Des soldats français vont donner leur vie pour rien au Liban !
La France est un des pays les plus mal placés pour s’engager en force au Liban, et qui plus est, pour prendre peut-être le commandement de la FINUL.

Dans sa communication télévisée, le président de la République annonce que la France va envoyer 1600 hommes (deux bataillons) en plus des 400 déjà déployés au Liban, et propose à nouveau de prendre le commandement de la FINUL.
La France a obtenu des garanties concernant l’engagement de ses soldats, et des assurances d’Israël et du Liban, annonce le président : il est évident que ces prétendues garanties et assurances sont illusoires. La clause, de très loin la plus difficile à faire respecter dans la résolution 1701, est le désarmement du Hezbollah : or, cette milice n’a nullement l’intention de rendre les armes et l’a annoncé bien fort. Le principal accord que la France devait exiger avant d’engager ses soldats aurait dû être celui du Hezbollah... et non celui du Liban, qui n’a aucune possibilité de contraindre cette milice à respecter la résolution de l’ONU. Le président affirme qu’il appartiendra à l’armée libanaise de réaliser cette impossible mission. Un seul commentaire : une telle affirmation n’est ni sérieuse, ni responsable.
Israël a donné son accord à la participation française (ajoute le président) et pour cause ! Bien que considérant depuis fort longtemps que notre pays est trop favorable aux Arabes, Israël, par la voix de ses diplomates, a fait savoir que nos brillants soldats étaient les plus aptes à désarmer le Hezbollah. Le piége est évident : l’échec étant certain, Israël pourra s’en prévaloir pour reprendre sa liberté d’action, critiquer un des plus fervents soutiens du Liban et marginaliser notre pays... qui, pour sauver la face, ira quémander l’aide de la Syrie ironique et revancharde, et celle de l’Iran dont on célébrera le rôle de stabilisateur au Moyen-Orient.
Mais le président nous rassure en annonçant que la France, toujours la France, a obtenu des règles d’engagement suffisamment claires pour rendre la FINUL "réactive" : cette force sera composée d’unités disparates, de multiples nationalités, aux motivations parfois antinomiques, avec un degré d’entraînement inégal. Elle aura à exécuter des ordres transmis par l’ONU dont on connaît depuis toujours la capacité à décider rapidement, à donner des directives claires et à en assumer la responsabilité en cas d’échec : un général, quel qu’ il soit, ne pourra réellement diriger un tel ensemble hétéroclite dans l’accomplissement de missions aussi délicates... Et s’il est français, il sera d’autant plus critiqué que notre pays s’est voulu le plus engagé, le plus perspicace, le plus capable de dénouer cette crise... comme d’habitude.
Les soldats français joueront leur vie au Liban, sans même savoir pourquoi, otages de tous les terrorismes, celui islamique du Hezbollah pour qui la vie n’a aucun prix, celui "d’Etat" d’Israël pour lequel sa propre défense justifie tous les tragiques excès, ceux de la Syrie et de l’Iran qui commanditent ces affrontements sanglants, en dehors de leur territoire, pour leurs seuls intérêts, otages aussi des divisions libanaises et du désintéressement ou de la partialité des grandes puissances.
Mais alors, fallait-il rester en dehors de la FINUL ? Certes pas, mais il eût été raisonnable, responsable, de ne pas vouloir jouer au leader en proposant de conserver le commandement de cette FINUL et en engageant un fort contingent comprenant des éléments de combat : une participation avec des éléments du génie, du corps médical, des modules logistiques aurait été plus adaptée à cette situation qui voit la France contestée, pour des raisons diverses, par Israël, le Hezbollah, la Syrie, l’Iran, regardée avec une certaine ironie par nos alliés, attendue avec trop d’espoir par nombre de Libanais.
En 1991, le président de l’époque constatait avec amertume que sa popularité était bien basse, pour un homme de son envergure, et cet homme, oh combien pacifiste, décida brusquement de s’engager contre l’Irak à la remorque des Américains et sur le flanc gauche, loin du centre d’intérêt de l’action principale : dans sa peau de commandant en chef, notre président, très connaisseur du peuple français, retrouva sa faveur et s’envola dans les sondages... Pourrait-on imaginer que l’histoire se répète aujourd’hui ? Il appartient aux lecteurs de donner leur avis...
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