Les occidentaux se préparent-ils à intervenir en Libye ?
Longtemps F. Hollande a pensé à une nouvelle diplomatie. L'Afrique était délaissée et l'Orient ferait de lui un chef de guerre et un leader influent au Proche-Orient. Cette politique fruit d'un alignement otanien inconditionnel, même si cela allait à l'encontre des intérêts économiques de la France, et des amitiés sunnites de la France en péninsule arabique dirigées contre les puissances chiites de la région (Syrie et Iran) ferait de lui "le meilleur allié" des Américains, l'ami des royaumes arabes sans pour autant s'aliéner Israel.
A trop s'opposer aux intérêts géo-stratégiques russes cette politique fut mise hors-jeu à plusieurs reprises : Dans le dossier nucléaire iranien la Russie arracha un compromis à l'Iran malgrè l'intransigence française ; dans le dossier syrien la diplomatie ruina les projets de F. Hollande d'effectuer une grande campagne militaire la première fois en obtenant in-extrémis que les Syriens détruisent leur stock d'armes chimiques, puis récemment en devançant militairement une intervention militaire occidentale contre DAESH en Syrie qui rétablit le pouvoir du président El Assad.
Janvier 2016 F. Hollande remplaça son ministre des Affaires Etrangères L. Fabius obnubilé par les questions du Moyen-Orient et qui avait négligé les autres questions, Afrique, Ukraine... J-M Ayrault le remplaça et accompagné du ministre de la Défense sillonna l'Afrique pour rétablir l'ancienne diplomatie française, renouant même avec des présidents jusqu'à maintenant jugés peu fréquentables comme le président Djiboutien. Il faut dire qu'il y a urgence malgrè les discours rassurants. L'opération Barkhane a atteint les limites d'une opération purement militaire. Les mouvements islamistes locaux ont été réduits sans pour autant empêcher l'Etat Islamique de métastaser dans tout le Sahel et faire muter les groupes islamistes aux ambitions géographiques régionales en djihadistes à l'agenda international.
Français et Américains s'attachent à redimensionner leur dispositif en fonction d'une guerre qui s'annonce extrêmement longue. Les Américains viennent de créer une base logistique au Sénégal qui sera le pendant de leur base à Djibouti qui leur permet d'opérer missions de drônes et opérations spéciales au Yemen comme en Somalie. La France vient de décider de renforcer ses effectifs permanents en Côte d'Ivoire, des Forces Françaises resteront en Centrafrique après le départ de la mission Sangaris, la France va bientôt signer de nouveaux accords de Défense avec le Nigéria.
La situation est cependant trop grave en Libye pour attendre, l'Etat Islamique gagne du terrain, se renforce, aucun gouvernement représentatif et puissant pour faire face. Le scénario de la Syrie est en passe de se reproduire. Développement de l'Etat Islamique, déferlement de migrants sur l'Europe et dissémination du terrorisme. Une intervention militaire conventionnelle en Libye n'est pas à l'ordre du jour, les opinions publiques n'y ont pas été préparées, difficile d'imaginer que la communauté accorde un nouveau mandat aux occidentaux pour intervenir, enfin les échéances électorales aux Etats-Unis bloqueront prochainement toute initiative.
L'heure est aux opérations spéciales de grande envergure. Il ne s'agit plus seulement d'éléments des Forces Spéciales en mission de reconnaissance conformément à leurs missions. Les Forces Spéciales américaines opérent déjà pour nouer des contacts avec les tribus et les milices sur place qui peuvent être des alliés potentiels. Les occidentaux viennent de décider la lever de l'embargo pour armer le gouvernement libyen. Les Forces Spéciales du CPA10 d'Orléans se sont récemment entrainées dans le sud de la France avec les Marine's américains à des exercices de déploiement. Fin avril des Forces Spéciales anglaises et Italiennes ont été repoussées par l'Etat Islamique lors d'une tentative de débarquement. Les avions de guerre électronique anglais opèrent des missions de brouillage au profit d'opérations au sol. Le gouvernement libyen ainsi que le Général Haftar chef d'une puissante milice armée par les occidentaux ont déjà lancé les premières offensives (sans succès pour l'instant) sur Syrte. Un bâtiment de la société MAERSK qui opère discrètement au profit des forces spéciales américaines vient d'entrer en mer Méditerrannée.
Tous les signaux d'une intervention militaires sont là. Les délais sont extrêmement courts avant que les politiques intérieures américaines et françaises bloquent toute initiative. Cependant qu'adviendra-t-il ensuite de ces groupes armés disparates à qui on confiera le pouvoir en Libye, quel projet politique et économique pour la Libye, personne ne semble s'en soucier. L'avenir de la Libye est loin d'être réglé.
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