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Conte, Salvini, Di Maio : l’improbable triumvirat à la tête de l’Italie

La rencontre entre le président Macron et le président du conseil italien Giuseppe Conte semblait compromise, tant la tension était grande entre Paris et Rome ces derniers jours, suite aux remontrances de la France au gouvernement italien pour son refus d'accueillir un bateau de 600 migrants. Tout a fini par rentrer dans l'ordre et l'entrevue s'est bel et bien tenue à l'Élysée. D'une même voix, les deux homologues ont réaffirmé leur attachement aux principes des Droits de l'Homme et à la solidarité humanitaire dans les limites de nos capacités respectives. L'Italie tiendra-t-elle cette promesse ? On ne peut qu'en douter lorsque l'on se penche sur la composition de l'actuel échiquier politique italien et, plus spécifiquement, de leur gouvernement dont la chaotique arrivée au pouvoir peut augurer de la suite.

Si les élections générales du 4 mars 2018 ont marqué la victoire des "antisystèmes" (l'ultra-dextrogyre Ligue du Nord et l'europhobe Mouvement 5 Etoiles) aucune majorité absolue ne s'en est dégagée et les deux favoris ont été contraints de négocier, laissant l'Italie sans gouvernement durant plus de 88 jours faits de retournements dignes d'un péplum. C'est finalement le 22 mai que Matteo Salvini et Luigi di Maio (chefs respectifs de la Ligue et du M5S) sont parvenus à un accord après d'âpres tractations et ont proposé au président Mattarella de nommer au poste de Président du Conseil un obscur professeur de droit, Giuseppe Conte. La crise aurait pu s'arrêter là s'il ne s'était avéré le lendemain que Conte avait menti sur son curriculum vitae et s'il n'avait eu de vifs désaccords avec Mattarella sur la nomination de certains ministres particulièrement sulfureux. Si les experts ont alors craint une motion de censure ou une dissolution du Parlement, voire la formation d'un gouvernement de technocrates. Mais tout a fini par rentrer le 31 mai par la conclusion d'un nouvel accord entre Salvini, Di Maio, Conte et le président Mattarella. Le gouvernement Conte a été investi le 1er juin.

Il est inutile de dire que le fantoche Conte ne dirige que dalle et qu'il est à la merci de Salvini et Di Maio, respectivement ministres de l'intérieur et du travail. Dénué de toute expérience politique, l'homme de 53 ans n'est encarté dans aucun parti. Et si vous vous demandez comment son nom inconnu a pu faire le consensus… les médias et politologues italiens se le demandent aussi. On suppose qu'il était proche des cadres du Mouvement 5 Etoiles qui l'auraient choisi et soumis leur proposition à la Ligue qui l'aurait acceptée avec joie.

Matteo Salvini, président de la Ligue et ministre de l'Intérieur, est le véritable chef du gouvernement. Sorti sans diplôme après des études en dilettante, c'est dans l'engagement politique qu'il a trouvé sa voie. Membre de la Ligue du Nord depuis 1990, il y a gravi les échelons avant d'en devenir Secrétaire Fédéral en 2012. Cet apparatchik a su redonner son éclat passé à un parti moribond et en proie aux scandales. Si sa campagne essentiellement basée sur la lutte contre l'immigration a séduit un tiers des électeurs italiens, nombreux sont les détracteurs de ses déclarations tonitruantes. Tous s'accordent néanmoins pour dire qu'il est le dirigeant de fait de l'actuel gouvernement. C'est lui, et non Conte, qui avait réclamé les "excuses de la France" après les remontrances de Macron sur le refus d'accueillir les migrants.

Luigi Di Maio est quant à lui le ministre du travail et des politiques sociales. Il a succédé à Beppe Grillo à la tête du M5S qu'il a modernisé en renonçant notamment à la sortie de l'UE et en adoptant un discours gay-friendly. Comme Salvini, il est sorti sans diplôme de l'université. Mais il apparaît comme un stratège hors-pair qui a su s'imposer à seulement trente-et-un ans à la tête de son parti et peser face à ce mastodonte de la politique qu'est la Ligue dont il est un allié de circonstance. Plus "fréquentable" que Salvini, plus charismatique que Conte, de nombreux experts lui prédisent un avenir d'homme d'état.

On peut dire sans exagérer que ce gouvernement est un triumvirat où le pauvre Conte joue le rôle de Lépide tandis que Salvini et Di Maio sont les frères ennemis qui fourbissent leurs armes. Ajoutons que sur dix-huit ministres, il n'y a que cinq femmes cantonnées à des postes secondaires et dénuées de toute expérience politique. Enfin, s'il y a de jeunes ministres comme Di Maio et Fraccaro, il y a aussi ceux qui semblent provenir d'une autre époque, à l'instar de Paolo Savona, le ministre des Affaires Européennes âgé de 82 ans, qui a déjà occupé le poste de ministre dans le gouvernement Ciampi entre 1993 et 1994… Imaginez Balladur revenir au pouvoir.

Cette alliance "jaune-verte" (des couleurs des deux partis) semble dès le départ vouée à l'échec. La Ligue du Nord (désormais simplement appelée "Ligue") est divisée entre le canal historique (régionaliste et libéral) et les salviniens conservateurs et populistes. La M5S fait également face à des dissensions notamment sur la question de la sortie de l'UE ou de l'immigration. En outre, ces deux partis, alliés de circonstance, ne s'apprécient guère : pour les antisystèmes du M5S, la Ligue est un parti d'apparatchiks fortunés et peu honnêtes, tandis que les ligueurs considèrent le M5S comme du vulgaires criailleurs plébéiens. Si le Président du Conseil Giuseppe Conte s'est dit déterminé à poursuivre une politique européenne et humaniste, on peut légitiemement avoir des doutes sur la pérennité de son gouvernement qui n'est pas tant menacé par Bruxelles que par ses propres querelles intestines.


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11 réactions à cet article    


  • Olivier Perriet Olivier Perriet 16 juin 2018 11:57
    On peut toujours tout critiquer, certes.

    Cela dit, ceux qui ont le courage de prendre leurs responsabilités et de gouverner sont toujours, à mon avis, plus respectables, que ceux qui préfèrent dérouler un programme parfait en restant dans l’opposition.

    • mmbbb 17 juin 2018 09:58

      @Olivier Perriet est que tu sais que les Elus de paris vont construire un « mur en verre » afin de proteger la tour Eiffel . Tous ces « droits de l hommiste » tant attachés a la liberte , ces gens la qui ont horruer des frontieres et qui vont devoir a terme creer des mur physique et aussi numlerique camera logiciel de surveillance etc etc J ai fais des reserve de bougies parce que des attentats il y en aura encore Peut etre qu un jour un membre de ta famille sera touche , j ai des bougies en reserve des cartons entiers et un abonnement chez mon fleuriste , je te repondrai pas de haine ! 


    • Cateaufoncel2 16 juin 2018 14:20
      "...on peut légitiemement avoir des doutes sur la pérennité de son gouvernement qui n’est pas tant menacé par Bruxelles que par ses propres querelles intestines."

      Telle est l’opinion de Nicolas Kirkitadze.

      Voici celle de Massimo Cacciari, philosophe, maire de Venise de 1993 à 2000 et de 2005 à 2010, répondant à la question Combien de temps durera le gouvernement ?  :

      - Longtemps, parce qu’il n’y a pas d’opposition. Salvini du point de vue politique a, jusqu’à présent, été extraordinaire et il s’est vraiment montré à la hauteur. Même si je déteste bien des choses qu’il dit et qu’il fait, il s’est montré d’une grande habileté. Salvini est un petit Machiavel. (affaritaliani.it - 15.06.18)

      On est bien avancé...


      • izarn izarn 16 juin 2018 14:43

        @Cateaufoncel2
        Matarella, un ancien du Bilderberg a essayé de faire voler en éclat l’alliance, et cela n’a pas fonctionné.
        Donc l’alliance est assez solide. Et surtout a un super poids éléctoral...
        Au niveau des diplomes, il faudrait demander ceux de Junker et de Merkel, merci...
        Ils en ont peut-etre, mais leurs valeurs, hein ?????  smiley
        Et bien sur, ceux de Trump !
         smiley
        Et puis nous le savons ; les populistes sont des crétins, comme le peuple !
        Ben voyons !
         smiley


      • Cateaufoncel2 16 juin 2018 22:13

        @izarn

        « Matarella, un ancien du Bilderberg... »


        Je ne crois pas que ce soit déterminant, car on peut dire qu’ils sont tous du Bilderberg d’une manière ou d’une autre. C’est un sérail, une mafia, les démocrates de l’alternance - un coup à toi, un coup à moi ! - qui se voyaient au pouvoir pour des siècles, dans toute l’Europe de l’Ouest. 

        Mais la roue tourne et ce sont les peuples, usant du peu de pouvoir qui leur reste, qui la font tourner. « Grâce aux migrants », dont ils ne veulent plus. En Italie, un sondage de l’institut SWG vient de révéler que 64 % des Italiens souhaitent un blocus complet des ports de départ des embarcations de fortune.



      • foufouille foufouille 16 juin 2018 15:54
        ils ont eu raison de refuser ce bateau de faux réfugiés récupéré très proche de la lybie.


        • Olivier Perriet Olivier Perriet 17 juin 2018 09:32

          @foufouille


          La méditerranée est une zone de non droit où des « ONG » et des mafias font la loi.

          La France a eu « le courage » de bombarder Khadafi mais ne peut pas faire la police maritime ? Comme c’est loin on s’en fout...

        • pallas 16 juin 2018 20:39
          Nicolas Kirkitadze

          Bonsoir,

          La France est finie, bon nombres d’individus en paie le prix, plus qui n’en faut.

          Un vengeance aveugle n’est pas la justice, elle n’est que le recommencement d’une nouvelle tragédie.

          Ce devoir est le miens et non le votre, chacun son rôle.

          Vous avez une vie, des gens qui vous aiment, moi je ne connais que les tenebres.

          Vivez votre existence, pour le reste, vous n’êtes pas « Atlas », uniquement un humain.

          Ma conscience est seul suffisante pour juger autrui jeune homme.

           smiley

          Salut

          • beo111 beo111 17 juin 2018 10:45

            D’après RT l’Italie ne ratifiera pas le CETA. Si c’est le cas ce gouvernement aura au moins fait quelque chose d’utile.


            • popov 17 juin 2018 12:49

              Ceux qui sont scandalisé par le refus de l’Italie d’accueillir un bateau rempli d’envahisseur pourraient-ils expliquer ce qu’il y a de scandaleux à ce qu’un pays décide qui peut y entrer ou pas ?


              • Phalanx Phalanx 18 juin 2018 20:19

                « Ajoutons que sur dix-huit ministres, il n’y a que cinq femmes »


                Au mon Dieu ! pas de quotas sexuels ou raciaux ?!! 

                Ne me dites pas que des ministres ont été nommés selon leurs compétences ! C’est terrifiant !

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