Les esprits sont mûrs pour un rapprochement entre université et emploi
Le rapport Hetzel
Le recteur de l’académie de Limoges, Patrick Hetzel, a remis mardi dernier son rapport sur les relations entre l’université et l’emploi au Premier ministre. Fruits d’une large concertation organisée d’avril à octobre 2006 (120 réunions dans 25 académies, 20 000 participants, 2000 commentaires d’internautes, 51 auditions d’organisations, d’organismes et d’experts), les conclusions rendues par la commission m’ont laissé pantois.
En effet, non seulement la question du rapport entre l’université et l’emploi est abordée très franchement, mais les solutions préconisées m’apparaissent aussi audacieuses que pertinentes et pratiques. J’étais loin de me figurer que tous les acteurs qui se sont impliqués dans ce débat national accoucheraient d’un tel résultat ; il semble même que les syndicats les plus austères se soient laissé gagner par la nécessité de prendre enfin en compte la question de l’insertion professionnelle des étudiants. Pour reprendre la dernière phrase du rapport, il semble bien que "les esprits sont mûrs pour un rapprochement entre université et emploi".
Plutôt que de m’étendre sur les préconisations de la commission, je voudrais seulement faire ressortir deux considérations implicites sur lesquelles elle s’est appuyée, et m’autoriser une remarque sur les moyens requis.
Tout d’abord, de nombreuses propositions renvoient à cette idée, qui m’est chère, de s’appuyer sur les étudiants pour réformer l’université. En effet, ces derniers ont trop longtemps été considérés comme une force indomptable animée du désir de ne rien faire, qu’on abandonnait volontiers à ces satellites de partis politiques de type UNEF et UNI qui ne se sont jamais souciés des étudiants que comme d’une guigne. Vu sous cet angle, on ne peut manquer d’apprécier la finesse avec laquelle la commission s’y est prise. Loin de donner l’impression de vouloir opposer les étudiants aux résistances du corps enseignant et de l’administration, elle entreprend de leur donner plus d’importance de manière détournée. Ainsi, privilégier l’orientation sur la sélection, ou mesurer le taux d’intégration professionnelle des étudiants au sortir d’un cursus, c’est finalement leur donner voix au chapitre.
Ensuite, la commission milite pour la création d’indicateurs et pour leur examen. Ceci renvoie à cette idée que c’est parce qu’on sait mesurer les performances d’un système qu’on est en mesure de l’améliorer. Pour plus d’informations, je renvoie à cet excellent article signalé par Econoclaste.
La mise en oeuvre des préconisations de la commission va requérir beaucoup de moyens, et il faut bien garder à l’esprit que ce ne seront pas que des moyens financiers. En effet, le succès tiendra pour beaucoup à un changement de mentalité de tous les acteurs, et il est intéressant de noter que la commission n’hésite pas à s’adresser sur ce point aux entreprises. A la nécessité qu’elle pointe du doigt de ne pas toujours préférer des diplômés de grandes écoles aux diplômés de l’université, on a envie d’ajouter qu’il faudra que les entreprises jouent franchement le jeu de l’interconnexion avec l’université. En effet, il me semble qu’on ne convaincra pas très longtemps les étudiants de s’en tenir à des formations courtes si on ne leur offre pas deux garanties essentielles :
- la possibilité de reprendre facilement des études
- la reconnaissance professionnelle de cet investissement
L’un ne va pas sans l’autre, et ceci implique notamment qu’on revienne de cette idée qu’il existe un âge limite pour s’engager dans un nouveau métier. Renversement de paradigme en perspective...
Enfin, voilà : la qualité de ce rapport est telle qu’il me semblait indispensable de participer à sa publicité.
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