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A l’enterrement des trente glorieuses

On pouvait croire que les « trente glorieuses » étaient éternelles, qu'elles ne s'arrêteraient jamais complètement. A la télévision, cela faisait des décennies que l'on voyait toujours les mêmes vedettes, les mêmes journalistes, les mêmes éditorialistes, les mêmes présentateurs. Bien sûr ils vieillissaient, grisonnaient des tempes, voire perdaient leurs cheveux, mais ils étaient encore et toujours là ainsi que les chanteuses, les chanteurs, les acteurs, les actrices. Mieux encore, grâce au net, les enfants des « trente glorieuses » pouvaient toujours regarder les feuilletons et spectacles de leur enfance voire même choisir d'y rester coincés.

Ils évoquent le second degré, mais c'est juste le désir de régresser vers la période de leur vie où il n'y avait aucune responsabilité grave, où tout semblait facile.

Il n'y avait que trois chaînes à la télévision. Les artistes que l'on y voyait, les acteurs que l'on regardait dans toujours le même genres de films, faisaient tous partie de la famille. Chacun dans son emploi. Le « baby boomer » avait l'impression de tous les connaître intimement et mieux encore qu'ils se souciaient de lui. Il rigolait de l'accent de Jane Birkin, Gainsbourg était le vieil oncle alcoolo qui faisait des blagues mal élevées mais tellement drôle, Eddy Mitchell ressemblait aux copains de régiment de son père. Et Alain Duhamel s'exprimait déjà comme l'oncle cultivé, un peu ennuyeux, que l'on invitait au réveillon car il avait quand même du pognon...

On pouvait prendre le métro sans risquer quoi que ce soit, dans les « cités » on ne se séparait pas entre ethnies et religions. On avait des copains, des copines arabes mais qu'ils le soient n'avait aucune importance. La banlieue devenait progressivement le refuge de poulbots d'un nouveau genre croyait-on.

Économiquement, la fin de cette exceptionnelle période de prospérité française date de la seconde crise pétrolière, en 1979. Mais l'illusion était tenace. Avec la mort de Johnny Hallyday, l'illusion se dissipe enfin, les idoles de la prospérité sont mortelles elles aussi....

Cette époque est morte et bien morte. On pouvait à la suite de « Soissantuite » s'y conduire de façon totalement irresponsable en se leurrant sur les conséquences. On pouvait changer de métier sans trop de difficultés, se planter financièrement et rebondir ensuite. On faisait juste attention durant quelques mois et puis c'est tout. On pouvait faire des gosses à droite et à gauche, leur prétendre qu'ils étaient libres comme l'air de choisir leurs vies, et continuer de jouir sans entraves, se leurrant sur son vieillissement, les petites ridules commençant à naître aux coins des yeux.

Dans les feuilletons de l'époque on voyait déjà de ces familles dites recomposées tellement sympa, tellement cool, avec des enfants que cela semblait ne pas affecter.

La méthode Coué, rien de mieux !

Il suffit de se répéter que l'on est jeune pour que cela soit une réalité...

Il suffit de se répéter que l'on a le droit de faire tout ce que l'on veut, sans s'inquiéter des autres pour se convaincre que c'est vrai...

On ne serait jamais adulte vraiment. N'est-ce pas ? Être jeune, c'est un sentiment, pas vrai ? Le monde extérieur n'existe pas ? Pas vrai ? Tous ces pauvres qui crèvent de faim, d'absence de liberté, c'est pas de notre faute ! N'est-ce pas ? Tous ces sans abris, ces précaires, ces éclopés de la vie qu'est-ce qu'on y peut mon bon monsieur ? C'est de leur faute ! Tous des fainéants, des empêcheurs de continuer à jouir sans se poser de questions gênantes. On aime bien que le cercueil de Johnny ait été béni à la Madeleine mais ce n'est pas pour ça qu'on remettra les pieds à l'église...

Et c'est ainsi qu'Allah est grand...

 

Image empruntée ici

Sic Transit Goria Mundi, Amen

 

Amaury - Grandgil


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