Fukushima hors contrôle ?
Les belles déclarations lénifiantes de l’exploitant nucléaire du 15 décembre 2011 signifiant l’arrêt à froid ont fait leur temps.
La situation ne permet plus de douter : aujourd’hui, TEPCO ne contrôle plus grand-chose à Fukushima.

La définition donnée par l’ASN (autorité de sûreté nucléaire) de l’arrêt à froid étant : « situation d’un réacteur nucléaire à l’arrêt dans lequel l’état du fluide de refroidissement se rapproche de celui qui correspond aux conditions ambiantes de pression et de température » est très éloignée aujourd’hui de la réalité sur le terrain.
Depuis cet « arrêt froid " optimiste, Tepco n’a cessé d’arroser les réacteurs endommagés, accumulant des centaines de réservoirs d’eau radioactive, déversant une partie de l’eau contaminée dans l’Océan, ce que l’exploitant vient de confirmer (lien) étant toujours incapable de vider les piscines de refroidissement afin d’écarter tout danger. lien
En effet, l’ASN (autorité de sureté nucléaire) japonaise à déclaré : « il existe de forts soupçons que de l’eau hautement radioactive accumulée dans le sol ne se répande dans la mer ».
Récemment, le 5 juillet 2013, l’exploitant a mesuré 900 000 Bq/l dans l’eau souterraine accumulée au pied des réacteurs, dans un nouveau puits, près de l’océan. lien
En l’espace de 3 jours on a constaté une multiplication par 90 du niveau de césium, la situation continuant de se dégrader. lien
Depuis le 18 juillet 2013, à 23h20 GMT, un panache de vapeur s’échappe du bâtiment du réacteur n°3 sans que l’exploitant puisse donner la moindre explication. lien
Il semblerait que cette vapeur provienne de la piscine située au 5ème niveau du bâtiment, (vidéo) et on n’en sait guère plus sinon que l’exploitant à signalé à l’AFP « nous avons l’intention d’effectuer des mesures de radioactivité au-dessus du bâtiment du réacteur ainsi que des prélèvements de poussière à proximité ».
Ce qui pourrait faire sourire si la situation n’était pas grave, car il règne autour de ce bâtiment un très haut niveau de radioactivité, et on voit assez mal comme Tepco pourrait différencier celle qui serait présente dans ce nuage à problème, et celle qui perdure depuis le 11 mars 2011 ?
Le porte parole de l’entreprise a fait un communiqué prudent : « tous les travaux destinés à enlever les débris ont du être arrêtés (…) les niveaux de radiation n’ont pas changé, et à 9h20, nous étions en mesure de confirmer que le réacteur n’avait pas atteint la criticité ». lien
D’autre part, Tepco préfère utiliser l’expression « mince filet de fumée » que celle d’un « nuage », ce que les images contredisent, et qui donne l’occasion de rappeler que ce réacteur n°3 était alimenté avec du Mox (grâce à la France), dans lequel on trouve de l’oxyde de plutonium, dégageant un très haut niveau de radioactivité, et compliquant d’autant plus le travail des ouvriers. lien
Le 20 juillet, ce nuage avait disparu, sans qu’on en comprenne la raison, mais en attendant que l’énigme soit résolue, d’autres préoccupations surviennent.
Les radiations nucléaires émanant de la centrale dévastée font apparaitre d’inquiétantes mutations sur les légumes, les fruits, les fleurs et les animaux. Une tomate voit surgir sous sa peau une nouvelle végétation…ou des excroissances monstrueuses (lien), les grenouilles changent de couleur (lien), les fleurs de pissenlit prennent d’étranges formes (lien), les roses ne sont plus ce qu’elles étaient (lien), les tournesols poussent sur d’autres tournesols, (lien), les cerises se mettent à ressembler à des grappes de raisin (lien), les pêches se dédoublent (lien), les choux triplent de volume, (lien) les épis de blé se scindent en deux, (lien) les kakis ne ressemblent plus à rien (lien), les mandarines deviennent bicolores (lien), les aubergines se transforment en tomates (lien) , ou se fractionnent à l’infini (lien), des feuilles poussent sur la peau des concombres (lien), les patates douces prennent des proportions énormes (lien), les navets ont les formes d’une main (lien)… et il est probable que si ces radiations sont capables de provoquer tant de difformités, l’être humain n’y échappera pas, comme on a pu l’observer à Tchernobyl. lien
En effet, des mutations ont pu être observées aussi sur les animaux, telle cette grenouille dotée de 2 cuisses supplémentaires, ce lapin sans oreilles, ce requin cyclope, ce papillon mutant…
Bien sur, certains tentent de se rassurer en indiquant que les mutations ne sont pas fatalement liées à l’activité nucléaire, allant même jusqu’à en faire une production artistique, mais il semble bien que l’on ne puisse écarter le rapprochement entre la catastrophe du 11 mars 2011 et ces préoccupantes mutations. lien
Du côté des humains, et des risques de cancers liés à l’accident, ça ne s’arrange pas non plus.
Si on limite ce risque aux travailleurs qui tentent d’éviter le pire, on a appris de la bouche même de la compagnie TEPCO récemment que 2000 travailleurs étaient exposés à un cancer de la thyroïde, soit le 10% du personnel présent sur le site.
En effet, ils sont 1973 ouvriers à avoir été exposés à des doses cumulées de radiations supérieures à 100 millisieverts/an, alors que la norme est limitée à 1 millisievert.
Ca représente plus de 10 fois le nombre annoncé précédemment. lien
Au-delà du site, des tests effectués sur 174 000 personnes habitant la région de Fukushima, qui compte près de 2 millions d’habitants, ont révélé que 12 mineurs étaient atteints d’un cancer de la thyroïde, et 15 autres cas sont suspects.
Il faut ajouter que le quotidien Asahi Shimbun a révélé qu’une société sous-traitante, la compagnie Build-Up, a demandé à une dizaine de ses ouvriers de recouvrir de plomb leurs dosimètres, afin d’en altérer les mesures, et permettre ainsi à leur compagnie de continuer leur travail sur le site. lien
C’est l’occasion de saluer le combat courageux de Tarô Yamamoto, acteur de cinéma star au Japon, qui s’engage contre le nucléaire. lien
En France, suite aux atermoiements du Président de la République, et aux conclusions floues de la conférence environnementale, le nucléaire continue d’avoir des soutiens.
Pourtant les accidents se succèdent dans plusieurs centrales françaises, la sécurité des sites n’est toujours pas assurée comme l’a prouvé une fois de plus un groupe de militants de l’association Greenpeace, pénétrant sans difficultés dans l’enceinte de la centrale du Tricastin, aucune solution recevable n’a été trouvée pour le stockage des tonnes de déchets nucléaires dangereux, et le débat Cigeo a fait long feu, tout comme celui de la conférence environnementale.
On se souvient qu’elle s’était tenue les 14 et 15 septembre 2012 et qu’elle a laissé de nombreuses questions en suspens.
A la suite de ce débat évité, certains, comme Jade Lindgaard, s’interrogent : « Serions-nous prêt à payer plus cher notre énergie et à en consommer moins ? Serions nous prêts à investir 10 000 € de travaux afin d’alléger nos factures d’électricité ? Sommes-nous d’accord que l’on dépense 100 millions d’euros par an pour enfouir 3% des déchets nucléaires ? ». lien
En attendant le risque d’un accident majeur perdure en Europe, et grâce à Nukemap, il est possible d’évaluer les conséquences d’une explosion nucléaire si elle se produisait à proximité de nos habitations. lien
Aujourd’hui, ils sont encore nombreux à affirmer qu’il sera impossible de se passer du nucléaire, pourtant, s’il faut en croire le rapport du GIEC, se référant au scénario [R]évolution énergétique, la solution prônant une transition rapide et graduelle vers d’autres sources d’énergie, et la diminution progressive concernant les énergies fossiles, est loin d’être utopique.
Comme le conclut Patrick Bonin, responsable de la campagne climat-énergie à Greenpeace Canada : « la révolution énergétique ne relève pas du miracle, mais elle exige courage et vision ».
Il ajoute que si on comptabilise les couts environnementaux (déchets nucléaires, risques d’accidents, émissions de GES), et si l’on tient compte des faramineuses subventions directes et indirectes aux industries pétrolières et nucléaires, l’électricité nucléaire coutera plus de 100 € MWh, contre 80 MWh pour l’éolien en France. lien
C’est l’occasion de rappeler que dans notre pays, contrairement à ce qui souvent affirmé, l’électricité d’origine nucléaire ne représente que 15 à 18% de la consommation finale, et non pas 75% comme le martèlent régulièrement les pro-nucléaires. lien
Ils utilisent cet argument pour expliquer qu’il serait très difficile de se passer du nucléaire en raison de ce pourcentage important.
Ils oublient que les 2/3 de l’énergie primaire produite par une centrale nucléaire sont perdus dans l’environnement comme l’explique Peter Bu dans son blog de Médiapart.
En réalité, l’hydroélectricité produit à elle seule plus d’électricité que le nucléaire (lien) et les énergies renouvelables produisent depuis 2008 en France plus d’énergie que le nucléaire. lien
Mais François Hollande, qui s’est engagé à réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75% à 50% à l’horizon 2025, tiendra-t-il parole ?
Comme dit mon vieil ami africain : « On ne creuse pas avec le manche de la bêche, mais le manche aide à creuser ».
L’image illustrant l’article vient de « rumeursdabidjan.net »
Merci aux internautes pour leur aide précieuse.
Olivier Cabanel
Une pétition à signer pour défendre les énergies propres.
Films à voir : « fukushima, chronique d’un désastre » ARTE
Terre Souillées, documentaire de Marie Dominique Robin
Beaucoup de vidéos sur le site de Scoop It.
A lire : « Fukushima, récit d’un désastre » de Michaël Ferrier
A découvrir : ce reportage dans la zone interdite, ainsi que ces vidéos décrivant chronologiquement la catastrophe.
Sites à visiter :
Articles anciens
Tchernobyl, drôle d’anniversaire (12 mars 2011)
Fukushima, Sarko pète les plombs
Fukushima, nuages noirs à l’horizon
Fukushima, le monde du silence
Fukushima, le syndrome Japonais
Nucléaire, la cible terroriste
Fukushima, le mensonge organisé
Le Japon bientôt inhabitable ?
On a retrouvé le corium de Fukushima
Fukushima, tragédie en sous sol
Fukushima, un silence inquiétant
Les normes sont-elles normales ?
Fukushima, quand c’est fini, ça recommence
Le mensonge nucléaire de sarközy
Promo nucléaire : pour toute centrale achetée, leucémie en prime !
Fukushima, les limites du cynisme
Nucléaire, de la fission aux fissures
Sur le même thème
Le grand dérapage qui guette l’Europe, une guerre radiologique en UkraineSommes-nous à l’aube d’une guerre nucléaire ?
La décision d’Israël de frapper l’Iran
Les armes nucléaires américaines en Europe: un moyen de pression sur la Russie?
L'Allemagne ferme ses dernières centrales nucléaires : les factures d'électricité augmenteront de 45 %
149 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON