Tahar Ben Jelloun artiste peintre
Le public connait Tahar Ben Jelloun pour le prix Goncourt 1987 attribué pour son roman "La nuit sacrée".
Philosophe, écrivain, poète, essayiste, le voici peintre avec la trentaine d'oeuvres qu'il expose à l'institut du monde arabe :" j'essaie de peindre la lumière du monde".
"Dans mes livres", nous dit-il, "je traque les solitudes. Mais dans mes toiles je chante la multitude heureuse. Ainsi des jardins et prairies voyagent pour retarder et décourager le chagrin".
Né à Fès au Maroc, étudiant à Tanger, enfermé dans un camp disciplinaire pour sa participation aux manifestations estudiantines en 1965, il s'installe en France, devient pigiste au "Monde", docteur en psychiatrie sociale à Jussieu Paris.
Auteur du "Racisme expliqué à ma fille", lauréat du "Global Tolerance Award", prix des Nations Unies pour la paix ,à Barcelone, élu à l'académie Goncourt, il a reçu le prix Osnabrück décerné pour son oeuvre favorisant la coexistence pacifique entre les cultures chrétienne et islamique. Tahar Ben Jelloun est vraiment un passeur, un trait d'union, un intellectuel si nécessaire à notre temps d'exclusions, d'anathèmes et de vindicte vaine et stérile.
"Créateur solaire", comme l'écrit Jack Lang le président de l'I.M.A.,Tahar Ben Jelloun peint joyeusement et la peinture pour lui est une respiration. Ses "oeuvres ensoleillées, emplies de couleurs, puisées à un lumineux imaginaire, couleurs d'enfance", s'expriment sur toiles "colorées et instinctives" et sur papier.
Tahar Ben Jelloun aime les peintres : Matisse, Delacroix, Giacometti...
Heureux de peindre, il réclame le droit de ne pas prendre au sérieux son travail, même s'il a "introduit du professionnalisme dans ce travail". Il nous dit vertement :" Ce que j'écris est à mettre sur le dos de la douleur et de la souffrance. J'ai ouvert les yeux sur des injustices et mes premiers textes sont des poèmes de dénonciation. Mais je n'allais pas passer ma vie à me lamenter parce que l'homme est un homme pour l'homme, pire qu'un loup ou une hyène".( n'a-t-il pas écrit "Cette aveuglante absence de lumière").
"Il y a chez certaines personnes une lumière et une grâce qui font oublier les tragédies commises par les salauds. Alors ma peinture est certainement née, suscitée voire imposée par ces êtres solaires.Ces toiles rappellent le pays natal, le pays intérieur, celui de mon imaginaire fait de voyages, de rencontres et d'étonnements. C'est le rythme de ma respiration, de ma liberté entêtée et du désir d'aller habiter une prairie qui change de couleur et de lumière, pensant malgré tout que l'on sauvera le monde".
La couleur naturelle est alors une obsession,une ligne directrice, pour le peintre qui n'a appris ni la technique, ni la composition, ni la science des couleurs.
Il a contemplé pendant des heures les tableaux des peintres aimés. Il a écrit sur eux et il s'est lancé avec joie, pinceaux et peintures acryliques à disposition, pour réaliser souvent d'un seul jet une oeuvre.
Des toiles avec poèmes, des toiles avec des portes, des marabouts (petits bâtiments du maghreb surmontés d'une coupole), des architectures méditerranéennes. "La maison d'enfance est une source ardente.Elle grandit l'oeil. Cuisine des épices venues de pays imaginaires. C'est un parfum du matin qui enchante et qui donne à l'enfant esseulé la passion des racines".
Tahar Ben Jelloun va recevoir à l'I.M.A. des lycéens, des élèves allophones arrivants. Avant la projection du film de Bunuel "L'ange exterminateur", il dialoguera avec l'écrivain et scénariste Jean-Claude Carrière. Bernard Pivot président de l'académie Goncourt viendra lui aussi dialoguer à l'I.M.A.
Peut-être Tahar Ben Jelloun parlera-t-il , en tant que membre du conseil d'administration de la fondation pour l'islam de France, "des islamistes et du problème de sexualité non résolu, de l'angoisse du rapport à la femme qu'ils veulent couvrir, voiler, cacher", comme il s'en était ouvert dans la presse française ? Peut-être évoquera-t-il la situation de la France, comme dans sa lettre au futur président Emmanuel Macron, publiée lors de l'élection présidentielle, lorsqu'il conseillait de "s'occuper de la France qui a voté Melenchon, Le Pen, de la France qui souffre, celle des bas salaires, celle des laissés-pour-compte...Cette France il va falloir lui parler, choisir les mots, savoir lui tendre la main".
Et ce conseil au futur élu, de prendre "le temps de lire, pour rester curieux".
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