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Réforme des retraites : discours et réalités

Tout le monde le sait maintenant, le gouvernement prévoit d’augmenter à 41 ans la durée de cotisations nécessaire pour avoir droit à une retraite à taux plein et, dans la foulée, certains parlent de repousser à 61 ou 62 ans l’âge légal du départ à la retraite.

Quelle est la situation dans les autres pays d’Europe ? On nous assène régulièrement le fait que l’âge du départ à la retraite y est nettement plus tardif. Certes ! Puisqu’il y est souvent de 65 ans. Mais regardons aussi l’âge réel de départ à la retraite dans ces pays ! En Europe, il est en moyenne de 60 ans, en Allemagne de 60,7, au Royaume-Uni de 62, en Italie de 57,8, contre 58,5 en France (données Eurostat 2005).

Il est donc clair qu’il y a, en Europe, un décalage entre la réalité (départ à 60 ans) et les souhaits des gouvernements (départ à 65 ans)

La question qui se pose alors est celle-ci : est-ce que ce départ anticipé correspond au souhait des salariés ou est-il subi par eux ? En voulant prendre des mesures pour inciter les entreprises à employer et garder les seniors, le gouvernement français semble penser que ce départ anticipé est contraire au souhait des salariés (et il est vrai que c’est parfois le cas), mais, là encore, les chiffres ne sont pas tout à fait d’accord. D’après une étude de la Drees (Direction de la recherche des études de l’évaluation et des statistiques) parue en mars 2006, les ouvriers français déclarent souhaiter partir, dans l’idéal, c’est-à-dire indépendamment de toute considération financière, à 58 ans, et sont, dans les faits, prêts à aller jusqu’à 58,8 ans. Les employés sont prêts à aller jusqu’à 59,9 ans, mais se seraient bien arrêtés à 58,6.

Première conclusion : au-delà de 58 ans, la motivation des salariés n’est plus tout à fait là  !

Une différence apparaît cependant en fonction des catégories professionnelles. Plus le salarié est diplômé, plus il souhaite continuer longtemps à travailler. Les salariés ayant fait un second cycle d’études s’arrêteraient bien à 60,1 ans, mais envisagent tout de même de travailler jusqu’à 61,4 ans, sans doute pour compenser leur entrée plus tardive dans le monde du travail, mais on note aussi que plus le travail est jugé satisfaisant, varié et formateur par le salarié, plus celui-ci souhaite le garder longtemps.

Les syndicats réclament une attention plus grande portée à la pénibilité du travail et à ses conséquences sur l’espérance de vie. L’Insee le confirme : l’espérance de vie des hommes cadres est de 81 ans alors que celle des ouvriers est de 74 ans. Il serait donc en effet assez légitime que l’âge de la retraite et la durée de cotisations varient en fonction de cette pénibilité.

Deuxième conclusion : pour augmenter la durée de la vie professionnelle, il n’y a qu’une solution humainement valable : rendre cette vie professionnelle plus intéressante, plus agréable.

Il est contraire aux souhaits de la population de prolonger un travail pénible, inintéressant, non gratifiant pour la personne. Il est même contraire à l’esprit de civilisation de le faire. Ce n’est pas possible concrètement d’éviter cet état de choses ? Je n’en suis pas si sûre.

Les sondages n’ont pas l’air d’être tous d’accord mais d’après l’Ifop, en tout cas, 56 % des Français sont contre l’allongement de la durée de cotisation et 62 % sont contre l’idée de reculer l’âge légal du départ à la retraite. Et, pourtant, tout le monde voit bien qu’il y a à la fois un problème de financement des retraites et un allongement de la durée de la vie. Faut-il donc que la relation des Français avec leur travail soit mauvaise pour expliquer cette hostilité aux réformes !!

Et c’est cela qui est grave et qu’on ne veut pas voir. C’est cela l’urgence : quand on parle de "réhabiliter" le travail, on ne parle que de chiffres, que du quantitatif, jamais du qualitatif ! Quand on ne va travailler que pour le salaire, c’est clair qu’on espère le faire le moins longtemps possible, et une année de cotisation en plus, ce n’est que du désagrément !

Nous vivons dans un monde où les interrogations sur le sens de la vie sont reléguées dans le domaine du religieux parce que la philosophie a perdu sa place dans la cité, au cœur de la cité. Pourtant, nous savons tous que le terme de la vie est la mort et qu’on n’est pas sur cette terre uniquement pour souffrir, travailler dur, amasser un peu d’argent avant de s’en aller les mains vides dans la tombe ! Au XXIe siècle, on pourrait quand même essayer de se fixer un autre idéal !

Troisième conclusion : nous avons assez entendu les politiques et les économistes, appelons les philosophes à la rescousse pour remettre le monde à l’endroit et nous redire ce qu’on peut attendre du travail et pourquoi il peut être aussi bien bon que mauvais pour l’homme !


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