Costa Rica : une démocratie en deuil
- Deputée Carmen Granados agressée
- 8 novembre 2012, manifestation contre la privatisation de la Sécurité Sociale
Depuis la France, le Costa Rica n’est qu’un petit pays dont personne n’est très sûr où le situer. Pas plus tard que cette semaine, quelqu'un m’a encore demandé : « Où est le Costa Rica ? » Je lui ai répondu : « Voyez-vous où se trouve le Mexique, et le Panama avec son canal ? Et bien, le Costa Rica est entre le Mexique et le Panama ».
Peu connu en Europe, peut être seulement par quelques touristes aisés, le Costa Rica est avant tout une destination de rêve pour passer des vacances inoubliables sur des plages tropicales exotiques, forêts et jungles habitées par des milliers d’espèces différentes d’animaux, plantes de toutes sortes aux couleurs chatoyantes, volcans actifs, montagnes et rivières, le tout dans un concentré de 5% de la biodiversité de la planète en seulement 51.100 km2, un dixième de la France.
Mais le Costa Rica est aussi une République avec 4 millions d’habitants, au bon milieu de l’Amérique Centrale. Une République avec séparation de pouvoirs et un système démocratique de plus de 100 ans malgré tous les régimes dictatoriaux, guerres civiles et coups d’Etat qu’ont caractérisé durant tout le siècle dernier les pays voisins : Honduras, Guatemala, Le Salvador, Nicaragua et Panama.
Le peuple costaricien est relativement éduqué. Accoutumé à un certain confort de vie, grâce à la présence d’un État progressiste qui pendant les années de 1950 à 1980 a investit en politiques sociales et économiques le budget auparavant dédié à l’armée, laquelle a été abolie en 1948.
Ces politiques ont réussit à rendre universel l’accès à l’éducation, la sécurité sociale, l’électricité, l’eau potable ainsi que l’accès à la propriété en milieu urbain et rural. Des politiques qui ont permis la naissance d’une large classe moyenne, support et garante de la cohésion sociale et du vivre en semble.
Mais ce petit paradis, a vu aussi passer ses « trente glorieuses ». Depuis 1980 l’État devenu libéral a diminué radicalement l’investissement en infrastructures, le réseau routier est une véritable catastrophe, les ponts, les bâtiments publics, reçoivent aucun ou très peu d’entretien depuis 30 ans. Les hôpitaux publics font pitié ainsi que les écoles, collèges et lycées qui ne reçoivent les élèves que pour une demi-journée la plus part du temps.
Ne parlons même pas des structures d’accueil pour la petite enfance pratiquement inexistantes, obligeant la femme costaricienne à rester chez elle pour s’occuper des enfants, personnes âgées et malades.
Des bidonvilles « tugurios » se sont développés autour de la vallée centrale où se trouve la capitale San José qui avec trois autres provinces Heredia, Cartago et Alajuela concentrent 60% de la population du pays.
Territoire de passage de flore, faune et populations aborigènes entre le sur et le nord du continent américain avant la conquête espagnole, le Costa Rica continue de nos jours à être un lieu de passage facile cette fois pour les cartels de la drogue vers le Mexique puis les Etats Unis.
Pendant trente ans, les « ticos » n’ont pas vu venir le déclin social, toujours fiers de se comparer au reste des centroaméricains, pauvres et analphabètes à 70% de leurs populations, sans sécurité sociale ni services publics. Oh ! Combien ils aiment les costariciens se faire appeler la Suisse Centroaméricaine.
Lamentablement, de cette « Suisse » centroaméricaine, il ne reste que les montagnes et encore… très déboisées.
- Non à la Violence de la Police
- 15 novembre 2012, manifestation contre la violence et la répression de la police, suite aux agressions contre de manifestants le 08/11/12
Mais les costariciens rêvent de ce pays perdu et ne savent comment obliger leurs dirigeants politiques à faire marche arrière. Ils ont commencé à se réveiller mais un peu tard, puisque maintenant tous les services publics importants ont été privatisés, la meilleure éducation et santé sont désormais privées. Au Costa Rica, les personnes sont soignées selon la tête du client et la grosseur du portefeuille.
Des marches et manifestations sont souvent organisées par les étudiants des universités publiques et les fonctionnaires, uniques à être syndiqués. Mais petit à petit d’autres groupes se sont associés : paysans, ouvriers agricoles, comités civiques et patriotiques, associations de développement local, mouvement gays, féministes, qui descendent dans la rue pour exiger la reconnaissance de leurs droits mais surtout le rétablissement de l’Etat Social.
Chaque fois les manifestants ont le droit de se faire tabasser par la police, peu importe le lieu et les revendications. La répression et la violence rarement déployées au Costa Rica deviennent la règle depuis 2 ans.
Le 8 novembre dernière ce fut le pompon, deux députés d’opposition dont une femme, ont essayé de calmer les esprits durant une manifestation pacifique contre la privatisation de la sécurité sociale, qui tournait au vinaigre, car la police avait débarqué en force et commencé à réprimer les manifestants.
Sans aucun respect des valeurs et des symboles de la République, des policiers ont mit à terre a la députée et quand sont collègue a voulu la défendre, lui aussi a été violemment agressé.
Tous les manifestants ont été dispersés à coup de matraque et le Ministre de l’Intérieur n’a pas trouvé mieux pour justifier la bavure que de dire que personne n’est au-dessus de la loi, il devait à tout prix rendre la droit au libre transit des citoyens, car les députés et les manifestant empêchaient les voitures de passer.
Voilà la démocratie de la « suisse centroaméricaine » bafouée, dénigrée, piétinée et ravagée a simple caricature d’Ananas République.
Mais la saga continue, je vous tiendrai au courant.
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