Élections libanaises du 7 juin

1) 3,2 millions de Libanais votaient dimanche 7 juin pour un taux d’abstention (54%) bien plus acceptable que celui des européennes en France. Si l’Alliance du 14-Mars remporte ces élections, elle perd un siège par rapport au scrutin de 2005. Réciproquement, l’opposition en gagne un. Aucun changement notable donc, la logique communautaire du système politique libanais ayant globalement scellé les fiefs communautaires de chacun des partis. Par ailleurs, les observateurs internationaux (Fondation Carter, Union européenne et National Democratic Institute) n’ont signalé aucune irrégularité.
2) La majorité a bénéficié d’un soutien des États-Unis et de l’Arabie Saoudite. Tandis que la diplomatie américaine a rappelé que le résultat du 7 juin conditionnerait son aide futur, l’Arabie Saoudite s’est engagée financièrement en faveur du Courant du Futur. L’aide financière accordée par ce dernier à des Libanais expatriés pour rentrer voter a certainement eu une influence, principalement dans les localités maronites où Forces libanaises/Kataëb d’un côté et Courant patriotique libre de l’autre se disputaient la victoire.
3) Le Hezbollah a mené une campagne relativement habile en limitant considérablement son argumentaire anti-israélien alors que le contexte (démantèlement de plusieurs réseaux d’espionnage israélien au Liban et publication de l’article du Der Spiegel) aurait pu virer à l’excitation générale. Ce scrutin lui a permis d’afficher une approche électorale plus tournée vers des enjeux de politique libanaise. Pour autant, il n’a pas effectué de percée électorale notable. Si l’hypothèse de la formation d’un gouvernement d’union nationale est ouverte, la majorité a rappelé son opposition à ce que le Hezbollah dispose d’une minorité de blocage. Dans ces conditions, celui-ci pourrait remettre sur la table des négociations l’exigence de garanties en ce qui concerne son arsenal militaire.
4) Le Courant patriotique libre de Michel Aoun n’a pas eu les résultats que beaucoup avaient annoncés. Une véritable bataille électorale s’est jouée dans les localités chrétiennes où s’opposaient les trois principaux partis maronites. Peut-être Aoun a-t-il été sanctionné pour avoir fait le choix d’une alliance contre nature reposant bien plus sur un intérêt électoraliste (stigmatiser la montée en puissance des sunnites). Prenant acte, Aoun semble déjà corriger le tir puisqu’il a affirmé sa volonté de travailler avec la majorité.
5) Au final, aucun grand changement. Les alliances internes devraient rester globalement les mêmes (hormis un repositionnement du Courant patriotique libre) avec toutefois l’effet possible d’une polarisation accrue des positions politiques. Idem au niveau des alliances externes (14-Mars avec les États-Unis et l’Arabie Saoudite ; opposition avec la Syrie et l’Iran), bien que les élections iraniennes du 12 juin et la politique du président d’Obama seront des facteurs à considérer dans d’éventuelles variations.
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