Être Jeune et Gaulliste en 2010 : Stanislas Korst (3/8)
Entretien avec Stanislas Korst, délégué Jeune Ille-et-Vilaine de Debout la République. Il revient sur son engagement politique et sa conception du gaullisme.
Il y a bien des Jeunes socialistes, non ? Idéologie bien plus ancienne que le gaullisme... Par conséquent, on peut se réclamer de l’action d’un homme, qui date de seulement soixante ans.
Le gaullisme m’a touché en ce qu’il présente déjà un programme politique social pour la France. La lecture des Tomes d’Alain Peyrefitte C’était de Gaulle ont été une révélation pour moi, tant on se rend compte que le général était lucide et clairvoyant. Bien sûr, il y a les faits qui démontrent constamment la lucidité des idées gaullistes d’aujourd’hui : crise de l’euro, problème des frontières avec l’affaire des Roms, le partage des profits de plus en plus en faveur du capital qui est totalement contraire à notre idéal de partage capital/travail (...). Dit autrement, tous ces faits ne peuvent que conforter dans cette certaine idée de la France...
Ce n’est pas une attaque de ma part, mais certains l’affirment. Par méchanceté ou après réflexion, je ne sais pas. Tout dépend de la personne qui le dit, peut-être. En tout cas, il y a de fortes chances pour que les lecteurs d’AgoraVox aient entendu ce genre de propos, je vous pose donc la question : le gaullisme n’appartient-il pas à l’Histoire, au passé ? Le gaullisme n’est-il pas mort avec le Général de Gaulle ?
Le libéralisme n’est pas mort avec Voltaire ni avec Turgot. Le socialisme n’est pas mort avec Marx ni Jaurès. De fait, il n y a aucune raison de mettre aux oubliettes la politique gaulliste qui alliait indépendance nationale et prospérité. C’est là un point central : nous n’entendons pas réinstaurer un gaullisme pur et dur en France. Ce qu’il faut bien avoir à l’esprit, c’est que les grands hommes de l’Histoire laissent systématiquement un héritage. Le bonapartisme n’est pas mort puisque le Code civil, les départements (...) sont un héritage laissé par Napoléon. Le gaullisme, lui, nous a ouvert la voie d’une France libre, indépendante, prospère.
Qu’est-ce qu’être gaulliste aujourd’hui ?
J’ai pour coutume de dire que la politique du Général doit servir de boussole. Autrement dit, le gaullisme doit guider la France. Nous devons nous inspirer -j’insiste sur ce terme par opposition au terme reproduire- de la politique du Général axée sur un État interventionniste, qui reprend ses droits régaliens, notamment la création monétaire, qui lui a été volé par les banquiers privés. Ces deux points fondamentaux doivent nous amener à remettre en question l’Union européenne d’aujourd’hui. Car l’Europe à 27 est un bourbier dans lequel la France s’enfonce lentement mais sûrement. La BCE, qui mène une politique purement au profit des rentiers, est totalement à l’opposée des besoins de la France. La manifestation la plus cruelle de cette politique est le chômage de masse qui mine actuellement notre pays. Au vu de son dynamisme démographique, il est nécessaire et urgent que notre Banque centrale nationale - débarrassée des dogmes ultra-libéraux - puisse créer la monnaie elle-même, impliquant par là-même un retour à un franc dévalué qui conduira à une relance de nos exportations, à une hausse des profits et donc, in fine, de l’emploi. De même, la France doit retrouver la maitrise de ses frontières sur le plan commercial d’une part, sur le plan de l’immigration de l’autre. Car on ne peut pas laisser le libre échangisme total appauvrir à ce point notre nation. Emmanuel Todd et même Maurice Allais l’ont démontré. Sur le plan de l’immigration, la France doit retrouver une politique plus rigoureuse, ce qui implique notamment une remise en cause du droit du sol et un durcissement d’accès à la nationalité française.
Il y a des gaullistes dits de Gauche. J’en conclus qu’il y en a de Droite, bien que le gaullisme se soit toujours voulu social. Et vous ? Nicolas Dupont-Aignan a déclaré reconnaître venir de la Droite. Et vous ?
Il ne faut pas se fier aux clivages Gauche/Droite. En effet, le gaullisme, c’est avant tout l’intérêt supérieur de la Nation au delà des intérêts de classe. Nous sommes favorables à la Vème République. Avec une Europe qui prend toutes les décisions et qui prime sur les Parlements nationaux, nous avons besoin de conserver un exécutif fort. De fait, à quoi bon redonner du pouvoir à un Parlement qui n’est plus qu’une chambre de retranscription de directives venues de Bruxelles ?
Le Général de Gaulle a été considéré comme le sauveur de la France parce qu’il a permis de vaincre l’Occupant, ce nazi qui gazait des gens dans des camps. Aujourd’hui, les camps ont disparu, mais des gens sont expulsés dans des pays qu’ils avaient quittés pour échapper à la mort. La France, patrie des Droits de l’Homme qui, dans ses lois, par deux fois (1981 et 2007), a aboli la peine de mort, est un État qui renvoie des gens se faire tuer. Est-ce un échec dans la victoire sur le III° Reich ? Le rôle d’un gaulliste aujourd’hui n’est-il pas de rappeler que ce n’est pas parce que le nazi est allé très loin dans la barbarie que toute politique peut être menée tant qu’elle n’égale pas le degré d’horreur et d’injustice de ce dernier ?
Cette comparaison est fallacieuse. La France qui expulse les Roms n’est nullement nazie ou hitlérienne. Rocard lui-même disait "on ne peut pas accueillir toute la misère du monde". L’Angleterre, qui a la maîtrise de ses frontières, renvoie aux frontières les étrangers non-désirés. La France se voit ainsi contrainte d’accueillir les immigrés que les Anglais refusent. La "jungle" de Calais, c’est ça : des gens qui souhaitent passer la frontière anglaise ! On ne peut pas continuellement peupler la France d’étrangers. Certains quartiers à Paris sont déjà totalement étrangers : Gare de l’Est, la Chapelle, Barbès (...) et certaines belles âmes nous expliquent que la diversité est nécessairement bonne. Mais non, car dès lors que ces populations sont plus nombreuses que les autochtones, ce sont leurs coutumes qui priment : nourriture halal, femmes voilées, prières dans les rues. La France est un pays ouvert, qui, à mon sens, doit accueillir des Arabes, des Noirs, des Jaunes. Cependant, on ne peut pas faire venir des populations étrangères sans leur donner un boulot, sinon la France devient un bouc-émissaire parfait. De fait, les jeunes algériens qui vivent en France la haïssent, d’une part parce qu’il y a toujours le problème de la colonisation et d’autre part parce que celle-ci n’a plus rien à leur offrir.
La politique du Général de Gaulle était claire : strict contrôle de l’immigration. Or, fut-il pour autant un dictateur Nazi ? Je ne le crois pas. Celui-ci disait à Peyrefitte :" Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront 20 puis 40 ?".
Je ne peux pas ne pas vous parler de Mai 68. Quelles revendications de ce mouvement-là reprenez-vous à votre compte ?
Franchement ? Aucune.
Vous vous réclamez du Général de Gaulle. Un homme qui a dû fuir son pays pour échapper à une condamnation à mort avant d’échapper à un attentat lorsqu’il était le chef de l’État. Faire de la politique, c’est dangereux. Vous y pensez souvent ? Vous avez eu le malheur de le vérifier par vous-même ?
L’attentat du Petit Clamart est un accident comme tant d’autres dans l’histoire de la politique mondiale. On sait bien que certains présidents sont la cible de certains extrémistes. On a tué Kennedy, on a failli tuer Reagan, on a tenté de tuer Chirac également. Bref, la politique est, me semble t-il, un métier dangereux. Pour autant, mon engagement ne m’a jamais porté préjudice jusqu’alors.
Vous êtes un militant de Debout la République et non de l’UMP. Ce dernier parti n’a rien de gaulliste ? Vraiment ? Quand ses adhérents se réclament du Général de Gaulle, ce sont des menteurs ? Quelle est votre différence avec l’UMP ?
L’UMP a cette contradiction fondamentale : elle se réclame du gaullisme tout en trahissant constamment ses mythes fondateurs. Ainsi, je vais donner un exemple récent. On entendait François Fillon expliquer doctement que les détracteurs de l’euro s’étaient trompés sur toute la ligne et que l’euro restait solide (...). Bref, un discours d’européiste convaincu. Or, de qui se réclame François Fillon ? De de Gaulle. Qui était son mentor ? Philippe Séguin, un des plus fervents opposants à Maastricht et à la monnaie unique. On se rappelle tous d’ailleurs de ce discours historique de 1992. Nicolas Sarkozy, lui, voue un culte aux États-Unis et ne s’en est jamais caché. Par exemple, il nous a réintégré dans le commandement intégré de l’OTAN.
Pourquoi avez-vous choisi Debout la République ?
C’est un parti libre, indépendant et, à mon sens, le plus à même de représenter les souverainistes. On parle beaucoup du FN en tant que parti d’opposition. Or, le FN joue un rôle nauséabond dans la démocratie dans la mesure où il incarne le vote de la colère et des "anti-tout". À DLR, nous avons une réelle réflexion sur l’Europe, l’éducation, la nation, la sécurité. Autrement dit, nous avons un réel projet de société à présenter au Peuple français. DLR présente ainsi un programme comprenant 101 propositions. Ce faisant, et de manière plus globale, nous proposons aux Français de reprendre le pouvoir qu’ils ont perdu de manière patente en 2005 lorsque Nicolas Sarkozy a fait passer le Traité de Lisbonne au Parlement malgré le NON qui l’emportait alors à 55%.
Et vos proches, que pensent-ils du gaullisme ? Comment vivent-ils votre engagement ?
La plupart tiennent le raisonnement décrit dans la deuxième question : le gaullisme est mort avec de Gaulle, ou alors le gaullisme, c’est fini. Au premier abord, les réactions sont globalement peu élogieuses. Toutefois, au fil de certaines discussions, on arrive à faire comprendre que le gaullisme d’aujourd’hui n’est ni rétrograde, ni passéiste, mais qu’il est, au contraire, porteur de progrès social et économique pour la France.
Propos recueillis par Richard Patrosso
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