Crise de la dette : et si c’était à Angela de quitter l’Europe ?
Merkel et Hollande ont décidé, au soir du 23 août 2012, de resserrer encore un peu plusl’éteau qui écrase la Grèce.Comme on s’y attendait, leur justification est toujours la même : le peuple grec doit s’acquitter de sa dette, coûte que coûte, vaille que vaille. Cette obsession aveugle de rembourser une dette impayable, même au prix d’efforts surhumains nous interroge nécessairement A gauche pour de vrai !

Car cet aveuglement devient suspect tellement il n’obéit à aucune réalité, tellement il empêche de voir que les efforts exigés sont tout simplement impossibles à tenir. Pourquoi donc un tel aveuglement quasi autiste en regard de la réalité de ce qui est véritablement possible, principalement en provenance de l’Allemagne, moteur de la cécité du couple Merkel/Sarkozy hier, Merkel/Hollande aujourd’hui ?
L’obligation de rembourser une dette impayable est un traumatisme qui vient de loin pour l’Allemagne. Au sortir de la première guerre mondiale, le traité de Versailles est, sans nul doute, impitoyable à l’égard des Allemands. Ce traité oblige l’Allemagne à l’égard de ses vainqueurs pour des décénies entières. Cette obligation, comme chacun le sait, prend la forme d’un paiement de plus de 132 milliards de Marks-or en réparation des dommages de guerre. C’est ainsi que toute l’économie allemande s’organise alors autour d’une dette vertigineuse, effrayante et indomptable. A tel point qu’il lui faudra finalement pratiquement un siècle entier pour en venir à bout, puisque le dernier remboursement n’interviendra qu’en 2010. Il aura donc fallut à l’Allemagne pour se sortir de son fardeau versaillais et de la pression de ses créanciers connaître le nazisme, une effroyable fracture qui s’en est suivie et qui s’est matérialisée par un non moins effroyable mur de Berlin, une réunification de tous les dangers, et pour finir l’obtention d’une monnaie unique souhaitée par Khol. Il aura donc fallut un siècle entier de turpitudes pour venir à bout d’une dette qui, reconnaissons le, n’avait rien de légitime à l’égard du peuple allemand, qui n’avait d’autre arrière pensée que la vengeance et le secret espoir d’en finir avec l’Allemagne en la réduisant à l’esclavage économique. Un siècle entier donc pour rembourser une dette impayable.
Ce traumatisme Angela Merkel l’a vécu, l’a subit, l’a supporté tout au long de sa vie d’enfant, d’adolescente, d’adulte. Elle n’a que 3 mois en 1954 lorsque son père, pasteur, obtient un poste en RDA. C’est donc en RDA qu’elle ira à l’école, puis à l’université où elle deviendra docteur en chimie. Surtout, c’est en RDA qu’elle entendra parler des deux Allemagnes, à travers une mère interdite d’exercer son métier d’institutrice car originaire de la RFA, à travers un père religieux dans un pays où la religion est surveillée de très très près. Angela est une enfant des deux guerres, qui ne les a pourtant jamais vécu, mais qui, comme des millions d’Allemands, en a payé un prix exorbitant.
Rien d’étonnant alors à ce que Angela rejoigne dès la réunification les libéraux conservateurs, ceux-là mêmes qui crient la victoire du capitalisme sur un socialisme “forcément” totalitaire, ceux-là mêmes qui prônent l’hégémonie des marchés sur la planification économique “forcément” pernicieuse, ceux-là mêmes qui décrient les politiques de relance “forcément” créatrices de dettes en faveur d’un monétarisme déflationniste “forcément” économe comme autant de signes symptomatiques d’un malade allergique à une dette qui serait “forcément” dévastatrice.
Mais Angela et avec elle tous les libéraux allemands se trompent de cible. Le causeur de crise n’est pas la dette elle même, et encore moins les pays endettés, mais bel et bien les faiseurs de dettes injustes et impayables, hier comme aujourd’hui. Et hier comme aujourd’hui les faiseurs de dettes ont été et sont les spéculateurs financiers. Et hier comme aujourd’hui les spéculateurs ont préféré et préfèrent spéculer sur les difficultés des états, au premier rang desquels l’Allemagne en 1933 en raison de sa dette de 1919. Hier, les spéculateurs et faiseurs d’argent boursier ont préféré les fascismes et leur rigueur autoritaire pour étrangler les syndicats et les opposants à l’austérité économique. Car l’austérité économique est la condition indispensable au règne de la spéculation sur les états. Aujourd’hui ils s’attaquent à Athènes, à Madrid, à Rome, à Lisbonne, favorisant ainsi la montée de toutes les extrêmes droites en Europe, érigeant même la menace d’un nouveau mur de Berlin entre l’Europe du nord et l’Europe du sud.
Angela est-elle, par conséquent, la mieux placée pour décider du sort de l’Europe ? Mieux que personne elle devrait savoir que l’obligation de payer une dette illégitime dans son ampleur, impayable dans la pratique rend possible toutes les obscurités, toutes les catastrophes politiques et humaines. Sauf qu’Angela ne raisonne pas, elle réagit. Sauf qu’Angela n’est pas dans la compréhension des faits de l’histoire mais dans la réaction, une réaction idéologique et dogmatique :
- aux conséquences d’un traité de Versailles qui a plongé l’Allemagne dans une dette de cent ans,
- à une RDA qui se prétendait socialiste mais qui était totalitaire et anti-démocratique, donc l’inverse du socialisme. Mais Angela, comme des millions et des millions avec elle n’a retenu que l’appellation d’un régime ignoble et continue de confondre le régime d’Erich Honecker et la pensée socialiste.
Alors Angela épouse le libéralisme, ce conjoint qui lui promet de la protéger contre les méfaits de la dette et de ses conséquences en usant des charmes d’un capitalisme forcément vertueux à l’inverse d’un socialisme forcément totalitaire, grâce à l’intervention d’une main invisible quasi divine. Cette ancienne victimede la RDA, fille de pasteur, à la tête de l’Union Chrétienne Démocrate ne peut pas résister à la tirade du beau charmeur capital. Mais c’est une Angela aveuglée par les ravages d’une dette centenaire et traumatisée par les saccages d’un régime totalitaire qui préside finalement aux destinées de l’Europe. Est-ce bien raisonnable ?
Le peuple d’Allemagne, lui, montre des signes de rejet à l’égard de sa chancelière et de son aveuglement traumatique. Comme lors du 1er mai dernier où les salariés allemands défilaient en revendiquant des augmentations de salaires importantes, éreintés qu’ils sont par des années d’austérité, contraints d’accepter n’importe quel job même à 1 euro lorsqu’ils sont au chômage. Depuis, c’est par dizaines de milliers qu’ils refusent la rigueur, qu’ils refusent une Allemagne traumatisée et réactionnaire. Et ils le font également savoir dans les urnes. Angela, chancelière d’une Allemagne libérale et conservatrice se heurte à ses citoyens de plus en plus progressistes. Ainsi, les trois quarts des Allemands n’adhèrent plus à l’idéologie dogmatique de leur Angela aveugle et traumatisée.
L’Europe n’a pas besoin d’une Allemagne libérale hégémonique mais de l’adhésion de ses peuples ! Car partout où l’Europe préfère “gérer” une dette injuste et en définitive fictive, le peuple divorce d’avec elle. En Grèce, où la colère et le rejet de l’Allemagne s’installent. L’Europe peut-elle vivre en paix lorsque ses citoyens en viennent à se haïr ? En Espagne, où les jeunes fuient leur pays après leurs études car sans perspective d’emploi. Et de quel avenir peut bien rêver un pays qui repoussent plus qu’il n’attire ses jeunes ? En Italie, où lesystème bancaire vascille, au point de faire trembler ses gouvernements qui ne sont même plus démocratiquement élus mais nommés sous la pressions de Bruxelles. Ce glissement anti-démocratique en Europe ne vous rappelle rien ? Or, sans l’adhésion des peuples un territoire n’est rien et sombre dans le chaos ! En définitive la crise s’achèvera lorsque les dirigeants européens gouverneront pour les peuples et non pour les marchés. Lorsqu’ils gouverneront pour la croissance et non pour l’austérité qui ne fait que mécaniquement et infailliblement accroître une dette source de toutes les peurs. Et le seul moyen pour que les gouvernants européens changent d’avis sur la dette et l’austérité c’est de changer de gouvernants par les urnes. A travers une révolution idéologique et citoyenne. La prochaine échéance est désormais fixée en 2013, quelque part du côté de Berlin, histoire qu’Angela quitte enfin ses fonctions de chancelière de l’Europe.
Sydne93
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