De la platitude du journalisme politique français
Journaliste moi-même et passionné de politique, j’ai été effaré cet été par la platitude du journalisme politique français. Alors que des candidats potentiels tentent de parler du fond, les journalistes politiques se contentent des querelles de personnes, de Ségolène en maillot de bain et de Sarkozy et Johnny. Des exemples, une envie de débat et d’alerte.
Cet été, nous avons vécu l’un des mois les plus affligeants pour le journalisme politique. Il n’a été question que des guerres de personnes et peu du fond, alors que du fond il y a eu. Ségolène d’abord. Taxée d’illusionnisme, la présidente de Poitou-Charente parle pourtant du fond. Elle a, par ses positions sur les 35 heures ou la délinquance, ouvert un débat à gauche. Lors de son discours chez Arnaud Montebourg à Frangy-en-Bresse, elle a parlé de développement durable, des institutions -sujet capital à mon sens dans cette campagne qui s’annonce - mais elle a aussi disserté de la restauration de la « valeur travail » et sur le cancer du sein, par exemple. Et a fait des propositions. Qu’ont retenu nos journalistes politiques ? Une bousculade, un appel creux à l’unité et une évocation de François Mitterrand... C’est peu, réducteur et très inquiétant pour la campagne présidentielle qui s’annonce.
François Bayrou maintenant. Depuis un an, l’UDF change, et de colloques en réunions, évoque des propositions pour l’avenir. Que font systématiquement les journalistes politiques ? Ils demandent à Bayrou quel candidat il soutiendra au second tour.
Sarkozy enfin, le maître dans l’art du prêt-à-remplir les colonnes des journaux. Il a fait un jogging sur la plage et a vendu son livre Témoignage. Il avait prévu que son livre serait un best-seller. En terme de ventes, c’est vrai. Mais que dire de la pratique son éditeur qui rajoute des exemplaires dans les commandes des librairies. En gros pour dix livres demandés, vingt- cinq sont livrés ! Et le nombre d’exemplaires écoulés augmente. CQFD...
Puis Sarko a fait l’université d’été de l’UMP. C’était ce week-end. Le JDD a titré : « Les révolutions de Sarko ». Impatient, j’ai lu. Et là, j’ai été déçu. Rien de nouveau sous le soleil, si ce n’est un appel à la rupture. Une question qu’aucun journaliste n’a posée m’est venue à l’esprit. Qui est ministre de l’intérieur et membre d’un gouvernement au pouvoir depuis quatre ans ?
Autre exemple. Ce matin, lundi 4 septembre, François Hollande était l’invité de Jean-Michel Apathie, un journaliste politique peu enclin aux broutilles de personnes habituellement. Eh bien lui aussi est tombé dedans en demandant de manière lancinante à Hollande s’il serait ou non candidat, s’il avait vu Lionel Jospin, etc. L’important n’est-il pas de se pencher sur le PS, d’interroger ses militants, de faire un travail de fond sur ses propositions, plutôt que de savoir si oui ou non Jospin sera candidat, ou s’il a pleuré à la Rochelle ?
Pour le bien de la campagne, les journalistes politiques doivent se réveiller. Pour vous dire à quel point ils sont déconnectés, voilà l’intitulé d’un débat qui a eu lieu la semaine dernière sur France Inter (30 août). « Présidentielle : le deuxième tour opposera-t-il Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy ? » Et journalistes et sondeurs de disserter pendant quarante minutes sur la question, grâce à un sondage publié le matin même. Quelle pertinence ! A plus de neuf mois d’une élection présidentielle ! Moi, ces inepties me rappellent 2002...
34 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON