Donald Trump a-t-il vraiment un plan dans cette guerre commerciale ?
Historiquement, l’augmentation des droits de douane s’est toujours retourné contre les Etats-Unis. Est ce que cette fois ci, l’administration Trump arrivera à faire mentir l’histoire ?
La guerre commerciale dans laquelle s’est engagé l’administration américaine marque les esprits par l'agressivité des mesures protectionnistes mais ce n’est pas la première fois que les Etats-Unis utilisent des droits de douane punitifs. Trump aurait il un plan pour remporter cette guerre commerciale qu’il juge “facile” ?
Lors de la présidence d’Obama, le droit de douane sur les importations de pneus chinois est passé à 35%. La mesure a eu l’effet contraire, au lieu de doper l’économie américaine, 3 700 personnes ont perdu leurs emplois.
La montée en puissance de l’empire du milieu
Il y’a encore peu de temps, l’hégémonie américaine ne pouvait être contestée. Mais ça c’était avant, la Chine a rattrapé son retard en devenant l’atelier du monde. Elle a inondée le marché mondial de produits “Made in China”. Depuis son accession à l’OMC en 2001, la Chine sous une économie de marché déguisé par un néo-communisme s’est hissé au sommet.
Aujourd’hui Pékin ne cache plus son ambition et souhaite passer du statut “d’atelier du monde” à celui de “cerveau du monde” avec son plan industriel Made in China 2025. Entamer une période de transition vers la production de bien à forte valeur ajoutée est devenu la nouvelle obsession de Pékin. Obsession tout à fait réalisable puisque les entreprises étrangères afin d’accéder au marché chinois se voient contraintes de transférer leurs technologies aux co-partenaires chinois sous le modèle de la joint-venture.
Les nouvelles routes de la soie que tissent Pékin partout dans le monde inquiètent toutes les anciennes puissances qui perdent de l’influence dans ces régions. La Chine veut façonner le monde à son image à grand coups de partenariats étatiques et de subventions.
Conflit sino-américain : le jeu du chat et de la souris
Selon le dernier rapport du représentant au commerce américain : « Depuis l'accession de la Chine à l'OMC, les Etats-Unis ont tenté à plusieurs reprises de travailler avec la Chine d'une manière coopérative et constructive. [...] Les Etats-Unis ont cherché à résoudre les problèmes commerciaux, à encourager la Chine à poursuivre des politiques axées sur la loi du marché et à devenir un membre responsable à l'OMC. Ces dialogues bilatéraux ont largement échoué parce que les décideurs chinois n'étaient pas intéressés pour promouvoir une véritable économie de marché ». A ce jour les différends commerciaux opposant la Chine aux Etats-Unis sont au nombre de 38, soit 15 déposés par la Chine et 23 déposés par les Etats-Unis.
Devrait-on encore se soucier du déficit commercial ?
La balance commerciale d’un pays ne mesure que les échanges de marchandises entre les pays. Lorsque il y a déficit commercial, cela signifie qu’un pays importe plus qu’il n’exporte. C’est l’argument martelé par l’administration Trump qui compte réduire le déficit sino-américain d’au moins $200 Mds d’içi fin 2020. Un déficit qui s’élève à $375 Mds à ce jour.
La Chine est la première puissance exportatrice avec 14% des exportations mondiales. Ce statut est en grande partie dû au fait qu'elle est l’usine du monde. Une usine qui fabrique avec parfois pour seul objectif d’exporter, fruit de la mondialisation et de la division international des processus productifs. Dans ce contexte, il convient de se demander si utiliser l’indicateur du déficit commercial est pertinent.
De plus, une multitude d’autres facteurs jouent sur le déficit commercial comme le cours des devises ou encore la facture énergétique. L’objectif théorique du commerce international est d’importer et non d’exporter, en important nous nous fournissons en biens et services dont nous avons besoin et dont on ne peut pas assurer la production. Ce qui est bénéfique pour la population qui a accès à des biens ou services jusqu’à lors indisponibles.
La compétitivité d’une économie est plus à prendre en compte que le déficit commercial. La productivité nationale mesure l’efficacité à produire un bien ou un service et organise les flux internationaux. Si Donald Trump veut s’attaquer au déficit commercial structurel des Etat-Unis, alors il faut donner les moyens aux entreprises américaines de regagner en compétitivité afin d’exporter plus qu’elles n’importent.
Augmenter les tarifs douaniers afin de réduire les importations n’est pas une solution viable. D’une part, les entreprises seront forcés de répercuter l’augmentation du prix des matières premières en augmentant le prix final ou en licenciant. D’une autre part, elles perdent en compétitivité, les investissements stagnent, l’instabilité économique croît et on assiste à une récession.
L’entrée en vigueur du Smoot-Hawley Tarif Act portant sur plus de 20 000 produits en 1929 a eu l’effet contraire et a exacerbé la grande dépression. Une entreprise qui ne veut pas être prise au milieu de cette guerre commerciale envisagera comme l’a fait Harley Davidson de délocaliser sa production afin de protéger son activité.
Peut-on vraiment blâmer Donald Trump lorsqu’il affirme vouloir protéger les intérêts américain en premier ?
Certes, la manière de faire de l’administration Trump n’est pas des plus subtiles et est questionable, mais elle fait partie du style du dirigeant américain. Alors que l’escalade semble inarrêtable entre les deux puissances commerciales, il en va de l’intérêt mondial d’arriver à une sortie de crise. Il semble que cette guerre commerciale englobe d’autres enjeux importants : à savoir géo-politique et économique (droit de la propriété intellectuelle et accès au marché).
Si l’administration Trump a un plan il est temps de l’utiliser, la situation s’enlise et Pékin apparaît de plus en plus comme la victime d’un président qui fait preuve de mauvaise foi.
Pour aller plus loin, l’infographie réalisée par Trade Machines offre un résumé sur les guerres commerciales.
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