Libye, il est urgent d’attendre
Kadhafi se terre, ses troupes de mercenaires sont positionnées en protection des ultimes dix pour cent de territoire encore sous contrôle, ce qui représente tout de même un tiers de la France. La communauté internationale comme on dit prépare les grandes manoeuvres, vous allez voir ce que vous allez voir. En fait on ne voit rien venir car les grandes nations n'ont aucune intention de bouger.
Bien sûr l'ONU ne va pas décider de lancer une offensive qui ne pourrait être qu'aérienne, d'ailleurs, les Etats-unis ne savent faire que ça, des frappes d'en haut sur des bunkers vides, les autres ne savent que remplacer des Ministres incapables. Si la solution militaire est irréaliste, la voie vertueuse serait de prendre sérieusement en considération l'aspect humanitaire. Mais pas à Benghazi, comme vient de le décider notre nouvel ancien Ministre, ou alors pas seulement à Benghazi.
A peine arrivé en sauveur de la planète diplomatique, Juppé expédie deux avions d'aide humanitaire à Benghazi à l'est de la Lybie, en une zone libérée par la révolte. C'est bien, mais en réalité ce n'est pas là que les besoins sont les plus urgents. La zone de tension extrême se situe plutôt de l'autre coté, à la frontière Tuniso-Lybienne au poste de Ras Jedir. Dans ce qui devient rapidement un trou à rats, des dizaines de milliers de réfugiés tentent de fuir le piège lybien mais se trouvent refoulés par des Tunisiens qui malgré une bonne volonté manifeste ne peuvent continuer seuls de supporter l'afflux des réfugiés de toutes nationalités. Quelques Tunisiens dérogent aux ordres et balancent dans la foule de l'autre coté de la frontière quelques bouteilles d'eau, quelques bouts de pain, quelques bananes, on se croirait au zoo, devant la cage aux singes.
Juppé annonce qu'une action concertée des Nations unies ne se fera que sous mandat du Conseil de Sécurité, ce soir il bouffe au Fouquet's.
Alors le mur frontalier devient une sorte de ligne de démarcation, les candidats à l'escalade sont refoulés par des coups de bâtons par des Tunisiens à bouts de nerfs et de patience, les foules entassées de l'autre coté crient famine.
Et Juppé envoit ses avions à deux mille kms de là. Car il faut montrer au 20h des carlingues chargées et en partance, il faut montrer du concret, il faut montrer du changement. Et peu importe de savoir que l'aide indispensable n'est en réalité pas apportée là où elle devrait l'être en toute première urgence, mais qui s'en soucie vraiment ? Dans le convoi qui est envoyé via le Caire à mille kms de là et qui n'arrivera que bien tard alors qu'il aurait pu se poser à Benghazi, deux ou trois médecins alors que des centaines de confrères avaient été rapatriés il y deux semaines de cela.
En plus de se tromper de combat, Juppé ressort dans son premier discours en tant que chargé des affaires étrangères le vieux dossier moribond, cette coquille vide appelée Union pour la Méditerranée au Vice -Président (Moubarak) en exil. Allez demander aux coincés de la frontière Tunisienne ce qu'ils pensent de l'Union pour une Méditerranée qui n'est pour eux qu'un refouloir à pauvres.
Quand on aura complété le tableau en rappelant que Juppé s'est toujours déclaré satisfait de la stabilité politique produite par les régimes forts du monde arabe, qu'il reste Maire de Bordeaux (il assista hier au conseil municipal alors que les autres Ministres des affaires étrangères planchaient à Genêve à propos de la Lybie), que notre Ambassadeur qui concourt pour le titre de plus mauvais diplomate de la Planète est toujours en poste à Tunis, que Claude Guant le nouveau Ministre de l'Intérieur est allé passer ses dernières vacances à Tripoli chez son ami Ambassadeur, que notre nouvel ancien Ministre Gérard Longuet nommé Ministre de la Défense va être entendu par la Justice pour les pots de vin du temps de la candidature Balladur, que d'ici quelques jours on va bien finir par recaser Michèle Alliot-Marie qui ne va tout de même pas se satisfaire de son fauteuil de Député (Il faudra rester vigilant à ce propos), on mesurera le décalage existant entre ce que De Funès appelle remettre de l'ordre dans la maison et la réalité.
Ce que le Président appelle l'ordre c'est l'ordre de marche en prévision de la présidentielle, en ce sens il devenait urgent de faire monter le Front national pour affaiblir la gauche, d'où la rhétorique sur l'Islam, d'où la danse du ventre diplomatique sur fond de peur larvée sur l'arrivée prochaine des clandestins du sud.
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