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Accueil du site > Actualités > Environnement > COP 21 chronique n°8, 12 décembre et conclusions

COP 21 chronique n°8, 12 décembre et conclusions

Retour maison, la COP est finie. Et quel bonheur, il n’y a pas eu de débordement, les matraques sont restées rangées et les rues de Paris ont pu accueillir et faire résonner les voix de ceux qui voient les choses un peu différemment. Sauf pendant une minute, avenue de la grande armée quand c’était l’heure de se recueillir et penser aux victimes du réchauffement, qui seront sans doute malgré le « bon » accord plus nombreuses en 2016, qu’elles ne l’ont été en 2015.

Au cœur des relations : l’attention.

Pour moi ça a commencé tôt ce 12 décembre. Le rendez-vous pour écrire un des « E » de « peace » était à 9h15 sur la dalle de Tolbiac, Université Paris 1. Notre « E » à nous c’est celui d’éducation parce que nous pensons qu’il faut changer l’éducation pour passer à une société décarbonnée. Changer l’éducation pour changer de culture, laisser la place à une nouvelle culture ou au centre il y aurait – l’attention – et pour ça commencer par mettre l’attention dans le quotidien éducatif, dans les maisons, les écoles, collèges, lycées les facultés, les administrations, les entreprises… partout.

– climate – justice – peace - (prononcer à l’anglaise)

Ils sont de Climates, du REFEDD, du WARN …, ils sont jeunes, ils sont joyeux, ils sont responsables et ils donnent corps, tout sourire, ce 12 décembre gris, tôt dans Paris, à cette idée que la solution de la crise climatique elle passe aussi par l’éducation. Nous serons vite 70 rassemblés et toujours, au moment de la fin du briefing, un seul de plus de 30 ans ! 19 groupes étaient comme le nôtre réunis dans Paris, autant que le nombre de lettres du tag. Un parapluie rouge, un chapeau rouge, une veste rouge, un bandeau rouge…certains sont déjà prêts pour la deuxième opération de la journée les « Red Lines  » action pacifique qui se déroulera à midi avenue de la grande armée. Mais ce matin c’est pour l’opération géolocalisation que nous sommes réunis. 3000 personnes, 1152 points géolocalisés, le résultat est assez inédit et surprenant ces trois mots – climate – justice – peace - s’inscrivent sur Paris comme un tag disant l’espérance des peuples.

Briefing juridique

Pour après la géolocalisation faire les Red Lines, il aurait fallu courir un peu afin de rejoindre à temps la Tour Eiffel ce que sous aucun prétexte je ne voulais rater. Et puis me souvenant du peu de discernement que nous avions connu place de la République le 29 novembre du côté force de l’ordre, on pouvait s’attendre à tout. Samedi matin l’occupation par la foule de l’avenue de la grande armée n’était pas autorisée. D’ailleurs vendredi soir au 104, nous avions eu avant le briefing médical, un briefing juridique nous indiquant conduite à tenir, nom et numéro de téléphone des avocats à appeler si nécessaire et ce briefing a été répété à Tolbiac où a un moment donné les organisateurs nous ont demandé de nous séparer en deux groupes, ceux qui partaient participer aux Red lines et les autres, ça faisait en gros 50/50 les très engagés et les prudents. Du club des prudents donc mes pas m’ont amené rue du Maine à Montparnasse où je tombe sur un groupe d’une trentaine de personnes avec des grandes photos de populations du sud inondées. Les passants regardent curieux, bienveillants, intéressés. Oui pensons aux victimes, pensons aux peuples affectés.

Manif d’un nouveau type ?

Finalement elles sont pas mal ces manifs d’un nouveau type que la contrainte nous a obligé à inventer. Plutôt que de battre le pavé à 100 000, à crier, à hurler, à nous inscrire de cette façon dans le jeu stupide et sans résultat à long terme du rapport de force, nous serons bien mieux en 1000 petits groupes de 10 dans Paris à montrer nos panneaux colorés, dire nos slogans marrants, chanter nos chansons sympas et pacifistes, exprimer notre créativité et toucher des dizaines de milliers de parisiens. Montrer aux gens de la rue qu’entre ceux qui, venant de tous les pays du monde se mobilisent pour le climat et eux il n’y a pas de différence. Tous on aime la paix, on aime le respect, on aime la tolérance, on a horreur de la violence et aucun ne veut que continue le massacre des beautés de la Terre. Alors c’est bien de se côtoyer de se parler. Parce que les « activistes » que j’ai rencontré ce samedi du 12 décembre sont des belles personnes et c’est bon avec eux de se parler.

Une jeune qui va bien

D’abord une jeune fille Léa, qui est venu me voir sur la dalle de Tolbiac, moi le seul plus de trente an du groupe, qui observait, comptais, photographiait, notais…intriguée elle est venu me parler, me demander ce que je faisais. Alors je lui ai raconté les chroniques et mon engagement pour l’éducation à l’environnement. Elle m’a dit qu’elle était en école d’éducateur, qu’elle avait déjà une licence de français langue étrangère et une de sociologie et qu’elle s’apprêtait à partir dans des pays du sud en humanitaire et aussi travailler contre l’alcoolisme qui fait des ravages dans les milieux populaires. Des jeunes comme ça, comme c’est bon à entendre. Elle a peut-être 25 ans sa vie à un sens déjà clair et précis, elle a l’impulsion et la détermination qu’il faut pour avancer en elle. Qu’elle est belle l’espèce humaine. 

29 novembre à République

Après, au Champ-de-Mars, intrigué par un groupe de trois hommes dont l’un a dans le dos un panneau plein de couleurs où il y a écrit : « empathie, paix, amour, partage, nature, unité, spiritualité » et où il y a dessiné des feuilles, un cœur et un soleil – trop mignon -, j’approche. L’un des trois qui discutait, homme au beau visage s’ouvre à moi immédiatement. Restaurateur pas loin de Tours, il me dit son engagement pour le bien mangé « bio ça ne suffit pas, ce qui compte c’est la diversité » puis il me parle de plantes comestibles dont je n’ai jamais entendu parler. Il me raconte son travail d’éducation sur l’alimentation avec les classes, il me raconte aussi ce qu’il a vécu le 29 novembre place de la République. Il faudra l’éclaircir un jour, personne ne pouvait sortir, citoyen ordinaire, non-violent, il aurait pu être embarqué. Discernement quand tu nous manques, quel danger pour la société !

Pas sous la Tour Eiffel qui reste aux touristes

Dans le métro ligne 6 j’entends que la station Etoile est fermée pour cause de « manifestation sur la voie publique ». Ouille, pourvu que ça se passe bien pour mes jeunes de ce matin. J’ai une heure d’avance, à 13 h je suis sous la Tour Eiffel… là rien… enfin je veux dire pas un signe, rien. La Tour Eiffel dans un jour ordinaire, touristes par centaines, marchands à la sauvette, au loin je regarde vers l’Ecole militaire tout au bout du Champ-de-Mars, et là, si j’aperçois un CRS. J’approche, partout des barrières, accès au Champ-de-Mars interdit, il faut contourner les immeubles. En fait le Champ-de -Mars a été coupé en deux. Les activistes n’auront pas accès à la Tour Eiffel, point de rendez-vous annoncé, qui va rester aux touristes et tous mobilisés pour le climat doivent se rendre côté Ecole militaire et Mur de la paix. Impressionnant de policiers, je n’ai jamais vu une manif à ce point encadrée. On passe entre deux barrières, pas de sac je ne suis pas fouillé, mais examiné de près.

Pauvre Mur de la paix

Il y a peu de monde, ici on accroche une banderole, là on distribue des tracts… Poncho ATTAC, K-way Amis de la Terre, Tee-shirt Alternatiba, chasuble ANV COP21… on dirait que les signes d’appartenance restent importants pour certains. Un groupe nettoie l’espace autour du Mur de la paix. Qu’ils sont bien ces militants. A une demi-douzaine, ils redonnent un peu d’allure à ce site hautement symbolique et complètement abandonné par les autorités. C’est une honte. Cannettes, bouteilles, papiers… 4, 5, 6 sacs d’ordures ont été remplis. Par leur geste ils nous redonnent un peu de dignité. MERCI à elles, MERCI à eux. On a tellement besoin de dignité. Une tribune a été disposée côté Ecole militaire. Ça donne quelque chose d’assez cocasse visuellement. Au premier plan l’esplanade où des milliers de manifestants vont converger, puis la tribune où vont s’exprimer les leaders du mouvement citoyens du monde pour le climat, puis au-dessus une statue équestre d’un général sans doute ou un maréchal illustre, un homme sûrement et au-dessus encore le drapeau de la France, les non-violents sur le Champs-de-Mars à l’Ecole militaire, faut le faire !

Une bonne sœur danse

Voilà les milliers qui arrivent en chaîne humaine. 6 ou 7 activistes déguisés en ours blancs font la joie des photographes, tout cela est bien orchestré. Je suis sur la pelouse et forme avec des dizaines d’autres le « O » de S.O.S - 3 degrés. Deux photographes juchés sur un élévateur nous mitraillent. Les photos feront le tour du monde nous dit notre manageur avec son haut-parleur. Souvenir d’une mobilisation malgré l’état d’urgence et ça il le fallait. Impossible d’imaginer qu’en France le peuple soit réduit au silence. Puis c’est reparti tous devant la tribune avec la maintenant célèbre chanson de HK et les Saltimbanks : sans haine, sans arme et sans violence… Nous sommes des milliers, nous sommes diversifiés et colorés, ambiance jeune, très joyeuse et fraternelle. J’hallucine carrément quand je vois une bonne sœur danser comme une folle tenant une banderole à la main, la superbe encyclique «  Loué sois-tu, Sur le soin de la maison commune » aurait-elle libérée des ardeurs. Trop beau, je publierais la photo dans FB.

Prises de parole.

Dans l’humeur joyeuse les prises de paroles se succèdent : « c’est une crise, climatique, sociale, raciale… il y a plein de crises… il faut gérer l’ensemble de ces problèmes… vous n’allez pas nous avoir avec de fausses solutions qui ne vont rien changer au problème… mais nous avons les solutions… on est 15 000 et beaucoup sont arrêtés par les contrôle de police… appel à la coopération… nous sommes en train de constituer une force immense… construire une autre société… 2016 année de lutte non violente contre la crise climatique… on est forts parce que solidaires… nous sommes debout, on lâche rien… 40 000 à avoir repris la rue lors de trois actions différentes…

La start incontestée c’est Naomie Klein.

Très applaudie, Naomie Klein entre en scène, elle dit : « C’est aujourd’hui que vous avez repris la rue… j’ai lu la dernière version de l’accord et comme nous nous y attendions le texte validé aujourd’hui nous conduit au désastre… nous sommes vraiment alarmés, nos dirigeants vont faire brûler notre planète… Nous nous sentons de plus en plus responsables… les leaders, ce ne sont pas eux, ce sont ceux qui sont dans la rue… les rues de Paris sont remplies de héros climatiques… ils sont dans le système de domination des peuples… c’est ce qui les empêche de changer leurs paroles en actes… »

Nous sommes en train de gagner.

« … A aucun moment dans le texte on ne parle d’énergie fossiles… nos dirigeants n’ont pas le courage de se lever face aux multinationales… se soulever contre les pollueurs et les faire payer… nous allons le faire par tous les instruments possibles… nous sommes en train de gagner… on a bloqué des oléoducs comme Keystone XL, vous avez réussi en France à bloquer la fracturation hydraulique … entre le 7 et le 13 mai nous allons bloquer les projets (elle cite 5 ou 6 pays)… on va s’attaquer à eux sur les marchés avec le désinvestissement … nous allons accélérer la transition vers une autre société… nous devons garantir la justice climatique… »

Ils se congratulent au Bourget

Voilà pour l’essentiel, les mots qui ont été prononcés… maintenant direction gare de Lyon. En arrivant à la maison, j’apprends qu’ils se congratulent au Bourget, la COP est un succès, tant mieux. Comment ne pas penser que les mêmes se congratulent quand l’indice de consommation grimpe, et pourtant l’équation est toujours vérifiée plus de consommation = plus de pollution, plus de réchauffement et moins d’avenir pour la vie sur Terre.

Les cartes de la politique sont rebattues

La crise climatique nous dit qu’elles sont rebattues les cartes de la politique. La politique avec un tout petit « p » qui est devenue court-termiste, ce qui est un non-sens, la politique qui se cantonne aux nations, la politique qui ne fait plus rêver les jeunes (plus de 63% des 18-35 ans n’ont pas voté dimanche 6 décembre). Les humains vont devoir regarder l’avenir d’une autre façon. Il va falloir, c’est vital, revenir au long terme, il va falloir qu’on envisage l’avenir de façon mondiale, il va falloir qu’à nouveau la jeunesse rêve de politique. Gros travail devant nous. En définitive nous voulons tous la même chose, nous voulons la paix, nous voulons que pour nous et nos enfants soient préservées les beautés du monde, nous voulons la joie de vivre, ici, maintenant, tout de suite, nous voulons retrouver la confiance, retrouver le chemin de l’intelligence commune, sans laquelle c’est une évidence rien de réellement humain n’est possible. Une chose est certaine, c’est qu’il n’y a pas deux mondes, il n’y en a qu’un. Il n’y a pas d’un côté les gentils négociateurs et de l’autre les affreux activistes, ni le contraire d’ailleurs. Il y a de la bonne volonté et de l’intelligence dans les deux camps et les deux camps sont à connaitre et à apprécier. Maintenant il faut que bien plus, ils puissent se parler. Nous sommes dans l’urgence climatique, ce n’est plus l’heure des oppositions stériles, faire ensemble est une nécessité.

Va falloir marcher

La COP 21 ça a été plein de rencontres et d’échanges. Ça a été plein d’observations, de prises de conscience et de réflexion. La COP 21 a été pour nous le succès de ce thematic day du 4 décembre qui nous projette déjà vers la COP 22 au Maroc où nous avons beaucoup d’ami(e)s et où nous espérons faire un pas de plus pour l’éducation. Pour l’éducation, pour mieux se comprendre les uns les autres, pour mieux comprendre ce qui se passe, mieux comprendre les enjeux et en pleine lucidité agir. Et agir tout de suite, et apprendre dans l’action… Mes remerciements à Claire qui le 4 décembre a pris des notes alors que je filmais, à Isabelle et Fabienne pour les corrections, à Olivier, Hélène, David, Zélie, Justine, Lucas, Garance qui m’ont hébergé. Merci aux membres du CFEEDD, du Réseau Ecole et Nature, et de l’ENC qui m’inspirent toujours autant, merci à toutes et tous les ami(e)s croisé(e)s qui réchauffent le cœur et donnent du courage… va en falloir pour le climat, pour la planète, pour l’humanité…pas de soucis on est des milliers…mais bon va falloir marcher… bon rythme !

A suivre

Roland Gérard Codirecteur du Réseau Ecole et Nature.


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6 réactions à cet article    


  • Clark Kent M de Sourcessure 14 décembre 2015 08:14

    J’espère que cette série d’« articles » tartines à la confiture d’eau de rose est terminée.

    Pour ce qui est de l’« événement » auquel ces comptes-rendus scolaires se rapportaient, il s’est terminé en eau de boudin. Ça a coûte cher, mais au moins c’est fini.

    • Homme de Boutx Homme de Boutx 14 décembre 2015 09:30

      « société décarbonnée »
      C’est quoi cette société ? pas de carbone, pas de plantes, pas de vie !

      PS (postscriptum) :
      Savez-vous que la France championne du décarbonné se réchauffe deux fois plus que le reste de la planète ?
      http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/conference-sur-le-climat-la-france-161586

      pour savoir pourquoi, faut demander à agoravox pourquoi mon dernier message est bloqué (contrairement votre votre ode au pouvoir !) trop de nucléopathes ? trop de carbopathes ?


      • Francis, agnotologue JL 14 décembre 2015 10:52

        Les écologistes savent-ils que la COP21 est l’une des deux mâchoires de l’étau qui nous enserrera, l’autre mâchoire étant le TAFTA ? 

        TAFTA+COP21, le marteau et l’enclume

        • JC_Lavau JC_Lavau 15 décembre 2015 15:11

          Je dirais même plus : « Les rues de Paris sont remplies de héros climatiques ».
          Il ne reste plus qu’à apprendre quoi c’est au juste, « climatique ».


          • mmbbb 20 décembre 2015 12:38

            rien a cirer de cette reunion d’autant plus qu n Hulot etait la Il faut que je me mette a son niveau c’est a dire bruler des tonnes de kerosene


            • Enabomber Enabomber 20 décembre 2015 12:48

              Pas mal l’article, mais j’ai préféré le film .

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