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Hollande en meeting au Bourget

La vie politique est curieuse. Il y a un peu plus de trois ans – c’était donc hier à peine – François Hollande quittait la direction du Parti socialiste au Congrès de Reims sous les ricanements et les huées.

A l’époque, pour beaucoup de militants et de responsables socialistes, il portait la responsabilité des divisions et pataquès internes. Il incarnait le summum de la ringardise et des pesanteurs d’un appareil politique.

Qu’est-ce qui a donc changé pour que cet homme suscite aujourd’hui des sentiments totalement inverses ?

Rien ou si peu, malgré une brillante victoire aux Primaires citoyennes l’année dernière.

Ce n’est pas moi qui le dis. C’est François Hollande lui-même :

« C’est vrai que je ne m’exhibe pas, je reste moi-même, c’est ma force. Ce que vous voyez ici, c’est ce que je suis [...] Je n’ai pas besoin de changer en permanence pour être moi-même. »

On aura raison de voir dans cet extrait une allusion à Nicolas Sarkozy et à son meeting du 14 janvier 2007. Dans une campagne électorale qui débute, cela va de soi.

Cependant, il faut aller, me semble-t-il, au-delà de ce premier degré de lecture car au Bourget, François Hollande s’est d’abord et avant tout adressé aux responsables socialistes siégeant aux premiers rangs, bien distincts de la joyeuse et bruyante plèbe militante, un peu à l’image des aristocrates du temps jadis qui disposaient à l’office de places réservées pour mieux écouter le sermon du curé.

En signifiant à ces derniers qu’il est resté lui-même, j’aime à croire que François Hollande les mettait aussi face à ces jeux d’appareil, à ces déclarations individuelles intempestives, à ces volte-faces et autres circonvolutions qui constituent une large part de la cuisine politique en général et de la cuisine socialiste en particulier. Cuisine dont François Hollande est d’ailleurs un expert reconnu comme en témoigne le sobriquet de « Culbuto » qui, longtemps, fut associé à son nom.

J’ai écouté son remarquable discours. Et j’ai aimé sa prestation. Toutefois, contrairement aux commentaires plus ou moins dithyrambiques de la presse et aux formules de circonstances, je n’ai pas perçu que François Hollande « avait fendu l’armure » en quoi que ce soit. Je le savais excellent orateur. Je n’en attendais pas moins de lui. C’est comme quand j’entends des militants du Front de Gauche s’extasier devant la prétendue nouveauté des envolées verbales de Jean-Luc Mélenchon alors qu’elles ont maintes fois résonné dans les enceintes des congrés socialistes.

Que François Hollande parle de lui et de son parcours, c’est bien le moins qu’il pouvait faire. C’est un exercice incontournable pour quiconque se présente à l’élection présidentielle.

Au Bourget, François Hollande a donc fait du François Hollande, en adaptant naturellement son discours aux exigences du défi qui est désormais le sien. Cette adaption s’est faite sobrement, sans grandiloquence excessive, et avec ce souci manifeste d’apparaître déjà comme le challenger le plus sérieux et le plus crédible à Nicolas Sarkozy.

Voilà pour la forme.

Sur le fond maintenant, son discours m’a séduit, car il reprend les positions les plus fortes de Ségolène Royal, notamment sur le contrôle des activités financières et bancaires, qui est indissociable d’une politique en faveur de l’emploi, et sur la lutte contre l’insécurité.

« Je vais vous dire qui est mon adversaire, mon véritable adversaire. Il n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera donc pas élu, et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c’est le monde de la finance [...] Si la finance est l’adversaire, alors il faut l’affronter avec nos moyens et d’abord chez nous, sans faiblesse mais sans irréalisme, en pensant que ce sera un long combat, une dure épreuve mais que nous devrons montrer nos armes. Maîtriser la finance commencera ici par le vote d’une loi sur les banques qui les obligera à séparer leurs activités de crédit de leurs opérations spéculatives. Aucune banque française ne pourra avoir de présence dans les paradis fiscaux [...] Non, je proposerai une véritable taxe sur les transactions financières, avec ceux en Europe qui voudront la mettre en euvre avec nous. Je proposerai aussi, si l’on veut éviter d’être jugés par des agences de notation dont nous contestons la légitimité de mettre en place au niveau européen une agence publique de notation [...] La réindustrialisation de la France sera ma priorité. Je créerai une banque publique d’investissement qui, en complément des fonds réggionaux, accompagnera le développement des entreprises stratégiques [...] J’exigerai des entreprises qui se délocalisent quand elles remboursent immédiatement les aides publiques reçues. Je donnerai priorité aux PME : ce sont elles qui embauchent, ce sont elles qui doivent être aidées avant tout »

On dirait vraiment du Ségolène Royal dans le texte.

Ce fut pour moi la véritable surprise de ce discours car j’attendais Hollande sur des positions plus modérées, c’est-à-dire davantage dans la lignée d’un social-libéralisme à la Strauss-Kahn (horresco referens !).

La droite n’a pas manqué d’ironiser sur le caractère incantatoire et irréaliste du discours du candidat socialiste.

Disons les choses comme elles sont : le discours de François Hollande n’est pas plus irréaliste et incantatoire que les centaines de discours de Nicolas Sarkozy sur la refonte et la moralisation du capitalisme. On en mesure aujourd’hui le résultat.

Le discours de François Hollande n’est pas plus irréaliste et incantatoire que les centaines de discours de Jean-Luc Mélenchon qui passe son temps à titiller le surmoi gauchiste d’une frange de l’électorat en promettant la fin du capitalisme.

Le discours de François Hollande n’est pas plus irréaliste et incantatoire que les centaines de discours de Marine Le Pen qui promet que la France ne pourra s’en sortir que si elle est seule, isolée et enfermée dans ses frontières et dans une politique résolument raciste et xénophobe.

Le discours de François Hollande n’est pas plus irréaliste et incantatoire que les centaines de discours contradictoires de François Bayrou.

Le discours de François Hollande n’est pas plus irréaliste et incantatoire que les envolées lyriques de Dominique de Villepin dont le seul but est de faire chuter Nicolas Sarkozy afin de régler mesquinement ses comptes après l’affaire Clearstream.

Non, le discours de François Hollande est légitime, respectable et responsable. Et c’est pour cela qu’il peut gagner le coeur de millions de gens qui souhaitent ardemment en finir avec le sarkozysme.

Idem sur la lutte contre l’insécurité, domaine dans lequel la gauche traîne, à tort ou à raison, une image de laxisme :

« L’égalité, l’égalité, c’est aussi la sécurité pour tous. Vivre dans la peur est insupportable ! L’insécurité est une injustice sociale intolérable. Elle touche les plus modestes, les plus âgés, les plus jeunes, les plus fragiles. La sécurité est un droit et je le ferai respecter en créeant des zones de sécurité prioritaires là où il y a les taux de délinquance les plus élevés, en mettant des postes supplémentaires [...] dans la Justice, dans la Police, dans la Gendarmerie, en rapprochant les Forces de l’ordre des citoyens. Et je lutterai contre tous les trafics, toutes les mafias. Pas plus que je n’accepte la délinquance financière, la fraude fiscale, pas plus je ne tolérérai qu’un petit caïd avec sa bande mette une cité en coupe réglée et fasse vivre à ses habitants un enfer. Tous ceux-là , les délinquants financiers, les fraudeurs, les petits caïds, je les avertis : ceux qui ont pu croire que la loi ne les concernait pas, le prochain président les prévient, la République, oui, la République vous rattrapera ! »

Je vois dans ces deux temps forts du discours de François Hollande non seulement un juste retour des choses pour celle qui fut la candidate socialiste à la présidentielle de 2007 mais aussi la confirmation de l’actualité et de la pertinence de ses propositions pour la France.

Hollande a tenu un discours bien ancré à gauche même si celui-ci fut émaillé de propositions plus baroques. Notamment le droit de vote des ressortissants non européens aux élections municipales (vieille revendication socialiste à laquelle je suis personnellement opposé) ou le fait de mettre la loi de 1905 sur la séparation de l’église et de l’Etat dans la Constitution (la laïcité y figure déjà à l’article 1) avec toutes les difficultés d’application aux départements français sous régime concordataire.

Hollande a également tenu un discours bien ancré dans l’indispensable construction européenne dont on sait qu’elle a permis aux Etats de notre continent un développement économique dans la paix, même si, bien sûr, celle-ci demeure un chantier permanent.

Sa réaffirmation de l’importance décisive de l’axe franco-allemand m’a paru essentielle et réconfortante en cette période où certains candidats, plus amnésiques de notre histoire que d’autres, proposent de jeter le bébé avec l’eau du bain. Elle est un signal lancé aux électeurs allemands qui, en 2013, seront appelés aux urnes pour les élections fédérales.

François Hollande doit prochainement détailler les points de son programme politique, économique et social pour les cinq ans à venir.

 Bonne chance à lui pour cette campagne qui promet d’être rude !

(Ce billet a été publié initialement sur Le Blog de Gabale)


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16 réactions à cet article    


  • bnosec bnosec 24 janvier 2012 12:46

    "François Hollande doit prochainement détailler les points de son programme politique, économique et social pour les cinq ans à venir."

    Brrr j’en frissonne d’avance !


    • REGCHA REGCHA 24 janvier 2012 13:55

      Fondamentalement, Hollande est de centre-doit social, c’est-à-dire libéral en économie (il a annoncé qu’il était pour l’autonomie des établissement scolaires) avec un peu de saupoudrage social pour les gueux.


    • kéké02360 24 janvier 2012 13:43

      un meeting au Bourget pour essayer de décoller dans les sondages !!!!!!!! smiley

      Pour l’instant l’Airbuse flamby neuf est cloué au sol smiley smiley

      Les Français(e)s pourraient voter utile en 2012 en se débarrassant de la racaille de droite UMP-PS dès le premier tour !!!!! smiley

      C’ EST POSSIBLE  !!!!! smiley

      Vivement le retour à la démocratie smiley


      • nicolas flamel 24 janvier 2012 19:09

        Retour à la démocratie avec Madame la Marquiise de Montretout ??????


      • Pelletier Jean Pelletier Jean 24 janvier 2012 14:46

        Oui Francois Hollande trace tranquillement son chemin depuis plus de deux ans, étapes par étapes.

        Il est vrai qu’il a quitté le premier secrétariat du PS sous les ricanements. Il ne s’est pas démonté pour autant et a commencé un long tour de France. Au début les salles étaient petites, puis l’assistance de plus en plus nombreuse. Au cours de ces tournées il a beaucoup expliqué, mais il a aussi beaucoup reçu.

        Pas étonnant que l’auteur puisse retrouver dans son discours du Bourget un peu de Ségolène Royal. Il a compris ce que les français attendaient de la politique, être un peu plus entendus et pris en considération.

        http://www.over-blog.com/profil/blogueur-984719.html


        • bnosec bnosec 24 janvier 2012 15:13

          « Il a compris ce que les français attendaient de la politique »

          Exact : des paroles, des promesses, un grand flou sur le programme, et un pseudo changement qui ne boulverse surtout pas leurs petites habitudes bourgeoises de canapé / plateau TV.


        • penajouir penajouir 24 janvier 2012 15:00

          Quand le flan gigote, la crème tourne... Putain ça fout les jetons, Ouioui qui hausse le ton.


          • bernard29 bernard29 24 janvier 2012 15:30

            je crois que jamais autant que pour cette échéance politique, Ségolène Royal était prête. La France est passée a côté de quelque chose, encore une fois à cause de ce parti socialiste sclérosé. 
            je vote Hollande avec ce dépit, mais ça ne doit pas nous pousser à redoubler d’éfforts dans la lutte pour le changement de notre systéme démocratique.
            http://changerlarepublique.over-blog.com/


            • kéké02360 24 janvier 2012 16:41

              T’es en pleine confusion Nanard , çà veut rien dire ce que t’écris !!!!!

              Je t’en pris !!! arrêtes la gégène devant la photo de Ségolène !!! smiley

              Allez fais moi plaisir , nettoies ton clavier smiley

              Hollande , oh désespoir , oh détresse ennemie , n’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie !!!!

              Vous voulez pas me croire mais la racaille UMP-PS , nous pouvons la virer dès le premier tour smiley

              C ’EST POSSIBLE  !!!!!!!!!!!!!! allez un peu de courage , si vous ne le faites pas pour vous, faites le pour vos enfants smiley


            • bernard29 bernard29 24 janvier 2012 16:47

              je t’ai moinssé, pour le plaisir parce que je ne le fais jamais. 
              je t’avoue que je me trompe toujours aux élections.


            • kéké02360 24 janvier 2012 20:35

              @ Nanard

              c’est bien Nanard de m’avoir moinssé pour le plaisir , çà prouve que tu t’affirmes et que tu peux trouver un succédané pour sortir de l’addiction que tu as pour Ségolène  !!!! smiley

              Sinon pour le vote c’est normal que tu te trompes à chaque fois si à chaque fois tu votes pour les éléphants du PS smiley  smiley

              sacré Nanard smiley


            • kéké02360 24 janvier 2012 20:36

              Les éléphants çà trompe énormément smiley


            • kssard kssard 24 janvier 2012 17:01

              @l’auteur, 


              merci pour cet article très bien rédigé, 

              Le discours de Hollande est salué par la presse. 

              Hollande monte dans les sondages. 

              Sarko annonce parallèlement qu’il y pourrait quitter la scène et disparaître de la vie politique. Ce n’est pas une faute politique mais plutôt la reconnaissance que la partie est bientôt pliée. 

              L’écran de fumée de la TVA sociale, de la taxe Tobin et du Grand Sommet Social est inopérant. Le petit homme agité est dépité. 

              La victoire qui se dessine est aussi un espoir pour toute l’Europe qui est vérouillée depuis de année par la politique de MERKOZY. Répartissons les richesses, supprimons les privilèges et tout ira mieux. 



              • nicolas flamel 24 janvier 2012 19:29

                Bonjour kssard (24.01.2012 17 ;01)

                Est-il crédible d’annoncer qu’on va quitter la vie politique quand on va se retrouver à vie membre de droit du Conseil Constitutionnel ?

                Encore une « parole verbale » dont on peut deviner une fois encore ce qu’il en adviendra. 


              • kssard kssard 24 janvier 2012 21:27

                @flamel,


                Tout à fait d’accord avec vous. Ce personnage est complètement discrédité. 

                Simplement, je voulais mettre l’accent sur le fait qu’il est complètement sonné et que sans doute on n’est pas loin du ko technique. 

                Je pense aussi qu’il s’est tellement pris pour le maître du monde, le sauveur de l’europe à la petite semaine (16 fois en un an et demi) qu’il doit être profondément déprimé. 

                Cet état dépressif est d’autant plus prégnant que l’ego de l’individu est disproportionné. Ces propos lâchés dans le presse relèvent concrètement à acte compulsif. 

                La dépression caractérise essentiellement un état de perte de motivation ou d’élan vital chez un individu, associé ou non à différents symptômes. Les symptômes les plus caractéristiques sont une perte d’espoir, d’envie, d’estime de soi. D’autres signes peuvent survenir, tels que l’anxiété ou l’angoisse, la fatigue, la tristesse, des pensées négatives, des idées noires, des intentionssuicidaires ou d’autres modifications de l’humeur et, dans certains cas extrêmes, des hallucinations.
                 
                Imaginez un instant, qu’une campagne soit lancée sur le thème « rendez l’argent » (distribué). Il y a réellement matière à « péter un boulon ». 


              • maxime 24 janvier 2012 21:09

                "Hollande s’est d’abord et avant tout adressé aux responsables socialistes siégeant aux premiers rangs, bien distincts de la joyeuse et bruyante plèbe militante, un peu à l’image des aristocrates du temps jadis qui disposaient à l’office de places réservées pour mieux écouter le sermon du curé."

                ça commence bien ! Est-ce prémonitoire ?

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