Déficit de la Sécurité sociale, un début de réponse

D’un point de vue fonctionnel, la sécurité sociale est destinée à assister financièrement ses bénéficiaires et cotisants, qui sont amenés à subir différents événements fâcheux de la vie.
Cependant, il est à noter que tous les frais médicaux ne sont pas forcements remboursables par la Sécurité sociale, qui divise les risques en quatre branches :
- La branche maladie (maladie, maternité, invalidité, décès) ;
- La branche accidents du travail et maladies professionnelles ;
- La branche vieillesse et veuvage (retraite) ;
- La branche famille (handicap...).
Or, sauf erreur de ma part, il n’y a aucune branche responsabilité civile (accident de la vie, de la route, etc.) couvrant ces risques médicaux liés. Et pour cause, ces risques font l’objet de souscriptions personnelles auprès de compagnies d’assurances privées, qui, moyennant finances, garantissent tous les frais médicaux qui résulteront de ces autres événements fâcheux et fortuits de la vie, elles se doivent, donc, de rembourser la totalité des dommages à responsabilités reconnues de tiers identifiés.
Alors, comment se fait-il que la Sécurité sociale et la mutuelle de santé remboursent, sans broncher, des frais médicaux d’un sinistre corporel de responsabilité civile, bien que la compagnie d’assurance, elle-même, reconnaisse son taux de responsabilité, à 100 %, de prestations qui ne rentrent dans aucun cadre couvert par les différentes branches connues de la sécurité sociale ?
Explication :
En janvier 1995, jouant dans une cour d’école, un élève a cassé une dent définitive (incisive supérieure) d’un autre élève, constatation et déclaration faites, la responsabilité civile du premier élève fut reconnue par son assurance, à 100 %.Passons sur les difficultés rencontrées pour obtenir d’emblée une indemnisation correcte, il a fallu batailler pendant trois ans et 8 mois, ainsi que 11 courriers pour arriver à un procès-verbal de transaction acceptable, qui ne fut rédigé qu’en octobre 1998.
Juste après l’accident, une facette provisoire de la dent fut installée, entièrement à la charge de la Sécurité sociale et de la mutuelle, la branche maladie prenant en charge tous les frais en soins dentaires. En raison de son usure et de sa dichromie avec les autres dents, elle vient d’être remplacée par la première prothèse définitive, soit un peu plus de 15 ans après les faits, et pour ce faire l’assurance en charge de ce dommage corporel fut rappelée à ses obligations.
Là où cela devient intéressant, c’est de savoir que pour cet accident à responsabilité civile totale, la Sécurité sociale et fatalement la mutuelle furent de nouveau mises à contribution, à priori sans raison apparente. L’assurance de l’enfant responsable à 100 % de cet accident, a exigé les avis de remboursements préalables de la Sécurité sociale et de la mutuelle, pour de ne prendre en charge que le solde restant.
Dans cet exemple vécu, le coût de la prothèse est de 1 060,00 €. Les prestations remboursées par la Sécurité sociale étudiante furent de 161,04 € (s’il avait été en activité professionnelle, c’est la Sécurité sociale, branche maladie, qui aurait payé), les prestations remboursées par la mutuelle santé furent de 472,21 €, et le solde final pris en charge par l’assurance de l’élève responsable des dégâts corporels, en l’occurrence, la Mat-Mut n’a remboursé que la somme restante de 426,75 €.
Partant d’une responsabilité reconnue de 100 %, pour ce sinistre corporel, cette compagnie d’assurance privée n’aura eu à débourser que 40,26 % du coût total de la prothèse, soit 59,74 % d’économie réalisée.
C’est un excellent résultat, et c’est une belle performance de faire payer par d’autres organismes de remboursement thérapeutiques une partie du sinistre dont on a l’entière responsabilité.
Mais tous ces petits arrangements entre amis, sont-ils véritablement légaux ?
Et simples questions de bon sens :
Est-ce la vocation de la Sécurité sociale de financer des remboursements d’accidents à responsabilités civiles reconnues par les compagnies d’assurances à risques personnelles ?
Est-ce la vocation de la Sécurité sociale de permettre aux compagnies assurances privées de s’enrichir sur le dos des assurés sociaux, et de fait aux dépens des contribuables, qui épongent régulièrement les dettes de cette institution d’État ?
Cette façon de procéder, si elle est pratiquée de façon générale à tous les remboursements portant sur les accidents corporels à responsabilité civile (accident de voiture, domestique, scolaire, etc.), nécessitant des soins médicaux, ce n’est pas étonnant de constater le trou béant qu’affiche la Sécurité sociale. Pour les mutuelles de santé, c’est un manque à gagner conséquent, mais cela ne regarde qu’elles et leurs clients. Or en ce qui concerne la Sécurité sociale, cela nous regarde tous, car c’est dans notre poche que sera pris l’argent pour renflouer, une fois de plus, la Sécurité sociale et son déficit abyssal, alors que les assurances privées font des bénéfices colossaux.
Monsieur le Ministre de la Santé, si réellement vous avez la volonté de faire des économies justes, alors passez aux actes, procédez aux vérifications qui s’imposent et rendez aux citoyens l’argent qui leur a été pris indûment. Pour une fois, ouvrez vos mirettes, et regardez au-delà de nos portes-monnaies pour renflouer cette malade chronique, la bien nommée Sécurité sociale.
Une fois de plus, laissons parler les chiffres :
Résultat net comptable de l'assurance française (1) (en milliards d’euros)
Année 2004 2005 2006 2007 2008 Total
7,0 8,0 10,7 11,2 9,4 58,7
Solde du régime général de la Sécurité sociale (2) (en milliards d'euros)
Année 2004 2005 2006 2007 2008 Total
-11,9 -11,6 -8,7 -9,5 -10,5 -62,7
Que nous apprennent ces chiffres, qu’ils sont presque identiques et que les compagnies d’assurances françaises ont fait 58,7 milliards de bénéfice en 5 ans, alors que, pendant cette même période la Sécurité sociale nationale a fait 62,7 milliards de déficits.
Est-ce vraiment juste une coïncidence ?
En ce qui me concerne, je pense qu’il n’y a pas de hasard dans la vie.
Mais attention ! Les choses ne doivent pas être aussi simples. Ce n’est que la constatation d’une méthode surprenante, découverte fortuitement par cet événement navrant de la vie. Néanmoins considérant la masse annuelle des accidents de ce type et l’importance des sommes concernées, cela mériterait d’être vérifié sur l’ensemble des sinistres corporels à responsabilité civile. Si la pratique dénoncée est la pratique générale, alors je ne dois pas être loin de la vérité. La seule fin de cette pratique troublante permettrait, pour ainsi dire, à la Sécurité sociale de sortir du rouge, et peut-être même de renouer avec des bénéfices.
Pour couronner le tout, la compagnie d’assurance de l’exemple a le toupet de proposer une indemnisation anticipée et définitive en capital d’un montant global de 738,65 €, incluant le solde de 426,75 € de la prothèse qui vient d’être mise en place. En fait la capitalisation du préjudice pour les 3 prothèses de remplacements prévus tous les 10 ou 15 ans ne s’élèverait qu’à 311,90 €, soit 103,96 € par prothèse. Ce n’est même pas le montant du solde (426,75 €) qu’elle vient de rembourser.
D’abord on « profite » de la Sécurité sociale et de la mutuelle, puis on « escroque » la victime. Mais au diable les victimes, la Sécurité sociale, les mutuelles, la Loi, le droit, etc. ! Qu’elles soient grosses ou petites, toutes les économies faites sur notre dos font grossir les bénéfices, pour le plus grand bien des actionnaires des compagnies d’assurances privées, n’est-ce pas là le but ultime d’une société, faire des bénéfices à distribuer à quelques privilégiés !
C’est aussi cela la démocratie libérale du tout est permis, même ce qui est interdit, le tout est de ne pas se faire prendre.
Mais quand est-il de la morale et de l’éthique ?
1) http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATTEF13103 2) http://fr.wikipedia.org/wiki/Dé ;ficit_de_la_Sé ;curité ;_sociale_en_France
2) http://fr.wikipedia.org/wiki/Dé ;ficit_de_la_Sé ;curité ;_sociale_en_France
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