François Hollande et la fracture nationale dans une époque de divisions sociétales
François Hollande divise les Français. On ne peut le nier, même si ça fait mal aux gens de gauche que de comparer Hollande à Sarkozy qui était l’incarnation même du diviseur. Diviser comme le diable. Hollande plus diabolique que machiavélique ? A moins que ces deux termes ne soient presque synonymes. Toujours est-il que le président Hollande possède une qualité que lui reconnaissent les gens « autorisés » dans les médias, celle d’être un bon stratège, ou si on veut un manipulateur ou pour être plus précis, un avatar de Mitterrand mais avec un peu moins de convictions profondes. Et un style plus familier pour ne pas dire emprunté, notamment dans les cérémonies et les discours.
Hollande divise, on le voit, mais on ne peut le rendre seul responsable de cette division qui semble marquer notre époque depuis quelques décennies avec une accentuation ces dernières années, depuis 2007 disons. Une division affectant la France et d’autres pays concernés par ces sortes de fractures sociales, non seulement économiques mais aussi idéologiques, sociales, culturelles, avec des polémiques allant jusqu’aux sujets futiles et des divisions marquées et profondes, aux Etats-Unis par exemple, ou dans le Royaume-Uni avec les Ecossais revendiquant l’indépendance. Ce qui n’a rien de très spécifique puisque d’autres mouvances sécessionnistes sont présentes en Europe, sans parler des guerres entre factions religieuses au Moyen-Orient et d’autres tensions de par le monde, en Asie, en Amérique du Sud. Le 21ème siècle sera-t-il spirituel se demande l’épigone de Malraux ? En tous cas, il a commencé comme un siècle des ego et des divisions.
Depuis sa prise de fonction, Hollande et sa politique ont produit des divisions, nul ne peut le contester, mais une analyse plus profonde permet de conclure également à une politique qui dévoile des divisions au sein de la société, avec des différents plus ou moins accentuées portant sur les idéologies, les valeurs, l’économie, l’éducation, la santé… Quoi qu’on puisse penser de la légitimité du mariage pour tous, force est de constater que ce thème a engendré une division profonde entre des Français aux convictions opposées. Le projet de loi est passé mais les divisions n’ont pas disparu, étant inscrites dans les esprits. Autre division, sur la politique économique. Même le camp du président est divisé, avec ceux que la presse se plait à nommer frondeurs et qui représentent un courant du PS s’opposant fortement à la politique du gouvernement sans aller jusqu’à une fracture car beaucoup tiennent à leur mandat.
Ce sont autant les hommes qui se divisent, que le cours du monde qui favorise les divergences avec les intérêts antagonistes qui s’y jouent. Austérité ou pas ? Politique de l’offre, aides sociales, Etat providence, croissance, chômage, intermittents, migrants, vieillesse… un ensemble de problèmes insolubles car les revendications ne peuvent être toutes satisfaites et qu’il faut à un moment décider en faveur d’un secteur au détriment d’un autre. Autre division, cette fois sur l’enseignement. Un consensus sur un cinquième à un quart des élèves du collège qui sont en décrochage scolaire. Mais surtout une puissante division sur les modifications à apporter dans les programmes et les enseignements. D’où les dissensions manifestées entre partisans et les sévères avertissements venant d’autorités intellectuelles comme Marc Fumaroli ou Luc Ferry pour n’en citer que deux. Par ailleurs, les observateurs neutres savent fort bien que les problèmes du collège sont imputables à des déficiences éducatives dans le primaire, doublées de facteurs sociaux étrangers au collège et puis ces réformes pédagogiques (démagogiques ?) il y a trois décennies à l’époque de l’enfant-roi.
Un bottin ne suffirait pas à recenser toutes les divisions et tous les conflits se produisant à divers échelons sur des enjeux tout aussi diversifiés et dans des lieux épars autant que sur les plateaux de télévision avec quelques intellectuels prêts à en découdre avec la polémique, Emmanuel Todd ces jours-ci après les Caroline Fourest et autre Eric Zemmour et avant les prochains sur l’interminable liste des bretteurs médiatiques. Notre époque vit la perte des valeurs, autorités et consensus fondamentaux créateurs de cohésion sociale et républicaine. Dans le même temps, l’envahissement des médias et écrans impacte avec ses contenus émotionnels les ego, créant de ce fait des antagonismes et des divisions avec bien souvent des faux enjeux et des problèmes hypertrophiés. Ce qui détourne les énergies pour aller aux choses plus fondamentales et essentielles. Rien de bien neuf, le divertissement opposé à l’authentique. Un gnostique se réclamant de Plotin verrait dans le divertissement le signe du multiple, des matérialités et même du mal (matière et miroir) alors que dans l’authentique, il verrait l’émanation de l’harmonie universelle transitant depuis le Un et l’Intellect vers l’âme.
L’Intellect de Plotin, tout comme le Logos de Platon ou encore le Logos lié à la Trinité ou même dans une certaine interprétation le Tao, s’avèrent source de cohésion. La matière, avec ses objets, ses images, ses écrans, façonne un univers marqué par une multiplicité démesurée qui par impact sur les individus, tend à exacerber les ego et créer de la division. Bref, nul besoin d’un traité roboratif de métaphysique pour comprendre que notre époque est marquée par les divisions. Ce qui dans un certain sens marque la plasticité et la diversité du genre humain, mais aussi engendre des antagonismes et des tensions préjudiciables au vivre-ensemble ainsi qu’à la cohésion nationale et les ressorts républicain. On se demande où ont la tête nos gouvernants, obsédés par la croissance et le réchauffement climatique alors que le problème majeur qui concerne la politique, c’est cette accumulation de divisions sociales pouvant générer une guerre civile à bas bruit, en paraphrasant Alain Finkielkraut. Mais la division relève aussi de la philosophie et de la religion car la politique ne suffira pas à enrayer ces tendances pouvant aboutir vers un chaos civil.
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