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Accueil du site > Actualités > Société > Être ou ne pas un être un vrai pro, c’est très très différent...

Être ou ne pas un être un vrai pro, c’est très très différent...

J’ai lu récemment deux articles dans deux revues différentes, dont l’Express, qui traitaient d’une tendance bien contemporaine, celle de créer des expressions toutes faites.

Rien à voir avec les mots ou aphorismes piqués aux Bronzés, rien à voir non plus avec l’affligeant "bien évidemment" popularisé par Dechavanne - le mauvais goût sémantique sachant toujours dégoter des ambassadeurs hors pair -, non, il s’agit de cette pathologie linguistique qui consiste à créer des intensificateurs dans un monde où dire d’un paysage qu’il est beau, d’une femme ou d’un homme qu’elle ou il est gentil(le) et d’un vin qu’il est bon, ne suffisent plus. Ce sont donc les parfaits "vrai" et "très très" qui ont fait leur apparition. Ainsi, tel job est-il une vraie opportunité pour se créer de vrais challenges (tiens, on en avait oublié les faux anglicismes des années 1980), le patron, par ailleurs, pourrait vous en parler, mais il est très très occupé, mais cela dit, ne l’écoutez pas trop, c’est un vrai con, mon pote du syndicat me l’a dit, donc c’est très très... vrai... Où est l’heureux temps des superlatifs, des hyper, des extra et des super ?

Pourquoi faut-il en faire toujours plus et souvent trop ? Parfois les mots perdent de leur force par l’appropriation frauduleuse qu’en font certains. Ainsi les intermittents du spectacle sont-ils souvent conduits à réclamer plus d’attention sur leur statut de comédien professionnel. De la même façon que les vrais journalistes en ligne doivent souvent s’annoncer comme journalistes... professionnels, tant sont de plus en plus nombreux les "nouveaux barbares du journalisme numérique" comme les appelait déjà en 2000 le journaliste [Marc Laimé->http://www.uzine.net/article81.html] dans les Cahiers du journalisme de l’ESJ Lille ; les blogs conduisent à une résurgence de l’Internet, salutaire, pour ne pas dire une résurrection, disons donc une deuxième vie, mais qui a des conséquences. Certes, et l’on doit s’en réjouir, en partie, apparaissent des médias citoyens et participatifs (médias et presse, rien à voir), comme l’explique très très bien dans son excellent ouvrage Joël de Rosnay : La Révolte du Pronétariat.

Mais pointent aussi leurs museaux ces fameux "barbares" que j’aurais tendance à requalifier "barbares de l’information numérique". Car l’espression "journaliste numérique" peut désigner un métier, qui nécessite une qualification, une déontologie et une façon de travailler, qui vont bien au-delà de la simple possession de la carte de presse, laquelle, en soi, ouvre plus à des devoirs qu’à des (passe-)droits. Entrer dans le débat d’un "autre journalisme", c’est crédibiliser les "barbares", les admettre à discuter le mot et ses séculaires évocations et mérites. Tout le monde pourrait prétendre être journaliste en écrivant juste trois phrases, en donnant son avis sur tout, ou en allant interviewer par un hasard fomenté une personnalité de premier plan ? L’amour du pain ne rend pas boulanger. Voilà pourquoi il est parfois nécessaire d’accoler des superlatifs ou des exhausseurs de sens, mais si l’on retrouvait hic et nunc le sens du vrai et de la mesure, on pourrait éviter de se retrouver un jour avec de vrais journalistes très très professionnels.


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3 réactions à cet article    


  • Lrnt (---.---.29.67) 16 mars 2006 17:04

    Super mega top cet article ... On peut en effet regretter la mauvaise habitude qui s’est repandue dans le parler et l’ecrit, d’ajouter du remplissage autour des mots et des idées comme pour vouloir ajouter du « signifiant » à un texte,à un discour dont on ne serait pas sur de l’impact, voire de son interet. L’escalade au sensationnel, à l’audiance à voulu que pour se differencier il fallait etre plus percutant. Meme avec des idées creuses. Tant pis. Mais en plus il faillait parler tendance, avec le vocabulaire du moment. Meme si souvent il ne veut rien dire. Rien que pour ne pas paraître obsolete, et toucher une population à la pointe de .... de quoi donc au fait ? Ça le fait ! C’est trop ! C’est clair ! Autant d’expressions qui ne sont là que pour faire du bruit dans la conversation et qui n’apportent rien. C’est le vocabulaire des gens qui n’ont rien à dire !!! A quand les journaux pour ceux qui ne savent pas lire..


    • Cémoi (---.---.128.239) 23 mars 2006 15:01

      S’il est juste de noter que de nombreux blogueurs/podcasteurs s’improvisent un peu vite journaliste, il faut quand même reconnaitre que grâce à eux, le public est invité à garder l’esprit critique vis à vis des grands médias ce qui n’est pas une mauvaise chose, à condition de rester tout autant critique vis à vis des média alternatifs.

      Par ailleurs, je suis déçu de voir une fois de plus une diabolisation de certains usages et expressions de la langue française. Faut-il rappeler que le Français n’aurait jamais pu apparaitre si nos ancètres n’avaient pas pris des libertés avec le Latin vulgaire ? Je comprends qu’on exige une certaine précision à l’écrit. Mais en revanche, la langue orale est heureusement bien plus libre, et j’aime que les blogs et les forums soient souvent un mélange de language écrit et oral.

      Pour finir, il me semble plus judicieux de se focaliser sur le sens de la phrase que sur les « très très » et les « vraiment » qu’elle peut contenir, ne croyez-vous pas ?


      • Zorro (---.---.215.103) 13 mai 2006 10:46

        Hallucinant !!

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