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Boris Berezovsky, un roman russe

Le sulfureux Boris Berezovky vient de trouver la mort à l’âge de soixante-sept ans. L’occasion de revenir sur cet intriguant haut en couleur.

Ce que ne comprennent pas les pseudo-intellectuels comme BHL est que la Russie, à l’instar de la Chine post-maoïste, a toujours été dirigée de manière empirique et que le rapport à la notion de démocratie commence tout juste à se murmurer. À la chute de l’URSS, les pays occidentaux, qui plaçaient Gorbatchev haut dans leur estime, ont fait l’erreur de céder aux intérêts américains. Loin s’en faut l’URSS incarnait l’absurde tant par les répressions d’opposants politiques déclarés et de pauvres quidams tout court, que par sa propagande destinée à camoufler les failles d’un système devant imploser un jour ou l’autre. Mais l’U.E n’a aucune excuse en ce qui concerne les lendemains des nations Bielorusses, Moldaves, Ukrainiennes et Russes. Pas plus qu’elle n’en a vis-à-vis des peuples de l’ex-Yougloslavie si chère à Tito (que maints Bosniaques, Croates, Monténégrins, Kosovars, et Serbes, regrettent). Au contraire, on a préféré tenir ces pays à distance et – comble de l’absurde – accorder une autorité très importante à l’Angleterre pays satellitaire des USA qui a toujours dans son histoire essayer de saboter l’espace européen et les souverainetés qui vont avec (ne pas confondre l’Europe géographique et géopolitique avec l’espèce de machin absurde située à Bruxelles).

On ne vend pas la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Au lendemain de l’effondrement, les Russes vont connaître une nouvelle période absurde. Imaginez une seconde que d’un système capitaliste d’état soi-disant abolitionniste en matière de catégorie professionnelle au nom d’un égalitarisme absurde (a.k.a Communisme) vous passez à un système capitaliste ultra-individualiste sans foi ni loi (a.k.a ultralibéralisme). Nous ne sommes pas dans la Cerisaie de Tchekov, mais bel et bien dans la pire des pièces théâtrales : la réalité. La perestroïka, quoi !

Dans cette ère de trouble émergera une nouvelle classe, celle des Nouveaux Russes. Le terme désigne des hommes d’affaires, nouveaux riches bien sur, qui deviendront les modèles succédant au prolétaire soviétique. En Occident, nous les appelons « Oligarques Russes ». Nous connaissons plus ou moins Roman Abramovitch actuel propriétaire du Chelsea F.C, Arkadi Gaydamak à la fois connaissance de Charles Pasqua et de l’inénarrable Gilles-William Goldnadel et propriétaire du Betar Jérusalem dont certains supporters font passer les tiffosis de la Lazio de Rome pour des hippies, Mikhail Khodorkovski, ou encore Vladimir Potanin, Oleg Derispaka, et Mikhail Prokorov.

Boris Berezovsky est à la base diplômé en sylviculture et mathématiques appliqués, mais fera fortune pendant la perestroïka via de fausses importations de voitures et en vendant sur place – il sera tour à tour expert en management d’AvtoVAZ (Lada) puis président de LogoVaz distributeur exclusif d’AvtoVaz, avant de revendre sa compagnie à une société suisse et de créer quelques compagnies financières basées aux Îles Caïmans. Secret de polichinelle tout industriel à cette époque est victime de racket, mais lui il ira plus loin en prenant part au règlement de comptes entre gangs et manquera de se faire assassiner à plusieurs reprises.

Lancé, Berezovsky va pouvoir s’introduire auprès de Boris Eltsine. L’objectif est d’acquérir des parts de marché dans des entreprises d’état privatisées. Aeroflot, qu’il pillera par société écrans interposés en payant des cacahuètes (un rien par rapport à sa valeur réelle) et en recourant aux services d’une banque pour financer les opérations (ça c’est de la gestion d’entreprise !). La volonté de puissance de Berezovsky ne s’arrête pas là. Il deviendra actionnaire majoritaire de la chaîne ORT et de quotidiens (Novaïa Gazeta entre autres) qui assurent officiellement un « soutien total » à un chef d’état qui ne tardera pas à révéler son penchant pour l’alcool et certaines pitreries (voir celle de 0’59)…Pendant que l’immense majorité des Russes crève la dalle et doivent compter sur eux-mêmes.

Voir : http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=xMThTEA4M0o

En réalité, « ils tirent les ficelles ». Berezovsky en tant que chef de Sibneft qui deviendra Gazprom par la suite, Khodorkovski par l’entremise de Menatep, Mikhail Fridman pour Alfa Group, Goussinski pour Media Group, Potanin par la banque UNAXIM, Aleksander Smolansky pour Stolichmy, et Vinogradov pour Inkombank. On les surnommeraSemibankirchtchina, ce qui signifie Groupe des Sept Banquiers. Ils seront aux commandes du pays. Berezovsky himself décidera de nommer Sergueï Kierenko premier ministre (c’est comme si chez nous le PDG d’un groupe important ou d’un lobby s’amusait à nommer les ministres, (in)concevable, n’est-ce pas !). Avec la bénédiction de la fille de Boris Eltsine, Tatiana Diatchenko, il fera tout ce que bon lui semble. Ainsi, quand une nouvelle crise économique frappera la Fédération de Russie et que son nom figurera en tête de liste des personnalités impopulaires, il expliquera ça, indécemment s’il-vous-plaît, par « L’antisémitisme des Russes ». Culotté, Berezovsly avouera tête haute être parvenus à faire destituer des Premier Ministres, et il ira même jusqu’à se faire élire à la Douma (équivalent de l’Assemblée Nationale) pour représenter une circonscription dont il se fout complètement.

Plus grave encore, alors qu’il exerçait successivement des fonctions de conseiller national à la sécurité pendant la première guerre de Tchétchénie (1996), il aurait plus ou moins cultivé des liens étroits avec la branche Tchétchène de la Mafia Russe et serait à l’origine de l’industrie du kidnapping selon le « très droit-de-l-hommiste » Ramzan Kadyrov. L’islamiste Chamil Bassaeïv reconnaîtra avoir été en contact avec lui et avoir reçu un pactole pour organiser les actions qu’on lui connaît…Bah oui c’était un interlocuteur incontournable ! On sait également que Berezovsky aurait provoqué la première guerre de Tchétchénie pour l’acquisition d’un oléoduc, au mépris des pertes humaines qu’on connues les deux camps. Un journaliste américain, Paul Klebnikov, connaîtra un destin similaire à Anna Poulitovskaïa pour avoir « retracé » la carrière mafieuse du Sulfureux Boris (mais pas grand monde n’en parle, peut-être parce que dans l’imaginaire des médias occidentaux il n’est pas possible de concevoir que certains opposants au Régime Poutinien sont de belles ordures).

L’orgueil est le plus mauvais des alliés. Eltsine affaibli, Berezovski pensera instrumentaliser un certain Vladimir Poutine, alors inconnu du public. Poutine, ex-agent du KGB qui a les dents longues, sera à l’origine de la chûte de Berezovski et provoquera son exil en Angleterre. Le tout sous l’étiquette « Opposant Politique » à une dictature. Les autres membres des Sept Banquiers perdront de l’influence, un partira en exil car Personae non gratae (Goussinski), un est en prison après suppression des biens (Khodorkovski). Comme par hasard Abrahamovitch a l’estime de Poutine depuis qu’il s’est inféodé à ce dernier – à l’instar de certains autres oligarques, et ça marche, c’est magique, ils n’ont aucun problème.

N’en déplaise à certains dissidents (ils se reconnaitront…) : Poutine est aussi dans les jolis papiers de l’extrême-droite israélienne ultra-libérale.

Berezovski, en exil, bénéficiera d’un semblant de protection britannique. Il essaiera d’exister médiatiquement en annonçant plusieurs fois soit de tenter son retour en Russie, soit d’essayer de faire renverser Poutine par un coup d’état. Il essaiera de nuire à son ex-ami Abrahamovitch en portant plainte contre lui suite à la revente de Sibneft. Il finance la Révolution Orange en Ukraine. La justice Brésilienne lancera contre lui un mandat d’arrêt pour blanchiment d’argent. Et, pour finir, Cocorico, il est connu de nos service de police pour blanchiment d’argent sale et pour avoir acquis des propriétés par des moyens douteux.

Comble du comble : deux mois avant sa mort il aurait écrit une lettre de pardon à…Vladimir Poutine. Pas sur que les Russes lui pardonnent.

Voir : http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=aiLYhXBurcw

 
Florian,
 
Pour le Cercle des Volontaires
 

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4 réactions à cet article    


  • Cercle des Volontaires Cercle des Volontaires 26 mars 2013 09:41

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    • Al West 26 mars 2013 10:14

      Bonjour,

      Je ne suis pas certain d’avoir compris le sens de cette phrase :

      « Poutine est aussi dans les jolis papiers de l’extrême-droite israélienne ultra-libérale. »

      Pourriez-vous développer ?

      MercI.


      • Maurice Maurice 26 mars 2013 19:44

        Oui moi aussi, qui fait parti du CDV, j’aimerai avoir un peu plus de précision sur ça. Flo où est-tu ?


      • leypanou 26 mars 2013 11:26

        " mais pas grand monde n’en parle, peut-être parce que dans l’imaginaire des médias occidentaux il n’est pas possible de concevoir que certains opposants au Régime Poutinien sont de belles ordures " : c’est normal, sur les médias français, on n’entend que ces voix-là -ou presque-, les autres n’étant pas dignes d’intérêt.

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