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La forêt rhénane : fragile et multiple

Dans un bruissement de feuilles, elle accueille le promeneur silencieux, tandis qu'une vie furtive fait danser ses flans.

DSC02433a.jpg    Photo Dan Rodgerson 

Le Rhin a connu une vague successive d’aménagement de 1840 à 1970 afin de préserver les villages et les champs de ses crues dévastatrices, d’éradiquer les moustiques, source de paludisme, de faciliter la navigation et de fixer la frontière avec l’Allemagne. Des terres agricoles ont été gagnées sur les terres inondables et sur les anciens bras du fleuve. Fertiles puisqu’elles ont été nourries par les sédiments. Le potentiel hydro-électrique du fleuve est exploité.

Le cours du fleuve est raccourci d’environ 30kms entre Bâle et Mannheim.

 

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Carte montrant une boucle du Rhin avant les travaux. En rouge sombre figure le tracé d’aménagement élaboré par l’ingénieur Johann Gottfried Tulla né à Karslruhe en Allemagne. Doc. provenant du site http://www.aufildurhin.com/fr/nature/index.htm

Cependant, l’accélération du débit de l’eau provoque une érosion importante du lit du fleuve qui peut selon les endroits atteindre 10cms par an. Une succession d’épis fait de roches (4 millions de tonnes de pierres) va être mise en place pour ralentir le débit du fleuve et limiter l’érosion qui sera également compensée par un apport annuel de 200 000 m3 de cailloux.

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Les travaux ont amputé la forêt de vastes zones humides. A l’origine, les eaux apportées par le fleuve se sont infiltrées dans les graviers et se sont accumulées dans les dépressions de la plaine pour constituer le paysage du « Ried alsacien ».

Constitué de mares fréquentes et de marais, de rivières phréatiques (L’eau des rivières provient de la nappe phréatique qui affleure. Elle est fraîche et limpide.), de petites forêts. Asséchée par la canalisation du Rhin et le drainage, transformée par le remembrement, la forêt rhénane a tendance à devenir une forêt traditionnelle perdant son caractère propre et beaucoup des espèces qui la peuplaient dont certaines rares. Elle ne draine plus les eaux du fleuve, perdant la fonction de filtre qu'elle assurait.

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Les crues du Rhin sont dues essentiellement à la fonte des neiges dans les Alpes de mai à juillet. Elles apportent eau et limon aux plantes. Elles favorisent une croissance rapide et importante. Une aubépine en forêt rhénane atteint dix mètres de haut tandis qu’en terrain sec, elle mesure trois mètres. Neuf étages de végétation peuvent s’échelonner dans la forêt rhénane dont les arbres présentent un feuillage laissant passer la lumière. La faune et la flore sont naturellement nombreuses et variées.

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 Les mares et marais favorisent la vie des batraciens, des mollusques et des insectes, la reproduction des libellules qui ont besoin d'eau douce pour pondre leurs œufs : petits cours d'eau, tourbières, marais,…. Ces lieux humides constituent un réservoir de nourriture pour mammifères et oiseaux.

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Asséchée, défrichée et aménagée comme zone industrielle, exploitée et quadrillée de routes, la forêt rhénane a perdu 8000 hectares depuis le début du siècle.

Les associations de protection de la nature ont informé et sensibilisé le public. Il fallait également et surtout interpeler les décideurs. Elles ont monté dossiers scientifiques, techniques, juridiques et financiers pour obtenir le classement en réserves naturelles des zones où la biodiversité était la plus grande et présentant des espèces rares. Chaque procédure s'étend sur une dizaine d’années.

 Alsace Nature

Ensuite s’est organisée la gestion de la réserve au sein d’un comité qui intègre les différents partenaires dont les communes ne sont pas le moindre. Elles renoncent à l’exploitation du bois, à la mise en culture de prairies, à l’extension de gravières.

Sont associés administrations, scientifiques, pêcheurs, chasseurs, forestiers, agriculteurs, élus et associations de protections de la nature.

Chaque réserve est confiée à une association de protection de la nature qui fait appliquer les règles de protection de l’environnement auprès des promeneurs, pêcheurs, chasseurs et toutes personnes qui fréquentent la réserve. Cette police est exercée avec souplesse, l’aspect sensibilisation étant privilégiée. L’objectif poursuivi par les associations est une découverte du milieu, de ses besoins, de ses fragilités pour amener à un respect choisi. Elles offrent ainsi de larges possibilités de promenades commentées tout au long de l’année afin d’offrir cette possibilité de découverte du Ried et de la vie qui l’anime.

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Plantation de peupliers hybrides. La biodiversité y est plus pauvre que dans les lieux sauvages. 

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 Le gui s’implante en nombre sur ces peupliers issus d’un croisement avec une espèce américaine sans défense contre l’invasion du gui.

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         Le peuplier noir du Ried 

Enfin, les associations participent à l’entretien des prairies notamment par la fauche une à deux fois par an pour éviter qu’elles soient recouvertes par les arbres et par certaines plantes à l’installation galopante.

Ces plantes ne sont pas autochtones. Elles ont été importées.

Les deux espèces citées le plus fréquemment et que l'on retrouve en bien d'autres lieux sont :

Le solidago canadensis dit « verge d’or » arrive d’Amérique du Nord dans les années 1860. Grâce à son système de rhizomes souterrains, le solidage du Canada forme des populations extrêmement denses – jusqu'à 300 tiges par m2. Il a également la capacité de produire jusqu’à 20000 graines par tige. Elles sont dispersées par le vent, transportées par les cours d’eau. Ces trois modes de reproduction lui confèrent une grande faculté d’expansion.

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Solidago canadensis - Photo Dan Rodgerson

La balsamine de l’Himmalaya ou Impatiens glandulifera colonise et envahit rapidement les berges de cours d’eau, les forêts riveraines, les zones déboisées et les lieux humides.

Ses graines sont projetées à plusieurs mètres, par explosion du fruit à maturité. Une plante peut produire jusqu’à 10 000 graines par pied et ses graines sont viables plus de 2 ans dans le sol.

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La balsamine de l'Himmalaya

La balsamine de l’Himalaya (ou balsamine géante), comme la plupart des espèces invasives, forme des populations très denses préjudiciables au développement des espèces indigènes par monopolisation des ressources nutritives du milieu. Elle menace de cette manière les espèces indigènes typiques des zones humides par réduction de leur habitat disponible. 

Ces vastes massifs entraînent également une homogénéisation de la flore, des paysages. Durant l’hiver, la plante laisse aussi le sol à nu, plus sensible à l’érosion. Des recherches récentes ont également prouvé que l’abondant nectar produit par la plante est très apprécié des insectes pollinisateurs au point de les désintéresser des plantes indigènes, voyant ainsi leur cortège de pollinisateurs détourné.

Lorsqu’une espèce invasive colonise un site, c’est toute la pyramide alimentaire qui est concernée. L’équilibre de l’écosystème est remis en question.

« Les recherches scientifiques ont été l’occasion de mettre en évidence les services éminemment utiles que rendent les zones humides : étalement des crues et donc protection pour les populations situées en aval, épuration et protection des eaux de la nappe phréatique, grande productivité végétale tant pour les forêts que pour les prairies et, évidemment refuge pour une vie sauvage rare. Ces travaux essentiellement menés sous l’impulsion des écologistes ont abouti dès les années 1970 à la reconnaissance internationale, nationale et régionale. La plupart des inventaires mentionnent les Rieds alsaciens parmi les zones humides les plus remarquables en Europe. » Propositions des associations de nature pour la sauvegarde des Rieds. http://blog.biodiversite-alsace.org/public/MAI/propositions_ried.pdf

DSC02495a  Forêt d'ErstC'est le mois d'août naissant.

L'été bat son plein. La forêt a revêtu sa parure vert sombre.

Un éclat roux sort de l'ombre.

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  Forêt d'Erstein

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  Photo Dan Rod Photo Dan Rodgerson - Ile de Rhinau

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  Ile de Rhina  Ile de Rhinau

Miroir d’eau. Eclats d’argent.

Touche mauve.

Verts panachés.

 

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   Forêt d'Erstein

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      Forêt d'Erstein      Forêt d'Erstein

Rhinau Ile de Rhinau - Photo DaIle de Rhinau - Photo Dan Rodgerson

Le saule est un arbre qui a de gros besoin en eau. C’est pourquoi il est fréquent de le trouver à proximité des cours d’eau.

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   Forêt d'Erstein

 

Des tâches de rousseur

Peignent la prairie sèche

Le midi est monté en Alsace.

Le gris du fleuve s'étire en sourdine.

 

  Forêt d'Erstein

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 Forêt d'Erstein

 

Les tiges vertes assaillent la pierrée.

Trilles d’oiseaux, envols secs.

Les lézards se font absence.

 

 

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  Forêt d'Erstein

 

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  IleIle de Rhinau de Rhinau

 

 

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Les pics creusent les troncs des arbres qui abritent des insectes.

Ils s'en nourrissent.

Cela n'altère pas la vitalité de l'arbre.

Ici, c'est le pic noir, le plus grand des pics, qui a évidé le tronc.

Une fois l'endroit nettoyé de ses hôtes, l’oiseau peut en faire son nid.

 

 

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  Forêt d'Erstein Forêt d'Erstein

 

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   Ile de Rhinau Ile de Rhinau

 

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  Forêt d'Erstein Forêt d'Erstein

 

Ils sont quatre, cinq, six ces papillons. Ils ont déserté nos contrées.

Ils n'y trouvent plus les prairies nourricières.

Mais y ingèrent moult insecticides.

 

Dans ces forêts préservées

le bois mort est laissé à terre ou sur pied.

 Il est le refuge nourricier des insectes et des oiseaux.

 

Dans ces forêts préservées, 

la prairie et ses fleurs sont protégées.

 

 Les papillons y volètent en nombre.

 

DSC02492a  Forêt d'Erstein

La sitelle torchepot se déplace aisément la tête en bas.

Elle coince les glands dans les anfractuosités des arbres

pour les décortiquer plus facilement.

Ce tronc garde prisonnière la coque d'un de ces glands.

 

Rhinau3    Ile de Rhinau - Photo Dan Rodgerson

 

La Forêt Rhénane doit sa diversité à l'eau.

L'Ile de Rhinau est encore la seule forêt Rhénane

inondée régulièrement naturellement.

Les autres réserves bénéficient de travaux afin d'y réintroduire

la présence de l'eau et de favoriser le retour des espèces disparues,

il s'agit de percer des ouvertures vers le Rhin ou le Grand Canal d'Alsace,

mais aussi de curer les anciens bras du Rhin qui se sont asséchés

et d'y faire ressurgir la nappe phréatique.

 

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         Ile de Rhinau - Photo Dan Rodgerson 

 

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        Ile de Rhinau - Photo Dan Rodgerson 

 

Voici la vraie fleur de carotte,

La seule à posséder un cœur noir. 

 

Pour en savoir plus :

Plusieurs sites très documentés sur le net.

D'autres photos, des idées d'itinéraires, 

c'est ici :

Le Grand Ried


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4 réactions à cet article    


  • Richard Schneider Richard Schneider 15 octobre 2011 15:27

    Article magnifique. 

    Dommage qu’un reportage de ce type ne s’intéresse pas à la forêt rhénane qui va du Nord de Strasbourg à Lauterbourg : il y a une faune et surtout une flore à faire connaître aux alentours de Drusenheim, Stattmatten, Neuheausel, entre la Moder (un petit affluent du Rhin) et le fleuve lui-même.
    Mais, félicitations à l’auteur pour ce beau reportage.

    • BOBW BOBW 15 octobre 2011 16:46

        Merci pour ce beau reportage illustré de magnifiques images .

      Défendons énergiquement réserves naturelles et  parcs forestiers contre les prédateurs « économiques » de plus en plus rapaces et destructeurs.

      • bert bert 18 octobre 2011 03:07

        ach il reste encore des espaces zauvages à éradiker 

        afin de mettre en place notre politik de kultur de biokarburante


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