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Accueil du site > Actualités > International > Les Indes que l’on croit connaître...

Les Indes que l’on croit connaître...

« Lettres Indiennes », tel est le thème du Salon du livre 2007. Bien vu le titre. Il n’est pas une Inde, mais des centaines d’Indes, peuplées d’un milliard d’habitants de toutes communautés. On croit connaître les Indes...

LettresindiennesDes Chemins de Katmandou dans les années 60 avec l’introduction des mots "karma", "gourou", "nirvana", "tantra" ou "yoga" dans le vocabulaire des illuminés, des snobs, des affairistes, des new age, des végétariens et des bobos...

Jusqu’à aujourd’hui, avec "l’indianisation des services informatiques", grâce à une main-d’oeuvre qualifiée et bon marché, où les "gentils Indiens, protecteurs des vaches sacrées et adeptes de la réincarnation" se sont transformés du jour au lendemain en "méchants voleurs d’emploi"...

Personnellement, tous ces clichés m’emmerdent. Je déteste ce que les Occidentaux branchés ont cru faire des enseignements millénaires des sages indiens, en se répandant partout sur les bienfaits de la méditation, du yoga et du régime végétalien revisité par Madonna.
Tout ça est kitch, faux, nul, et méprisant pour les Indiens "in the first place", que l’on se plaît à qualifier comme bon nous semble. Qui d’entre vous n’a jamais entendu dire ou même proféré : "ah, vous avez la peau brune et êtes originaire d’Inde, vous devez être bon en informatique..."
Pourtant, la civilisation indienne a rayonné dans toute l’Asie dans les années 1700, représentant à l’époque la première puissance mondiale.

L’Inde est déroutante, l’Inde est une femme : aimez-la ou détestez-la mais n’essayez pas de la comprendre et encore moins de dire que vous la connaissez...

Je me suis rendue aux Indes par deux fois et tout ce que je peux dire, c’est que l’intense misère, même bariolée de mille couleurs et regardée du haut des temples par les 330 millions de dieux que compte le Sanâtana Dharma, pue la merde, l’eau sale, la sueur. Et les épices ont renoncé à lutter contre cette odeur qui est partout.
Oui, bien sûr, je lis dans la presse que le niveau de vie général s’élève régulièrement de Bangalore à New Delhi. Et qu’avec un peu de chance, le PIB dépassera celui des Etats-Unis en 2050.
Bonsoir, Madame Irma, merci d’être passée...

Je vois surtout une croissance à marché forcé pour un géant aux pieds d’argile.
Car qu’en est-il des Indiens ?

Les Indes, ce sont 500 millions d’agriculteurs qui vivent dans des villages jusqu’à ce qu’ils se suicident par dizaines de milliers, poussés à bout par la nouvelle économie de marché qui les incite, à grands renforts d’emprunts à taux usuriers, à investir dans les cultures commerciales et non plus vivrières. Cultures commerciales, telles le café et le coton qui ne rapportent rien au pays confronté aux barrières protectionnistes mises en place par les grandes puissances. Gandhi disait que l’agriculteur est à la base de l’économie indienne. C’est toujours vrai et cela doit continuer car de la bonne santé de l’Inde rurale dépend la prospérité de l’Inde toute entière.

Les Indes, ce sont 60% de foyers privés d’eau potable. 5 millions de personnes meurent de maladies liées à la contamination de l’eau chaque année (source OMS). Alors que le pays se vante d’être l’un des premiers producteurs au monde de médicaments et de vaccins !

Les Indes, c’est la nation la plus touchée par le virus du Sida. Sujet tabou dans le pays où les malades sont chassés de leur foyer, quand ils ne sont pas lapidés. L’information est nulle et les tests de dépistage hors de question pour des raisons socioculturelles ! Et pendant que les touristes jouissent de la nouvelle tendance du tourisme médical, 70 millions d’indiens souffrent d’une carence en iode : il suffirait de fournir du sel iodé pour l’alimentation...

Le plus grand bidonville d’Asie est à Bombay, à quelques minutes des hôtels cinq étoiles.
Les Indes forment 250 000 ingénieurs par an, alors qu’il y a une pénurie cruelle d’écoles primaires, de collèges et de lycées. Les meilleurs ingénieurs émigrent aux USA et en Europe : la fuite des cerveaux coûte à l’Inde plus de 2 milliards de dollars par an.

Bon, j’arrête et propose que nous tâchions de comprendre un peu mieux cette nation en regardant de plus près sa situation, mosaïque de religions et de communautés, et son histoire récente, aux explosions de violence récurrentes, alors que la majorité de la population est pacifique, modérée et respecteuse de la loi.
Les Indes, "démocratie souveraine, socialiste et laïque", sont composées d’environ 80% d’hindous, de 14% de musulmans, le reste de la population étant constitué de sikhs, de chrétiens, de bouddhistes et autres minorités religieuses.
Sans compter les centaines de milliers de réfugiés afghans, tibétains, bengladais et népalais.

Au moment de l’indépendance, en 1947, le sous-continent a été partagé en deux Etats : l’un musulman (Pakistan occidental et oriental, qui deviendra le Bengladesh) et l’autre hindou, l’Union indienne.
Cette partition a été accompagnée de mouvements massifs de populations et de terribles massacres. Certains experts avancent que les génocides entre hindous et musulmans auraient fait plus de victimes que l’Holocauste  !
Le souvenir de cette violence est profondément enraciné dans les mentalités et les responsables politiques populistes en attisent régulièrement le feu dans le sens de leurs intérêts.
En Inde, être chef du gouvernement est définitivement une profession à haut risque : Gandhi a été assassiné par un fanatique hindou, Indira Gandhi, assassinée par ses gardes du corps sikhs, son fils Rajiv Gandhi, assassiné par les Tigres tamouls...

Qui dit Indes, dit "castes" et ce fléau justifie encore et toujours les violations des droits de l’homme les plus ignobles et les plus scandaleuses. En 1955, après avoir adopté une constitution reposant sur l’égalitarisme, l’Union indienne a aboli le système des castes. Mais comment changer une mentalité vieille de 5 000 ans ?
Les mesures de discrimination positive en faveur des castes inférieures provoquent des tollés parmi les hautes castes qui y voient l’abandon de la notion de mérite. La question est loin d’être résolue.

Qui dit Indes, dit "mariage à l’indienne et système de dot", qui, sans entrer dans les détails, conduit chaque année à la ruine des centaines de milliers de familles et à la mort des centaines de milliers de jeunes femmes, appelées les "dowry deaths" ou "mortes pour cause de dot", brûlées vives par leur belle-famille.
Et puisque nous parlons de la situation des femmes, un simple chiffre qui donne le vertige, 23 000 petites filles ont été tuées à la naissance pour la seule ville de New Delhi en 2003 !

Une "énorme anecdote" pour conclure : une révolution se profile aux Indes, du fait des activistes naxalites !
Ces "Robins des Bois" luttent en faveur d’une société sans castes et sans classes. Ils contrôlent actuellement 30% du pays et envisagent d’en contrôler 60% d’ici quatre ans...
Ils collectent les impôts, mettent en place des programmes d’irrigation, dirigent la justice, le système scolaire et propagent de nobles idées, tout en liquidant les grands propriétaires terriens.
Du nord au sud du pays, les naxalites sont organisés en vastes réseaux d’une efficacité redoutable et mènent 1 500 attaques par an faisant de nombreuses victimes parmi les policiers.
La solution pour en venir à bout pacifiquement serait d’introduire de véritables réformes agraires, d’améliorer la vie des populations rurales en leur donnant accès à toutes les infrastructures qui leur manque cruellement, d’arrêter la déforestation et les déportations de populations.

Il est grand temps pour les responsables politiques en Inde de conduire des réformes fondamentales à visage humain, plutôt que d’être tout occupés à se graisser et à passer de gros contrats commerciaux...

9782212538151 Un très, très, très bon conseil de lecture, si vous avez des projets en Inde, pour y faire des affaires, ou une visite "éclairée du pays" :

l’excellent bouquin de l’écrivain indien Izzi Lokku, "La Face Cachée de l’Inde" (Editions Eyrolles), ou tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’Inde sans jamais oser le demander....


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14 réactions à cet article    


  • TALL (---.---.145.250) 26 mars 2007 13:15

    Encore un article vraiment instructif et sans langue de bois après celui de la Russie.

    Merci.


    • alberto alberto 26 mars 2007 13:16

      Bravo, Cath, pour votre mise à bas des clichés véhiculés par les vendeurs d’exotisme, et bien écrit en plus !

      Pour y avoir (un peu) travaillé je suis d’accord avec tout ce que vous en dites...et il y en aurait encore beaucoup à en dire : mafias, corruption, esclavage...

      Bien à vous.


      • tovara (---.---.149.181) 26 mars 2007 13:46

        L’indolâtrie actuelle (il ne se passe pas de mois sans qu’il y ait de « semaine de l’Inde » dans l’un de nos grands magasins, et le magazine « Elle » s’est fait le spécialiste des Cachemire, Jodhpur, recettes de riz au curry, reportages GASTRONOMIQUES ET CULTURELS sur l’INDE, mise sur un piédestal, n(oublions pas non plus la fusion Arcelor-Mittal alors que la logique aurait voulu que cette opération se fasse avec Severostal) a des raisons bassement politiques : dans le binôme Inde-Chine, la Chine est décrite (du moins depuis qu’elle est devenue de facto capitaliste) comme le grand méchant, qui viole les droits de l’homme, qui fait du dumping industriel, qui veut bientôt devenir une trés grande puissance « qui nous bouffera tous » (sous-jacent un racisme à peine dissimulé : le « péril jaune ») ; alors comparativement l’Inde, avec son « petit » milliard d’habitants (comparés aux i, 3 milliards de la Chine) et son territoire pas si immense que çà (3, 3 millions de km2, soit un peu plus que...l’Argentine, contre 9, 5 millions de km2 pour la Chine populaire) semble moins menaçante, d’autant plus que nombre de bo-bos new age étant aux manettes dans notre pays aujourd’hui sont d’anciens 68tards fumeurs de pétards nostalgiques de l’époque où certains faisaient la route vers Katmandou ou aller « chercher leur vérité »(et se regarder le nombril ou celui de nombreuses adeptes féminines de divers gourous) dans les ashrams d’Auroville, de Poona, de Goa...


        • armand (---.---.217.81) 26 mars 2007 14:11

          Bonjour Cath et merci pour cette présentation d’un sous-continent aimé mais mal-connu. Mais quand vous écrivez que la civilisation indienne a rayonné dans toute l’Asie vers 1700 à quoi faites-vous allusion ? En cette année-là la majeure partie du sous-continent obéissait à l’empereur moghol Aurangzeb, contemporain de Louis XIV et fanatique musulman autant que son homologue français était catholique intransigeant. C’était une exception, car le plus grand des empereurs moghols, Akbar, qui régnait cent ans plus tôt a élevé au rang de doctrine d’Etat la tolérance religieuse au moment où les Européens s’étripaient entre catholiques et protestants. La civilisation moghole est un mélange savant d’éléments indiens et de traditions arabo-persanes, mais elle est mise à mal à la fois par l’intégrisme wahhabi au Pakistan, qui récuse tout syncrétisme, et le nationalisme hindou en Inde qui y voit la trace des invasions musulmanes. Or c’est peut-être bien cette civilisation, dont le faste et les grands mythes sont célébrés dans beaucoup des films indiens, qui peut servir de terrain d’accord entre Inde et Pakistan.


          • Marsupilami Marsupilami 26 mars 2007 14:47

            Excellent article, Cath. J’ai beaucoup voyagé en Inde et je confirme tout. L’indomania est une escroquerie intellectuelle et spirituelle de première bourre. La misère y est effroyable, les inégalités sociales monstrueuses, la corruption endémique, la bureaucratie catastrophique, le racisme omniprésent, la violence quotidienne, la criminalité colossale, l’emprise des religions insupportable, la pollution sans limites.

            Je connais plein de gens qui sont allés là-bas chercher la sagesse et la spritualité et blablabla et qui sont devenus fous en quelques semaines ou quelques mois quand ils ont été obligés de confronter leurs illusions occidentales à la cruelle identité indienne. Ceux-là sont les meilleurs êtres humains. Les pires se la coulent douce dans des ashrams aseptisés pour gogos western dirigés pour la plupart par des gourous-escrocs.

            Mais quand même, une nuit magique de pleine lune sur un ghât de Bénarès, au bord du Gange où défilent des cadavres de buffles sous un immense ciel étoilé. C’est d’une beauté à couper le souffle au milieu de toute cette misère mutilée et grouillante et klaxonnante. Mais quand même l’insoutenable beauté de Jaisalmer, cité aux murs couleur or dans le désert de Thar aux habitants si beaux et si accueillants. Mais quand même tant d’autres belles choses...

            C’est un pays fascinant que j’adore et que je hais. Indissolublement.

            Merci pour cet article qui remet à sa place l’indomania pour ex-hippies ou bobos branchouilles.


            • (---.---.69.212) 26 mars 2007 20:46

              « Elle verse 500 grammes de nixtamal (farine de maïs) sur la table, y ajoute une petite cuiller de sel »

              et une brouettée de conneries, ça te dit quelque chose ?


            • Rdlm (---.---.114.107) 26 mars 2007 19:18

              la fuite des cerveaux coûte à l’Inde plus de 2 milliards de dollars par an mais Mr Mittal en ramène des millards en Inde !!! De même, beaucoup de ces cerveaux le sont devenus aux USA et parmis ceux-ci beaucoup rentrent au pays. La somme n’est peut être pas si négative que ça pour l’Inde...

              L’inde, c’est aussi des sacrifices humains (j’en ai compté une disaine à Dehli et alentours en 2003, donc rapporté à tout le pays ça doit faire BEAUCOUP !). Sacrifices humains au nom des principes ayurvédiques cher à nos bobos (s’ils savaient smiley !!!)

              En ce qui concerne les intouchables, je vous conseille L’équilibre du monde de Rohinton Mistry, qui reste d’actualité malgré que ce se passe dans les année 70 et que je trouve que la vérité va encore plus loin (après 1 an de lecture quotidienne du Times of India) !

              Pour finir, la religion hindou dont le principe est « on ne nait ni libre ni égaux » (sic) est un frein très puissant aux changements en Inde (y compris venant de certains intouchables) ! Pour échapper aux systèmes des castes, les intouchables indous se convertissent au bouddhismes mais face à ça, le gouvernement (ou les gouvernements locaux) a interdit la conversion religieuse (vous savez comme au pakistan où les convertis musulmans sont comdamnés à morts et où ça fait tout plein de bruit en occident... contrairement à ce qu’il se passe ne Inde)


              • Cath Cath 26 mars 2007 19:45

                Bonsoir smiley

                Merci pour vos commentaires et vos compléments d’enquête, également sur l’empire Moghol (fondé par un descendant de Tamerlan !).

                Concernant la question du binôme « Chindia », j’évoque cette question dans l’un des commentaires sur mon blog :

                Ces deux pays affichent grosso modo des croissances de 10 % annuelle, ont beaucoup de points communs en matière d’appétance pour les produits et services de base, les articles de luxe, les marques branchées, l’acier, le ciment, les minéraux, l’eau, le pétrole et les textiles. Ils constituent de gigantesques marchés. Mais ces comparaisons sont ridicules car ces deux « continents » n’ont en fait rien en commun :
                - l’Inde est une démocratie (même si...) et la Chine une dictature
                - la Chine possède 800 Mia de USD de devises, l’Inde à peine 150 Mia
                - la Chine est alphabétisée à 80%, l’Inde à 50%
                - la Chine peut s’offrir les JO, des missiles balistiques, des centaines de boeing et d’airbus, ce que ne peut faire l’Inde et de loin

                Au plan géographique, l’Inde est entourée d’états en faillite, en proie à la guerre ou les deux (Afghanistan, Pakistan, Bengladesh, Népal, Birmanie, Sri Lanka). La Chine jouit de bons voisins : le Japon, Taïwan, sans compter les profits retirés du retour de Hong Kong.

                Les relations entre ces deux puissances ne sont pas sous le signe de la cordialité. Et c’est un euphémisme pour ne pas dire que les tensions sont constantes sur la question du Tibet, du Sikkim, du Jammu-et-Cachemire et de la pénétration chinoise en matière d’infrastructures au Bangladesh et au Népal...

                Sans compter l’influence que ces deux états se disputent sur le contrôle des gisements de gaz et de pétrole jusqu’en Afrique.

                Pour l’heure, les chinois mène le bal.

                Une dernière chose qui n’est pas anodine : les grands cours d’eau indien sont alimentés par la fonte des neiges de l’Himalaya. Or il semblerait que les chinois détournent les cours d’eau à leur profit !!! Une guerre de l’eau en vue entre ces deux-là ? Bien possible ! smiley

                Bref, comment ces deux géants vont influer sur leur avenir et l’avenir du monde... en fonction du réalisme de leur vision actuelle.

                — -

                Enfin, et cette question s’adresse à Rdlm, j’ignorais la pratique de sacrifices humains en Inde ? Pouvez-vous nous en donner les raisons ?


                • Rdlm (---.---.114.107) 26 mars 2007 20:03

                  Cath, comme tout sacrifice, c’est pour avoir un enfant (de préférence un garçon), pour réussir des examens, pour guérir d’une maladie incurable, pour devenir riche,...

                  Voici quelques extraits péchés vite fait sur google :

                  1) Opinion - Letters to the Editor

                  Human sacrifice

                  Sir, - Reading about the recent wave of human sacrifices across India in a British newspaper made me wonder whether our country is really in the 21st century. More saddening is that these acts are patronised by some of our educated elite, including senior politicians. The Government should summarily outlaw these irrational and dangerous acts and their practitioners.

                  J. Shankaranarayanan, Thiruvananthapuram

                  2) Urdu and Hindi papers report these events almost daily

                  3) Mob lynches tantrik for child sacrifice

                  4) One gets death sentence in human sacrifice case

                  5) Human sacrifice : Life terms upheld


                  • Cath Cath 26 mars 2007 20:53

                    Merci pour ces liens dangereux... smileysmiley


                  • LE CHAT LE CHAT 27 mars 2007 09:46

                    très bon article cath , pour illustrer le fait que les indiens ne sont pas tous cool , voici ce qui se passait il n’y pas si longtemps que ça :

                    L’exécution par éléphant était un mode d’exécution courant dans l’ensemble de l’Asie du Sud-Est et du sud, et particulièrement en Inde, pour les condamnés à mort jusqu’à un passé récent . Le voyageur anglais Robert Knox, en 1681, relate la méthode d’exécution par éléphant utilisée à Ceylan. Plus tard, en 1868, durant une expédition en Inde, Louis Rousselet assiste à une de ces exécutions d’un criminel à Baroda. Un croquis, fait au cours de l’exécution, montre le condamné forcé de placer sa tête sur un piédestal, et puis tandis qu’on le maintient en place, un éléphant lui écrase la tête sous sa patte. Le croquis, plus tard transformé en gravure, sera imprimé dans « Le Tour du Monde », un journal alors très diffusé en France et traitant de voyages et d’aventures.

                    Une exécution à Baroda en 1868De temps en temps, les exécutions sont précédées d’un supplice au cours duquel le condamné est tiré, attaché à l’une des pattes de l’animal, dans les rues de la ville avant l’exécution proprement dite. D’autres fois, l’éléphant est utilisé pour écraser des membres, tout d’abord, puis le thorax, souvent avec une lenteur cruelle.

                    La plupart des râjas conservent alors des éléphants d’une taille et d’une masse spectaculaires ─ pesant parfois plus de neuf tonnes, le double du poids moyen ─, destinés aux exécutions qui se font en public, en guise d’avertissement contre les transgressions.

                    Quelques monarques adoptent également cette forme d’exécution comme divertissement. L’empereur moghol Jahangir fait opérer un grand nombre de mises à mort de cette manière. Au cours du XVIIIe siècle, les Marathes l’emploient aussi très couramment. Le général marathe Santajî Ghorpade (1764-1794) est célèbre pour sa fascination pour ce type d’exécution à laquelle il condamne avec la plus grande facilité.

                    Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, les cours musulmanes en Asie du sud l’utilisent de façon générale, mais l’expansion britannique entraîne le déclin de cette pratique jugée barbare par le colonisateur. La dernière exécution par éléphant en Inde eut lieu en 1948.

                    édifiant , n’est ce pas !


                    • Cath Cath 27 mars 2007 17:47

                      Bonjour Le Chat

                      Oui, j’avais entendu parler de ces supplices d’une effroyable barbarie, comme c’est souvent le cas avec les supplices, d’ailleurs...

                      Merci pour cette contribution ! Les Indiens ne sont pas ’cools’, non, mais qui l’est au final, hein ?

                       smiley A tous, je suis enchantée d’avoir été convaincue par mon ami Christophe Brasseur, qui intervient également en tant que rédacteur sur Avox car les interventions et les commentaires participent grandement à l’enrichissement du billet original. Y compris les critiques négatives !


                    • Krishna_Underground Krishna_Underground 3 avril 2007 01:59

                      L’INDE ET L’OCCIDENT

                      L’Occident c’est comme une très jolie boîte avec des morceaux de chiffons dedans, l’Inde c’est un joyau dans un chiffon. Pour comprendre l’Inde il faut connaître ce qu’était la civilisation védique et le varnasrama dharma. merci Ghanasyam


                      • (---.---.149.182) 4 avril 2007 15:23

                        très bon article, mais plusieurs choses : je suis né en inde et après avoir été adopté par des parents français, je suis retourné en inde plusieurs fois, et c’est vrai que les premiers jours sont d’une difficulté énorme car tout ce que vous décrivez dans votre article est absolument vrai : pollution, misère, manque de structure, mais je n’y ai pas rencontré personnellement de violences, enfin peu importe... ce qui se produit c’est qu’ayant vécu depuis si longtemps en france, ma vision est déformée par l’exigence des mêmes standards universalistes dans lesquels je fus éduqué, cela dure trois ou quatre jours : je refuse cet inde que je vois comme « primaire », cependant après ces quelques jours de flottement spirituel, quasi mystique plusieurs choses disparaissent : l’attachement matériel (je dormais chez des gens très simples), le confort n’était d’aucune utilité, la misère laissait la place à des sourires et à des invitations de toutes part pour que je partage leur quotidien, la pollution m’était indifférente car l’enjeu est la survie (je sais c’est choquant quand j’y repense !!), mais surtout ce qui disparaissait le plus c’était l’habitude d’exiger quoi que ce soit, même de vouloir, la demande laissait la place à l’offre : offrir un sourire, une parole, du temps pour moi et l’autre. voilà l’inde que je quitte à chaque fois les yeux en pleurs, celle qui me pique de ne pas vouloir désespérer de notre monde et qui m’incite à y retourner dès que je pourrai. un indien de france cordialement

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