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Accueil du site > Actualités > Médias > Internet : l’ère de la fusion des quatrième et cinquième pouvoirs (...)

Internet : l’ère de la fusion des quatrième et cinquième pouvoirs !

La récente élection d’Obama, les velléités de contrôle d’états démocratiques sur le contenu diffusé par Internet semblent consacrer Internet au rang d’un sixième pouvoir. Le regain d’attention vis à vis d’Internet qu’expriment tous les États du monde s’étend désormais à la France. S’agit-il de l’expression de la volonté de la mise en œuvre d’une nouvelle forme de contrôle social ?

A la frontière des pouvoirs économiques et médiatiques, Internet tendrait-il à être l’incarnation de la fusion des 4e et 5e pouvoirs ou un 6e pouvoir ?

La situation des médias traditionnels

Tribune Co, le groupe qui édite Los Angeles Times, vient d’être racheté par Zell, un spécialiste parmi tant d’autres de la vente d’entreprises à la découpe. Ce dernier vient d’affirmer, parlant des médias et de la presse que "cette industrie a perdu beaucoup de sa crédibilité". Les recettes publicitaires du groupe viennent de s’effondrer en quelques mois.

Lors des Etats généraux de la presse, Bruno Patino, le nouveau directeur de France Culture a présenté les constats suivants :
  • L’offre de la presse écrite progresse plus vite que la demande.
  • Les annonceurs se retirent des supports traditionnels.
  • La demande se fragmente.
  • Les médias classiques sont devenus minoritaires chez les 15-24 ans.
  • Les déplacements expliquent le succès des médias numériques.
  • La baisse des médias payants s’est amorcée bien avant Internet
  • La presse gratuite semble avoir rencontré son public.
  • Il y a corrélation entre consommateur de médias écrits et "activisme" Internet.
  • 60% des Français disposent d’Internet. Les jeunes de 15-24 ans y consacrent près d’une heure par jour.
  • L’utilisation d’un smartphone introduit une disruption forte dans la consommation de médias classiques.
  • Le modèle économique de Google draine à lui une publicité en volume de plus en plus grande.
Jean-Louis Misseka dans son ouvrage "La Fin de la télévision" considère trois phénomènes qui viennent à expliquer la chute de la télévision - et des médias traditionnels :
  • la démédiatisation de l’information due à des supports éclatés
  • une désynchronisation de la réception et du traitement de l’information
  • une déprofessionnalisation liée à l’émergence de la blogosphère comme nouveau média d’information
Dans un article récent, l’ancien journaliste de FR3, José Alcala, rappelait les tirages de la presse régionale dans l’Eure. Au vu de ces chiffres, la presse régionale résiste même si on peut percevoir au vu et au su des chiffres l’amorce d’une certaine forme d’érosion. Il y aurait beaucoup à dire sur la fonction miroir de la presse locale. Quant aux conditions de travail, à l’indépendance et à la qualification des correspondants de presse, il y aurait encore sans doute beaucoup plus à dire !

Le mimétisme et le pillage

Plutôt que de faire du reportage, nous avons le droit sur France Info à un traitement de l’information digne de la télévision. Lors des jours de grèves, on interviewe les usagers là où nous aimerions comprendre les raisons qui amènent les salariés de la SNCF, de l’Education Nationale à faire grève.

Dans Journalistique, Alain Joannes reprenait récemment ce jour si singulier au cours duquel France Info introduisait - en boucle - ses flashs d’information en relatant l’anecdote d’une femme qui avait glissé sur une frite. La belle affaire !

En dehors de l’AFP qui irrigue les rédactions des médias français, la presse écrite depuis de nombreuses années a comme source d’inspiration la radio et la télévision. Ses contenus ne font écho qu’à ce que nous avons vu ou entendu.

A la radio, à la télé, dans la presse, nous lisons, nous entendons, nous écoutons ces mêmes experts de tout et du rien. Nicolas Baverez, Elie Cohen, Alexandre Adler, Alain Duhamel, Alain-Gérard Slama, Jacques Attali, Dominique Reynié, Nicolas Domenech, Eric Zemmour, Alain Minc, en dehors de leurs immenses qualités, sont aux médias ce que l’Eglise est à la société française. Ces "conseillers" des princes et autres bouffons de nos rois républicains nous répètent en boucle ce qu’ils sont depuis 25 ans. Ils ont au moins le mérite de nous permettre de croire à de nouvelles formes d’immortalité ou d’atemporalité.

Pas étonnant dans ces conditions que la désaffection pour ces médias soit de plus en plus grande ! Autrement dit, faire ce que font les autres dans un contexte de désamour avéré des supports traditionnels est la meilleure garantie pour un voyage en aller simple dans un avion en sapin.

Malgré la baisse des tirages, cela ne semble pas entamer la confiance dans les médias. de ceux qui continuent de les entendre, de les regarder et de les entendre. Et pourtant...

10 mythes du web 2.0

Alors, la faute à... Google... et aux blogueurs ?

Premier accusé de l’effondrement de la presse lors des États généraux de la Presse : Google. Les ennuis du géant de l’internet avec la presse belge et allemande semblent avoir donné des idées aux groupes de presse français. Largardère entend porter le problème des médias et éditeurs français avec Google devant la justice européenne. Pierre Conte, directeur de PubliPrint (groupe Figaro) n’y va pas par quatre chemins : "[...]aujourd’hui, avec la crise actuelle, nous vous considérons comme notre pire ennemi." Les choses ont le mérite d’être claires.

Nonobstant d’avoir Google dans le collimateur, le livre vert des Etats généraux de la presse remis à Christine Albanel apparaît comme l’expression d’un nouvel élan corporatiste revendiqué. Déterminé par les éditeurs de presse français, le statut d’éditeur de presse en ligne serait limité aux portails et autres sites assurant l’emploi régulier de journalistes professionnels. L’enjeu est de taille puisque le statut d’éditeur de presse garantit une TVA réduite à 2.1% et des aides qui se sont élevées à 1 milliard d’euros en 2007 !

La presse écrite reproche à Google et aux blogueurs ce qu’elle-même a fait vis à vis de la télévision et de la radio. Du coup, la presse se met, malgré quelques formules originales, comme celles de Rue89, Médiapart, Agoravox et Bakchich, à singer le Web... et FaceBook. C’est ainsi que Libération et Le Figaro ont mis en place leur plate-forme sociale : Libé+ et Mon Figaro. Que d’innovations !

Les velléités de contrôle social du pouvoir politique

Souvent mis en exergue pour illustrer les volontés de contrôle social sur la toile, l’Empire du milieu compte, à ce jour, 50 millions de blogueurs pour 290 millions d’internautes. En Thaïlande, la royauté a décidé de bloquer l’accès à 2300 sites. La raison officielle est que les sites bloqués au contenu à caractère pornographique provoqueraient une grave menace pour la sécurité nationale. La Chine et la Thaïlande ne sont toutefois pas les seuls à vouloir exercer un contrôle social sur ses citoyens.

Après l’Australie, c’est au tour des travaillistes britanniques et du secrétaire d’état à la Culture, aux médias et au sport, de s’intéresser de près aux moyens de censurer les contenus Internet. Le secrétaire d’état considère qu’"Internet, c’est le bordel" !!! Il parle de sa volonté de "purifier" Internet. Gloups.

Les Etats généraux de la presse : réflexion ou instrumentalisation ?

Au mois de novembre, Guillaume Champeau révélait les velléités de contrôle social que le pouvoir français entend étendre à l’internet. Le gouvernement souhaite la mise en place d’une charte dite de la "confiance en ligne". Ce regain d’intérêt s’accompagne dans le même temps d’une volonté sans faille de dépouiller méthodiquement la CNIL : la France figure dans les 3 derniers pays européens en la matière. Alex Türk, son Président actuel, dénonce l’avènement d’une "société de surveillance".

La prise de conscience par le pouvoir ne date pas d’aujourd’hui : nomination d’Eric Besson, conseillers élyséens à temps plein sur la campagne américaine, ... Dans la droite ligne de la campagne de Barack Obama, l’UMP va lancer ses réseaux sociaux. Nicolas Sarkozy a donné 6 mois aux responsables de l’UMP pour mettre en place des outils adaptés aux campagnes électorales de demain. La blogosphère nationale est très largement dominée par des blogs dont la tonalité est très hostile au pouvoir actuel. Dans ce contexte, la nomination de Frédéric Lefebvre au poste de secrétariat d’état au développement de l’économie numérique ne doit rien au hasard.

La grande habileté du pouvoir est, sans conteste, d’avoir instrumentalisé la parole des professionnels des médias pour justifier des réformes qui s’annoncent extrêmement liberticides. La sortie médiatique de Xavier Darcos et de Nadine Morano, la mise sous surveillance de la blogosphère, le renforcement législatif avec les lois LCN, DADVSI, Hadopi apparaissent comme autant de signaux avant-coureurs d’une volonté - réelle ou supposée - de reprise en main par le pouvoir de l’expression citoyenne.

Crédit photos : Wikipedia, Portail Internet et Ntic

Sources

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3 réactions à cet article    


  • Internaute Internaute 12 janvier 2009 10:55

    « ...Lors des jours de grèves, on interviewe les usagers là où nous aimerions comprendre les raisons qui amènent les salariés de la SNCF, de l’Education Nationale à faire grève.... »

    Vous avez tout à fait raison. Il faut constater que ce phénomène est bien antérieur à Internet. Cela fait des années que le JT ne nous apprend jamais rien. Les journalistes ne nous proposent pas d’information synthétique. Ils surfent sur l’émotionnel du détail et passent maintenant le plus clair de leur temps à faire de la propagande politique. Par exemple on ne saura rien du Vendée Globe ou des mouvements politiques au Pakistan mais on passera 10 minutes sur un assistant de l’EN qui aide des petits noirs en difficulté dans une couteuse école de banlieue puis encore 10 minutes pour nous montrer des aide-soignants noirs au chevet de vieux blancs. Actuellement on traverse une campagne du JT contre l’Hôpital public. Il y a chaque jour des centaines de milliers de gens qui sont soignés correctement mais à les croire, l’hôpital est devenu un endroit ultra-dangerositeux. En terme d’information, la télé se meurt car elle ne vaut plus rien. Internet l’a doublé et elle ne se rattrapera jamais.


    • bourgpat 12 janvier 2009 11:26

      A la place de lefevre à l’economie numérique on parlerait maintenant de devedjian.


      • Deneb Deneb 13 janvier 2009 04:36

        Un bon article injustement ignoré.
        On constate en effet une nouvelle vague de diabolisation du Reseau, une veritable guerre contre l’Intérnet
        La dernière en date : Google pollue. La vague de diabolisation de Google qui serait anti-ecolo vient de commencer. Première phase : culpabiliser l’intérnaute - pollueur. On nous sort un chiffre : deux recherches Google ont le bilan énergétique égal à une tasse de thé. Ces chiffres sont évidemment balancés hors contexte. En effet, aucun journaliste "professionnel" ne compare le bilan d’émission de CO2 de Google à un article d’un journal papier, une course en voiture ou un évènement sportif...

        A quelle démagogie devrait-on s’attendre prochainement ? En voyant le point de vue aussi partial des journalistes "professionnels", on ne peut que constater qu’il creusent frénétiquement leur propre tombe. Force est de constater qu’aujourd’hui un enfant possède un outil de recherche journalistique infiniment plus puissant qu’avait à disposition un lauréat Pulitzer, avec toute son équipe il y a 20 ans. Un tas de metiers vont disparaître, il y a des pans entiers d’industrie qui s’effondrent. Le bilan-emploi de cette hécatombe pourrait trouver sa compensation dans la création de nouveaux métiers, de plus en plus nombreux, souffrant cependant d’un manque de reconnaissance et d’identité professionnelle - les structures publiques ne sont pas assez réactives pour suivre la loi de Moore. Vive la Democratie 2.0 Open Source !

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