La Palestine a toujours existé
« Nous peuples du monde… » Ce n’est pas moi qui
m’enflamme, ce sont les premiers mots de la Chartre de l’ONU. Or,
les Palestiniens forment un peuple. Peut-on soutenir le contraire ?
C’est l’un des peuples les plus anciens de notre planète, et
il est assez curieux de voir les Etats-Unis s’opposer à la
reconnaissance de la Palestine alors que les Etats-Unis étaient de
l’herbe quand la Palestine était déjà un peuple.
Pour nous,
peuples de la Méditerranée, la Palestine est une mère, comme l’a
été la Grèce. De toute l’histoire, on a su placer la Palestine
sur une carte de géographie. Alors, depuis quand les peuples
souverains disparaitraient-ils ?
D’ailleurs, et on
pourrait en rester à ce constat, ceux qui font le plus de tort à la
Palestine en reconnaissent l’existence. Israël gère les
territoires palestiniens par le ministère des affaires étrangères,
pas par le ministère de l’intérieur. De même, ce bouillon de
culture impérialiste qu’est le Conseil de Sécurité reconnaît à
tous les territoires palestiniens le statut de territoires occupés,
au sens de la IV° Convention de Genève. Le Conseil de sécurité a
toujours dénié la moindre valeur aux déclarations d’Israël
affirmant faire de Jérusalem sa capitale.
La Palestine
est reconnue comme Etat depuis 1922
A la dissolution de
l’Empire Ottoman, la Palestine était reconnue comme Etat, avec un
peuple souverain et un territoire, et la carte figurait dans les
traités de Sèvre et de Lausanne. Personne n’aurait envisagé de
dessiner une Palestine qui n’aurait pas correspondu à la
Palestine, terre façonnée par l’histoire.
Le régime des
mandats est apparu, à la fin de la Première Guerre Mondiale, comme
une manière de gérer le droit des peuples à l’autodétermination.
Le droit à l’autodétermination du peuple palestinien se retrouve
à l’article 22 du Pacte de la SDN.
L’article premier du
mandat sur la Palestine donné par la SDN à la Grande-Bretagne prend
acte de la souveraineté, inaliénable, du peuple palestinien, le
mandataire n’ayant de pouvoir que pour la législation et
l’administration : « Art. 1. - The Mandatory shall
have full powers of legislation and of administration, save as they
may be limited by the terms of this mandate”.
Le mandat
n’était que d’administration, et ne pouvait modifier la
substance de la souveraineté, en respectant les limites
territoriales fixées par un mémorandum britannique du 16 septembre
1922, qui correspondaient aux limites de l’ancienne province
de l’Empire Ottoman.
L’ordre juridique palestinien était
déjà pleinement structuré à l’époque, et respecté par le
mandataire.
De plus, et ce point est essentiel, la question de la
souveraineté s’est posée à l’occasion du partage de la dette
publique ottomane entre la Turquie et les « territoires
détachés de l’Empire Ottoman ». Dans cet arbitrage rendu en
1925 par la SDN, la Turquie, la Bulgarie, la Grèce, l’Italie,
l’Irak, la Transjordanie et la Palestine était placées sur un
pied d’égalité. La Palestine était un Etat sous mandat, mais un
Etat.
En 1947, l’ONU n’a rien donné… car elle
n’avait rien à donner
Combien de fois faudra-t-il le
rappeler… En 1947, l’ONU n’a rien donné à Israël.
L’ONU était alors qu’un club de grandes puissances voulant se
partager le monde, mais elle n’a rien pu faire devant l’évidence
de la souveraineté palestinienne. Le document voté était une
recommandation pour un plan de partage, tentant de donner un contenu
à la déclaration du ministre des affaires étrangères Lord Balfour
de 1917, sur la création d’un « foyer national juif »,
destiné à devenir la place forte des intérêts occidentaux dans la
région.
Cette recommandation a été un acte irresponsable,
permettant aux groupes armés sionistes de se déclarer comme Etat au
départ du mandataire, en mai 1948, et d’engager la première
grande opération militaire, la Nakba, chassant les
Palestiniens de leurs terres et de leurs maisons. C’est le début
de l’histoire des réfugiés, dont le droit au retour est
inaliénable, face à un Etat qui a conquis un territoire par la
force des armes.
Et depuis ?
Aujourd’hui,
127 Etats ont reconnus la Palestine comme Etat : à peu près
toute l’Afrique, tout le monde musulman, toute l’Amérique
du Sud, tout l’ancien bloc de l’Est, toute l’Asie.
La
Palestine. Etat sous mandat hier, Etat sous occupation militaire
aujourd’hui, mais toujours Etat… Le peuple palestinien n’a
jamais renoncé. Le fait d’être sous occupation ne remet pas en
cause la qualité d’Etat, lorsqu’il existe un peuple, un
territoire et une organisation des pouvoirs. La RFA, ancienne
Allemagne de l’Ouest, a été créée et reconnue alors qu’elle
était sous occupation des puissances alliées.
La Palestine,
malgré les mille difficultés qu’elle rencontre, est d’ailleurs
un Etat très organisé. Il existe un peuple palestinien, qui vit en
fonction d’un ordre juridique interne. La Palestine a d’ailleurs
été le premier Etat arabe à procéder à des élections
démocratiques… mais comme le résultat – victoire du Hamas –
n’était pas celle prévue, les puissances occidentales ont puni le
peuple palestinien.
Alors, ce vote à l’ONU ?
Ce
soir ce vote sera acquis.
Juridiquement, il sera le signe d’une
amélioration de l’état civil tenu par l’ONU, mais ne touchera
rien d’essentiel.
Un Etat reconnu par 127 autres Etats, et dont
les dirigeants sont reçus comme représentants légitimes par les
opposants, à commencer par les US, devrait bien évidemment être
membre à part entière de l’ONU. Les Etats-Unis bloquent tout, au
motif qu’il faut d’abord négocier une paix globale. Ils
n’avaient pas été aussi exigeants pour accueillir Israël en
1949.
Juridiquement, ce poste d’Etat observateur apportera
quelques petits avantages fonctionnels marginaux au sein de l’ONU.
Mais Abbas passera toujours par le chek-point pour rentrer chez
lui à Jérusalem, et il devra toujours demander l’autorisation
s’il veut se rendre à Gaza. Le scandaleux accord de Paris, qui
place toute l’économie palestinienne sous le contrôle israélien,
ne sera pas changé d’une virgule, et la population de Gaza vivra
toujours le blocus. Les services israéliens viendront toujours sur
le territoire palestinien de Cisjordanie, pour procéder aux
arrestations de Palestiniens. Et de nouveaux permis de construire
seront donnés par les autorités israéliennes à Jérusalem-Est.
Dans les difficultés que rencontre le peuple palestinien, ce
plus n’est sans doute pas à négliger, s’il peut aider à
l’unité. Encore une fois, c’est aux Palestiniens de choisir.
Mais attention à ne pas donner à ce vote plus d’importance qu’il
n’en a, car les désillusions seraient cruelles.
Source :http://lesactualitesdudroit.20minutes-blogs.fr/