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Accueil du site > Actualités > Politique > Redistribution politique : un cycle centriste ?

Redistribution politique : un cycle centriste ?

Deux facteurs clés de réussite ont profondément marqué cette campagne présidentielle 2007 : la droitisation de la droite et la gauchisation du centre, qui permettent de décrire, durablement ou pas, un nouveau visage du paysage politique hexagonal. Sous l’angle de vue de la bipolarisation de la vie politique française, c’est un cycle centriste qui s’ouvrirait, effet de la partition consommée du centre.

On pourrait résumer l’essentiel de la refondation politique qui a eu lieu sous nos yeux en France en indiquant que le centre, qui était hier politiquement un centre uni et marqué à droite, s’est divisé et a basculé d’un côté et de l’autre de l’échiquier. La frontière droite-gauche a glissé, glisse encore, hésite à revenir à son point de départ, à trouver un nouvel équilibre, non sans provoquer et traduire des recompositions internes pour chaque camp.

Avant-hier, à gauche, c’est l’alliance orchestrée par F. Mitterrand d’un Parti socialiste en mutation vers le centre et l’économie de marché et d’un parti communiste en perte de vitesse qui avait permis à la gauche de remporter la présidentielle de 1981. Conforté par l’exercice du pouvoir, sa position devenue très dominante à gauche et le déclin continu du parti communiste, le Parti socialiste d’alors a pu s’opposer à armes aux moins égales à une droite composée de deux grands partis distincts et proches, le centriste et le gaulliste. De leur côté, ces derniers se sont largement entendus pour faire front ensemble, la place d’honneur revenant aux gaullistes, et ne pas avoir à nouer d’alliance avec une extrême droite renaissante, qui n’a pourtant cessé de prendre plus de place dans les esprits jusqu’à devenir, ponctuellement et par négligence, la seconde force politique du pays au printemps 2002. Fin d’un cycle. Désarroi de la gauche et abandon de L. Jospin. Suffisance de la droite et création de l’UMP.

Un cycle « inversé », favorable aux centristes de gauche d’un côté et à la droite unitaire de l’autre.

Début de cycle : fin du gaullisme et naissance du sarkozisme ; gauchisation du centrisme et naissance du bayrouisme. Dont acte : la présidentielle 2007. Réticent mais otage de la faiblesse de la gauche, le Parti socialiste est tenu d’organiser sa mue en parti social-démocrate et d’accepter une alliance avec le parti du centre, tenu également d’assumer son ambition. L’extrême gauche aujourd’hui laminée et revancharde cherche de nouvelles passerelles, se prépare un destin plus conforme à ses vues ; l’extrême droite politique, comme elle peut, se console de son discrédit électoral. L’extrême droite visiblement pâlissante et fondue dans sa gauche bonapartiste, l’extrême gauche apparemment crépusculaire et soumise à sa droite utile ? Signes grossiers des temps nouveaux, n’ayons crainte pour elles. Mais la nouvelle composition politique attire le regard.

Ainsi donc la gauche dominante court désormais jusqu’au centre de F. Bayrou en pleine ascension, en passant par un Parti socialiste au profil bas. En se déclarant personnellement pour S. Royal pour le second tour de l’élection présidentielle, F. Bayrou franchit à nouveau le Rubicon au vu et au su de tous pour faire de la surprise d’hier une évidence pour tous : la première force politique potentielle du pays allie, avec l’appui d’écologistes modérés et l’appoint de divers gauches, deux partis distincts, le PS renouvelé à majorité sociale-démocrate et les bayrouistes, centristes de gauche.

A droite, les centristes de droite renforceront leur appartenance à ce grand parti presque autosuffisant qui, coupé du centre gauche, devra néanmoins une bonne parti de son élan aux ralliements des électeurs auparavant extrémistes de droite. Ces ralliements n’étant pas le fruit d’une réduction des causes qui nourrissent cette extrême, ce parti unique de la droite présidentielle qui voudrait contenir tout son camp doit déjà sa force à une forme de virulence et de licence qui a trouvé en N. Sarkozy un chef, capable d’assumer ses liaisons dangereuses avec l’extrême droite et la pacification de la droite sous une bannière unique.

A l’ordre du jour du second tour de la présidentiel 2007 : deux forces congruentes autour du centre gauche, qui, associées, deviendraient imbattables, préfèrent-elles faire le sacrifice d’une défaite pour sceller leur union face à l’opposant commun, archi-favori, ou choisissent-elles brouillonnes le pouvoir partagé sans délai face au péril sarkoziste en question ? Autre question fondatrice pour ce nouveau cycle : comment aux origines et au second tour de la présidentielle 2007 différencier les centristes de droite des centristes de gauche, puisqu’il faut les distinguer, et bientôt les nommer ? Les uns et les autres se veulent à égale distance de deux extrêmes, et pour conjurer la leur, certains de leurs leaders ont finalement fendu l’armure, voulu le pouvoir et la décision qui va avec, autrement dit, dans une certaine mesure qui épuisera les théologiens politiques, le choix d’un camp préféré. Les centristes actifs ou opportunistes se seront rapprochés les premiers du pouvoir en place, du pouvoir favori, qui a et aura un besoin vital de leur caution modératrice, ils y perdront leur nom ; les autres, centristes résistants ou idéalistes, ont dans l’attente mûri un projet pour obtenir plus, associer au pouvoir une forme d’honneur, de légitimité, de supplément de puissance. Le panache soufflant dans leur dos et fort d’un mouvement d’opinion favorable, pour le meilleur et le moins meilleur, ils pourraient tenir demain ou après-demain leur revanche sur leurs devanciers au pouvoir. Il leur reste même une chance aujourd’hui de vaincre sur le fil dans la présidentielle, avec la gauche, ce qui se conçoit désormais puisqu’ils ont vocation, s’ils le veulent, à devenir son pivot, peut-être sa partie dominante, ce que la droite sûre d’elle-même ne saurait pouvoir faire miroiter à leurs anciens camarades de jeu. Chaque centre, même récusant les extrêmes par origine, a donc pour ainsi dire une extrême de prédilection et une autre qui lui sert de repoussoir favori, qui signe son appartenance à l’un des camps structurants majeurs et authentifie la légitimité de sa division fraternelle. Question subsidiaire : la cohabitation mineure de demain pourrait être celle des PS et UDF nouvelles formules, mais qu’en sera-t-il de la possibilité d’une cohabitation majeure dans tout ça, entre faces opposées ? Rendez-vous aux législatives... Mais lesquelles, nous verrons bien !


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1 réactions à cet article    


  • poetiste poetiste 30 avril 2007 08:28

    Autophagie.

    La France est un pays où il fait bon vivre mais est-ce pour autant que l’on y vit bien ? Nous ne nous débarrassons pas du syndrome colonial qui s’est refermé sur nous. Jadis nous exploitions le burnous ; maintenant, le Français exploite le Français. Un humoriste dirait : après le colon, les luttes intestines. La personne exploitée n’a pas la clé de sa libération ; elle n’a à sa disposition que la clé du rêve. Alors, on lui vend du rêve : des jeux d’argent télévisés qui exhibent des sommes sans aucune pudeur, sans aucun respect pour les plus démunis. On assomme le téléspectateur avec des publicités débiles. La technique de ravalement par le bas n’a d’autre but que d’empêcher le citoyen de penser. Le consommateur est conditionné. On fait fric de tout bois. Pour ceux qui ne se contentent pas du rêve, on peut leur vendre aussi de la fuite ; les anxiolytiques ne manquent pas qui font la fortune des lobbies pharmaceutiques. Nous sommes non seulement parmi les plus gros consommateurs d’alcool mais aussi de tranquillisants. Quand un problème surgit dans notre beau pays, ne croyez pas que l’on va le résoudre ; non ! On crée une loi qui va vous occulter le dit « problème ». A noter que le mot : « solution » n’est pas du tout à la mode. Le chômage existe, qu’à cela ne tienne, on crée un organisme qui va en vivre et n’aura pas intérêt à résoudre le problème car il se retrouverait sans objet et les salariés de cet organisme, au chômage. La valeur du travail a cédé la place à la spéculation financière, au boursicotage. Les syndicats sont restés dans l’attentisme et la revendication sans prendre le train du changement. Du temps où la « force de travail » avait un sens, l’ouvrier était un outil indispensable au patron. Cet « outil » se trouve à bien meilleur marché hors de nos frontières et la tentation de délocaliser est trop belle ; les syndicats n’ont pas réclamé de substitut à cette force de travail, c’est-à-dire une participation dans la gestion des entreprises, un actionnariat. Envolé le bien des ouvriers et employés ! Il ne reste qu’à se plaindre, à manifester auprès de politiques qui n’ont plus qu’un rôle de représentation. D’un point de vue holistique, si la France va mal c’est que chacun de ses ressortissants va mal. Et s’il y a quelque explosion par ci par là, ce que l’on appelle une délinquance, sans col blanc, celle-ci, eh bien, le système se referme encore, on crée des emplois de police et le problème peut se pérenniser en se durcissant. Ce principe de la répression étant exploité en politique nous montre à quel point l’intérêt particulier passe avant l’intérêt général chez les politiciens démagogues. Nivellement par le bas, toujours et toujours. Une République est faite d’hommes et de femmes qui pourraient faire un effort de compréhension de leurs propres problèmes et agir en conséquence, pense t’on. Mais quand plus d’une moitié du pays trouve son compte dans cette disparité des moyens et que le vote est à la majorité, il n’y a pas de solution. Redonner un véritable sens civique au citoyen est une gageure dans un monde qui exalte le profit. Nous sommes mal élevés, ou plutôt, nous nous élevons mal. Ceux qui s’enrichissent oublient que le bateau appartient à tous et ceux qui s’appauvrissent se lamentent de n’avoir ni part du bateau ni part du gâteau. Sortir du conditionnement individuellement est sans doute la solution mais qui peut vaincre cette inertie ? Ne pas compter sur un « sauveur » car c’est le populisme qui le hissera au pouvoir mais certainement pas à la responsabilité. Il est vrai que nous sommes tous responsables de l’ambiance et de la conjoncture. Le « roseau pensant » a beaucoup à faire pour sortir de sa torpeur et doit bien se dire que ce qui est acquis en matière de fortune ne revient jamais en arrière. Il ne reste plus qu’à compter sur les nouvelles générations mais, oh ! Malheur ! On ne leur apprend plus la générosité et le partage ; il faut gagner, s’imposer. La boucle est bouclée, le cercle est vicieux. La France tourne sur elle-même, elle se ronge de l’intérieur. On reconnaît une bonne démocratie à la place qu’elle fait aux plus petits, au partage. On reconnaît une mauvaise démocratie à la place qu’elle donne à un sauveur populiste qui caresse les préjugés dans le sens du poil et ne donne que dans la répression. Autant en emporte le vent ! Le veau d’or est toujours debout, vieille rengaine ! Prenez soin les uns des autres, dit Hélène Grimaud après un concert. Sans commentaire !

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romain


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