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Accueil du site > Actualités > Politique > Histoire et politique : merci, Monsieur de Villepin

Histoire et politique : merci, Monsieur de Villepin

Une clarification utile et bienvenue : celle de Dominique de Villepin, dans un contexte chargé de mauvaises passions. En Europe, aujourd’hui, ce n’est ni aux gouvernements ni aux parlements de dire quelle est l’Histoire... L’histoire officielle est officielle, mais n’est pas l’Histoire... C’est comme la Vérité. N’a-t-on pas assez tiré les leçons des régimes où l’Histoire est téléguidée ? Savoir distinguer la croyance et le savoir, et faire face aux réalités, loin des vaines nostalgies ou des rancoeurs entretenues…

Enfin, un constat de bon sens, au plus haut niveau gouvernemental. Dommage que le Premier ministre n’ait pas réagi plus tôt. Avant les manifestations antillaises, notamment. Avant le vote des députés de l’UMP. Mais ce qu’il a déclaré hier, sur France-Inter, doit être entendu. C’est à son ministre de l’Intérieur de faire, sur ce point précis, « repentance » ... « Ce n’est pas au Parlement d’écrire l’histoire », a estimé Dominique de Villepin, faisant référence à la loi du 23 février 2005 sur les rapatriés, qui évoque le "rôle positif" de la colonisation. « Ce n’est pas aux politiques, ce n’est pas au Parlement d’écrire l’histoire ou de dire la mémoire. C’est la règle à laquelle nous devons être fidèles [...] Il n’y a pas d’histoire officielle en France ». Heureusement. Sinon, ne parlons plus des "Lumières"...

Il faut « un temps d’apaisement, un temps de dialogue ; [...] que des gestes soient faits qui permettent d’avancer tous ensemble », a ajouté M. de Villepin. « Il revient à l’inspection générale de l’éducation nationale de faire les programmes [...] Et les enseignants sont libres dans le cadre de ces programmes de leur enseignement. » Le premier ministre a estimé qu’il fallait « regarder notre histoire en face, surtout les questions qui dérangent. Il faut trouver les moyens de la regarder avec sérénité [...] Dans notre pays, il n’y a pas une mémoire, mais des mémoires. Ces mémoires, elles sont à vif, parfois même écorchées, souffrantes. Dans l’histoire de la colonisation, ceux qui ont été jetés dans le ventre des galions, qui ont traversé l’Atlantique pour être amenés au cœur des plantations : ce sont des souvenirs qui sont vivants. Quand vous allez à la Guadeloupe, à la Martinique, vous le voyez, tout cela sécrète encore de grandes douleurs », a expliqué M. de Villepin. « Nous devons trouver le moyen de la regarder avec sérénité, c’est là que l’historien est indispensable », a poursuivi le chef du gouvernement, considérant qu’un « simple acte de contrition ne suffit pas ».

Merci, Monsieur de Villepin... même si les sondages donnent raison à ceux qui veulent mettre en relief les « aspects positifs de la colonisation ». La France aurait moins de difficultés à affronter les problèmes d’aujourd’hui, si les Français savaient mieux regarder leur passé en face.

Il ne s’agit en rien de se plonger dans une masochiste « repentance ».

Il ne s’agit pas de juger hier et avant-hier avec notre regard et nos valeurs d’aujourd’hui. La colonisation, cette post-croisade et cette pré-mondialisation, n’est pas une exclusivité française...

Il ne s’agit pas d’alimenter ni d’encourager les rancunes, les rancœurs, les griefs, les injustices, les visions sélectives des «  indigènes de la République » ou des militants d’un tiers-mondisme plus passéiste que porteur d’avenir.

Il s’agit de ne pas confondre le croire et le savoir. Et de fonder ce «  vivre ensemble » si difficile et si menacé, sur une quête de vérité qui passe par des confrontations des mémoires, des limages de cervelles, des études sérieuses. Et par le respect mutuel.

L’ histoire officielle est comme la vérité du même nom. Elle est officielle, non histoire. Et l’on sait trop où conduit l’histoire téléguidée par les politiques : au nationalisme, facteur de guerre, au révolutionnarisme romantique, responsable de tant de désillusions, aux dictatures, si chargées d’injustices, et aux totalitarismes, si écrasants pour la personne humaine.


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4 réactions à cet article    


  • (---.---.162.15) 14 décembre 2005 12:35

    Les propos de M. Villepin seraient intéressants s’il n’était pas premier ministre. Il l’est, alors qu’attend-il pour abroger cet article de loi ? Plutôt que de gloser (au sens premier, non péjoratif), il ferait mieux d’agir. Pareil pour M. Chirac et ceux qui ont refusé d’abroger l’article tout en le critiquant. Ces attitudes deviennent exaspérantes.

    Quant aux sondages, je rappelle que d’après le site expression publique, il y a 57% pour l’abrogation et 35% contre. Comme quoi on peut croire qu’il y des aspects positifs et ne pas vouloir l’écrire dans la Loi.

    Am.


    • Emile Red (---.---.84.39) 14 décembre 2005 16:37

      Il y a l’Histoire, l’histoire officielle et l’histoire selon Mr Riot.

      La volte face de Mr de villepin n’est qu’une tentative pour dissimuler l’origine de ce texte onirique.

      L’UMP, malgré les gratouillis internes, est un bloc monolithique où il est bon parfois de se démarquer, espoir de voir la côte au marché électoral grimper.

      Mais la duperie est claire, la loi est et restera, n’en déplaise aux conciliateurs baisse-culotte.


      • Sylvain Reboul (---.---.123.53) 15 décembre 2005 14:44

        Je considère que le débat sur cette affaire est pour le moins confus car il mélange la considération objective des faits et le jugement de valeur nécessairement subjectif sur eux. La colonisation est un fait ; ce fait est jugé négativement par les populations qui l’ont subi. C’est aussi un fait que la colonisation dans son principe était un déni de droit du point de vue des règles de la démocratie et de la république dont se réclamait la puissance coloniale (comme du reste l’esclavage). Cette contradiction entre valeurs fondamentales et réalité du comportement de la puissance coloniale est en effet objective et non pas seulement subjective, elle mérite en tant que telle d’être mentionnée par l’historien.

        Maintenant que la présence française ait eu certains effets positifs pour les populations colonisées ne justifie en rien que la colonisation en elle-même ait été positive, sinon du point de vue des colonisateurs et de leurs serviteurs. Rien ne peut donc valider objectivement un tel jugement global ; cela interdit à des historiens, en tant que tels, de se risquer à émettre un tel jugement partial, ou alors ils ne sont plus des historiens mais des moralistes.

        Mais ce qui est vrai des historiens, l’est davantage en démocratie encore du parlement dont le rôle n’est pas d’imposer une appréciation subjective sur les faits historiques en forme de (pseudo)vérité officielle, laquelle n’a aucun sens puisque un tel jugement ne relève pas de la vérité mais du jugement moral sur les faits.

        Cela est tout à fait autre chose que de refuser le négationnisme dès lors que les chambres à gaz sont des faits et non des jugements de valeur, et que ces faits sont admis comme des crimes contre l’humanité ; là on n’est plus dans la sphère de l’histoire mais de la justice fondée en droit. Or c’est un des devoir de l’état de dire le droit et de le faire respecter.


        • Briou (---.---.10.218) 16 décembre 2005 22:19

          Une fois de plus, notre premier ministre, ce cher Gallouzeau de Villepin ne fait que brasser du vent !!!

          En n’abrogeant pas le texte de loi, sa déclaration ne sert strictement à rien ...

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