs, pour créer une nouvelle drogue synthétique ... le temps que les instances Européennes réagissent avec une loi pour interdire cette « nouvelle » drogue (au moins deux mois pour faire sortir une nouvelle loi) ... les chinois ont déjà développé la drogue de la génération suivante ... en tout légalité (pendant 3 mois) ... etc. ...


                                    • eau-du-robinet eau-du-robinet 22 avril 2013 11:24

                                      correction : (au moins trois mois pour faire sortir une nouvelle loi)


                                    • eau-du-robinet eau-du-robinet 22 avril 2013 11:24

                                      correction : (au moins trois mois pour faire sortir une nouvelle loi)


                                      • Laurenzola Laurenzola 22 avril 2013 23:38

                                        Pas de radis fiscaux pour la mafia, telle est la solution.

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