La crise institutionnelle que traverse le Liban semble interminable
Le blocage présidentiel
Le mandat de Michel Sleiman s’est achevé le 24 mai dernier ; le Liban connaît une vacance de la présidence depuis maintenant plus de 200 jours. La majorité aux deux tiers est requise pour déclarer un candidat gagnant à la tête de la fonction suprême. Durant la dernière session, seulement 56 des 128 membres du Parlement étaient présents ; une nouvelle session a donc été prévue pour le 7 janvier 2015. Les députés du 8-mars se sont engagés dans un véritable boycott des sessions parlementaires, empêchant ainsi les sessions de se tenir puisque le nombre de députés nécessaire pour élire le Président n'est pas atteint.
La longévité de la crise présidentielle semble montrer que le CPL (avec son allié, le Hezbollah) souhaiterait imposer de nouvelles conditions à sa participation au processus présidentiel. En effet, le parti chrétien voudrait un amendement de la Constitution afin que l'élection présidentielle soit au suffrage universel à deux tours, avec un premier tour réservé aux électeurs chrétiens et un second à tous les libanais afin de renforcer le poids politique des chrétiens au Liban.
Les opposants politiques du CPL considèrent que l'élection de Michel Aoun à la présidence relèverait d'une manœuvre politique du Hezbollah afin de protéger la livraison d'armes au régime de la Syrie ainsi que l'implication militaire du parti de Dieu à ses côtés (Hassan Nasrallah, lors de son discours suite aux commémorations de l'Achoura a publiquement déclaré son soutien à M. Aoun). Michel Sleiman, président sortant, s'était distingué par sa politique de distanciation du conflit syrien et avait parfois même ouvertement critiqué les prises de positions du Hezbollah en Syrie.
Sous le parrainage et la médiation du chef du Parlement, Nabih Berri, le Hezbollah et le Courant du Futur sont entrés en négociation pour tenter de trouver une issue à la crise présidentielle entre leurs candidats opposés, Samir Geagea pour l'alliance du 14-mars et Michel Aoun pour le 8-mars.
Le pouvoir du Président de la République, au Liban, est certes restreint (ses décisions peuvent être rejetées par un vote majoritaires des parlementaires, le Premier ministre détient le pouvoir sur l'organe exécutif...) mais il est perçu comme un personnage unificateur et consensuel de la vie politique libanaise ainsi que le garant de l’unité de l’armée. Son élection paraît d’autant plus cruciale en cette période de tensions confessionnelles et de menaces régionales grandissantes.
Cette impossibilité d’élire un président de la République suscite chez nombre de libanais la crainte de changer la formulation actuelle du système politique, basée sur le partage des pouvoirs et des institutions entre les différentes confessions au Liban. La composante chrétienne soupçonne une volonté, sur le long terme, de remettre en cause l'équilibre interne libanais et de le réorganiser sur la base des nouveaux équilibres résultant de la montée en puissance des partis chiites, soutenus par Iran et la Syrie et du pouvoir sunnite, soutenu par l'Arabie saoudite et d'autres pays du Golfe.
Ainsi, les principes de partage du pouvoir définis par les Accords de Taëf sont en jeu et les récentes déclarations et suggestions du chef du Hezbollah selon lesquelles une assemblée constituante devrait être convoquée afin de trouver une issue au blocage institutionnel, nourrissent ces craintes de réexamen de l’accord.
Le scénario le plus probable serait que les médiateurs régionaux tentent de trouver un « compromis » autour d’une figure consensuelle sans réelle autorité sur le pays et avec peu de marge de manœuvre., certains noms restent pressentis, bien que concernant des personnes n'ayant pas fait acte officiel de candidature. Il convient néanmoins
Certains noms sont pressentis, bien que concernant des personnes n'ayant fait acte officiel de candidature. Il convient de citer : Jean Obeid, Georges Khoury et Jean Kahwaji. Il semblerait que leur point commun est d’avoir la bénédiction du Hezbollah et donc de la Syrie.
Il parait également que le plus lié au régime d’Assad serait Jean Obeid qui de :
-1983 à 1987 était l’un des principaux conseillers politiques du président Gemayel et a contribué à son rapprochement avec le régime de Damas ;
-1993 à 1998 avait servi de ministre d’état dans le gouvernement de Hariri ;
-2003 à 2004 occupait le poste de ministre des affaires étrangères. A l’époque, il a pu enlever le terme Syrie de la résolution 1559 des Nations Unis qui demandait le retrait des forces étrangères du Liban.
http://en.wikipedia.org/wiki/Jean_Obeid
Jean Kahwaji serait le premier candidat qui a réellement la faveur du Hezbollah : la synergie entre les Forces armées libanaises (FAL) et le Hezbollah s’est concrétisée pendant son mandat comme le dévoile cet article :
https://now.mmedia.me/lb/en/commentaryanalysis/546430-no-need-for-compromise
Georges Khoury a occupé plusieurs postes à responsabilité dans les services de renseignements de l’armée, dont il était finalement devenu le chef. Comment arriver à accéder à cette fonction sans avoir été proche des services secrets syriens ? D’ailleurs il est même accusé d’avoir pratiqué des tortures à l’égard des détenus dénoncés par la Fédération des ligues des droits de l’homme :
La France s'est récemment particulièrement activée pour trouver une issue à la crise institutionnelle actuelle au Liban. Jean-François Girault, Directeur de la section d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient a été envoyé par le Ministre français des Affaires Etrangères à Beyrouth. Il devrait se déplacer à Téhéran puis à Riyad pour tenter de trouver une issue à la crise.
La reconduction du mandat du Parlement
Après avoir été renouvelé jusqu'en novembre 2014, le mandat des parlementaires libanais a été prorogé jusqu'en juin 2017. Si l'on ajoute cette nouvelle prolongation à la précédente, les députés libanais vont exercer une nouvelle législature entière, soit quatre ans. Un journaliste libanais écrivait, début novembre et au moment de la décision de cette prorogation : « Quatorze séances parlementaires ne leur ont pas permis d'élire un président de la République, trois ans ne leur ont pas suffi pour adopter la grille des salaires du secteur public ou voter une nouvelle loi électorale. Mais quelques dizaines de minutes leur ont été largement suffisantes pour proroger, une nouvelle fois, leur propre mandat de deux ans et sept mois ».
Le Parlement apparaît donc totalement illégitime, alors que celui-ci est censé désigner le futur président de la République...
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