Urgence écologie, un rapport qui alerte. Mais n’est-il pas trop tard ?
Une plate-forme internationale de chercheurs sur la biodiversité a publié un rapport qui va faire référence sur l’état des milieux naturels. Ils alertent sur le fait que des actions rapides sont nécessaires pour enrayer un déclin qui menace même à terme l’existence de l’homme sur Terre. Mais est-il encore temps ?
La biodiversité en danger de mort, quelques rappels :
L’information n’est pas nouvelle et pourtant à en juger par l’engagement manifeste des participants au 7e congrès de l’IPBES (Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques), le moment est historique. Après 5 jours d’intenses discussions, les délégués de 132 pays ont fini par se mettre d’accord et ont publié lundi 6 mai à 13 heures un texte d’une quarantaine de pages aux allures d’alarme sur l’effondrement sans précédent de la nature.
Depuis longtemps déjà, Scientifiques et écologistes ne cessent d'alerter sur l'état de la biodiversité et de l'extrême gravité de la situation écologique avec une sixième extinction des espèces dans laquelle nous sommes engagés. Si la planète a bien connu cinq extinctions d'espèces, la sixième est la première dont l'Homme est le seul responsable. L'homme est également devenu une force géologique destructrice par son nombre sans cesse croissant et ses activités économiques, ce qui nous fait entrer dans une nouvelle ère que les Scientifiques dénomment" anthropocène".
Disparition dramatique de populations d'animaux sauvages et d'insectes
Les scientifiques estiment que 60% des populations d'animaux "sauvages" ont disparu de la terre depuis 1970. Cette disparition de plus de la moitié des vertébrés, à l'exception de l'homme, dont la population continue de croître s'est donc opéré en un peu plus de 40 ans. Dans les zones tropicales et en Amérique Latine qui sont touchées très durement par la déforestation, la chute serait de 89%. Quand on écoute les déclarations délirantes du nouveau Président Brésilien par rapport à sa volonté de poursuivre à grande échelle la déforestation de l'Amazonie, il y aurait urgence à prendre des mesures contre ce chef d'Etat, dans le cadre des Nations Unies.
D'autres preuves scientifiques ont été publiées ces derniers mois pour démontrer l'appauvrissement de la biodiversité et ses causes. Les populations d'insectes ont chuté de près de 80% en Europe, a estimé en octobre 2017 une étude publiée dans la revue scientifique "Plos One". Le déclin des abeilles domestiques, très médiatisé par le monde apicole, n’est que la part émergée d’un problème bien plus vaste. Une chute brutale liée à la perte d'habitats des insectes est due essentiellement à l'agriculture intensive, grosse consommatrice de pesticides, qui a également un impact sur les populations de pollinisateurs, mais aussi des oiseaux.
D'autres chercheurs expliquent que les trois quarts des plantes, amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères ont disparu de la surface de la Terre depuis l'an 1500, pour deux raisons : la surexploitation de certaines espèces et l'agriculture.
La demande mondiale d'alimentation et de terres agricoles exerce une pression considérable sur les écosystèmes et la biodiversité. À elle seule, l'agriculture est responsable de 70 % de la déforestation mondiale. L'expansion de certaines cultures, comme celle de l'huile de palme en Asie du Sud Est, gagne maintenant d'autres pays en Afrique, notamment la République démocratique du Congo, le Congo-Brazzaville, le Gabon et le Cameroun.
Artificialisation des sols en question
On estime que la biodiversité, a plongé de 83 % depuis le début des années 1970. La baisse est moins soutenue dans l'Hexagone (60 %). Toutefois, en France, les zones humides ont perdu la moitié de leur superficie en trente ans. Elles disparaissent surtout à cause de l'artificialisation des sols, notamment pour l'habitat, la circulation avec de nouvelles voies routières ou autoroutières et la construction de zones commerciales. Après une relative pause ces dernières années, l'artificialisation des sols en France repart à la hausse »
Il existe également une déforestation importée en Europe, dont en France. C'est le cas notamment pour l'écosystème spécifique du Cerrado, en Amérique latine. Ce territoire composé à moitié de savanes et de forêts s'étend sur 1,5 à 2 million de km². Il représente 22 % de la superficie du Brésil et déborde sur les régions limitrophes du Paraguay et de la Bolivie. Alors qu'il abrite 40 % d'espèces endémiques, Cet écosystème a perdu la moitié de sa surface au cours des trente dernières années. Cette réduction de la taille est provoquée par la culture extensive du soja et l'élevage de bœufs. Comme ce soja est importé en France, notamment pour l'élevage de poulets, cela veut dire que derrière nos œufs et nos blancs de poulet nous contribuons à la déforestation du Cerrado ! ».
D'autres activités humaines dégradent l'environnement et réduisent fortement le nombre d'espèces vivantes dans les zones humides, constituées de marais et de zones inondables. Ces milieux représentent moins de 1 % des surfaces immergées, mais ils constituent un habitat pour 126.000 espèces, soit 10 % de celles qui sont connues dans le monde.
Plus d’un tiers de la surface terrestre du monde et près de 75 % des ressources en eau douce sont en effet destinés à l’agriculture ou à l’élevage, 85 % des zones humides ont été détruites depuis l’ère préindustrielle. Les experts de l’IPBES donnent des premières pistes qui devront ensuite être discutées lors de la COP15 sur la biodiversité en Chine en 2020, en développant, par exemple, les pratiques agroécologiques.
Les populations de manchots en Antarctique, totalement déstabilisées
La hausse moyenne de 2,8°C de la température depuis la seconde moitié du XXe siècle dans l'Antarctique occidental a profondément affecté l'habitat et la disponibilité de la nourriture pour les manchots. Ce réchauffement a provoqué une forte diminution de l'étendue de la banquise, où vivent les manchots empereur et Adélie. De ce fait, pour trouver leur nourriture, il y a une sorte de compétition entre les différentes populations de manchots.
Dans certaines zones, notamment sur la « minuscule île Signy, située dans l'Antarctique occidental, la diminution du krill antarctique, proie préférée des manchots, a provoqué une diminution de 42 % des manchots Adélie et de 68 % des manchots à jugulaire depuis 1978, explique le rapport « Planète vivante » de l'ONG WWF. Dans la péninsule Antarctique, où les manchots Adélie et les papous cohabitent désormais, les changements climatiques ont provoqué une forme de compétition pour les mêmes proies. En revanche, l'espèce des manchots papou a vu sa population croître de 255 % sur la même période. A lire : https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2018-10/20181030_Rapport_Planete_Vivante_2018_synthese.pdf
15% des espèces végétales menacées
Dans le cadre de la Liste rouge nationale, des scientifiques ont mené un examen approfondi des près de 5.000 espèces de plantes indigènes recensées en France métropolitaine. Selon leurs conclusions, 742 espèces, soit environ 15%, présentent un risque de disparition.
Toutefois, le degré de menace varie en fonction des espèces. Ainsi, 421 taxons sont considérés comme "menacés" et 321 sont jugés "quasi-menacés". Parmi les taxons menacés, 238 sont classés "vulnérables", 132 "en danger" et 51 en "danger critique d'extinction". (Un taxon correspond à une entité d'êtres vivants regroupés parce qu'ils possèdent des caractères en communs du fait de leur parenté)
Dans cette dernière catégorie, figurent par exemple une petite plante endémique du Jura devenue extrêmement rare, la saxifrage de gizia (Saxifraga giziana) ou le panicaut vivipare (Eryngium viviparum), une petite plante à fleurs bleues qui pousse en milieu humide et a subi une forte régression au cours des dernières années.
Malheureusement, la situation de certaines espèces françaises est apparue encore plus préoccupante : sur les quelque 5.000 évaluées, 22 espèces ont disparu de métropole et 2 se sont totalement éteintes. C'est le cas de la violette de Cry (Viola cryana) dont les petits fleurs ont été observées pour la dernière fois en 1927 et de la carline à gomme (Carlina gummifera) également disparue de France métropolitaine.
Force est de constater que la situation est préoccupante pour ne pas dire catastrophique. Un million d’espèces, animales comme végétales, sont à ce jour en danger d’extinction. Seuls 25 % des objectifs fixés en 2010, lors de la conférence de la Convention de la diversité biologique d’Aichi, au Japon, sont en passe d’être atteints en 2020.
Quand les Européens qui représentent 7% de la population mondiale utilisent à eux seuls 20% de la biocapacité de la Terre
Avec 513 millions d'habitants pour une superficie de 4,2 millions de km2. les USA c'est 330 millions pour plus de 9,6 millions de km2. Avec la seconde plus forte empreint écologique derrière les USA, la population européenne commence à grignoter les ressources naturelles de la Terre plus vite qu’elles ne sont régénérées en un an, alerte un rapport de l’association WWF. Population en croissance continue avec un territoire inférieur de moitié aux USA pour une population presque du double, il faut prendre acte que l'Union Européenne est dans une situation des plus critique en regard de la gravité de la situation écologique.
Ce 10 mai 2019, "jour du dépassement » européen," est calculé en comparant l’empreinte écologique de l’Union européenne par résident par rapport à la biocapacité disponible dans le monde par personne.
Chaque année, cette date faite pour marquer les esprits, est de plus en plus précoce : en 1961, c’était le 13 octobre à l’échelle de l’Europe. Au sein de l’UE, les cas varient toutefois selon les régions : cette année le Luxembourg a atteint ce cap dès mi-février, pour la France ce sera le 15 mai, et la Roumanie y sera mi-juin. C’est plus tôt que la moyenne mondiale où les hommes consomment aussi largement au-delà des capacités de renouvellement des ressources. En 2018, l'humanité a commencé à vivre à crédit le 1er Août, alors qu'en 1997 c'était fin Septembre.
Cette érosion du capital naturel et ses conséquences directes ou indirectes (chute des stocks de poissons, érosion des sols, pollutions, extinctions d’espèces et dérèglement climatique) ont coûté 450 milliards d’euros à l’Europe depuis 1980. Il convient également d’ajouter, selon le WWF, que la pollution de l’air cause 430.000 morts prématurées en Europe chaque année.
Les mesures envisagées par le Président de la République sont-elles réellement à la hauteur des enjeux, en France et en Europe ? (https://en-marche.fr/emmanuel-macron/le-programme/environnement-et-transition-ecologique)
Lorsque le Président de la république annonce : "15 milliards d’euros seront consacrés à la transition écologique". Et d'indiquer :
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" Nous diviserons par deux le nombre de passoires thermiques dont les propriétaires sont précaires d’ici à 2022 et les éliminerons en dix ans (4 milliards).
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Nous rénoverons les bâtiments publics.
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Nous transformerons le crédit d’impôt transition énergétique en prime immédiatement perceptible.
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Nous éliminerons les véhicules les plus polluants, produits avant 2001, d’ici à 2022, grâce à une prime à la casse de 1 000€ supplémentaires par véhicule.
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Nous contractualiserons avec les collectivités locales sur la base de projets permettant de réduire l’empreinte écologique (ex : déploiement d’énergies renouvelables, soutien au recyclage et à l’économie circulaire…) et de créer des emplois nets (ex : accompagnement des travailleurs dont les industries doivent se reconvertir)".
Tout en regrettant l'absence d'annonce de mesures fortes pour l'interdiction immédiate du Glysophate et autres intrants chimiques, ou pour le renforcement des aides à la reconversion de l'agriculture classique vers le Bio, ainsi que celles destinées à l'agriculture Bio, Il est évident que l'on ne va rejeter ces propositions et pour quelqu'un qui n'a pas vocation à faire de l'écologie sa préoccupation principale, on ne peut que l'encourager pour aller beaucoup plus loin dans ce sens. Mais face à la gravité de la situation écologique (cette nouvelle période que l'on nomme "anthropocène" où l'homme, par son nombre et son empreinte écologique, est devenu une force géologique, avec pour corollaire une sixième extinction des espèces, dérèglements climatiques, épuisement des ressources et des énergies fossiles...) cela peut paraître "gadget".
Alors que la question démographique reste la question centrale, surtout en Europe par rapport à l'équation population/territoire on ne peut que déplorer l'absence de prise en compte de cette thématique fondamentale au moment où va se tenir à Paris le jeudi 16 mai une conférence sur la démographie qui est initiée par l'association "Démographie Responsable" (DR) (https://www.demographie-responsable.org/).
Il faut se rendre à l'évidence et rappeler une fois encore que même si la France devenait un îlot de vertu écologique, ce qui serait souhaitable, mais cela ne changerait pas grand chose par rapport à la situation écologique de la planète si les autres pays ne suivent pas. Ce qui signifie qu'il faut absolument que la prochaine législature Européenne fasse prendre conscience à tous les dirigeants Européens que la priorité des priorités c'est "l'urgence écologie"avec la décroissance démographique qui en est la problématique centrale... Mais là encore, n'est-ce pas illusoire et trop tard pour stopper l'effondrement inévitable évoqué par les Collapsologues ?...
Pour conclure
La situation n’incite guère à l’optimisme. À court terme on risque de se retrouver dans des situations inextricables génératrice de violence à cause d'une concurrence des usages de sols pour se nourrir, se fournir en énergie, par rapport aux biocapacité et avec la destruction de la biodiversité qui en découlera. Ne nous y trompons pas, lorsque, par exemple, des projets de grands barrages, peuvent paraître une solution pour fournir une énergie décarbonée, ils sont catastrophiques pour l’écosystème. De même les énergies dites renouvelables, solaire, Eolien sont de gros consommateur de métaux issus de terres rares, lesquelles, outre l'impact environnemental désastreux pour l'extraction et la santé des populations riveraines sont une énergie fossile qui n'est pas inépuisable.
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