Conseil de l’Europe : un Français président de l’AP
Pure coïncidence : un Turc, M. Mevlüt Cavusoglu achève son mandat ; un Français, Jean-Claude Mignon lui succède à la présidence de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE). Aucun rapport avec les relations refroidies entre les deux pays.
Au Conseil de l’Europe, on est scrupuleux, pointilleux : rien ne s’y produit sans mûre réflexion. Et très souvent, avec moult précautions et atermoiements, on y évite tant qu’on peut les avertissements, les réprimandes ou les sanctions. On invite, on incite après avoir dénoncé les manquements.
Un parlementaire expérimenté dans les affaires européennes
Député de Seine-et-Marne depuis 1988 (RPR puis UMP), Jean-Claude Mignon a occupé de nombreuses fonctions importantes dans les Affaires Européennes tant à l’Assemblée N
ationale qu’au Conseil de l’Europe où il appartient à la délégation française depuis 1993. Comme professionnel donc, apprécié pour son sens du compromis en dépit de ses convictions européennes profondément ancrées, il a été élu très facilement pour un an, renouvelable. Il était le seul candidat !
Les priorités annoncées de sa présidence ne pouvaient être que consensuelles : « assurer l’Etat de Droit, la promotion des Droits de l’Homme et la Démocratie (…) faire en sorte que la belle ignorée du bord de l’Ill, quelque peu supplantée par son voisin le Parlement Européen, retrouve sa place des glorieuses années 90 où le Conseil de l’Europe accueillait les Etats d’Europe centrale et orientale. » Bien avant l’UE. Mais il faut préciser que les missions ne sont pas les mêmes, encore que le Conseil ait toujours été considéré comme l’antichambre de l’UE, du moins comme un sas de contrôle des pratiques démocratiques ou de certains principes fondamentaux. Le séjour en antichambre n’a peut-être pas toujours été suffisant.
Bien sûr, hors de ces généralités de bon aloi, trouvant « inacceptable qu’il y ait encore des murs dans cette Europe des 47 », le président Mignon annonce d’autres interventions ambitieuses du COE, relayant les prises de positions antérieures de l’Assemblée pour la cause des femmes, par exemple : avortement sélectif dénoncé, violences, égalité professionnelle…
Un petit cocorico en prime
En fin d’après-midi, le nouveau président a déposé une gerbe au magnifique monument aux morts de la ville (place de la République). La sculpture de Léon-Ernest Drivier (1878-1951) est une Pièta laïque : une mère tient sur ses genoux ses deux fils nus, mourants et qui se donnent la main. Pas d’uniforme pour ces victimes qui ont été obligées de combattre dans des camps différents, comme le leur imposait l’Histoire de leur région (cf photo).
Pourquoi cette démarche inhabituelle, très « française » disons-le, pour la première fois depuis l’existence du Conseil ? Jean-Claude Mignon tient à marquer son engagement acharné pour la paix, mais aussi à rapprocher le Conseil des autorités locales et régionales, civiles et militaires. Ainsi a-t-on pu voir à ses côtés, le préfet de Région et à sa droite un député de gauche, Armand Jung et sur sa gauche le député UMP André Schneider(cf photo). Ajoutons à cette réduction symbolique, tout un aréopage d’officiers généraux (les chefs d’Etat-Major de l’Eurocorps) et des délégués parlementaires de tous pays. On a notamment remarqué, entre autres, la présence du membre très influent de la Douma d’Etat de la CEI de Russie, M. Léonid E. Sloutsky , président du comité pour les Affaires de la CEI… C’est dire ! On peut voir dans ce rapprochement un épisode, vigoureux cette fois, de la préparation du Forum Mondial de La Démocratie qui se tiendra à Strasbourg en octobre prochain ( du 3 au 10). La Ville et la Région devraient se mettre en fête pour la circonstance.
Réjouissante, cette ambiance calme et sereine autour d’un homme, sans aucun doute de haute tenue, n’étaient les divergences peu apparentes au Conseil de l’Europe et qu’on retrouvera, parfois violentes, dans les parlements nationaux. Même les bruits de bottes ne s’entendraient pas sur les moquettes du Palais de l’Europe à Strasbourg. Impensable.
Ah, je crois savoir pourquoi : ici l’âpre lutte électorale n’a pas cours, elle est derrière. Et on travaille.
Antoine Spohr. ( article paru sur Mediapart)
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