La moraline a du plomb dans l’aile
La moraline, c’est cette substance prétendument miraculeuse, sorte de poudre de perlimpinpin parée de toutes les vertus, élaborée alors dans un laboratoire situé rue de Solférino et habilement vendue en 2012 par le VRP Normal 1er qui ne survécut pas au malheureux accident industriel que fut son calamiteux quinquennat.
Cette panacée, prodigieux remède contre les maux politiques, est un savant mélange d’exemplarité, de probité, d’exigence de transparence, d’anti stigmatisation auquel on ajoute invariablement une pincée de ‘’gouverner autrement’’ assez insipide, mais très décorative.
Les résultats de ces essais cliniques sur cinq ans furent décevants, elle se révéla impuissante sur la phobie administrative de Thevenoud, n’empêcha pas le scootériste d’ironiser sur les sans-dents et altéra de manière significative la mémoire du célèbre traqueur d’exilés fiscaux Cahuzac au point même de lui faire oublier qu’il partageait le triste sort de ses camarades de galère en Helvétie.
Echaudée par ces douloureux échecs, la macronie décida de reprendre intégralement tout le processus de fabrication entièrement bio et de le confier à la référence en la matière le moraliste Bayrou avec l’onction du télégénique écolo Hulot.
Il y avait urgence, une dizaine de jours après sa nomination au gouvernement, l’aide de camp de Macron, le maréchal Ferrand se trouvait enferré dans de curieuses mais juteuses affaires, puis le bras droit du roi de l’éthique en toc Marielle de Sarnez faisait l’objet d’une enquête préliminaire ouverte par le Parquet de Paris pour « abus de confiance ».
Plus grave encore, subissant sans doute l’un des effets secondaires les plus souvent constatés chez les individus dépendants à la moraline, notre vertueux centriste fut victime d’un trouble dissociatif de l’identité et oublia un moment qu’il était Ministre de la Justice en retweettant le communiqué de la vice-présidente du Modem dans lequel elle développait sa défense.
Et pour couronner le tout, le vaillant Narcisse Macron, sans doute galvanisé par sa récente victoire au Championnat du Monde de poignées de mains viriles sur le lutteur américain à la mèche peroxydée devant un monde médiatique béat d’admiration s’est cru autorisé à faire un trait d’humour sur les kwassa-kwassa, ces embarcations comoriennes qui pêchent peu mais ramènent du comorien sur les rives de Mayotte.
Il faut quand même être indulgent avec lui, appartenir au camp du bien, c’est viser la perfection, côtoyer la sainteté, se contraindre à une ascèse langagière, réprimer sa beauferie naturelle, c’est exténuant et n’est pas à la portée du premier Sarkozy venu.
Il est nécessaire d'évacuer de temps en temps le trop plein de communication millimétrée, ouvrir les vannes quitte à ce que l’une d’entre elles, un peu pourrie, rance écrirait l’arbitre des élégances morales Laurent Joffrin ne s’échappe inopportunément.
Lucidité ou crainte d’un retour de manivelle, Monsieur Propre à la fidélité politique à géométrie variable a retiré la moraline du marché et jeté la moralisation aux orties pour changer l’intitulé de son projet qui devrait s’appeler plus prosaïquement "loi pour la confiance dans notre vie démocratique" censée redonner le moral aux électeurs à l’approche des législatives.
Vous l’aurez compris, ce qui précède n’est pas une fable, aussi nous nous garderons bien d’y ajouter une quelconque morale.
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