• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > Société > La crise de l’Éducation (3/3) – Quand l’éducation ne va (...)

La crise de l’Éducation (3/3) – Quand l’éducation ne va pas… rien ne va

Le métier d’enseignant est devenu impossible. J’en ai abordé dans les deux articles précédents les raisons profondes : – la crise d’identité de l’éducation nationale, pilier de la République ascendante, simple charge de la République en faillite – la remise en cause de toute notion d’Autorité et la « relative » absurdité de toute « éducation » qui en découle… De là ce triste bilan de la situation actuelle.

Le désarroi actuel
 
La crise de l’éducation est un des phénomènes les plus inquiétants de notre situation sociale actuelle, car quand une société n’arrive pas à se reproduire, c’est qu’elle touche à sa fin. Et une des caractéristiques les plus fortes de l’époque présente, c’est que nous avons peur de nos propres enfants. Non point une peur physique, mais une peur morale, ce qui est bien plus grave sans doute.
 
La prise en main de l’éducation par l’État a créé un vide en fonction duquel le problème est bien qu’aujourd’hui parents et enseignants se renvoient à juste titre la balle. À la question des enseignants : « Comment voulez-vous former des jeunes qui n’ont pas la moindre éducation ? », répond celle des parents : « Comment voulez-vous que nous éduquions des jeunes si l’école n’embraye pas en leur imposant une structure ? » La question n’est pas de savoir lequel des deux camps a raison, ils ont bien raison tous les deux, contradictoirement, en même temps. Mais les parents ont encore la satisfaction de voir individuellement grandir leurs petits, alors que pour les enseignants, la logique est bien souvent celle d’un échec permanent. Non qu’ils échouent plus que les parents, mais que placés plus directement devant la non-structuration d’une classe d’âge, ils vivent avec le sentiment d’échec ! Nombreux sont les enseignants dès lors tentés par la seule alternative subsistante, simplement de « prendre du bon temps » avec les gamins. Que ceux-ci soient heureux de leur temps scolaire ! Quitte à parallèlement sauver la face en montrant qu’ils ont répondu aux objectifs administratifs ponctuels fixés par le ministère.
 
Manque de moyens ?
 
C’est le faux problème par excellence. La France est sans doute un des pays européens qui consacre le plus de moyens à l’enseignement, mais où sa crise est la plus profonde, et il vaut donc mieux parler d’un manque de résultats. Dans tous les métiers à résonnance humaine, dans tous les métiers où l’on ne manipule pas des dossiers, des boulons, des légumes… mais où l’on a directement affaire à des êtres humains, une énorme part de la rétribution – la rétribution de l’investissement particulier que ces métiers requièrent – se trouve dans le résultat humain. Ce sont toujours des boulots mal payés, eu égard à l’énergie mise en œuvre, à ce que j’appellerais pour faire vieux jeu le don de soi indispensable. Il est certain qu’une rémunération honorable aide, mais à mon sens elle se situe toujours en deuxième position par rapport à la question des conditions de travail. Je n’entends pas par là les locaux, les horaires, le nombre d’enfants par classe, ou autres critères quantifiables. Non l’aspect humain profond de la relation éducative. Et c’est là que se situe le véritable problème. Ce qui fait que la crise présente échappe totalement aux organisations syndicales.
 
Faute de pouvoir aborder le problème et plutôt que de se retrouver dans une situation de burnout, il ne restera à l’enseignant qu’à « s’absenter ». L’absentéisme est plus élevé dans l’Éducation nationale que partout ailleurs. C’est un des biais par lesquels sa crise est le plus sensible. Incapables de pourvoir aux innombrables remplacements, les Académies laissent les directions d’écoles et les mairies devant des situations ingérables : renvoyer les enfants à la maison, multiplier les garderies, ou entasser les élèves dans des classes surpeuplées au-delà de 30 élèves. En cas de non-remplacement d’un enseignant, on répartit les élèves dans trois autres classes qui se retrouvent ainsi en situation idyllique, soit au total quatre classes perturbées pour un absent non remplacé… Or un enseignant sur cinq est aujourd’hui en situation difficile, personnellement, par rapport à son métier !
écolier pleurant.jpg
Manque de place !
 
Il est tout à fait symptomatique que dans l’organisation sociale en France, l’enseignement ne trouve plus sa place. L’organisation annuelle (avec ses deux mois de vacances d’été) repose encore sur la nécessité de libérer les enfants pour aider à la moisson… Nous avons là un siècle de retard sur le calendrier social. Les vacances d’hiver sont elles coincées par l’impératif économique des stations de ski. Quant à la répartition des cours sur la semaine, elle ne répond, elle, plus à rien. La récente suppression des cours le samedi dans l’enseignement primaire aligne enfin son horaire sur celui de la semaine anglaise, adoptée partout, à l’exception du commerce bien sûr. Cette modification eût été l’occasion de déplacer la matinée du samedi au mercredi et de créer une continuité de la semaine. Cinq journées consécutives de sommeil et de lever matinal. En place de quoi, on a un horaire totalement incohérent. En outre, la preuve a été faite que l’enseignement général (lecture, mathématique) doit être donné le matin, la diversification assumée l’après-midi. Que dire d’une classe qui commence sa semaine par deux heures de natation le lundi matin et la termine par un après-midi de français et de mathématique le vendredi ? Cas extrême, mais d’application si courante…
 
Démobilisation
 
Tout cela contribue à la démobilisation du corps enseignant, principale victime après les enfants de cette situation absurde. Deux mouvements caractérisent son état actuel :
Individuellement, je l’ai dit, un absentéisme de plus en plus important.
Collectivement, et pour les plus motivés d’entre eux seulement, la revendication des enseignants se limite malheureusement à la protestation contre le manque de moyens, qui s’accroît encore par les restrictions de personnel en cours dans la fonction publique.
 
Cette revendication, les syndicats l’ont de manière absurde coincée dans le contexte suranné de grèves, qui brisent l’unité indispensable avec les parents et nuisent objectivement aux enfants. Les syndicats sont objectivement des organismes réactionnaires, opposés à toute réforme en profondeur. Ils appuient leur puissance sur la défense des « droits acquis ». Ici l’enseignant a le malheur d’être assimilé au fonctionnaire, dont l’image n’est à juste titre pas reluisante. L’enseignant a ainsi tendance à avoir tout le monde contre lui : l’État, les parents, le public… et dans ce combat ses propres organisations syndicales – en s’arcboutant aux droits acquis et au passéiste statut de fonctionnaire - s’avèrent elles aussi un dangereux ennemi !
 
Mais le pire bien sûr concerne nos enfants. Pour eux, il n’y a aujourd’hui qu’une seule solution : parents, mobilisez-vous, individuellement et collectivement, rassemblez les forces nécessaires et prenez vous-mêmes en charge l’éducation sûrement et l’enseignement, s’il le faut, de vos enfants, dans le cadre de collectivités locales. Faites vite, sans quoi la catastrophe est imminente… et faites-le en collaboration avec les enseignants, en dehors des syndicats, en dehors du cadre académique, car c’est dans ce retour à une prise en charge locale de l’enseignement et de l’éducation que se trouve leur seul avenir.
 
MALTAGLIATI
 
La série comporte trois articles :
1. Le mythe de l’éducation nationale.
2. De la société des pères à la société sans repères.
3. Quand l’enseignement ne va pas… plus rien ne va.

Moyenne des avis sur cet article :  3/5   (8 votes)




Réagissez à l'article

16 réactions à cet article    


  • Soi Même 19 mars 2012 12:39

    Expliquez moi comme se fait ’il que d’autres synthèses pédagogiques en France fonctionnent,

    http://ecole-vivante.com/

    avec moins de moyen que l’éducation national ?

    C’est qu’il y a bien quelque chose qui cloche chez vous ? Et vous sur que vous faites du bon boulot !
     A part le formatage de masse ?


    • Soi Même 19 mars 2012 18:26

      Expliquez moi comme se fait ’il que d’autres pédagogiques en France fonctionnes,


    • Soi Même 20 mars 2012 09:11

      @ alchimie, vous posez mal la question, il y a d’autre pédagogie en France qui fonctionne, le fait qu’il est très facile en France de les disqualifiés. elles sont juste tolérés et non reconnue officiellement pleines et entières.

      Ce n’est pas un bazar si des centres de recherche sur l’éducation s’intéresse à ces pédagogies et tentes de les incorporés à l’éducation national en les édulcorants de toute les originalités qui les gênes.

      il est très facile avec des moyens coercitifs de faussé le résultat de ses écoles. les inspecteurs académiques ont tous une palette de moyen pour noyauté et ruiné ces initiatives.

      Une des dernières qu’ils ont trouver, pour les candidats du bac issues de ses écoles et de poser des questions qui non aucun rapport aux connaissances acquises.

      Dans ces conditions, ils ne peuvent que confirmés que ces écoles sont mauvaises, qui est tout simplement déloyale, mesquin, et malhonnête de leurs parts.

       

       


    • gordon71 gordon71 19 mars 2012 17:35

      les enseignants ne sont pas les seuls responsables ce ne sont que les symptômes les plus visibles d’un débâcle sociétale, comment pourraient ils remonter seuls le courant ?





      • Kookaburra Kookaburra 19 mars 2012 17:54

        Les méthodes d’apprentissage privilégient toujours le compliqué sur le simple. Dès les premières
        classes, les enfants sont contraints d’utiliser des méthodes pédantes et incompréhensibles. Ils doivent ânonner les théories littéraires les plus sophistiquées et faire de la linguistique avant même d’étudier la grammaire. Les méthodes pédagogiques sont tellement nébuleuses et amphigouriques que personne n’y comprend rien, en général pas même l’instituteur, et pas davantage évidemment les malheureux parents qui tentent, comme il se doit, d’aider leur enfant affolé ou coulant à pic. Et l’avantage de ces méthodes, c’est que les parents les plus cultivés se cassent aussi le nez dessus. L’école républicaine d’avant-guerre employait des méthodes unificatrices, réalisait l’égalité des
        conditions, prônait la laïcité, mais en même temps elle considérait l’enfant un être pas encore fini, sous l’autorité d’une tutelle. Dans les années soixante, l’enfant est considéré, non plus comme un être en devenir et attendant pour se structurer des modèles adultes, mais comme un citoyen à part entière, déjà doté de toutes les capacités et attributs nécessaires. L’enfant est autonome de nature et il s’agit seulement de le laisser s’épanouir. Dès lors, enseigner c’est opprimer, non plus « élever ». Les enfants sont nantis des mêmes droits que les adultes.


        • rosemar rosemar 19 mars 2012 18:24

          Je ne pense pas que l’absentéisme des profs soit la cause des difficultés scolaires:il faudrait vérifier les chiffres !!

          Le fait est que ce sont les élèves qui s’absentent le plus...,problème crucial et difficile à résoudre !

          Les problèmes de l’éducation viennent surtout de l’arrivée massive des élèves dans les lycées alors que certains n’ont pas le niveau requis:en lycée ,il est trop tard pour rattraper d’énormes lacunes dans l’orthographe, l’expression:le goût de la lecture se perd aussi avec la concurrence des nouveaux médias...
          Bonne soirée

          • Soi Même 19 mars 2012 18:34

            Ce qui est grave, c’est qu’il s’agit bien de mettre la charrue avant les bœufs.
            Plus de cours, une photocopie, où un écran pc et de l’exemple exposé, t’es sensée comprendre la matière.


            • gordon71 gordon71 19 mars 2012 22:01

              il faudra bien un jour faire le bilan de ce qu’a réellement produit l’idéologie de l’égalitarisme et de la pseudo « démocratisation » du savoir


              « Avec pour résultat que l’éducation de masse, qui se promettait de démocratiser la culture, jadis réservée aux classes privilégiées, avait fini par abrutir les privilégiés eux mêmes. On retrouve ce type d’analyse chez Renaud Camus lorsqu’il parle de la prolétarisation des classes moyennes et du corps professoral.

              Ainsi, contrairement à l’esprit de l’institution qui était de former des citoyens éclairés capables de se diriger eux-mêmes, il semble que le système ne soit plus capable –hors quelques filières d’excellence soigneusement épargnées à dessein- que de produire des générations d’abrutis incultes et pour beaucoup analphabètes, tout juste aptes à obéir servilement aux campagnes promotionnelles, à opiner aux sommations d’une expertocratie auto proclamée et omni présente, et à célébrer comme il se doit l’avènement de cette société du Spectacle de masse dont parlait Debord. »

              (même source que plus haut)

              • rosemar rosemar 19 mars 2012 22:23

                Est ce le système scolaire qui est responsable ?Croyez vous ?La société dans son ensemble privilégie le paraître ,l’argent et certainement pas la culture ! I


                • gordon71 gordon71 19 mars 2012 22:46

                  « la société » dans son ensemble hum on va où avec ce genre de poncif


                  « la société » comme vous dites n’est pas un canard sans tête, l’école telle qu’elle fonctionne aujourd’hui donne satisfaction elle produit exactement ou presque ce qu’on lui commande 

                  une élite formée dans les réserves protégées des grandes écoles

                  et une masse d’employés déqualifiés, humiliés par l’échec, dégoutés de la réflexion, interchangeables et manipulables à merci

                  • lloreen 19 mars 2012 22:58

                    Je ne suis pas enseignante et pas spécialiste de la question mais il se trouve que l’école est le miroir de la société.Notre société est malade et l’école l’est corrélativement.
                    Pourquoi les français sont-ils les plus gros consommateurs d’anti-dépresseurs ?
                    Parce qu’ils sont heureux ?
                    Les gosses sont-ils heureux d’aller à l’école ? A en croire les échos que j’entends, pas pour la majorité d’entre eux ?
                    Les professeurs sont absents ? C’est que le malaise est profond.
                    Les travailleurs sont-ils heureux ? A en croire les constatations des divers organismes chargés de la santé des travailleurs ce n’est pas de gaieté de coeur qu’ils se rendent au travail le matin.
                    Le malaise n’ est pas propre à l’école, il est général.


                    • lloreen 19 mars 2012 23:01

                      Nous récoltons ce que la société consumériste a fait fructifier.
                      Tout est vicié.
                      Quand les cultures sont attaquées par les parasites il faut traiter en profondeur et non pas saupoudrer.
                      A moins d’être aveugle il faut quand même consentir à reconnaître qu’il est plus que temps de commencer le traitement curatif.


                      • rosemar rosemar 19 mars 2012 23:05

                        oui lloreen

                        le malaise est global  rejeter la responsabilité sur l’école ,c’est la solution de facilité et ce n’est pas voir ce qui caractérise nos sociétés ;le manque de perspectives ,de repères...

                        • Gégé 20 mars 2012 11:32

                          Je ne suis pas enseignant, contrairement à la plus part des intervenants ici, mon expérience sur le sujet se limite à mon rôle de parent d’élève (une fille en 5ème), aux contacts avec deux professeurs de collège, mon voisin professeur d’histoire et l’épouse d’un agriculteur chez qui j’interviens, professeur de sciences et à ma propre expérience scolaire, bac D en 1988 , BTS et Licence après.

                          Je constate que dans l’ensemble les méthodes d’enseignement se sont améliorées, avec un bémol pour la lecture en primaire (point important).
                          Cependant les changements de société sont tels que ces quelques avancées ne compensent plus la dégradation socio-économique actuelle.

                          - Premier facteur le chômage et le travail précaire qui touche une partie de plus en plus grande de la population : conséquences : difficultés financière pour les études des enfants et surtout démotivation d’une grande partie de ces derniers qui se voient déjà chômeurs ou intérimaires comme leurs parents.

                          - Deuxième facteur, l’abus des écrans (télé, facebook...) et jeux vidéos qui coupent les enfants de la réalité et causent des problèmes de concentration : comportement zappeur...

                          - Troisième facteur , l’abandon de filière comme les 4ème technologique, cppn, qui, si elles sont réservées aux élèves volontaires pour y aller et non utilisées pour « y mettre quasi systématiquement » ceux qui ont 2 ans de retard comme c’était le cas à mon époque , éviteraient les problèmes posés par le maintient en 4ème et 3èmes d’élèves non motivés par la filière générale.

                          - Autres facteurs : polluants (métaux lourds, radioactivités...) intervenant sur le comportement, temps de transport plus long du fait des fermetures d’écoles et de collèges ruraux, moins de disponibilités des parents du fait de l’éloignement du travail...

                          Pour les absences comparons ce qui est comparable, les congés de maternités doivent être déduis si l’on veut comparer ce taux avec celui d’autres professions où le sex ratio est différent, de même il est logique que la pénibilité d’une profession peut être à l’origine d’un nombre plus élevé d’absences (accident du travail pour un ouvrier du bâtiment, dépression pour un enseignant...


                          • Gégé 20 mars 2012 11:34

                            Je rajouterai la dévalorisation de l’image d’un métier par la plus part des médias et des politiciens.


                            • Gégé 20 mars 2012 11:39

                              Pour ce qui est de l’intérêt au travail, du fait de ma profession, je ne suis pas objectif, étant donné que je fais parti des privilégiés qui en sont content.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès