Le prix du sexe
On connaît le commerce classique du sexe qu’est la prostitution. On connaît aussi le commerce d’objets, d’images ou d’écrits : l’érotisme et la pornographie. Mais on ignore d’autres petits ou gros revenus. Un jugement de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence vient d’en dévoiler un.
Un couple, la cinquantaine, demande le divorce. Depuis des années ils n’ont plus de sexualité, ou très épisodique. S’estimant lésée par cette quasi-abstinence forcée, estimant qu’elle subit un préjudice, Madame demande des dommages et intérêts. Et le juge les lui accorde : 10’000 euros. Monsieur fait appel de ce jugement. La Cour d’appel confirme les 10’000 euros de dommages et intérêts.
Que dit la Cour d'Aix-en-Provence dans ses considérants ?
« C'est à juste titre que le premier juge a octroyé la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts à l'épouse sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, pour absence de relations sexuelles pendant plusieurs années. Si le mari conteste l'absence de relations sexuelles, considérant qu'elles se sont simplement espacées au fil du temps en raison de ses problèmes de santé et d'une fatigue chronique générée par ses horaires de travail, cette quasi absence de relations sexuelles pendant plusieurs années, certes avec des reprises ponctuelles, a contribué à la dégradation des rapports entre époux. Il s'avère, en effet, que les attentes de l'épouse étaient légitimes dans la mesure où les rapports sexuels entre époux sont notamment l'expression de l'affection qu'ils se portent mutuellement, tandis qu'ils s'inscrivent dans la continuité les devoirs découlant du mariage. Il s'avère enfin que le mari ne justifie pas de problèmes de santé le mettant dans l'incapacité totale d'avoir des relations intimes avec son épouse. »
L’article 1382 du Code civil dit :
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »
Quatre remarques :
1. Un tribunal a donc le droit de décider quel doit être le rythme des relations sexuelles dans un couple. Il faut satisfaire les demandes du conjoint, de Madame en l’occurrence. Donc il faut être performant et ne pas trop baisser de régime. Mais au fait, c’est quoi la norme ? Quelle est la bonne fréquence ? Qui place la jauge ? De quel droit un tribunal peut-il décider d’une norme de fréquence sexuelle dans un couple ? On notera que le tribunal ne dit pas si Madame faisait de son côté des efforts pour rester sexy et stimuler son mari. Ou si le mari était en panne à cause du harcèlement de son épouse.
En tous cas les français et les françaises sont prévenus : si le désir ou la libido baisse, ils passent à la caisse.
Ça fait encore une contrainte juridique sur la sexualité. Ils devraient taxer aussi les phallus impudicus pour exhibitionisme...
Au secours, ils deviennent de plus en plus fous !
2. Je parlais il y a quelques jours du prix du joint de cannabis pour les parlementaires helvétiques. Je me suis amusé ici à un petit calcul : 10’000 euros, ça fait combien le coït ? C'est approximatif puisqu'on ne connaît pas la durée de l'abstinence du couple.
Sur une base moyenne de 3 rapports sexuels par semaine, (hypothèse), ça fait 150 coïts par an. Avec, mettons, 5 ans d'abstinence. Donc 750 fois. Cela fait un peu plus de 13 € le coup.
Avec une moyenne d'un rapport par jour, donc 1825 en 5 ans sans les années bi-sex-tiles, ça fait environ 5€50 le coup.
C'est le barème du juge.
Moi je serais déçu. C'est peu payé.
3. Cela pourrait donner des idées. En cas de divorce, la partie lésée pourrait se faire payer les coïts qui n'auront plus lieu. Par exemple elle pourrait assurer vouloir vivre encore 10 ans avec cette personne, mais son départ lui cause un préjudice. Ça pourrait rapporter. Et puis, tant qu'à faire, on devrait se faire payer les coïts passés. Il n'y a pas de petit profit.
4. Enfin, que se passerait-il si, en place de Madame qui réclame son dû face à un époux fatigué, ce soit Monsieur qui se plaigne d'une épouse amorphe ? Serait-il poursuivi pour harcèlement ou tentative de viol conjugal ?
Car le message clair de ce jugement est que "Non" ce n'est plus non. C'est une faute, et une faute coûteuse. Dites "non" de manière répétée aux sollicitations sexuelles de votre partenaire et vous serez condamné-e. Si votre partenaire a envie, vous devez, d'une manière générale, répondre positivement à son envie.
Enfin un message clair en matière de sexualité...
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