Mais où est donc passée l’armée française ?
Entre publicité high-tech épurée de recrutement et pérégrinations de la 7e compagnie au clair de lune, où en est l’armée française professionnelle aujourd’hui ? Faut-il se fier à l’image moderne véhiculée ou doit-on craindre que Pitivier & Co auraient encore toute leur place dans bien des régiments ?
Forte de ses presque 350 000 hommes, l’armée française ne fait pas
rigoler en nombre, c’est sûr. C’est par rapport au nombre d’habitants,
proportionnellement plus que les Etats-Unis par exemple. Quant au
budget de quelque 50 milliards d’euros, il nous positionne également
dans le peloton de tête des armées selon le PIB.
Côté emploi, ce
n’est pas mal non plus, l’armée jouant un rôle non négligeable
d’insertion des jeunes notamment, 35 000 environ chaque année. Et côté
patrimoine, c’est presque Bizance puisque le patrimoine immobilier issu
de la période de conscription permet à la Grande Muette de se muer en
opérateur immobilier et de dégager de substantielles marges autour de
ses 130 casernes désormais inoccupées.
Bien sûr de cette masse
globale émargent déjà quelques surprises comme le fait de posséder plus
d’une trentaine de bases aériennes ce qui fait beaucoup. Ou de compter
presque 5 000 personnes au sein des services centraux du ministère de la Défense ce qui permet assurément au ministre de se sentir en
sécurité... ou de proposer 1 300 blindés quand l’Angleterre fonctionne
avec 400...
Mais c’est surtout lorsque l’on parle matériel que
l’inquiétude grandit. Une doctrine fortement teintée d’indépendance a
permis à notre pays de se constituer une industrie de premier plan à
même de permettre de développer ses propres programmes.
Mais entre
l’hélice du porte-avion nucléaire Charles de Gaulle, la complexité
absolue du Rafale, les retards du char Leclerc ou les déboires de nos
sous-marins nucléaires, force est de constater que notre équipement
n’est pas à la hauteur de notre ambition. Du reste, le marché pourtant
florissant des ventes d’armes nous le rappelle tous les jours puisque
ni le Rafale ni le Leclerc n’ont jamais trouvé preneur à l’étranger (si
l’on excepte la tragi-comédie des Emirats arabes unis). Ennuyeux pour
des programmes aussi lourds financièrement, le programme Rafale aurait
ainsi coûté 35 milliards d’euros environ...
Tout se passe comme si
c’était désormais cette industrie chère à M. Dassault qui dictait
sa loi. Nombre de politiques de gauche comme de droite n’hésitent
d’ailleurs plus à reconnaître que les dépenses militaires ont d’abord
pour but de donner du travail à cette industrie.
Pourquoi pas.
Problème,
la vision du monde sortant de ces établissements commerciaux n’est-elle
pas restée trop axée sur un concept de guerre froide, de dissuasion, à
l’instar de toute notre organisation militaire multiple et parfois
désordonnée ?
Résultat, nous ne pouvons guère assurer une présence militaire hors de nos frontières supérieure à 15 000 hommes aujourd’hui.
Un
rappel utile car si peu audible à l’époque de la guerre naissante en
Irak. Notre grandeur politique à refuser le conflit alors n’était-elle
pas en partie guidée par notre incapacité à nous y engager ?
Un
rappel inquiétant si l’on veut bien considérer ici que le temps de la
guerre froide est révolu, que la menace russe est limitée, mais la
menace terroriste très pesante et disparate.
L’Armée semble être
devenue un jouet au service du politique, un moyen d’assurer une
présence française aux quatre coins du monde comme à la grande époque
du rayonnement français.
Mais quid de notre capacité à nous projeter ? Pas évident si l’on ajoute le fait que nous ne possédons pas d’avions furtifs...
A protéger le territoire national ? Pas forcément d’une invasion, mais
d’actes terroristes sur nos centres énergétiques par exemple...
Bref
au-delà de financer les industries et de permettre à nos politiques de
briller, sait-elle encore combattre et nous protéger ?
Notre nouveau
président semble vouloir s’aligner sur nos cousins d’Amérique et craint
l’islam, l’occasion de beaux discours au Congrès certes, mais aussi le
risque de bientôt ne plus être épargné de la menace terroriste comme
notre non-alignement chiraquien nous l’a permis.
Il faudra alors être prêt et ne pas juste signifier
"J’ai glissé... chef !"
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