Franc-maçonnerie française : une crise ravageuse spécifique ?
Il est rare que les obédiences franc-maçonniques fassent parler d'elles en tant que telles, mais cette année 2011 qui se termine, aura été pour les franc-maçons français une année horrible.
Souvent décriées et critiquées pour des dérives liées à l'affairisme, à des scandales politico-financiers, parfois accusées de pratiquer des immixtions obscures, mais illicites dans les institutions de la République (police, justice notamment), la franc-maçonnerie française a été présentée souvent, à tort ou à raison, comme source de bien des maux et dossiers ténébreux au sein de la République depuis des décennies, ce qui n'est pas le cas dans d'autres pays.
De là, il est intéressant de se pencher sur cette « spécificité française » par qui une immense crise s'abat sur la franc-maçonnerie mondiale, en lui portant un tort considérable appelé à croître.
D'une crise apparente de gouvernance à la crise publique ouverte : la question de la nature et de la place de la franc-maçonnerie dans la société française
La crise de la GLNF (Grande Loge Nationale de France), en 2009, a démarré bien simplement. Son point de départ est le refus de certains membres de cette association de loi 1901 des dérives, dénoncées avec force en tout cas par les opposants au Grand Maître François Stifani, un proche de Nicolas Sarkozy.
Le Grand Maître en question est accusé d'avoir voulu inféoder la GLNF aux ambitions personnelles et politiques du Président de la République et de son parti, l'UMP, entre autres dérives d'autres natures en instance d'être soumises à la Justice par les rebelles en nombre croissant.
Ce lien permet de constater que cette accusation première n'est pas dénuée de tout fondement, si on lit ici les courriers échangés entre le locataire de l'Elysée et François Stifani :
Cette crise s'est donc aiguisée à un point tel qu'elle est aujourd'hui en voie de toucher toutes les obédiences françaises. Elle tend aussi à remettre en cause certaines pratiques anciennes de ces obédiences, pratiques qui sont en effet de plus en plus évidemment contradictoires avec leurs buts associatifs déclarés à la République.
Cette crise soulève et illumine certains faits troublants.
Ainsi, certains dossiers judiciaires concernant la GLNF comme telle mettent un curieux temps très long à être jugés ou les jugements sont curieusement reportés sans cesse dans le temps, ce que notent aussi les médias surpris :
Pendant ce temps, d'autres actes de la Justice dans ces affaires de la GLNF soulèvent des conflits rares dans certains milieux professionnels français :
Cette crise de la GLNF aura aussi appris au grand public que d'anciens dirigeants de grands services de l'Etat, notamment dans les services secrets et de police, sont ou étaient membres de cette obédience.
http://www.arnaudpelletier.com/tag/alain-juillet/
Ce même Alain Juillet est durant des années membre de la GLNF avant de devenir un opposant à François Stifani :
Pierre Marion, haut gradé du renseignements, décédé, ancien membre de la GLNF, a aussi laissé un livre-témoignage intéressant sur la GLNF :
http://www.amazon.fr/Mes-bien-aim%C3%A9s-fr%C3%A8res-Histoire-Franc-Ma%C3%A7onnerie/dp/208068020X
La crise de ma GLNF aura aussi levé le voile pudique sur des connexions « franco-africaines » qui passaient, au moins en apparence, par la GLNF :
Sans oublier le franc-maçon Ali Bongo dont le sens de la démocratie et de la probité, comme son éloignement des valeurs matérielles, sont sujets à de fortes contestations dans le monde entier :
Sur ce lien, la GLNF est décrite de l'intérieur par un de ses anciens membres, Christophe Bourseiller, qui en serait sorti écœuré à l'extrême :
http://humanisme.canalblog.com/archives/2010/04/22/17656708.html
Si on reprend pour se donner une image générale tout ce qui ressort des informations fournies par ces liens, la GLNF apparaît comme une association qui jouxterait les services secrets français, compterait des gens pas très fréquentables, s'occuperait beaucoup des liens des milieux d'affaires avec les dirigeants des dictatures africaines, toutes choses qui peuvent ne pas être prévues par les statuts de l'association à visée spirituelle de loi 1901.
Quand on lit tout ce qui est écrit sur la GLNF, on peut ensuite se demander si les objectifs de cette association sont bien d'ordre spirituel comme elle le prétend, ou bien, plus matériels, sonnants et trébuchants.....
Face à ces faits qui sont connus, car relevant du domaine public, il est autorisé de s'interroger sur le silence OFFICIEL des autres obédiences maçonniques françaises (GODF, DGLDF, DH, GLADU, GLFF) qui semblent avoir ici perdu la voix.
Toutes ces dérives énoncées dans tous les médias n'ont pas, à ce jour, soulevé une once d'indignation OFFICIELLE exprimée par les dirigeants de ces obédiences.
Par contre, force est de reconnaître que des franc-maçons, à titre personnel, tels Alain Bauer et quelques-uns de ses proches du GODF, ont élevé la voix pour exiger que ce scandale de la GLNF se termine avec des sanctions appropriées car il menace, selon eux, la franc-maçonnerie toute entière :
Mais, de la direction du GODF comme telle (Alain Bauer est membre de cette obédience), on entend sur ces dérives largement dénoncées au sein de la GLNF qu'un silence assourdissant ! Comme si ce grand déballage aux odeurs nauséabondes ne touchait pas toute la franc-maçonnerie française.....
De la crise française à la crise internationale ou la GLNF, matrice du plus grand scandale de l'histoire de la franc-maçonnerie ?
La lettre citée plus haut a donc libéré quelque peu la parole publiques de certains franc-maçons en France, mais sans générer une prise de position ou des actions claires de la part des dirigeants des autres Grandes Loges françaises.
Cependant, la crise de la GLNF est devenue une plaie béante qui infecte toute la franc-maçonnerie mondiale. Et ce n'est pas nous qui le disons, mais des organisations maçonnes célèbres comme nous allons le constater.
Le premier événement qui a démontré cet état de fait, encore nié par certains hauts responsables maçons, fut cette double et spectaculaire manifestation lors d'une Assemblée des cadres de la GLNF (Grande Tenue en langage maçonnique) à Levallois le 3 décembre 2011, où les opposants manifestaient par centaines à l'extérieur du lieu de la réunion tandis qu'à l'intérieur, d'autres s'exprimaient tout aussi nettement à haute voix très audible :
Ce lien pour l'extérieur :
Ce lien vers un vidéo pour l'intérieur :
http://www.youtube.com/watch?v=eTX1PZ5C3Vs
Alors que les Grandes Loges françaises se taisent, tel n'est pas le cas des Grandes Loges étrangères qui ont commencé à « lâcher » la direction actuelle de la GLNF :
Le texte de la lettre commune de ces Grandes Loges nationales étrangères est clair et précis.
Le contenu du message de non-reconnaissance mutuelle tranche avec le silence lourd, pesant et peu courageux, des Grandes Loges françaises, dont un des arguments avancés pour justifier leur position tout aussi commune est, pour résumer, « nous n'avons pas à nous mêler des affaires internes de la GLNF » !!!
Comme s'ils ne voyaient pas que les dérives dénoncées sont aussi des virus existant en leur sein. Tant d'aveuglement ou d'inconscience souligne que la situation va continuer à dégénérer, tant à la GLNF que dans les autres obédiences, surtout les plus importantes et influentes.
Conclusion en forme de quelques enseignements
Ainsi, les « méfaits de la mondialisation » se font aussi sentir dans les obédiences maçonniques françaises du fait des confusions évidentes, publiques et connues de tous, de rôles et des croisements peu spirituels d'intérêts particuliers très matériels.
Il est plus que probable que la prochaine obédience à souffrir des mêmes maux, produits par des causes similaires, soit le GODF dont, aussi, dans le passé et jusqu'au présent récent, des membres ont été impliqués dans des « affaires » de corruption (contrats de ventes d'armes à plusieurs pays, dont les fameux Bravo et Tango), de proxénétisme (affaire du Carlton), etc.....
Or, la mondialisation peut aussi se concevoir comme une concurrence acharnée pour la conquête de marchés, nouveaux ou déjà existants.
En clair, les intérêts des sociétés engagés dans le marché mondial sont totalement antagoniques et les moyens de gagner des parts de marchés ne sont pas toujours légaux, voire pacifiques, comme les événements récents en Afrique le démontrent.
Si et quand des structures associatives, officiellement dédiées à des activités spirituelles, jouent un rôle actif dans les affaires commerciales mondiales, il ne faudrait pas ensuite s'étonner que les pires contradictions, et les plus destructrices, s'y accumulent.
Comme le notait finement un observateur étranger que nous avons interrogé :
« En France, le rôle de la franc-maçonnerie, depuis le début de la première guerre mondiale, a évolué d'une intervention politique générale extérieure à partir de principes éthiques identifiés vers une activité toujours plus grande d'implications directes dans les affaires publiques, privées et aux confins des deux univers. L'éthique spirituelle a été remplacée progressivement par l'affairisme et ses déboires inévitables.
Plus ces dérives ont infecté le corps de la franc-maçonnerie française, plus elles ont coupé ses membres actuels, qu'ils en aient conscience ou non, de leurs racines spirituelles historiques.
L'affairisme, tolérée au début comme une maladie que certains croyaient pouvoir contrôler, est devenu un mal général qui a ALTERE la nature même de la franc-maçonnerie française, laquelle se mêle maintenant ouvertement de la politique du pays au plus haut niveau de l'Etat comme le souligne la correspondance publiée entre François Stifani et l'Elysée.
Ce que la crise de la GLNF manifeste publiquement, avec sa violence, ses haines, ses procès, ses déchirements, n'est que le prologue d'une crise plus profonde et globale de la franc-maçonnerie française, infectée par des maux anciens que ses dirigeants se refusent à regarder en face avec courage et lucidité.
Spiritualité et affairisme sont incompatibles : le second finit toujours par détruire la première ».
Un autre interlocuteur, spécialiste des « affaires » au plan international, note pour cet article :
« Les réseaux franc-maçons- ou se déclarant tels- affairistes français ne peuvent intervenir dorénavant que dans un contexte global de déclin de la France en poids économique, militaire et politique. De plus, ces réseaux constitués vivent sur le lien tissé par la francophonie comme élément commun structurant. Aujourd'hui, la tendance, pour la France, est à la perte de marchés en Afrique, tout en perdant lentement pied en Asie et en Amérique du Sud.
Cette situation exacerbe les tensions internes et externes. De fait, l'affairisme se trouve de plus en plus réduit à la France et à ses marchés, notamment publics. Cette situation générera de nouveaux conflits entre réseaux au service d'intérêts opposés, donc de nouvelles explosions de scandales dans les obédiences qui abritent, de gré ou de force, ses réseaux en perte de vitesse .
Sans compter que, tant en Afrique qu'en Russie, Amérique du Sud ou Asie, ces réseaux se mettent souvent en conflit avec des réseaux locaux nationaux, y compris de nature mafieuse et/ou étatique, aux moyens radicaux d'élimination de la concurrence. Les dossiers des sous-marins vendus au Pakistan, du contrat Tango avec Taïwan ou de matériel militaire fourni à l'Indonésie pourraient illustrer ces processus nouveaux de suppression des anciens réseaux, souvent camouflés, pour son plus grand malheur, sous le nom de la franc-maçonnerie française ».
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