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Marc Machin sera-t-il le 7e condamné, depuis 1945, à pouvoir bénéficier d’une révision de son procès ?

Ils ne sont que six à avoir eu la « chance », dans leurs galères respectives, de trouver la porte de sortie de l’injustice par une révision de leur procès : Jean Dehays, condamné en 1949 à vingt ans de travaux forcés et acquitté en 1955, Jean-Marc Deveaux, condamné en 1963 à vingt ans de réclusion criminelle et acquitté en 1969, Roland Agret, condamné à quinze ans en 1973 et acquitté en 1985, Guy Meauvillain, condamné en 1975 à dix-huit ans et acquitté en 1985, Rida Daalouche, condamné à quatorze ans en 1994 et acquitté en 1999, Patrick Dills, condamné en 1989 à la perpétuité et acquitté en 2002.

Marc Machin sera peut-être le 7e si la commission de révision décide de le renvoyer devant un tribunal alors qu’il a été condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle par la Cour d’assises des Hauts-de-Seine en septembre 2004, peine confirmée en appel à Versailles en novembre 2005 pour le meurtre de Marie-Agnès Bedot, assassinée sur le pont de Neuilly un soir de décembre 2001.

Grâce du destin, ce sont les aveux spontanés d’un SDF, David Sagno, confortés par la présence de son ADN sur les vêtements de la victime, qui permettront, peut-être, à Marc Machin de mettre fin à son calvaire en transformant, enfin, ses cris d’innocence en vérité.

Si l’erreur judiciaire était confirmée, elle rouvrirait un vieux débat sur la procédure criminelle française. Destruction des indices, culture des aveux, intime conviction !

Seulement six erreurs judiciaires reconnues en soixante-trois ans, cela signifie-t-il que la justice est « presque » infaillible ou que d’autres innocents ont pu être condamnés définitivement sans avoir eu l’opportunité d’apporter un « fait nouveau de nature à jeter un doute sur la culpabilité du condamné » ?

Il est probable que, dans l’avenir, les nouvelles techniques de détection de l’ADN engendreront la nécessité de conservation des indices pour d’éventuelles recherches plus sophistiquées lorsqu’un doute subsistera. Trop de dossiers n’ont pu être réouverts faute de conservation des indices pour une recherche ADN !

Il faut également espérer que l’évolution de la technicité permettra d’abandonner la culture des aveux relevant plus du Moyen Âge que de notre siècle ! Combien d’innocents, victimes des tortures psychologiques et physiques de la garde-à-vue ont fini par avouer des crimes qu’ils n’avaient pas commis ? Le temps de garde-à-vue doit être un temps d’enquête avec des droits respectés du gardé-à-vue. Trop souvent, ce temps est considéré comme une zone de non-droit dans laquelle l’équilibre de l’enquête à charge et à décharge est oublié au profit d’une mise en scène de scénarios relevant de l’intime conviction !

Marc Machin avait déjà un casier judiciaire conséquent : condamnations pour vol en réunion, violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique, dégradation volontaire de monument. Il avait, de plus, été placé, pour une agression sexuelle commise quelques mois avant le meurtre de M. A. Bedot, sous un contrôle judiciaire qu’il ne respectait pas.

N’était-ce pas suffisant pour forger l’intime conviction des enquêteurs et oublier les éléments à décharge comme l’absence de toute trace d’ADN de Marc Machin sur les vêtements de la victime !

En garde-à-vue, Marc Machin commence par nier, avant d’avouer lors de la cinquième audition. Que s’est-il passé entre la première et la cinquième audition ? Un procès-verbal de garde-à-vue ne fait jamais état du traitement réservé au prévenu pendant sa période de garde-à-vue hors l’indication administrative des temps de repos.

Marc Machin se rétractera par la suite et criera son innocence au cours de ses deux procès d’assise.

En vain !

Car, l’intime conviction, c’est aussi la règle de fonctionnement du jury de la Cour d’assise qui n’a pas à justifier ses décisions ! Conception étonnante de la justice lorsqu’on décide de la vie d’un individu !

Marc Machin ne représentait-il pas le coupable idéal dans le cadre de cette intime conviction ! Le Monde du 26 mars 2008 précise : « Il n’a pas 6 ans quand sa mère décède des suites du sida. Il a déjà effectué un séjour dans un foyer de la Ddass quand il est placé dans une famille d’accueil, où il dit avoir été abusé sexuellement par un autre jeune en difficulté. La mort de sa grand-mère, avec laquelle il a vécu, à Marseillan (Hérault), de 8 à 12 ans, met fin à la seule période heureuse et scolairement réussie de son enfance. Il est ensuite renvoyé à Paris, chez son père, policier, alcoolique. Il arrête ses études générales en 4e et il obtient un CAP de peintre en bâtiment. En 2001, lorsqu’il est interpellé, cela fait plusieurs mois que M. Machin ne travaille pas, ne touche aucune aide sociale et vit toujours chez son père. Selon ses déclarations au cours de l’instruction, il passe ses soirées et ses nuits à boire, seul ou avec ses amis, et à errer dans les rues de Paris. Très impulsif, il lui arrive souvent de se battre. Il porte régulièrement un couteau, utile, selon lui, quand il va acheter son "shit" en banlieue. Il se rend aussi régulièrement au bois de Boulogne pour "mater". Presque effrayé par ses pulsions sexuelles, il a déjà consulté plusieurs psychologues. »

La procédure de révision d’une condamnation définitive est lourde et peut prendre plusieurs années. L’avocat de Marc Machin a demandé la remise en liberté immédiate de son client. La commission de révision peut décider à tout moment la suspension de la peine purgée par Marc Machin en attendant la fin de l’examen de la requête en révision. Souhaitons qu’elle prenne une décision rapide car, pour le moment, deux hommes sont en détention pour un crime commis par un seul d’entre eux : d’un côté, un vrai coupable pour la justice, Marc Machin, qui crie son innocence et, de l’autre, un présumé innocent pour la justice, David Sagno, qui se déclare coupable !


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3 réactions à cet article    


  • L.S.B 7 avril 2008 14:21

    Les assises ressemblent plus à une grande représentation théâtrale qu’à une enceinte dans laquelle on recherche la vérité. Malheur au prévenu qui n’aura pas choisi le bon orateur ! Malheur au prévenu qui présente le profil du coupable. Son avocat devra redoubler de talent pour convaincre des jurés qui n’ont rien à justifier pour se faire une intime conviction !


    • Internaute Internaute 7 avril 2008 20:31

      Si on continue comme cela on va bientôt refaire le procès de Jeanne d’Arc.


      • Raptor Raptor 5 mai 2008 20:39

         L’avocate générale, collègue de l’excellent Philippe Bilger, vient d’émettre un avis négatif sur la supension de peine de Marc Machin alors que la commission de révision des condamnations pénales a été saisie par Dati-Dior le vendredi 28 mars soit 38 jours après la saisine !
        La décision est "annoncée" pour le 9 juin 2008 !
        Les magistrats de la chambre criminelle de la cour de Cassation sont-ils à ce point débordés ?
        C’est dans la même veine, mauvaise pour les citoyens moyens, que les délibérés qui remettent à plus tard voire beaucoup plus tard ce qui pourrait être décidé si ce n’est immédiatement, du moins dans les 24 ou 48 heures qui suivent.
        Nous comprenons que la "justice" ne soit pas rendue dans la précipitation mais cette lenteur finit par devenir insupportable, surtout quand elle ne cherche pas sciemment à enterrer des affaires.
        Vu le nombre de dossiers que cumulent les magistrats il est peu probable que ce(s) affaire(s) soient réétudiés en détail !
        Il serait donc instructif que la "justice" avoue que les justiciables et présumés innocents ne sont que des dossiers ou des infractions, des crimes... et que ces reports ne sont que des artifices judiciaires soit pour faire oublier temporairement le dossier soit pour des raisons obscures non avouables.
        Mais la "justice" est le 3 ° pouvoir qui vit tellement en vase clos qu’elle déteste se montrer sous son vrai jour de broyeuse d’humains et surtout, reconnaître ses torts.
        Le taux de sur-remplissage des prisons en est une pitoyable preuve.

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