Faut-il sauver le soldat Sarko ?
Depuis le jugement et la condamnation de Nicolas Sarkozy dans l’affaire dite du pacte de corruption ou des écoutes, les prises de paroles s’accumulent, allant beaucoup dans le même sens d’une justice d’exception voulant la peau d’un ancien Président de la République qui n’a jamais porté les juges dans son cœur.
Alors justice revancharde où justice normale ?
Rappelons tout de même un élément essentiel qui a été passé sous silence dans les prises de paroles notamment le fait que l’ancien Président, celui qui vilipendait et menaçait les délinquants de banlieue et autres trafiquants de tous genres de les passer au Karcher © est le même qui, pour cacher ses turpitudes, utilisait un abonnement téléphonique souscrit sous un faux nom. Il n’y a donc pas de différence notoire entre un dealer et un ancien élu en ce sens où les deux utilisent des méthodes identiques pour passer leurs messages, que ce soit la livraison de boulettes de shit ou bien l’avancée d’une affaire en cour de cassation.
Au final, le dealer avec son téléphone aux cartes prépayées aura sans doute ramassé en comparution immédiate une peine de prison ferme avec mandat de dépôt alors que l’ancien élu qui dispose de moyens financiers et de soutiens conséquent ira en appel (suspensif), voire en cours européenne de justice.
Pour faire bonne mesure, la bronca orchestrée par les soutiens de l’ancien élu aura consisté à vouloir essayer d’amalgamer le Parquet National Financier qui a instruit le dossier et requis une condamnation dans le procès, au tribunal correctionnel, totalement indépendant, qui a prononcé la sentence. Pas sûr que ce « tous pourris » ait fait très plaisir à la magistrature dans son ensemble.
Rappelons également ce fait, largement oublié par les commentateurs, mais souligné perfidement par les magistrats dans leurs attendus, que Sarkozy, ancien Président de la République, mais également avocat, côtoyait sur le banc des prévenus du beau monde, dont un autre avocat ainsi qu’un Conseiller à la Cour de Cassation, tous bien au fait de ce que leurs petites magouilles pouvaient leur attirer comme ennuis.
La stratégie de ces pieds nickelés aura surtout consisté à minimiser les faits et surtout nier le pacte de corruption qui, rappelons-le, en droit, n’a pas besoin d’être réalisé (le poste pour Aziberg à Monaco) pour être effectif.
Les amis à la rescousse
Sitôt le verdict rendu, il a été de bon ton parmi beaucoup de commentateurs politiques aidés d’avocats pas toujours très objectifs et d’amis (Christian Jacob) de hurler à l’acharnement judiciaire et de parler de peine disproportionnée, (tiens, il était donc coupable quand même ?).
La couverture média aura été très bonne surtout au Figaro et sur TF1/LCI dont les propriétaires ont toujours soutenu Nicolas Sarkozy. Au Parisien, les journalistes ont tout de même rué dans les brancards en découvrant l’article du patron de la rédaction, mais le temps d’une journée on aura eu presque l’impression que les sujets du moment comme le Covid avaient disparu.
Si les amis se sont fait entendre ou ont laissé libre cours à la reproduction des propos « indignés » de Nicolas Sarkozy, d’autres faisant pourtant parti de la même famille politique mais poursuivant leur trajectoire personnelle pour 2022 ont fait le service minimum, voire ont commencé à prendre la température à LR afin de mesurer les dégâts dans la famille. C’est le cas de Gérard Larcher, Président du Sénat qui mise sur le bordel complet quant au choix d’un candidat en 2022 pour se poser en recours.
Quel futur politique pour Sarkozy ?
L’appel aura sans doute lieu dans un an, en pleine campagne électorale pour la présidentielle, ce qui exclut de fait une candidature de l’intéressé comme l’avait imaginé Christian Jacob.
Mis hors-jeu, l’ex n’en conserve pas moins un certain pouvoir de nuisance et son intervention dans la campagne pourrait s’avérer essentielle pour celui qui en bénéficierait. Tirer les ficelles en coulisse, il connaît. A ce petit jeu de massacre dont les politiques ont le secret, le parti des Républicains pourrait se retrouver en lambeaux et les départs et ralliements vers LREM - moyennant des circonscriptions aux législatives - venir compléter ceux déjà effectués depuis 2017 (Le Maire, Darmanin,…) afin de résister à une percée de la Présidente du RN en 2022. C’en serait terminé avec le ni droite ni gauche (mais cela a-t-il réellement existé ?).
Et comme rien n’est gratuit en ce bas monde politique, on se contentera de noter la mollesse de la réaction de Dupont Moretti interrogé par un député à l’Assemblée Nationale sur l’actualité judiciaire du prévenu Sarkozy et le soutien appuyé de Darmanin après le verdict pour juger de la crédibilité, ou non, d’un tel scénario de ralliement.
La question n’est sans doute pas tant celle du futur politique de Sarkozy définitivement bouché, mais plutôt celle de son futur judiciaire, et là tout est bon à prendre pour éviter de rejoindre la cohorte des Balkany, Chirac ou bien encore des Cahuzac, marqués définitivement au fer rouge de la condamnation judiciaire.
Restera le Sarkozy « homme d’affaires » (dans tous les sens du terme) qui aura tourné la page de la politique, après encore quelques passages dans les prétoires...
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