Bilan moral du nazisme, au prisme du monde actuel
Cet article propose de réaliser un bilan moral du nazisme, qui ne se borne pas à dire « c’est mal, plus jamais ça, oh non, point Godwin, sale néonazi, va te faire emmmmmh, #balancetonheil ». Mais cela ne signifie pas qu’un bilan moral soit exhaustif, ni encore moins précis. Il lui suffit d’être sensé. Comme tout bilan, il s’agit de peser le pour et le contre, de voir ce qui peut être amélioré, et ce à quoi il faut remédier. Mais si une telle ambition semble trop grande, lisez là une tentative ou, si l’on veut, une tentation, parce qu’il faudra bien en passer par là. Remercions LREM d’avoir détabouïsé le débat sur l’immigration, encore que les températures de saison soient chaudes, et que cet article est écrit au prisme du monde actuel ⸻ pas forcément en faveur de LREM.
Attention, cet article n’est pas manichéen, et attaque sec. Si vous avez le sentiment qu'il ne juge rien, c’est précisément qu’il ne juge pas : vous pourrez toujours trancher dans les commentaires, si ça vous pulse ... Lisez cela comme un panorama, un paysage. Car le fait est que le nazisme est un phénomène social-politique au fond humain, trop humain, pas si exceptionnel que cela, et surtout dangereux dans sa dimension suprémaciste exterminationniste « magicienne » (vous verrez). Pour le reste, il est comme tout le monde. C’est-à-dire que le nazisme ... que le nazisme n’est pas « nazi » ce qu’on délire nazi, et que l’Histoire a suivi son cours en vérité, que l’humanité a traversé les âges normalement. Il ne faut pas surestimer le nazisme : c’est lui faire trop d’honneur, des honneurs surfaits. Car alors : ou bien tout le monde est nazi, ou bien personne, pour ainsi dire. Ce n'est pas logique.

Source internautique
Dans Instincts et société, Gonthier, 1964, du sociologue Roger Caillois, récemment cité sur AgoraVox, voici ce qu’on lit, pp.72-76 :
La secte au pouvoir
Une secte peut se proposer pour but précis la conquête du pouvoir dans le pays où elle se forme. Elle ne cherche pas une influence occulte, diffuse, mais entend s’emparer de l’État. Aussi prend-elle l’apparence d’un parti politique et d’abord on la traite comme tel. Mais la société distingue bientôt le péril : elle devine sous le couvert qui respecte ses institutions et ses coutumes, une décision bien arrêtée de les détruire. Pour un dessein moins radical, faudrait-il en effet cette discipline sévère, cette cohérence absolue, ce fanatisme délibéré ? Serait-il besoin de détacher les affiliés de chacun des scrupules qui assurent la convivance de tous les citoyens, détruirait-on en eux le respect des lois, de la vérité, du prochain, au profit d’une seule fidélité aveugle, si l’on ne travaillait pas à forger pour une lutte sans merci des instruments dociles et efficaces ? Ces cœurs durs, qui servent sans trembler une foi ennemie, sont aussitôt regardés comme un danger pour la morale et pour l’ordre. On leur fait crime de violer des principes, qu’ils se vantent en effet d’avoir désappris de professer. Ils en voyaient trop qui sont incapables de rien sacrifier pour la défense des maximes qu’ils disent saintes réclamer des autres une soumission que dément leur propre exemple, mais où ils trouvent un profit certain.
On recourt en vain à la répression : la secte en est fortifiée. Elle est obligée à plus d’invention et d’énergie. Profitant des divisions de ses adversaires, s’alliant avec les uns contre les autres, elle fait brèche dans le front qu’on lui oppose. Elle exige de la société les droits dont elle jure déjà de la priver un jour. Enfin, par la ruse et par la violence mais aussi à force de courage, d’abnégation et d’intelligence, elle parvient au terme de ses efforts. Elle est maîtresse de la nation sans avoir perdu le moins du monde ses abruptes vertus. Loin de croire ici sa tâche terminée, elle entreprend sans tarder d’imposer à la société entière l’esprit qui l’anime.
Roger Caillois fait référence à la montée du nazisme, et pourtant cela ressemble à l’islamisme. Des sectes au pouvoir. Il ne croyait pas si bien dire.
Pages 158-160 :
Hitler, « Chef inspiré »
Hitler apparaît d’emblée avec les traits mythologiques du souverain inspiré, en partie parce que la nature même de son ascendant lui impose de les afficher, en partie parce que l’imagination populaire les lui accorde d’instinct, D’ailleurs, le chef attendu dans les milieux où il développe son mouvement, appartient déjà au type charismatique du meneur inspiré, et non au type fonctionnel de l’homme d’État. Le fondateur du parti national-socialiste, Gottfried Feder (Der deutsche Staat auf nationaler une sozialer Grundlage) compare ce messie au Christ, à Luther, à Savonarole, à Mahomet.
Or des adeptes de LREM comparèrent Macron au Christ, pour l’anecdote. Cela n’en fait pas un nazi, mais fait certainement de l’archétype du chef inspiré, comme son nom l’indique, un archétype.
[Gottfried Feder] attribue par avance [à Hitler] une volonté de fer comme principale vertu et le définit comme un libérateur. A ce titre, il peut compter sur le fanatisme de la masse qu’il affranchit. Elle le reconnaît comme la source de toute liberté, et elle le sert avec un dévouement à toute épreuve. Enfin, dirigeant la nation, il agit avec une « sûreté somnambulique » [il pourrait aussi bien le faire dans le noir, ou bien en marchant sur l’eau]. Aussi ses décisions sont-elles infaillibles. Il veut qu’on les exécute sans les discuter ni même les comprendre.
LREM est très douée pour exiger cela des siens et de la population française. Mais on voit bien que la technique d’annonce hitlérienne est reprise : on annonce, en somme, un messie, afin de subjuguer les mentalités. Mentalités qui sont parasitées par la convocation d’un archétype puissant (C.G. Jung) : celui d’une sainteté superhéroïque divine, entre Jupiter, Mars, Jésus, et maintenant Atlas. Des titans, des dieux, Dieu. La totalitaire ! ... Continuons :
Lundendorff (Der totale Krieg), dont l’influence fut grande dans les mêmes cercles à la même époque, trace du chef militaire un portrait analogue. Il le condamne à un isolement intellectuel absolu : « Personne ne doit chercher à contrôler le cours intérieur de ses pensées, si dignes et si intelligents que soient les hommes de son entourage ». Le chef pense et agit avec l’aisance d’un artiste, mais en même temps, il a la « force de supporter une responsabilité incommensurable » [Atlas ...]. Il accède à des états de lucidité privilégiée, qui dérobent sa psychologie à l’entendement vulgaire : « Jamais l’histoire des guerres n’apprendra ce que c’est qu’un général en chef, jamais elle ne pourra exprimer ce qui se passe en lui. Cela, c’est son bien personnel et il ne pourra l’éprouver lui-même pleinement que dans les heures de suprême tension. » Il s’agit d’une sorte de vertige du commandement et de ses responsabilités que provoque l’atmosphère des batailles [...]
Certes il s’agit ici de l’émotion créatrice du chef de guerre, mais le chef de l’État lui est couramment assimilé en tant que dépositaire d’un pouvoir absolu, dont les décisions mettent constamment en jeu l’existence de la nation. L’un et l’autre sont sujets à la même exaltation, dont on paraît attendre qu’elle les illumine.
Or on s’est très peu privé de comparer la jeunesse et la démarche d’Emmanuel Macron à celle de Louis Napoléon III Bonaparte, qui évoque fatalement le Premier Empire par le prisme rabougri du Second ⸻ mais le Second fut profondément industrialiste comme nos jours. On voit bien qu’Emmanuel Macron ne fait pas de nationalisme, puisqu’il est internationaliste, ni vraiment de socialisme, encore qu’il doive bien se dépatouiller avec l’administration française au fond soviétisante jusqu’à son énarchisme. Tout est au poil.
Car même quand Macron dit par Sehnsucht, langueur aspirationnelle, qu’après sa fonction présidentielle il pourrait retrouver les siens, il se veut un phare. C’est-à-dire qu’il fait passer le poste suprême pour un poste normal (en mode François Hollande) mais avec prestige managerial (en mode Nicolas Sarkozy) comme s’il rédigeait ses mémoires (en mode Jean-Marie Le Pen). La totalitaire !
En tout cas, ce n’est jamais le calcul ni la froide raison qui sont supposés les éclairer. Walter Darré, ministre et théoricien officiel du IIIème Reich, affirme au contraire que les grands conducteurs de peuples obéissent à un mystérieux sentiment intérieur qui les dresse « contre leur temps et contre les raisonnements de leur temps ». Tout comme Gottfried Feder, il les imagine doués d’une sûreté de somnambule. Ce sentiment intérieur où ils puisent leur inspiration, est comparable à celui d’une mère pour son enfant. L’intellectuel en est dépourvu. C’est le contact avec « Notre Mère la Terre » qui l’éveille. En outre, « il ne se développe qu’au milieu du rayon cosmique que distribue la libre nature avec tant d’abondance ». [...]
On mesure combien sont proches, en un pareil domaine, mythologie et psychologie.
Si évidemment Emmanuel Macron ne se prend pas pour le Terre-Mère, sans conteste il est dans ce maternalisme, comme tout le monde ⸻ rien qu’avec sa conjointe. Cela l’exempt d’ailleurs de toute attaque féministe, à moins qu’il soit temps que les féministes s’intéressent à lui enfin. Après tout, c’est un homme ! ...
Mais là où notre aimable président n’est évidemment plus nazi, c’est sur ce qui suit, encore qu’il fait tout pour se comporter comme si c’était le cas, pages 165-166 :
« Le peuple est au chef ce que l’inconscience est à la conscience. » Cette identité rend le Chef infaillible. Comment n’aurait-il pas toujours et d’avance raison, puisque sa volonté reflète immédiatement la volonté collective, dont il est le seul interprète légitime, et qui ne trouve qu’en lui son expression reconnaissable ? On ne peut rien lui opposer qui ne se dresse en même temps contre le génie-même de la nation ou de la race. Pour exprimer ces relations mystérieuses, Hitler se sert de deux images principales.
Dans les discours où il aborde la question, il se compare volontiers à un tambour et à un aimant. L’origine de la première désignation remonte au procès de Leipzig [au début des années 1920]. Dans le plaidoyer qu’il prononça devant le tribunal où l’avait mené l’échec du putsch de Munich, il se présenta comme « le jeune tambour du peuple allemand », Quand il fut parvenu au pouvoir, un journal anglais reprit l’expression pour lui dénier la qualité d’homme d’État, lui rappelant que, de son propre aveu, il n’était qu’un simple tambour. Dans un mouvement oratoire de grand style, le Chancelier releva aussitôt l’ironie, proclamant à la face du monde qu’il était en effet le tambour sur lequel résonnait la misère des quatre-vingts millions d’hommes que ses roulements avaient fini par réveiller de leur torpeur. Plus tard, au cours de sa carrière, il revint maintes fois à la même image.
Outre que c’est une image de transe chamanique, il faut noter la rhétorique qui reprend à son compte le mal qu’on dit de soi. C’est pervers narcissique, mais cela marche très bien : la tactique du retournement de situation, du retournement des armes de l’adversaire contre lui-même. LREM a fait cela, en parlant « d’acte II » alors que les Gilets jaunes en étaient à leur énième acte déjà. Et ainsi de suite, quand LREM agitait des drapeaux français au Louvre à l’élection, ou quand est lancé l’actuel débat sur l’immigration : il y a récupération de thèmes RNistes. Finalement, Hitler n’est pas si « hitlérien », ou bien LREM est hitlérienne comme le RN, qui au fond ne l’est pas. Si vous n’y comprenez rien, c’est qu’il n’y a rien à comprendre à pareilles comparaisons en vogue. C’est-à-dire que c’est de la politique politicienne, quoi.
Pages 173-174 :
Dans un régime totalitaire, le pouvoir est toujours charismatique à quelque degré. Deux raisons au moins le rendent inévitable. En premier lieu, un régime totalitaire repose sur l’identification d’un parti avec la nation. Or la discipline et l’organisation partisanes constituent dans les sociétés modernes le cadre le plus favorable au développement du pouvoir charismatique [aujourd’hui, c’est le monde de l’entreprise en général]. C’est là surtout qu’un chef s’impose personnellement, avec pour unique soutien les acclamations populaires et la fidélité de ses compagnons. Si, parvenu au pouvoir, il demeure d’abord chef de parti, il conserve ce prestige qui l’y a porté et il en tire, plus que de sa fonction, l’ascendant qui fait sa force. En second lieu, un régime totalitaire suppose une grande oeuvre à accomplir ; il ne se justifie pas s’il ne s’agit que de gérer calmement les affaires de l’État. Chacun voit que tant de rigueur est superflue pour une besogne comptable et qu’elle risque même de tout gâcher. Mais la même rigueur est indispensable, s’il faut mobiliser la nation en vue d’une tâche infinie, d’un projet qui, en tout cas, dépasse de loin, en ampleur et en portée, l’humble souci de la prospérité quotidienne. L’exécution d’une pareille entreprise, domination de l’univers par une race élue ou instauration d’un monde socialiste [et toute autre « révolution » managériale], requiert un champion à sa taille. Celui qui mène un tel combat apparaît presque nécessairement avec les traits d’un ouvrier du destin [...]
[Mais] la part de l’atmosphère mythique et religieuse est rarement aussi envahissante [qu’avec Hitler].
Ou bien Emmanuel Macron, dont le grand’oeuvre consiste apparemment à fonder un européisme par d’autres moyens qu’Hitler, ainsi qu’à combattre toutes les formes de complotisme et de nationalisme encore que ⸻ comme dit Frédéric Taddéi dans une interview à la dernière parution d’Eléments ⸻ les anti-complotistes soient les premiers à voir des Russes partout. D’ailleurs, l’anti-russisme est toujours d’actualité géopolitique, y compris à travers des éléments aussi risibles que de surnommer un guignol « Poutine » dans un film. Comme à l’heure de l’anti-communisme nazi pourtant. Comme quoi, le monde n’est pas manichéen.
Mais revenons à cette « atmosphère mythique et religieuse rarement aussi envahissante » qu’avec Hitler, car nos actualités se réclament avant tout d’une atmosphère pragmatique. Cette fois-ci, c’est le Matin des magiciens de Pauwels et Bergier, Gallimard, 1960, qui va servir à la citation.
Page 500 :
Aux USA, il y a, depuis la [Seconde Guerre mondiale voilà 15 ans seulement], plus de 30.000 astrologues, 20 magazines uniquement consacrés à l’astrologie, dont l’un tire à 500.000 exemplaires. Plus de 2.000 journaux ont leur rubrique astrologique. En 1943, 5 millions d’Américains agissaient selon les directives des devins et dépensaient 200 millions de dollars par an pour connaître l’avenir. La France seule possède [en 1960 déjà] 40.000 guérisseurs et plus de 50.000 cabinets de consultation occulte. Selon des estimations contrôlées (chiffres cités par François Le Lionnais dans son étude Une maladie de civilisation : les Fausses sciences, La Nef, n°6, juin 1954), les honoraires des devins, pythonisses, voyantes, sourciers, radiesthésistes, guérisseurs, etc., atteignent 50 milliards de francs pour Paris. Le budget global de la « magie » serait, pour la France, d’environ 300 milliards par an : beaucoup plus que le budget de la recherche scientifique.
Que l’on ne s’étonne pas qu’aujourd’hui, après ça, LREM compare allègrement Macron au bon dieu, au diable et à tous les saints, à ce compte : c’est extrêmement rentable ! ... C’est extrêmement rentable, mais c’est exactement ce qui motiva le nazisme aussi. Et là, on touche à l’essentiel. En effet, comment une bureaucratie d’État telle que l’allemande, si rationnelle alors, peut-elle parvenir à organiser en grand une extermination génocidaire ? comment même cette administration peut-elle se retourner contre ses acteurs-mêmes ⸻ car les dirigeants nazis, ne reconnaissant pas la défaite à venir, étaient prêts à sacrifier tout le peuple allemand sans distinction ? Il y a une « magie » à l’oeuvre.
Longtemps, on a cru que c’était lié à la révolution conservatrice qui précéda l’avènement de Hitler. Malheureusement pour les gauchistes, il faut bien voir que le nazisme est un socialisme national, d’une part ... d’autre part, nombreux furent les socialistes à rejoindre et organiser le régime fasciste de Vichy ... mais en plus, pour tous les progressistes post-gauche recentrés, des juifs furent acteurs de cette révolution conservatrice ...
En tout cas, il y a, dès le numéro 23 de la revue Nouvelle École, paru en 1973, un excellent article d’Armin Mohler, Die Konservative Revolution in Deutschland 1918-1932 pour s’en convaincre. Un grand intellectuel tel que Leo Strauss, ressortissant juif, faisait d’ailleurs partie de cette révolution conservatrice, qui produisit les conférences parues sous le nom de Nihilisme et politique chez Payot. De toute évidence, le conservatisme ⸻ serait-il juif ⸻ est tendanciellement de droite (encore que de nos jours, des socialistes libertaires tels que Michel Onfray ou Jean-Claude Michéa s’avèrent conservateurs), mais là où le travail de mémoire récent s’est fourvoyé, c’est lorsqu’il a associé le nazisme à la droite, et précisément à l’atmosphère de cette révolution conservatrice, car cette révolution conservatrice n’avait rien à voir : la révolution conservatrice se nourrissait des meilleurs intellectuels.
Rien à voir avec des « magiciens » nazis ! ... Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le monde n’est pas manichéen. Pas plus à gauche, au centre qu’à droite, avec leurs extrêmes idoines dont extrême-centre, vous n’avez de nazisme obligatoire.
Voyez plutôt, page 454 du Matin des magiciens :
La véritable S.S. de formation « initiatique » [et supérieure au NSDAP lui-même, détachée par décret, donc supérieure à l’État allemand] [...] « ne compte pas sur l’aide fanatique de sadiques qui recherchent la volonté du meurtre, [dixit Himmler] : elle compte sur des hommes nouveaux. » Hors du « cercle intérieur », qui comprend les « têtes de mort », leur chefs, plus proches de la doctrine secrète, selon leur rang, et dont le centre est Thulé, le saint des saints, il y a le S.S. de type moyen, qui n’est qu’une machine sans âme, un robot de service. On l’obtient par fabrication standard, à partir de « qualités négatives ». Sa production ne relève pas de la doctrine, mais de simples méthodes de dressage.
Page 437 :
[Les ouvrages nazis] paraissent fondés sur un réalisme politique étroitement matérialiste. Ce souci, chez tous les membres du groupe, d’employer un langage exotérique purement matérialiste, de véhiculer vers l’extérieur des conceptions pseudo-scientifiques, brouille dans cesse les cartes.
Exactement comme « la science soviétique » (encore qu’elle recela aussi des éléments de valeurs, tels qu’en psycholinguistique Lev Vygotski) et comme tous ces sites Internet actuels, vendant « la science coranique » comme si le Coran avait tout prévu (c’est évidemment anti-historique, et d’islamisme radical) ⸻ ce qui évidemment n’empêche pas (comme Lev Vygotski chez les soviets) qu’il y ait des scientifiques musulmans. Et c’est aussi, actuellement, comme le scientisme mobilisé par les progressistes, par exemple en matière de gender et de génétique raciale.
Car il y a bien des morphotypes raciaux, psychophysiologiques : un Européen n’est pas vert à trois yeux avec des griffes, ce n’est pas nazi de nier cela, et de dire que l’Européen est séculairement ⸻ depuis les Indo-Européens ⸻ comme on dit aux USA, of Caucasian race, tendanciellement au teint plus clair que le restant de l’humanité variée, avec des yeux non-bridés et un crâne non-bombé, etc. par-devers toute possibilité de croisement inter-racial, accouchant de métis eux-mêmes croisables avec tout le monde, qui aboutirait théoriquement sur une race planétaire standardisée.
Alors, qu’est-ce qui est nazi ? ... Ce qui est nazi, répétons-le, est de vouloir exterminer un ou des groupes, au nom d’un suprémacisme racial, sur une base sorcière. Car même les pseudo-« Indigènes de la République », sont racisants, et pourtant ils ne sont pas nazis. Ce qui est nazi, c’est le suprémacisme exterminationniste « magique », au prix même des personnes qui en sont les acteurs, en vue de métahumains d’ailleurs. Voilà ce qui est nazi.
Nous lisions tout à l’heure que Hitler se voulait un tambour chamanique pour les Allemands. Ce n’est pas parce qu’il disait « peuple allemand » voire « race germanique », ni même « espace vital » en soi, qu’Hitler était nazi (tous les animaux sont territoriaux : les oiseaux chantent pour marquer leurs territoires ! leur beau chant signifie aux autres oiseaux : « ceci est mon espace vital, nul autre n’y est souverain que moi » ⸻ lisez les zoologues) ...
Voici, page 435 :
[Du docteur Achille Delmas :] « Résonateur puissant, Hitler a toujours été le "tambour" qu’il se vantait d’être au procès de Munich, et il est toujours resté un tambour. Toutefois, il n’a retenu et utilisé que ce qui, au hasard des circonstances, servait son ambition de conquête du pouvoir, son rêve de domination du monde, et son délire : la sélection biologique de l’homme-Dieu. » [Ils croyaient en la « magie » !]
Mais il y a un autre rêve, un autre délire : changer la vie sur toute la planète. Il s’en ouvre parfois ou plutôt la pensée de derrière [secrète] le déborde, filtre brusquement par une petite ouverture. Il dit à Rauschning : « Notre mouvement est une étape nouvelle, ou plutôt l’étape définitive de l’évolution qui mène à la suppression de l’histoire ... » Ou encore : « Vous ne connaissez rien de moi, mes camarades du parti n’ont aucune idée des songes qui me hantent et de l’édifice grandiose dont les fondations au moins seront établies quand je mourrai ... Il y a un tournant décisif du monde, nous voici à la charnière des temps ... Il y aura un bouleversement de la planète que vous autres, non-initiés, ne pouvez comprendre ... Ce qui se passe, c’est plus que l’avènement d’une nouvelle religion ... »
Ce que nous lisons bien, c’est que le nazisme se veut une sorcellerie digne des bouleversements imposés par la société industrielle artificialiste que nous connaissons, désormais, encore que notre industrialisme ne soit pas raciste, et qu’il laisse brailler l’écologisme pour les bonnes manières tandis qu’il signe des accords de libre-échange à plus soif (le CETA), et que les sénateurs votent contre la protection animale dans ce terrible contexte ... même Hitler, était animaliste. Comme Poutine, d’ailleurs. Et pourtant l’animalisme n’est pas nazi.
La vie, la politique réelle, les humains en bandes organisées, territorialisés, culturalisés, identifiés, coutumiers, etc. ne sont décidément pas manichéens. Le traditionalisme n’est pas un nazisme, et ainsi de suite ! pas plus que le néopaganisme résurgeant vivement en Europe contemporaine. L’estremdrwat n’existe pas, même si le nazisme a existé, et que des néonazis existent. Je témoigne personnellement avoir rencontré en 2013 un jeune Français radicalisé dans les résidences universitaires du CROUS de Pau, la ville de François Bayrou. Ce salafiste solitaire lisait Mein Kampf parce qu’il ⸻ dixit ⸻ « trouvait bien les passages sur les juifs ». Lui ayant fait remarquer sa connerie, il voulut me casser la gueule. Personnellement, je n’ai pas peur des coups, mais combien se conchieraient dans pareille situation ? Que prévoit la délation macronienne, dans ce cas ? ... Des années plus tôt, à Mulhouse (Alsace), un jeune beur de 13 ans, dans une maison de quartier, jugeait bon de me dire que « les Français, ils vont aller en enfer » à cause d’un connard d’imam de quartier. Ayant lu le Coran, j’ai pu lui rétorquer qu’il y était écrit textuellement que seul son dieu est juge. Mais tout cela répond à des pulsions suprémacistes exterminationnistes « magiciennes » : tout cela était nazi, voilà le nazisme contemporain.
Page 430 :
L’hypothèse d’une communauté initiatique, sous-jacente au national-socialisme, s’est imposée peu à peu. Une communauté [...] régie par des dogmes cachés, bien plus élaborés que les doctrines élémentaires de Mein Kampf ou du Mythe du XXème siècle, et servie par des rites dont les traces isolées ne se remarquent pas, mais dont l’existence semble indubitable pour les analystes (et redisons qu’il s’agit de savants et de médecins) de la pathologie nazie. Voilà de l’eau à notre horrible moulin.
Nous ne pensons pas cependant qu’il s’agisse d’une seule société secrète, solidement organisée et ramifiée, ni d’un dogme unique, ni d’un ensemble de rites organiquement constitué. La pluralité et l’incohérence nous semblent, tout au contraire, significatives de cette Allemagne souterraine que nous essayons de décrire. L’unité et la cohésion dans toute démarche, même mystique, paraît indispensable à un Occidental nourri de positivisme et de cartésianisme. Mais nous sommes [paradoxalement] hors de l’Occident [avec le nazisme, donc hors même la révolution conservatrice qui le précéda, puisque soutenue par des intellectuels juifs-même] ; il s’agit plutôt d’un culte multiforme, d’un état de sur-esprit (ou de sous-esprit) absorbant des rites divers, des croyances mal liées entre elles. L’important est d’entretenir un feu secret, une flamme vivante ; tout est bon pour l’alimenter.
Dans cet état d’ame, rien n’est impossible. Les lois naturelles sont suspendues, le monde devient fluide. Des chefs S.S. déclaraient que la Manche est beaucoup moins large que ne l’indiquent les mappemondes. Pour eux, comme pour les sages hindous d’il y a deux mille ans, comme pour l’évêque Berkeley au XVIIIème siècle, l’univers n’était qu’une illusion et sa structure pouvait être modifiée par la pensée active des initiés.
Croire que « chacun sa vérité » n’est pourtant pas spécialement nazi : notre époque est prompte à croire cela, qui s’imagine que chacun n’est que ce qu’il pense être en vérité. Hélas, il y a des réalités, il vaut mieux s’en souvenir.
Tout cela peut servir à expliquer un grand nombre de faits terribles, de manière plus réaliste que celle des historiens conventionnels qui veulent voir uniquement, derrière tant d’actes cruels et déraisonnables, la mégalomanie d’un syphilitique, le sadisme d’une poignée de névrosés, l’obéissance servile d’une foule de lâches.
En somme, ils y croyaient, ils croyaient messianiquement en leur raison d’être, mystifiée. Or, croire en soi et en ses rêves est largement promulgué par le monde de l'entreprise toujours, et pas que de l’entreprise :
« Nous n’avons nullement besoin, dit Hitler, d’une conception du monde cohérente. [Les partisans de la Terre creuse ou non ⸻ que nous vivions à l’intérieur ou à l’extérieur d’une sphère planétaire] peuvent avoir raison l’un et l’autre. »
Ce qui compte, ce n’est pas la cohérence et l’unité de vue, c’est la destruction des systèmes issus de la logique, des modes de pensée rationnelle, c’est le dynamisme mystique et la force explosive de l’intuition. Il y a place, dans les ténèbres étincelantes de l’esprit magique, pour plus d’une étincelle.
Actuellement, le libéralisme de toutes les entreprises nous vend de la creativity à tours de bras, qui enjaille tant la classe aspirationnelle à la Macron (« bobos » et pas que « bobos ») devant les classes plus nourries d’espérances (Gilets jaunes et pas que Gilets jaunes), les « anywhere » devant les « somewhere » (transnationaux devant les nationaux), les « créatifs » devant les « besogneux ». L’imagination n’est pas nazie, mais quand elle prétend abattre toutes les limites, elle semble dépasser les bornes du raisonnable, au risque du nazisme.
Dans cette civilisation [nazie], l’intuition, la mystique, l’illumination poétique, sont placées exactement sur le même plan que la recherche scientifique et la connaissance rationnelle. « Quand j’entends parler de culture, je sors mon revolver », dit Goering. Cette phrase redoutable à deux sens : le littéral, où l’on voit Goering-Ubu casser la tête des intellectuels, et un sens plus profond et aussi plus réellement préjudiciable à ce que nous appelons la culture, où l’on voit Goering tirer des balles explosives qui sont la cosmogonie horbigerienne [de l’univers froid, selon laquelle les astres seraient de glace], la doctrine de la Terre creuse ou la mystique du groupe Thulé [et son aryanisme hyperboréen].
Cela va loin, très loin, puisque des tests de missiles V2 furent arrêtés à l’époque, au cas où leur envoi dans l’atmosphère ferait fondre et s’effondrer la lune sur terre (une consultation de chefs, dont Horbiger) doit d’abord avoir lieu. Ou bien, les nazis s’imaginèrent tellement être le feu éternel contre la glace (selon le même horbigerisme) qu’ils partirent en expédition contre la Russie par -40°C. Le moindre soldat désireux de chier, congelait par l’anus, à cause du délire des chefs.
Page 406 :
Notre esprit refuse d’admettre que l’Allemagne nazie incarnait les concepts d’une civilisation sans rapport [avec notre volonté]. C’est pourtant cela, et rien d’autre, qui justifie cette guerre, une des seules de l’Histoire connue dont l’enjeu ait été réellement essentiel. Il fallait qu’une des deux visions de l’homme, [raisonné ou magique], triomphe . Il n’y avait pas de coexistence possible, alors que l’on imagine volontiers le marxisme et le libéralisme coexistant : ils reposent sur le même fond, ils sont du même univers [raisonneur]. [...]
Ce qui nous gêne, pour admettre cette vision étrange d’une [« magie »] établie en un rien de temps au-delà du Rhin, c’est que nous avons gardé une idée enfantine de la distinction entre le « civilisé » et celui qui ne l’est pas. Il nous faut des casques à plumes, des tamtams, des cases, pour sentir cette distinction [et croire en la magie]. Or, on ferait plus aisément un « civlisé » d’un sorcier bantou qu’on n’aurait relié à notre [raisonnement] Hitler, Horbiger ou Haushoffer. Mais la technique allemande, la science allemande, l’organisation allemande, comparables, sinon supérieures aux nôtres, nous cachaient ce point de vue. La nouveauté formidable de l’Allemagne nazie, c’est que la pensée magique s’est adjoint la science et la technique.
Les intellectuels détracteurs de notre civilisation, tournés vers l’esprit des anciens âges, ont toujours été des ennemis du progrès technique. Par exemple, René Guénon ou Gurdjieff, ou les innombrables hindouistes. mais le nazisme a été le moment où l’esprit de magie s’est emparé des leviers du progrès matériel. Lénine disait que le communisme, c’est le socialisme plus l’électricité. D’une certaine façon, l’hitlérisme, c’était le guénonisme plus les divisions blinduées.
Page 447 :
Himmler vivant, traîné au procès de Nüremberg, qu’eût-il pu dire pour sa défense ? Il n’y avait pas de langage commun avec les membres du jury. Il n’habitait pas [le raisonnement]. Il appartenait tout entier à un autre ordre des choses et de l’esprit [un ordre magique]. C’est un moine combattant d’une autre planète [comparé à ce que nous sommes].
De toute évidence, les nazis ou du moins leurs franges les plus représentatives, se prenaient pour des métahumains : ceux que nous adulons à travers les comics ⸻ les Marvel et autres Ligue des justiciers. Et pourtant, ces comics ne sont pas nazis, combattant régulièrement le nazisme, tels que Captain America ou Wonder Woman. Ils n’en sont pas moins dans un délire nazifiant métahumaniste.
Page 397 :
Nous sommes ici aux bases-mêmes de la pensée hitlérienne. Nous estimons qu’il est regrettable que cette pensée n’ait pas été jusqu’ici analysée de cette façon. On s’est contenté de mettre l’accent sur des aspects extérieurs, sur ses formulations politiques, sur ses formes exotériques.
Mais voici, dès la page suivante, ce que croyait Hitler, véritable new ager occidental, digne des plus grands délires médiumniques de channeling si rentables dans le new age de nos rayons d’ésotérisme en librairie :
Nous sommes en relation magique avec l’univers, mais nous l’avons oublié. La prochaine mutation de la race humaine créera des êtres conscients de cette relation, des hommes-dieux. Déjà cette mutation fait sentir ses effets dans certaines âmes messianiques qui renouent avec le très lointain passé et se souviennent du temps où les géants influençaient le cours des astres.
Installez-vous bien dans votre fauteuil-banquette de cinéma CGR, avec les lunettes 3D, vous en aurez pour votre argent. C’est une vaste science-fiction de fantasy :
Horbiger et ses disciples, on l’a vu, imaginent des époques d’apogée de l’humanité : les époques de lune basse, à la fin du secondaire et à la fin du tertiaire. Quand le satellite menace de s’effondrer sur la terre [car il y en a eu plusieurs dans ce délire, captés par l’orbite terrestre, après chaque crash supplémentaire], quand il tourne à faible distance du globe, les êtres vivants sont au sommet de leur puissance vitale et sans doute de leur puissance spirituelle. Le roi-géant, l’homme-dieu, capte et oriente les forces psychiques de la communauté. Il dirige ce faisceau de radiations de telle sorte que la course des astres soit maintenue et que la catastrophe soit retardée. C’est la fonction essentielle du géant-mage. Dans une certaine mesure, il maintient en place le système solaire. Il gouverne une sorte de centrale d’énergie psychique : c’est là sa royauté. Cette énergie participe de l’énergie cosmique.
Bienvenue dans la Quatrième dimension ... On croirait une secte issue de Woodstock, droguée à overdose. Mais vous souvenez-vous de la fin du monde annoncée au 21 décembre 2012, sur la base du calendrier maya ? Lisez :
Ainsi le calendrier monumental de Tiahuanaco, qui aurait été érigé durant la civilisation des géants, ne serait pas fait pour enregistrer le temps et pour maintenir des mouvements. Il s’agit de prolonger au maximum la période où la lune est à quelques rayons terrestres du globe, et il se pourrait que toute l’activité des hommes, sous la conduite des géants, fût une activité de concentration de l’énergie psychique, afin que soit préservée l’harmonie des choses terrestres et célestes. Les sociétés humaines, animées par les géants, sont des sortes de dynamos. Des forces sont produites par elles, qui vont jouer leur rôle dans l’équilibre des forces universelles. L’homme, et plus particulièrement le géant, l’homme-dieu, est responsable du cosmos tout entier.
Ah ! Humanocentrisme, quand tu nous tiens ! Comme si l’espèce humaine était à la fois le centre, le coeur et le tout de l’univers ! C’est vieux comme le géocentrisme, ou bien l’unithéisme juif, chrétien et musulman si égotiste. L’animal humain, finalité de l’univers ! quelle présomption. Hitler est finalement humain, trop humain. Vous en voulez encore ? C’est digne du titan Atlas macronien, et pourtant Macron n’est pas nazi, non ?
Page 450 :
Ce qu’il faut bien saisir, c’est qu’à partir du moment où toute l’oeuvre de rassemblement et d’excitation du parti hitlérien change de direction, ou plutôt est plus sévèrement orienté dans le sens de la doctrine secrète, plus ou moins bien comprise, plus ou moins bien appliquée, jusqu’ici, par le médium placé aux postes de propagande [le tambour chamanique pour la population], nous ne sommes plus en présence d’un mouvement national et politique. Les thèmes vont, en gros, demeurer les mêmes, mais il ne s’agira plus que du langage exotérique tenu aux foules, d’une description des buts immédiats, derrière lesquels il y a d’autres buts. « Plus rien n’a compté que la poursuite inlassable d’un rêve inouï. Désormais, si Hitler avait eu à sa disposition un peuple pouvant mieux que le peuple allemand servir à l’avènement de sa suprême pensée, il n’eût pas hésité à sacrifier le peuple allemand. » Non point « sa suprême pensée », mais la suprême pensée d’un groupe magique agissant à travers lui. Brasillach reconnaît « qu’il sacrifierait tout le bonheur humain, le sien et celui de son peuple par-dessus le marché, si le mystérieux devoir auquel il obéit le lui commandait. »
« Je vais vous livrer un secret, dit Hitler à Rauschning ; je fonde un ordre. » Il évoque les Burgs où une première initiation aura lieu. Et il ajoute : « C’est de là que sortira le second degré, celui de l’homme mesure et centre du monde, de l’homme-Dieu. L’homme-Dieu, la figure splendide de l’Être, sera comme une image du culte ... Mais il y a encore des degrés dont il ne m’est pas permis de parler ... »
Au passage : l’Être est évoqué, ce qui fera penser à la philosophie ontologique de Martin Heidegger les connaisseurs. Or, le heideggerisme ne partage pas la « magie » nazie, pas plus que son suprémacisme-exterminationnisme auto-sacrificiel. Le heideggerisme n’est pas un nazisme, même si Martin Heidegger se laissa transporter ⸻ comme tant d'autres ⸻ par l'atmosphère d’époque. Personne ne peut dire comme il aurait réagi, Allemand sous Hitler. Arrêtons la germanophobie.
Car un tel dirigeant sacrifiant son peuple, même s’il fera penser à Emmanuel Macron pour certains Gilets jaunes ... un tel dirigeant, évidemment, n’est plus un Allemand. Il est anti-peuple, et pour ainsi dire anti-race germanique, en vérité, puisqu’il pourrait en faire l’holocauste aussi bien que la Shoah. Dès lors, répétons-le, ne soyez plus si germanophobes : « Le modèle allemand », on ne sait pas s’il est adaptable ni efficace pour la France, son peuple, voire la race latine, mais on sait qu’il n’est pas nazi. C’est une certitude.
Autre exemple, chez l’aviateur et écrivain Ernst Jünger, page 458 :
A la date du 14 octobre 1943, Jünger écrit :
« Le soir, visite de Bogo. (Par prudence, Jünger revêt les hauts personnages de pseudonymes. Bogo, c’est Hierscher, comme Knibolo est Hitler.) En une époque si pauvre en forces originales, il m’apparaît comme l’une de mes relations sur qui j’ai le plus réfléchi sans parvenir à me former un jugement. J’ai cru jadis qu’il entrerait dans l’histoire de notre époque comme un de ces personnages peu connus, mais d’une extraordinaire finesse d’esprit. Beaucoup, sinon la plupart des jeunes intellectuels de la génération qui est devenue adulte après la grande guerre [génération révolutionnaire conservatrice], ont été traversés par son influence et sont souvent passés par son école ... Il a confirmé un soupçon que je nourris depuis longtemps, celui qu’il a fondé une Église. Il se situe maintenant au-delà de la dogmatique et s’est déjà avancé très loin dans la liturgie. [...]
« J’ai pu constater chez Bogo un changement fondamental qui me semble caractéristique de toute notre élite : il se rue dans les domaines métaphysiques avec tout l’élan d’une pensée modelée par le rationalisme. Ceci m’avait déjà frappé chez Spengler et compte parmi les présages favorables. On pourrait dire en gros que le XIXème siècle a été un siècle rationnel et que le XXème est celui des cultes. Kniebolo (Hitler) en vit lui-même, d’où la totale incapacité des esprits libéraux à voir seulement le lieu où il se tient. »
En somme, ne cherchez pas à raisonner le nazisme. Si Hitler est incompréhensible, c’est parce qu’il est porté par une mentalité technico-religieuse à laquelle nous nous laissons tous infantilement porter « magiquement » jusqu’à se croire métahumain, suprême, voire potentiellement exterminateur comme les métahumains de nos comics. Le nazisme n’est pas seulement un atavisme, une résurgence des temps passés, mais c’est un modernisme sorcier, et derrière lui toute sa clique ésotériste est du même ordre singulièrement progressiste réactionnaire ! Ce ne sont pas des sadiques, ce sont des rêveurs éveillés. Sans cette lucidité aveuglante, ce feu consumatoire sacrificiel de l’esprit, ils n’auraient jamais osé le génocide, et tant d’autres excursions déphasées.
Ainsi, plus que tout autre chose : en vérité, le nazisme et la Seconde Guerre mondiale ne marquent aucune rupture entre avant 1939 et après 1945. Les êtres humains sont les mêmes. Au fond, pour surréaliste soit le nazisme, le surréalisme n’a pas été inventé par des nazis, et nous sommes tous capables de surréalisme, donc tous quelque chose comme des nazis, avant comme après le nazisme. Nous l’avons tous toujours été, tous autant que nous sommes, à nos manières, quelle que soit notre race ou notre peuple. Et il n’y a pas de quoi en faire un drame, tant que ça ne se veut pas suprémaciste, ni a fortiori exterminationniste.
L’être humain est un animal si « magicien » ! Le commerce ésotériste se porte bien. Et nous communions en cette « magie », malgré toutes nos tentatives de rationalisations, nos îlots de rationalités éparses au coeur des forêts, jungles, mers et steppes sauvages de l’imagination et de la créativité, sans lesquelles nous ne nous émerveillerions ni ne nous effrayerions plus de rien.
Nous avons besoin de ça, pour vivre.
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