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Un pas en avant, deux pas en arrière

Le camarade Lénine s’il était encore parmi nous ne manquerait de qualifier de la sorte la politique étrangère européenne à l’égard de son ancien pays tant il est patent que l’Union européenne gère très mal celle-ci. Le sommet UE – Russie du 14 novembre changera-t-il la donne ?
Un avertissement à demi-voix

Le constat que je dresse en introduction est quelque peu rude pourrait-on m’objecter. Il est vrai que la Fédération de Russie n’est pas un Etat avec lequel il est toujours facile de composer, et dont l’histoire récente a laissé de sérieuses traces dans les esprits et les structures. Pour autant, peut-on exonérer aussi facilement l’Union européenne de ses errements successifs à son égard ?
Le 2 septembre dernier, j’avançais au sein d’un article le risque que l’organisation prenait en sanctionnant, même symboliquement, la Russie au sortir du conflit du Caucase. Je ne reviens pas sur l’interprétation fort modulable du droit international par les hiérarques européens tant il apparaît difficile d’y déceler autre chose que de la précipitation et/ou de la mauvaise foi : l’affaire du Kosovo pèsera à ce titre longtemps sur les relations bilatérales entre ces deux entités. Cahin-caha fut le compromis adopté en ce 1er septembre à Bruxelles, naviguant entre avertissement et sanction et qui prit la forme d’un gel des négociations pour le renouvellement de partenariat (APC [1]) existant depuis 1994 et arrivé à son terme depuis 2007. Cette mesure déplut néanmoins aux tenants d’une ligne dure (Pays baltes, Pologne et Royaume-Uni). Or, peu à peu, les pragmatiques (Italie, Allemagne et France en tête) décidèrent d’envisager justement la levée du gel de ces négociations pour mieux favoriser une approche plus profitable à leurs intérêts [2].
 
L’unité de façade
 
Un article de The Economist en date du 6 novembre relève avec justesse le mouvement opéré un peu benoîtement par certains membres de l’Union européenne : But Europe’s threat was clear. And that, two months later, has led to a painful moment. Most EU governments now want to resume talks on a new PCA with Russia—foreign ministers are expected to agree this at a meeting on November 10th, just in time to cast a cheering glow over an EU-Russia summit in Nice four days later. En somme, sans se déjuger il est ébauché une approche tendant à reprendre langue avec les responsables russes pour réussir, enfin (!), à signer un nouvel APC.
Les autorités de Moscou ne sont aucunement dupes de ces limitations et savent en jouer parfois avec brio. Elles savent que le temps joue pour elles, et que les dissensions apparaissent déjà au grand jour comme le note toujours aussi ironiquement The Economist : Europe’s strength is its unity—hence the need to come up with a quick decision to resume the talks with Russia, to “keep the sheep in the pen”, and stop individual countries “going off on their own”. In short, the EU’s unity over Russia in September was quite unsustainable. Ce passage en dit long sur l’unité réelle au sein des gouvernants européens, ce qui est avouons-le, logique en ce sens que plus le cercle s’élargit, plus le consensus devient difficile. Alors en temps de crise, l’on devine que la volonté de chacun de faire cavalier seul peut présenter quelques menus attraits.
 
Le compromis des braves
 
Alors, un sommet de Nice pour rien ?
Pas forcément, et il est possible d’entrevoir une solution qui arrangerait les affaires de toutes les parties : elle combinerait la renégociation de l’APC, souhaitée vivement par la chancelière Angela Merkel depuis de nombreux mois et une avancée sur le dossier géorgien réclamé à cor et à cri par certains membres. De la sorte, aucune partie ne perdrait la face devant son peuple et chacun pourrait en retirer de substantiels avantages. Le dossier géorgien ne doit toutefois pas venir occulter le sujet initial de la rencontre, d’autant qu’il est lui-même complexe et que ni les Abkhazes ni les Alains n’accepteront de sitôt une présence géorgienne sur leur sol ; cependant un accord commun sur une zone tampon de maintien de la paix pourrait par exemple voir le jour.
Seule réelle inconnue : la volonté pour certains gouvernants de l’Union de pratiquer la politique du pire, en lieu et place d’une politique raisonnée et axée sur le bien européen commun.
La décision votée par une majorité de ministres des affaires étrangères le 10 novembre dernier en faveur d’une reprise des négociations avec la Russie sur l’accord de 1994 est un acte que l’on peut saluer comme encourageant. Il est vrai aussi que la conjoncture économique et financière mondiale n’incite que fort peu à rajouter de l’huile sur le feu. Reste désormais à espérer qu’un compromis des braves voie le jour au sortir de ce sommet.
 
[1] APC : Accord de partenariat et de coopération dans le domaine commercial. Le premier ayant été formalisé en juin 1994, prenant effet seulement en décembre 1997 et valable pour dix ans, reconductible tacitement si aucun accord ne devait découler de négociations ultérieures. Cette clause fut une sage précaution puisque effectivement les blocages se firent jour du fait de l’opposition fortement appuyée de la Pologne et des trois Pays baltes, empêchant tout nouvel accord fin 2007. Pour de plus amples informations, je vous invite à vous rendre sur le site de la Documentation française.
[2] Si l’on en croit Le Monde dans son édition du 11 novembre dernier, le président Sarkozy aurait décidé d’assouplir la position française après avoir rencontré son homologue russe, Dimitri Medvedev le 8 octobre à Evian.

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6 réactions à cet article    


  • LE CHAT LE CHAT 12 novembre 2008 12:35

    les russes ont guère évolué non plus , certains veulent lyncher l’actrice Olga Kurylenko qui a tourné dans le dernier James Bond Quantum of Solace , car elle serait traitre à sa patrie de collaborer ainsi avec ceux qui ridiculisent depuis plus de 40 ans l’union soviétique et la Russie .


    • Yannick Harrel Yannick Harrel 12 novembre 2008 13:42

      Bonjour le matou,

      Attention, la belle Olga est d’origine Ukrainienne, pas Russe ! Même si le film l’a fait passer effectivement pour une Russe (sans trop dévoiler l’histoire de ce métrage) smiley

      Cordialement 


    • LE CHAT LE CHAT 12 novembre 2008 14:16

      @yannick

      je le savais , mais comme tu sais l’Ukraine est à moitié peuplée de russophones qui voudraient un rattachement à la mère patrie . smiley après mila Jovovic qui bosse pour les laboratoires occidentaux dans resident evil ,c’ est trop pour eux !  smiley


    • cogno1 12 novembre 2008 12:57

      Moui.... enfin avec des arguments pareils, je peux dire que certains aux USA appartiennent encore de nos jours au KKK, et que donc les Américains n’ont pas évolués.

      C’est pas mal le troll déguisé en commentaire, mais même si tes potes jugent ta phrase constructive, ça reste un troll.


      • Hieronymus Hieronymus 12 novembre 2008 14:00

        Je ne sais pas ce que dirait Vladimir Illitch Oulianov s’il etait encore parmi nous, je parlerais plutot de cacophonie au niveau europeen entre les pragmatiques, les extremistes et une sorte de centre mou ..
        Tout recemment la Pologne a leve son blocage laissant la seule Lituanie (qui a recu tout recemment Saakashvili en grande pompe) fermement opposee aux negociations avec la Russie, le president lituanien Adamkus, homme plutot ouvert et modere, qui n’a rien d’un extremiste, est influence negativement a 2 niveaux :
        = il a vecu pres de 40 ans aux USA et est de ce fait tres pro-atlantiste
        = sa base electorale est farouchement nationaliste donc tres russophobe, il ne faut helas pas trop en vouloir aux peuples baltes de leur russophobie violente, elle resulte de profonds traumatismes historiques

        Ds ce bras de fer engage par certains pays europeens contre Moscou, pas besoin d’etre grand clerc pour y voir la main de Washington, la politique "pourrie" du gouvernement Bush a toujours vise a mettre de l’huile sur le feu partout ou ils pensaient que cela pouvait servir leurs interets, il est naif de continuer a croire que les Americains auraient encore une attache sentimentale a l’Europe comme ils l’ont demontre lors des 2 guerres mondiales, ils n’ont en tete que leurs interets propres et agissent envers nous comme envers le reste du monde, des vassaux a regenter, point barre.
        Pour cela vaut toujours la bonne vieille tactique : favoriser tout ce qui divise, cultiver les antagonismes, souffler sur les braises du ressentiment anti-russe (toujours tres vif ds la plupart des pays de l’est) cela s’est fait en ex Yougoslavie, cela s’est fait en Ukraine, et plus recemment en Georgie avec les resultats que l’on sait ; a chaque fois montee des nationalismes, affaissement de l’Union europeenne, le benefice a la marge etant l’affaiblissement de la federation de la Russie (ce que souhaitait les USA au depart)
        Mais quand les Europeens, je veux dire tous les Europeens, comprendront ils enfin que les Americains agissent avec un parfait cynisme envers toute l’Europe ? Se servant de nos divisions et de notre naivete (l’ideal de Liberte, le reve americain, sornettes tout cela c’est bien fini..) ?
        Le bon sens consiste a tacher de pratiquer un jeu d’equilibre entre les differentes puissances en s’affirmant nous Europeens, comme puissance tangible et non plus chaotique ou aphone !
        Helas au lieu de cela nombre de dirigeants europeens s’empressent avec une ardeur masochiste d’aller donner gage d’allegeance sur gage d’allegeance a nos "amis" americains ..

        Je ferais tout de meme un reproche aux Russes (qui ne sont pas non plus des saints) ds leur politique etrangere, c’est leur cote "ours", toujours un peu pataud, un peu grossier, ils ont du mal a se departir de leur image de rudesse (voir sur Avox les jugements kitch de nombreux redacteurs) .. disons que la com a encore des progres a faire chez eux ..
        Souhaitons que la nouvelle administration americaine qui prendra bientot ses fonctions saura se montrer a la fois plus pragmatique et plus moderee, moins brutale et moins egoiste, rompant definitivement avec cette epouvantable politique du pire de W. Bush !


        • manusan 13 novembre 2008 04:01

          Aucune surprise à ce que l’Union Européenne ne soit pas unie en politique internationale, la vocation du traité de Nice n’a jamais été de faire de la politique extérieure. Pour que l’UE parle d’une seule voie, faudrait il encore qu’il y ait une constitution et un représentant des affaires étrangères. Or je rappelle, les peuples européens n’en veullent pas, ils ont refusé la constitution. En attendant, ce sera toujours le brouhaha, la Russie continuera de taquiner les pays d’europe de l’est (qui continueront d’être séduite par les US), la Chine de taquiner ceux qui manifestent contre ses dirigeants....

          Je remarque une chose concernant l’affaire Russie-Georgie : la Russie à ouvert le dialogue avec l’UE quand Sarkosy a amené le probléme devant le parlement européen. Ce qui veut dire que le pouvoir européen, c’est le parlement (ceux qui sont élu aprés tout), la commission et Barosso ne servent à rien (les technocrates).


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