Belgique kapot ? of/ou België cassée ?

En Belgique, les événements se bousculent. Le gouvernement Leterme démissionne : le Roi tient sa décision en suspens (LIVE). Comme si l’actualité n’était pas déjà assez chargée, Miss Belgique va encore faire couler beaucoup d’encre, monopoliser beaucoup de bande passante et de plages d’audimat. Après la Grèce et le nuage volcanique, voici la crise Belge revisitée. Par les temps qui courent (crises et crises de crises), les éditions spéciales vont devenir légion. Journalistes et éditorialistes, accrochez-vous !
Ceci dit, cette crise belge mérite que l’on s’y attarde. Logée au cœur même du projet Européen néolibéral, elle est hautement symbolique d’une gestion politique déconnectée du bien commun. Ou, en d’autres termes, elle est hautement symbolique de l’échec de la démocratie telle que véhiculée de nos jours. Démocratie entendue non pas dans le sens de pouvoir donné au peuple mais de pouvoir à donner aux élus, aux dents longues en puissance ou en devenir vu l’attrait faussement sécurisant de l’homme pour le pouvoir.
Or, Avoir conscience de la vulnérabilité et du côté sombre de l’être humain (en tout temps !) est dans la même logique de vigilance que l’idée que la qualification du candidat Front national pour le second tour des élections présidentielles en France, en mai 2002, « nous rappelle à quel point la démocratie est un régime très fragile qu’il faut défendre au quotidien » (dixit Louis Michel - libéral, Mouvement réformateur, ministre des Affaires étrangères de Belgique -, in : le Soir, 06 mai 2002). Mais la démocratie à défendre n’est pas celle de Mark Eyskens - social-chrétien - ou de Louis Michel - libéral -. Ceux-ci commettent l’erreur, ou la tromperie, d’amalgamer démocratie et démocratie nationale de représentation pour perpétuer l’ordre établi, autoproclamé « le meilleur des systèmes possibles ». La démocratie, il faut en construire une autre. Et ce n’est pas la « réinvention de la démocratie » selon Guy Verhofstadt, libéral, VLD, Premier ministre de Belgique, ni la « politique autrement » promise par Jacques Chirac après sa réélection à la présidence de la république française en mai 2002. (La non-domination au quotidien par Benny Thyrion)
Ainsi donc, plus fondamentalement, cette crise belge est aussi et surtout hautement représentative de toute la difficulté de la transcendance humaine par une recherche quotidienne et difficile de coexistence harmonieuse entre le corps et l’âme. Une coexistence harmonieuse entre le territoire et la personne, entre l’objectif et le subjectif.
Ci-dessous, la conclusion du gourou Jean-Luc DEHANE (ex-premier ministre à qui l’on a confié la mission de rechercher des solutions diplomatiques à l’épineux dossier Bruxelles Hal Vilvoorde) concernant la sempiternelle crise belge opposant Flamand et Francophones.
« J’ai en effet rarement vécu une illustration plus claire de la philosophie de base qui m’a été apprise par mon père, qui, comme vous le savez, était psychiatre, à savoir que pour comprendre la logique de ses partenaires de discussion, il faut accepter leurs prémisses. Dans ce cas-ci, cela signifie que chaque communauté croît détenir la vérité en se basant sur son propre point de départ. Une communauté part du principe de territorialité ; l’autre du principe de personnalité. Les deux sont en opposition totale. Un compromis n’est possible que si chaque partie est disposée à se départir en partie de sa propre logique, à intégrer des éléments de la logique du partenaire de discussion et inversement. Cela a été le cas lors des compromis conclus lors de chaque phase de la réforme de l’Etat » Dehaene ou de Gaulle ? par Charles Bricman.
Et voici ce que le réfléchi Marc EYSKENS en dit dans l’émission RTBF Matin Première de ce matin :
« Nous vivons ensemble depuis l’époque de Jules César, on en a vu d’autres : la question de Louvain, etc… la fixation de la frontière linguistique… on est toujours sorti. Mais aujourd’hui il y a une coïncidence de défi et il y a cette crise politique menaçante, avec évidemment des défis économiques et sociaux considérables. S’il y avait une crise politique grave (la crise économique n’est pas entièrement terminée, ni financière) on risque d’avoir une évolution comparable à celle de la Grèce. Nous avons une dette publique de plus de 100%, qu’il faut financer. Il faut émettre des emprunts de l’Etat, à des taux qui seraient en hausse en cas de crise politique : 5%, 6%, 7%, 8%... Cela va freiner considérablement les investissements, augmenter le chômage et donc on est en train, potentiellement, de sacrifier notre prospérité à un problème politique irritant, mais qui n’est pas fondamental pour l’avenir du pays, ni pour la Flandre, ni pour la Wallonie, ni pour Bruxelles. »
Il ajoute également : « Nous avons dans chacune de nos communautés, nos extrémistes, qui eux ne veulent pas de solution, car ils vivent du problème communautaire. C’est leur fond de commerce. Alors il faut avoir le courage, nous autres gens responsables de dire : zut… on ne les écoute pas, ils sont minoritaires et ils resteront minoritaires, parce qu’on va expliquer à la population, quel est le véritable enjeu. Le véritable enjeu, c’est que si on provoque une crise politique communautaire, on commet un crime contre la prospérité de la population. »
Quelques questions. Une prospérité définie par qui et pour qui ? Qui sont les gens responsables ? Les élus, les entrepreneurs, les investisseurs, les capitalistes ou les parents qui s’occupent de leurs enfants dans l’ombre du grand casino économique ?
Pour conclure, la Belgique, avec ses velléités séparatistes, centre de l’Europe, et bientôt présidente de celle-ci, est le parfait exemple de difficultés d’aboutissement d’une quête cathartique du genre humain. Une quête qui cherche à concilier intériorité et transcendance. Une quête qui cherche à unir sans confondre et à distinguer sans séparer. Une sorte d’union hypostatique à atteindre. « En mécanique du solide, une structure est hypostatique si et seulement si le nombre de liaisons indépendantes qui le lient est inférieur au nombre de ses degrés de liberté ». Autrement dit, ma liberté s’arrête là où commence celle des autres…
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