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Accueil du site > Actualités > Politique > Henry Chabert, la passion de Lyon et de l’urbanisme

Henry Chabert, la passion de Lyon et de l’urbanisme

« J’ai toujours dit que pour moi, Michel Noir est un ami, et je n’ai pas à renier cette amitié et ce n’est surtout pas au moment où un ami est en difficulté qu’il faut renier cette amitié. C’est dans ces périodes-là que l’on peut voir ses vrais amis. (…) J’ai le mérite d’être l’élu le plus contrôlé de France et les Lyonnais sauront me faire confiance car j’ai été passé à la lessiveuse comme aucun autre candidat. » ("Lyon People", le 29 août 2000).

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Ses dernières apparitions publiques avaient eu lieu le 25 septembre 2016 pendant la fête de rentrée des Républicains du Rhône à Rillieux-la-Pape en présence de Laurent Wauquiez et le 28 novembre 2016, au congrès de l’INTA (Association internationale pour le développement urbain) à Lisbonne où il avait pris la parole (comme président d’honneur) sur "la place de la culture dans la ville".

À Lyon, il y a juste un an, le 17 janvier 2017, a disparu Henry Chabert, à l’âge de 71 ans, des suites d’une saleté de maladie. Ses funérailles ont eu lieu le 23 janvier 2017 en la primatiale Saint-Jean de Lyon en présence de Michel Havard, Emmanuel Hamelin, Michel Terrot, Michel Forissier, Philippe Cochet, Georges Képénékian, Michel Noir, etc. Acteur de la vie économique et politique et engagé au sein du RPR, il a eu une passion, sa ville de Lyon, et un objectif rêvé mais manqué, de justesse en 1995 et encore en 2001 : devenir le maire de Lyon.

Né le 3 octobre 1945 à Saint-Étienne, diplômé de Sup. de Co de Lyon et de l’Institut des hautes finances (créé par Georges Pompidou en 1972 dans le cadre de l’Université Paris-X Nanterre), Henry Chabert commença sa vie professionnelle dans la création d’entreprise avant d’être recruté par le groupe BSN comme dirigeant d’une filiale.


Entre 1969 et 1989

De manière assez innovante pour l’époque, Intergestion, l’entreprise qu’il avait créée et dirigée de 1969 à 1979, proposait aux entreprises de l’assistance à la gestion financière : « J’avais mis au point une sorte de programme qui s’appuyait sur la théorie des systèmes appliquée à la gestion financière. » ("Lyon People", le 29 août 2000). Il a ensuite franchi "l’autre côté du miroir" : de conseiller, il est passé opérationnel.

Ce fut Antoine Riboud qui lui proposa de diriger sa filiale Grand Traiteur : « Pour vendre [l’affaire de produits alimentaires de mon ex-beau-père], j’ai donc rencontré les grands de la distribution de l’époque qui étaient Unilever, Nestlé et BSN. (…) C’est par mes activités de conseil que je me suis mis en relation avec BSN et que BSN m’a dit "on achète sous réserve que vous soyez directeur" et moi j’ai dit "très bien, banco, ça me permet de passer de l’autre côté de la barrière". » ("Lyon People", le 29 août 2000). Résultat, entre 1979 et 1989, la filiale est passée de 30 millions de francs de CA avec 70 salariés à 450 millions de francs de CA avec 420 salariés.

Comme on le voit, au contraire de bien des responsables politiques, il a eu une grande expérience de la vie économique. Son engagement politique s’est amorcé très tôt, en 1962, en militant auprès de Lucien Neuwirth (1924-2013), député UDR de Saint-Étienne (de novembre 1958 à juin 1981), puis sénateur de la Loire (septembre 1983 à septembre 2001), président du conseil général de la Loire (de mars 1979 à mars 1994). Lucien Neuwirth fut à l’origine de la loi sur la contraception (loi du 29 décembre 1967). Au début des années 1970, Henry Chabert a aussi travaillé avec Jacques Delors, alors conseiller du Premier Ministre Jacques Chaban-Delmas, lorsqu’il était rapporteur de l’UJP (jeunes de l’UDR) à Royan sur les problèmes de la culture.

Pour ses études puis sa vie professionnelle, Henry Chabert a rapidement quitté Saint-Étienne pour Lyon où il s’est implanté politiquement sous l’étiquette du RPR. Il fut élu conseiller municipal de Lyon en mars 1983 sur les listes conduites par Michel Noir, alors jeune député RPR depuis mars 1978 (successeur de Jacques Soustelle dans l’ancienne 3e circonscription).


Entre 1989 et 1995

Pendant douze ans, la vie politique d’Henry Chabert s’est un peu confondue avec celle de son ami Michel Noir. À 38 ans, très ambitieux, Michel Noir a en effet lancé ses listes dissidentes contre le maire centriste sortant, Francisque Collomb (1910-2009), sénateur (septembre 1968 à septembre 1995) et maire de Lyon (décembre 1976 à mars 1989). Si l’initiative de Michel Noir (vaguement contestée par Jacques Chirac, président du RPR, qui officiellement a soutenu Francisque Collomb) a échoué, ce fut de justesse et il a ébranlé durablement la vie politique lyonnaise, très particulière et fermée.

Aux élections municipales suivantes, en mars 1989, ce fut un raz-de-marée pour les listes dissidentes de Michel Noir qui ont largement battu les listes du maire sortant Francisque Collomb (Michel Noir a remporté les neuf arrondissements lyonnais). Même Raymond Barre (1924-2007), député et ancien Premier Ministre, qui avait accepté d’être colistier de Francisque Collomb à sa demande, a été battu ! Entre-temps, Michel Noir avait été nommé Ministre du Commerce extérieur du gouvernement Chirac du 20 mars 1986 au 10 mai 1988.

Combattant du Front national (en publiant une tribune dans "Le Monde" le 15 mai 1987 : « Mieux vaut perdre les élections que perdre son âme. »), Michel Noir est donc parvenu à se faire élire maire de Lyon du 24 mars 1989 au 18 juin 1995. Henry Chabert fut alors élu premier adjoint au maire chargé de l’urbanisme et vice-président de la Communauté urbaine de Lyon (la Courly) présidée par Michel Noir qui a placé dans ses exécutifs des élus UDF et des élus RPR. À la Courly, Henry Chabert était chargé de l’aménagement et du développement urbains.

Michel Noir avait de très hautes ambitions personnelles, celles à terme d’être candidat à l’élection présidentielle : il fut en avril 1989 aux côtés notamment de Dominique Baudis, François Bayrou, Philippe Séguin, Charles Millon, Bernard Bosson et François Fillon, dans l’aventure des Douze "rénovateurs", ces quadragénaires qui voulaient renverser l’hégémonie au centre droit des "vieux" leaders qu’étaient Jacques Chirac et Valéry Giscard d’Estaing.

Michel Noir a ensuite quitté le RPR en décembre 1990 après avoir cofondé "Force unie" le 5 mars 1990 avec Michèle Barzach, François Léotard, Claude Malhuret, Patrick Devedjian, Gérard Longuet, Jean-Louis Bourlanges et Pierre-André Wiltzer, devenus des "néo-rénovateurs" de l’opposition, ce qui n’a abouti à aucune démarche concrète. Michel Noir, Michèle Barzach et Jean-Michel Dubernard démissionnèrent de leur mandat de député le 12 décembre 1990 pour se faire réélire le 3 février 1991 (seule Michèle Barzach a échoué dans cette opération et a quitté la vie politique).

Rattrapé par les affaires judiciaires, Michel Noir fut mis en examen en mars 1993 et condamné en appel le 10 janvier 1996 à dix-huit mois de prison avec sursis et cinq d’inéligibilité pour recel d’abus de biens sociaux. Réélu le 28 mars 1993 (face au RPR Alain Mérieux), il a dû démissionner de son mandat de député le 6 février 1997 et a quitté définitivement la vie politique, se reconvertissant dans la création d’une start-up et dans la préparation d’un doctorat en sciences de l’éducation.


Entre 1995 et 2001

Pour les élections de juin 1995, à Lyon, la situation était donc très "dégagée" : Michel Noir ne pouvait pas se représenter à la mairie en raison de son implication judiciaire et Francisque Collomb a pris sa retraite (il quitta son mandat de sénateur en septembre 1995 à l’âge de 85 ans).

Henry Chabert, premier adjoint de Michel Noir, a pris très logiquement la tête des listes noiristes et a donc été candidat à la mairie de Lyon au premier tour des élections municipales du 11 juin 1995. Dans ses listes, on y trouvait Michel Noir candidat à un poste de simple conseiller municipal (en prévision d’un non-lieu et d’un rebondissement municipal qui n’ont jamais eu lieu).

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L’alliance UDF-RPR était divisée à cause des listes noiristes depuis 1983. Finalement, ce fut Raymond Barre, par son prestige personnel et moral, qui fut le candidat UDF-RPR à la mairie de Lyon (après s’être fait prier). Il faut se rappeler que si le maire de Lyon (Michel Noir) était "juste" mis en examen, le maire de Grenoble (Alain Carignon), lui, était déjà en prison (provisoire avant procès) pour une autre affaire judiciaire et ne pouvait pas non plus se représenter aux municipales à Grenoble, ce qui donnait un climat politique assez particulier dans la région.

L’avocat André Soulier, ancien premier adjoint de Francisque Collomb entre 1983 et 1989 (adjoint depuis 1977), député européen (d’août 1992 à juin 1999) et vice-président du conseil régional (de 1983 à 1986), aurait pu aussi se présenter, souvent présenté comme le dauphin de Francisque Collomb. Il fut candidat dans les listes de Raymond Barre.

Au premier tour, les listes de Raymond Barre ont pris un léger ascendant sur les listes concurrentes au centre droit, celles d’Henry Chabert (qui suivaient de peu). Henry Chabert a donc perdu de justesse la mairie. Les listes de Raymond Barre et celles d’Henry Chabert ont fusionné pour le second tour le 18 juin 1995. Résultat, les barristes ont obtenu 26 élus, les noiristes 18 élus (ce qui n’était pas évident en début de campagne), et les socialistes de Gérard Collomb 27 élus.

Pour prendre la tête de la Courly le 11 septembre 1995, Raymond Barre a fait du Emmanuel Macron avant l’heure et a distribué 37 vice-présidences : 17 à l’UDF, 8 au RPR, 1 aux noiristes (Henry Chabert), 8 aux socialistes, 1 aux divers gauche et 2 sans étiquette). Malgré sa victoire, Raymond Barre a perdu deux arrondissements gagnés par la gauche (Gérard Collomb fut élu maire du 9e arrondissement) et deux candidats FN furent élus au conseil municipal de Lyon (ce qui était sans précédent).

Henry Chabert, loyal avec le nouveau maire Raymond Barre, fut reconduit le 25 juin 1995 dans ses fonctions d’adjoint au maire chargé de l’urbanisme (deuxième adjoint) et de deuxième vice-président de la Courly chargé de l’aménagement et du développement urbains, mais le courant n’est jamais passé franchement entre Henry Chabert et Raymond Barre (qui se méfiait beaucoup des noiristes et des élus RPR).

Voici ce que disait Henry Chabert de Raymond Barre : « Les relations sont complexes. J’admets ses grandes qualités sur un certain nombre de sujets et je peux dire que j’ai toujours obtenu son soutien dans un certain nombre d’actions qui n’étaient pas simples. Alors, il y a ce côté-là qui est très positif. À côté de cela, je l’irrite, je l’agace, j’ai le sentiment de lui hérisser le poil parfois. (…) Je suis un vilain petit canard, je suis d’une indépendance farouche, je dis ce que je pense avec un maximum de courtoisie mais sans détour. (…) [Raymond Barre] a cru bon de s’appuyer sur une espèce de majorité qui n’en était pas une. C’était vraiment une armée mexicaine sans capacité d’agir avec des déséquilibres politiques, et les actions n’ont pas été aussi fortes que celles attendues. C’est un peu ça qui fait la difficulté de nos relations. (…) C’est un nounours, un gros chat. Il a ce caractère félin et il appartient à la fois à l’ours et au beau chat. » ("Lyon People", le 29 août 2000).

De son côté, André Soulier fut désigné adjoint au maire chargé du tourisme et du rayonnement international (un domaine sur lequel Raymond Barre avait travaillé entre 1989 et 1995 à la demande du maire Michel Noir). Universitaire (ancien professeur de droit de François Fillon), Christian Philip fut élu premier adjoint de Raymond Barre entre 1995 et 2001 (plus tard, il fut élu député de la 4e circonscription du Rhône, succédant à Raymond Barre comme député entre 2002 et 2007).


Les années Chabert

Pendant presque onze ans (entre mars 1989 et février 2000), Henry Chabert fut le responsable urbain de Lyon, ville intra muros et agglomération du Grand Lyon. Ce fut lui qui lança de nombreux projets, la Cité internationale, le métro lyonnais, la réhabilitation de la rue de la République, la rénovation de la place des Terreaux, de la place des Célestins et de la place de la Bourse, le réaménagement de la Presqu’île, Lyon Confluence, la Porte des Alpes, le parc de Gerland, parc de la Fourvière, etc., il a mis de l’art dans les parkings.

Il a fait construire ou réaménager des centaines de parcs ou jardins publics, a lancé un programme de logements avec au moins 20% de logements sociaux, bien avant que ne l’imposât l’article 55 de la future loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). Il fut aussi à l’origine de l’inscription de Lyon au patrimoine mondial de l’Unesco (en 1998) et de la Fête des Lumières le 8 décembre à partir de 1998. Il fut également président de l’Agence d’urbanisme de Lyon de 1995 à 2001 et président de l’Association internationale pour le développement urbain (INTA) de 1999 à 2002.

Grâce à lui, Lyon, renfermée sur elle-même pendant de nombreuses décennies, s’est ouverte à l’international : « Lyon est devenue un exemple. Des délégations sont venues du monde entier pour visiter cette ville. » (Jean-Pierre Charbonneau, urbaniste et conseiller technique de 1989 à 2001, dans "Le Progrès" le 25 janvier 2017).

Partisan convaincu de la construction européenne (je me souviens d’avoir assisté à une réunion avec lui sur ce thème près de Grenoble dans les années 1990), Henry Chabert fut élu député européen de juin 1989 à juin 1994, siégeant à la commission des relations extérieures (à un moment historique : la Réunification allemande et l’effondrement de l’URSS ; il a exposé des crèches de Cracovie sur la place Bellecour), puis, prenant la succession de Michel Noir dans la 2e circonscription du Rhône (à la Croix-Rousse), il fut élu député de Lyon le 1er juin 1997 (jusqu’au 18 juin 2002) et siégea à la commission des finances.

Sa victoire aux législatives de 1997 fut personnelle car il s’était lancé sans l’investiture du RPR qui avait investi le candidat Marc Fraysse, député sortant de la 6e circonscription, soutenu également par le maire Raymond Barre et le premier adjoint Christian Philip.


Les élections de 2001 et 2002

Alors qu’il fut épargné par l’affaire Noir-Botton, Henry Chabert fut mis en examen le 1er février 2000 pour une affaire concernant les travaux de sa résidence secondaire. Raymond Barre l’a déchargé le jour même de ses responsabilités municipales et son ascension lyonnaise fut brutalement interrompue alors qu’il comptait se présenter de nouveau à la mairie de Lyon (les sondages le donnaient même favori pour la succession de Raymond Barre).

Henry Chabert a évoqué une tentative de déstabilisation : « L’ensemble de ce qui était contenu dans les lettres anonymes s’est progressivement dégonflé et aujourd’hui, puisque l’instruction est bouclée depuis le 29 juin [2000], vous avez pu voir que toute cette description qui a été faite me concernant à propos de relations ou autres s’est totalement dégonflée. Rien, dans l’ensemble de l’instruction, n’a été de nature à démontrer quoi que ce soit qui soit négatif dans ma responsabilité d’élu. Il reste une bataille d’experts sur la maison, ce qui n’est nullement fondé en droit, ce qui m’a fait naturellement déposer un mémoire en non-lieu. Et c’est tout. Il ne reste que cette affaire. Imaginez, on nous avait promis l’Himalaya et on se retrouve en train de grimper sur le gros caillou de la Croix-Rousse. » ("Lyon People", le 29 août 2000).



Le 19 janvier 2001, Henry Chabert a quand même inauguré sa permanence de campagne "Réussir Lyon" pour mener une liste "dissidente", mais la plupart de ses amis politiques ne l’ont pas suivi à cause de sa mise en examen : « Je pense qu’avec beaucoup de mes amis, quoi qu’il arrive, l’amitié ne disparaîtra pas ! » ("Lyon People" le 22 janvier 2001). Finalement, le tribunal de grande instance de Lyon l’a condamné en première instance le 2 février 2001 à un an de prison avec sursis, 100 000 francs d’amende et deux ans d’inéligibilité pour recel d’abus de biens sociaux. Il fut condamné le 23 janvier 2002 par la cour d’appel de Lyon à un an de prison avec sursis et deux ans d’inéligibilité, mais déjà sa condamnation en première instance rendait politiquement intenable sa candidature aux municipales de 2001.

Devant s’éclipser de la vie politique, Henry Chabert a laissé son suppléant (entre 1997 et 2002) Emmanuel Hamelin (conseiller régional de Rhône-Alpes entre mars 1998 et mars 2010), qu’il a "lancé" en politique, se présenter et lui succéder comme député de la 2e circonscription du Rhône entre juin 2002 et juin 2007 (battu ensuite par le PS).


Lyon sans Henry Chabert

Aux élections municipales de mars 2001, la division à droite était encore très forte mais il n’y avait plus de "noirisme". Ne se représentant pas aux municipales (comme prévu lors de son élection), Raymond Barre, à 76 ans, a pris progressivement sa retraite politique (il quitta le Palais-Bourbon en juin 2002).

L’ancien Ministre de la Défense Charles Millon, député de l’Ain, maire de Belley et surtout, ancien président du conseil régional de Rhône-Alpes (1988 à 1999), a décidé de se lancer à la conquête de la mairie de Lyon. Très contesté pour avoir été réélu le 20 mars 1998 à la tête de la région grâce aux voix des 35 conseillers FN, et déboulonné le 3 janvier 1999 par le Conseil d’État (dans le passé, il avait pourtant rejeté toute accord avec FN en déclarantnotamment dans "Le Point" le 25 janvier 1992 : « Le silence sur le FN est une complicité (…). L’alliance avec lui est collaboration. »). Après sa rupture avec l’UDF pour cause d’alliance avec le FN, Charles Millon s’est "enfoncé" dans l’ultra-droite catholique traditionnelle, très présente à Lyon (celle de la "Manif pour tous"). Dans cette démarche, il fut soutenu entre autres par Chantal Mérieux, Monique Raimond et Gérard Pélisson (cofondateur du groupe Accor).

Face à Charles Millon, en dehors du sénateur socialiste Gérard Collomb, perpétuel candidat depuis 1989, qui a réussi à obtenir avec lui l’union de la gauche plurielle (PS, PCF, écologistes), le centriste Michel Mercier, sénateur et président du conseil général du Rhône (futur Ministre de la Justice de Nicolas Sarkozy), fut investi comme le candidat UDF-RPR à la mairie de Lyon en 2001.

Mais au premier tour, le 11 mars 2001, les listes de Charles Millon ont fait un très bon score, dépassant même Michel Mercier dans le 5e arrondissement où il s’était présenté. Désavoué par les électeurs, Michel Mercier renonça à poursuivre le combat électoral entre les deux tours, et laissa le député RPR et chirurgien Jean-Marie Dubernard, adjoint au maire sortant, reprendre le leadership de l’alliance UDF-RPR. Les listes millonistes et UDF-RPR ont fusionné pour le second tour le 18 mars 2001, avec une grande majorité de candidats millonistes. Finalement, Gérard Collomb fut élu maire de Lyon et commença son premier mandat (il en était à son troisième lorsqu’il fut nommé Ministre d’État, Ministre de l’Intérieur).


Les élections de 2007 et 2008

Henry Chabert a tenté de revenir dans le jeu politique lyonnais en se présentant aux élections législatives de juin 2007 dans la 6e circonscription du Rhône (à savoir, la commune de Villeurbanne). S’il a fait un beau score au premier tour du 10 juin 2007, avec 36,8% face à sa concurrente socialiste Pascale Crozon (alors adjointe au maire de Villeurbanne et conseillère régionale de Rhône-Alpes) avec 25,8%, cette dernière l’a largement emportée au second tour du 17 juin 2007 avec 53,8% contre 46,2% à Henry Chabert (sans beaucoup de surprise, Villeurbanne, la ville de Charles Hernu, étant considérée plutôt comme une terre de centre gauche, la circonscription a été gagnée en juin 2017 par un candidat LREM, entrepreneur connu).

Henry Chabert a fait une dernière incursion électorale aux élections municipales de mars 2008. Comme Lyon fut réservé à l’ancien Ministre de la Justice Dominique Perben (candidat à la mairie de Lyon dès 2003), il a dû se "contenter" de la (grande) ville limitrophe, Villeurbanne, comme candidat UMP à la mairie face au maire sortant Jean-Paul Bret, député socialiste (son prédécesseur Gilbert Chabroux est mort le 1er décembre 2017 à 83 ans).

Au premier tour du 9 mars 2008, la liste de Jean-Paul Bret est arrivée largement en tête avec 46,6%, distançant celle d’Henry Chabert avec seulement 23,8% et celle du MoDem menée par Richard Moarales avec 14,6% qui s’est maintenue au second tour. Avec un tel rapport de forces, il était impossible à Henry Chabert de remporter la victoire le 16 mars 2008 : il n’a obtenu que 27,5%, devançant la liste MoDem avec 16,0%, toutes les deux battues par celle de Jean-Paul Bret avec 56,5%. Élu conseiller municipal de Villeurbanne, Henry Chabert a pu cependant se faire élire conseiller communautaire à la Courly pour le mandat entre 2008 et 2014. Quant à Lyon, Dominique Perben échoua même dans le 3e arrondissement où il s’est présenté, dès le premier tour, ce qui a permis la réélection de Gérard Collomb avec une solide avance.


Tourné vers l’international

Après cet échec d’il y a dix ans, Henry Chabert quitta la vie politique lyonnaise définitivement et se consacra à un métier de consultant en affaires urbaines, spécialisé dans le développement culturel et économique et aussi dans l’éclairage urbain, en particulier à Marrakech.

Dans les salons dorés du Quai d’Orsay, le 11 octobre 2011, il a reçu, très ému, les insignes de chevalier de la Légion d’honneur par le ministre des lieux, Alain Juppé.


Des témoignages unanimes

À la nouvelle de la disparition d’Henry Chabert, toute la classe politique lyonnaise, y compris ses opposants politiques comme le maire de Lyon (à l’époque) Gérard Collomb et la Ministre de l’Éducation nationale (à l’époque) Najat Vallaud-Belkacem (qui fut une élue lyonnaise), ont rejoint sa famille et amis dans la tristesse. Voici quelques réactions à chaud…

Michel Noir (qui avait milité à l’UJP, jeune de l’UDR, avec lui dès 1967) : « [Il] a su irriguer de sa fibre humaniste toutes les vies qui ont été les siennes. Celle de l’homme d’entreprise qui croyait au dialogue social et à la participation. Celle de l’homme politique soucieux de bâtir un espace urbain fait de mixité sociale et de partage culturel. Celle du croyant attaché aux valeurs familiales et à la primauté de la personne. (…) Sa conviction européenne traduisait sa conviction que l’ouverture au monde et non le repli sur soi était la peule politique utile à notre pays. » ("Le Progrès", le 18 janvier 2017).

Michel Havard, candidat UMP à la mairie de Lyon en 2014, ancien député de Lyon (2007-2012) et ancien assistant parlementaire d’Henry Chabert (1997-2001) : « Je voudrais ici parler de l’homme que j’ai connu et que j’avais l’habitude de présenter comme mon père politique. Je l’ai connu alors qu’il était député européen. J’étais alors étudiant en droit et militant associatif pro-européen. J’ai très vite compris que son engagement politique était tourné vers l’homme. Henry Chabert était un humaniste par nature. Par son caractère et sa sensibilité, il était étranger à tout sectarisme. Il n’aimait pas les positions extrêmes, les attitudes de rejet et plaidait la tolérance, l’échange et l’écoute dans tous les cercles qu’il côtoyait. Son ouverture au monde, acquise lors des voyages qu’il effectuait sous ses différentes casquettes, renforçait cette conviction profonde chez lui que l’humain était ce qui devait nous guider dans nos décisions et que l’urbain était un moyen et pas une finalité. (…) Il était aussi un homme de culture (…). Pour lui, elle était essentielle à l’équilibre des hommes, au vivre ensemble et à la réussite des projets urbains. (…) Je peux même témoigner qu’en 1995, après l’élection de Raymond Barre à mairie, il avait hésité à lui proposer d’occuper le poste d’adjoint à la culture à ses côtés. » (Conseil municipal de Lyon, séance du 27 mars 2017).

Gérard Collomb : « Nous partagions un même attachement à la construction de notre ville, une même volonté d’en accroître la beauté par la même exigence sur les formes architecturales, la qualité des espaces publics, l’élégance de la mise en lumière de nos bâtiments. » (19 janvier 2017).

Maurice Charrier, ancien maire communiste de Vaulx-en-Velin (1985-2009) et vice-président du Grand Lyon (2004-2014) : « Je garde en mémoire l’éloquence, l’élégance de la pensée et surtout l’humanisme exprimé. Je garde aussi en mémoire sa fidélité à ses engagements mais aussi son ouverture au dialogue. (…) Nous avons partagé bien des audaces et même des utopies pour faire face à des moments difficiles. Un de ses traits de personnalité était la fraternité, cette valeur qui permet au-delà des différences, qui nous marquent tous, de vivre ensemble et de partager. ».

Ariella Masboungi, architecte-urbaniste en chef de l’État, Grand prix de l’Urbanisme 2016 : « Nourri des leçons de l’excellence barcelonaise, il a inventé le modèle lyonnais de métamorphose de l’espace public, en appui sur ses services qu’il a su structurer et réorganiser, mais aussi en faisant appel à des concepteurs remarquables [Michel Corajoud, Renzo Piano, Michel Desvigne, Alain Marguerit, Alexandre Chemetoff, etc.] (…). Un grand projet fait de multiples démarches, avec le souci d’un passage à l’acte à la hauteur de ses ambitions pour la métropole. Sa disparition prématurée le prive d’un Grand prix de l’Urbanisme qui aurait dû lui revenir, depuis que sa carrière l’a réorienté sur le conseil en France et à l’international faisant bénéficier d’autres territoires de son talent et de sa capacité visionnaire. C’est une grande perte pour le monde de l’urbanisme et un exemple à méditer à l’heure où le courage d’entreprendre semble moins à l’ordre du jour. » (La revue "Urbanisme" n°403).


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (17 janvier 2018)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Interview de "Lyon People" publiée le 29 août 2000.
Henry Chabert.
Raymond Barre.
Lucien Neuwirth.
Édouard Herriot.

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1 réactions à cet article    


  •  C BARRATIER C BARRATIER 19 janvier 2018 17:33

    On le savait déjà, nul n’est irremplaçable.

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