Se présenter aux élections municipales : un pari risqué ?
Se présenter à l’élection locale qu’est celle du conseil municipal ne nécessite pas uniquement un engagement, de la volonté, etc. Il exige aussi des moyens financiers. Petites réflexions...
Nos concitoyens l’ignorent trop souvent, c’est pourquoi il paraît judicieux de le préciser ici : vouloir devenir maire ne nécessite pas que de l’ambition, du courage et, évidemment, un programme juste et cohérent, mais il réclame aussi de la part du candidat des moyens financiers plutôt importants. Certains rétorqueront : « Les candidats sont remboursés, par l’Etat, des frais engagés pour la campagne ». C’est exact, mais si et seulement si le candidat a obtenu 5 % des suffrages exprimés ! Ca paraît facilement réalisable, 5 % ça semble peu. Mais il faut « les faire » !
Le candidat prétendant à une mairie doit dépenser beaucoup d’argent pour les frais liés à sa campagne électorale : tracts, affiches, programme, location du local de permanence, frais de communication, etc. Pour une ville de 40 000 habitants, par exemple, cela monte vite à plus de 15 000 euros, soit le prix d’une voiture neuve de gamme moyenne. Combien sont ceux qui peuvent, dans une ville de 40 000 âmes, mettre plus de 15 000 euros pour mener une campagne électorale au service des autres ? Faut-il en déduire que seules les personnes aisées ou prêtes à fortement s’endetter peuvent espérer voir leur programme, leurs idées, leur engagement, présentés à leurs concitoyens ? La réponse semble clairement oui.
Pourtant, combien d’entre vous ont des connaissances, des projets, de l’énergie à mettre au service d’une ville et de ses habitants sans, toutefois, pouvoir mettre une somme rondelette dans une campagne électorale ? Partir en campagne, c’est un peu jouer à pile ou face lorsque l’on n’a pas de notoriété ; et, encore, celle-ci ne suffit pas toujours pour atteindre les 5 % fatidiques et être remboursé de la plupart des frais liés à la campagne électorale. On ne récupère jamais toutes les sommes engagées d’autant que la réglementation est très précise et la commission des comptes très tatillonne (ce qui est, somme toute, normal puisque ce sont les contribuables qui paient les remboursements de campagne).
Alors, peut-on être engagé, motivé, avoir de bonnes idées et un vrai programme pour sa ville tout en étant inconnu et financièrement modeste ? D’évidence non.
Quelles sont les mesures qui permettraient à toute personne motivée de présenter un programme politique pour sa ville sans craindre d’y laisser sa veste ou, pire, sa maison ? L’Etat doit-il prendre en charge la totalité des frais engagés par chacun des candidats ? Non et pour une raison simple : la porte serait alors ouverte à toutes sortes de listes, des plus sérieuses aux plus farfelues... Ces dernières seraient d’ailleurs très nombreuses à convoiter le poste de premier magistrat de la ville. Les voix seraient encore plus dispersées. Le désordre ainsi créé entraînerait une augmentation du taux d’abstention, déjà très élevé aujourd’hui.
Un électeur sur deux ne se déplace pas pour voter, même à l’élection locale. C’est dire le peu d’intérêt qu’ont les Français pour la politique. Ces mêmes « électeurs » sont pourtant, tous les jours, des milliers à se plaindre de leurs conditions de vie... Sensibiliser chacun à l’importance des scrutins, les réconcilier avec la politique ne pourrait que rendre plus lisible et plus claire la volonté des électeurs. Ceux-ci doivent remplir leur devoir de citoyen. Peut-on imaginer prétendre à tous les droits sans avoir un minimum d’obligations ? Faut-il se diriger vers le vote obligatoire ? Cela permettrait de répondre partiellement à l’une des questions posées dans le présent article : Comment atteindre le taux de 5 % permettant d’être remboursé des frais de campagne ? Une plus grande participation au suffrage augmenterait, en effet, de facto le taux de voix obtenus par chacun des candidats. Le risque de ne pas atteindre le seuil fatidique existerait toujours, mais serait considérablement réduit. Quoi qu’il en soit il paraît évident, aujourd’hui, que le citoyen lambda et modeste ne peut pas s’engager sans prendre un risque considérable. Faut-il réformer le Code électoral ? La question mérite bien une réflexion approfondie.
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