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L’UMP et les institutions en question

Se comportant en Premier ministre bis, le candidat Sarkozy dévoile ses intentions de présidentiable à la presse.

D’entrée de jeu, Nicolas Sarkozy se démarque ! Sortant de son rôle de ministre de l’Intérieur pour parler en tant que président de l’UMP, il se comporte d’ores et déjà en présidentiable possible... D’ores et déjà, sous son impulsion, l’UMP a programmé la tenue de deux colloques :

- le 24 janvier 2006, une convention sur la culture et les nouvelles technologies

- le 1er février 2006, une convention sur l’école.

« D’autres conventions sont d’ores et déjà prévues, qui porteront sur la santé, la justice, le sport, l’Outre-Mer, les institutions... sans oublier le logement, autre préoccupation majeure de nos concitoyens, dont l’inspiration à devenir propriétaires est loin d’être actuellement satisfaite », annonçait-il à la presse venue assister à ses voeux.

Selon son souhait, ces conventions sont destinées à associer les militants de son parti à l’élaboration du projet commun. « A l’automne 2006, une "convention du projet" fera la synthèse de l’ensemble de nos débats et travaux avant que le Conseil national n’adopte les grandes orientations du projet législatif de l’UMP pour 2007, les dix propositions principales de ce projet étant soumises après au vote des militants », annonçait-il.

Le patron de l’UMP, qui expose son attachement aux institutions de la Ve République, estime que, « du fait du quinquennat, plus que jamais le président de la République est la clé de voûte de nos institutions ». Pour lui, il convient de « tirer les conséquences de la place et du rôle du président de la République dans le cadre du quinquennat ».
« Le président de la République a la légitimité du suffrage populaire dans son expression la plus universelle. En même temps, cette considération me conduit à ajouter que le futur président ne pourra être que différent de ceux qui l’ont précédé : il devra s’engager non seulement sur les grandes options, mais aussi sur tout ce qui concerne la vie quotidienne des Français, sur leurs souffrances, sur leurs aspirations. Il devra davantage engager sa responsabilité. Il devra prendre des engagements. Expliquer comment et avec qui il les mettra en œuvre », expliquait le premier policier de France, pour donner sa vision du futur chef de l’Etat français.

Seulement, là où le bât blesse, c’est que l’adoption, par voie référendaire, du quinquennat présidentiel est une grave erreur politique, puisqu’il interdit toute forme d’alternance démocratique. Contrairement à ce que prétend Nicolas Sarkozy, le président de la République ne peut plus être la clé de voûte de nos institutions, pour plusieurs raisons :

- la durée du mandat présidentiel est la même que celle du mandat des députés
- les élections législatives, qui sont actuellement organisées presque immédiatement après le second tour des élections présidentielles, octroient de facto au président élu une Chambre entièrement de son bord, donc un pouvoir présidentiel exorbitant.

De plus, en cas de dissolution de l’Assemblée nationale ou en cas de motion de censure provoquant la chute du gouvernement, une cohabitation serait toujours possible : de ce fait, le chef de l’Etat ne serait considéré que comme « le chef suprême de l’ancienne majorité gouvernementale », et non plus comme « l’arbitre suprême de la Nation ». Certaines personnalités politiques voudraient que le poste de Premier ministre, devenu, à leurs yeux, « inutile », soit supprimé[1].

Pour Nicolas Sarkozy, « le nombre de mandats présidentiels devrait être limité à deux à partir de la prochaine élection présidentielle ». « C’est faire, qui est le premier devoir d’un président », explique-t-il avant de continuer en ces termes : « Avec de telles responsabilités exercées quotidiennement, dix ans de pouvoir est un horizon suffisamment ambitieux ».

Pourquoi vouloir toujours toucher à nos institutions ? Est-il démocratique de décider, en nos lieu et place, si dix ans de pouvoir, c’est suffisant pour un homme ou une femme ? Qu’il nous soit permis d’en douter...

« Je suis pour que le président de la République puisse venir expliquer directement sa politique aux parlementaires, et pour que ceux-ci puissent demander à débattre des questions touchant à la politique étrangère, à la défense et à la politique européenne », souhaitait Nicolas Sarkozy.

Mais, au passage, il oublie, bien qu’il l’ait rappelé, que « le chef de l’Etat est la clé de voûte de la Nation ».

Bien sûr, et le ministre de l’Intérieur a raison sur ce point, les contrepouvoirs au pouvoir présidentiel doivent être renforcés, voire créés ! « Pour cela, il faut que le Parlement puisse débattre avec le gouvernement des orientations de la politique gouvernementale, et, le cas échéant, les amender », préconise-t-il à juste titre. « Il faudrait », et le patron de l’UMP a encore raison sur ce point, « inscrire dans la Constitution la possibilité pour le Parlement d’adopter des résolutions, c’est-à-dire des textes de portée politique non normatifs ». « Enfin, le président de la République ne doit pas monopoliser entre ses mains toutes les nominations de la République », propose-t-il à juste titre. Pour cela, il préconise « que les parlementaires de la majorité et de l’opposition prennent une part active dans les nominations les plus importantes grâce à un mécanisme d’auditions publiques se concluant par un vote à la majorité qualifiée des commissions compétentes ».

Pour Nicolas Sarkozy, « la fonction de Premier ministre doit être conservée comme outil nécessaire à la coordination de l’équipe gouvernementale » : en cela, il va à contre-courant de tous ceux qui considèrent que l’adoption du quinquennat suppose qu’on supprime carrément ce poste devenu totalement inutile. « Une nouvelle rédaction de la Constitution devrait prévoir que le Premier ministre coordonne l’action du gouvernement, alors que le texte actuel dispose qu’il la dirige », conseille-t-il avant de préconiser « que le gouvernement soit limité à une quinzaine de ministres ».

Avec un président de la République nanti de pouvoirs renforcés, et un Premier ministre cantonné dans un rôle de « coordonnateur », nous ne sommes pas convaincus qu’une alternance démocratique soit possible, même si, comme l’a suggéré le ministre de l’Intérieur, des contrepouvoirs seront créés. Nous sommes de plus en plus convaincus que ce pouvoir présidentiel fort, voulu par Nicolas Sarkozy, est excessivement dangereux pour l’avenir même de nos institutions. Une alternance est plus que nécessaire : à maints égards, dans le passé, notamment pendant les trois périodes de cohabitation, le président de la République a montré qu’il était « le président élu de tous les Français »...

En souhaitant rendre l’accès du Conseil constitutionnel aux Français, le ministre de l’Intérieur ne fait que reprendre une proposition qu’avait faite le président François Mitterrand lors de son premier septennat. Si cette disposition était adoptée, ce serait une grande première dans nos institutions.

Quoi qu’il en soit, les vœux du Président de l’UMP étaient placés sous le signe d’une campagne présidentielle.

Seulement, est-ce que se sera suffisant pour éviter que les présidentielles 2007 soient la copie conforme du premier tour des élections présidentielles du 21 avril 2002 ? Rien n’est moins sûr, tant la désespérance des Français est toujours présente ! Le candidat Nicolas Sarkozy pourra-t-il répondre aux questions des Français relatives à l’augmentation du chômage et de la précarité, à la précarité de l’emploi, au logement, à la sécurité, à la cherté de la vie, à l’Europe... ? Rien n’est moins sûr, tant leur grande désespérance est toujours présente !



[1] Cf. « Tribune libre », AgoraVox, Le Journal citoyen du jeudi 3 novembre 2005 : Dominique Dutilloy in : « Revenir, par voie référendaire, au septennat présidentiel est urgent ».


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