Coke en stock et bois d’ébène : esclavage en Libye et retour des Barbaresques et de la barbarie. Une solution en amont
« Remettre les rivages et les villes de l’Afrique à des princes arabes, ce serait confier la civilisation à la barbarie, la mer à la garde de ses pirates, nos colons à la protection et à l’humanité de leurs bourreaux…Si l’or a son poids, la politique, l’honneur national, la protection désintéressée du faible, l’humanité, n’ont-ils pas le leur ? Abandonnerions-nous ces mers à leurs pirates ? Les côtes de France, d’Italie et d’Espagne à leurs insultes ? Repousserions-nous les bénédictions de ces rivages que nous avons affranchis de leur terreur ? Laisserons-nous repeupler d’esclaves français et européens ces nids d’esclavage que nous avons détruits pour jamais ? »….
Alphonse de Lamartine – Discours du 2 mai 1834 à la Chambre des députés
« Nous entrons dans l'Archipel inédit où les communautés humaines pourront se connaître et s'équivaloir, et changer en échangeant, sans pour autant se perdre ni se dénaturer », écrivent Edouard Glissant, Wole Soinka et Patrick Chamoiseau dans leur déclaration sur la Traite négrière et l'esclavage. Il n'est pas sûr qu'ils aient été vraiment lus et encore moins entendus. Nous n'entrerons pas ici dans les distinctions subtiles pour qualifier toutes les déclinaisons et modalités techniques et géographiques de la traite négrière et de l'esclavage qui ne sont que l'illustration de cette abomination que représente depuis des siècles, sans jamais disparaître, ce qu'il convient d'appeler le trafic d'êtres humains et leur asservissement. Une littérature abondante disponible en la matière permettra à chacun de trouver une lecture susceptible de répondre aux sensibilités et aux approches particulières qui laissent en l'état le fait qu'en novembre 2017 il existe encore des hommes qui en réduisent d'autres en esclavage mais aussi et surtout des dirigeants politiques dévoyés qui mettent en place en amont les conditions de cet esclavage qui n'existerait pas si l'immigration était contrôlée.
I- Un terrible constat
S'il importe plus que jamais de procéder à l’installation d’un tribunal international qui aurait à juger des crimes d’esclavage moderne, il serait surtout intéressant qu'une Europe forte comprenne que l'ouverture de ses frontières à une submersion migratoire démentielle ne peut que susciter un appel d'air incontrôlé à des mouvements de populations fragilisées et sans défense qui deviennent naturellement les proies rêvées de prédateurs criminels.
Le reportage diffusé le mardi 14 novembre dernier par la chaîne américaine CNN représente à cet effet et pour une fois d'une manière réellement justifiée l'usage de ce poncif désormais mis à toutes les sauces que constitue le concept-valise de « banalité du Mal » forgé par Hannah Arendt auquel me semble répondre celui « d'ensauvagement » du monde tel que décrit par Thérèse Delpech dans son ouvrage éponyme. Le reportage précité montre ainsi ce que l'on savait parfaitement, à savoir que devant les difficultés croissantes de quitter l'Afrique pour l'Europe et de traverser le Sahara et la Méditerranée, nombre de migrants sub-sahariens deviennent les proies de leurs « passeurs » Nigériens et Ghanéens et terminent leur voyage en étant vendus aux enchères sur les marchés d'esclaves des vieilles routes commerciales, tel le marché de Ghadamès dans le sud de la Libye.
Nul ne disconviendra que si le XXè siècle fut un siècle particulièrement féroce il est probable que le XXIè siècle réserve encore quelques surprises tant il est vrai, comme l'écrit T. Delpech, au rythme où vont les événements, que « Les pays de droits acquis, qui ne se battent que pour défendre des positions conservatrices, finiront par être balayés » (p. 75). Regarder le monde en face est une nécessité et le regarder tel qu’il est, et non tel qu’on rêve qu’il soit, c’est-à-dire en obéissant au principe de réalité, est d'une urgence absolue. « Quand on ne demande rien d’autre à l’Histoire que de durer, écrit-elle, il ne faut pas se plaindre si elle fournit des réponses brutales » (p. 17).
Parmi les buts essentiels de l’humanité, que le châtiment de tous les crimes soit pris en compte et compte, je ne vois rien là qui ne doive émouvoir, dit-elle. J’y vois plutôt une source de mobilisation. Enfin, s’il y a un jugement de l’Histoire, il implique nécessairement la notion de responsabilité politique. Celle de l’Europe n’est plus à démontrer : « Nous avons entraîné le monde dans nos guerres. Il nous entraînera dans les siennes » (p. 15). À ce sujet, le diagnostic est terrible. Mais hélas ! Terriblement réaliste aussi. Le problème de l’Europe, c’est qu’après avoir été la grande pourvoyeuse d’idées dans le monde, il faut reconnaître que ces dernières n’y naissent plus et que celles qui restent n’ont plus assez de force pour convaincre. Comment pourrait-elle, dans ces conditions, influencer les autres ? Au nom de quoi pourrait-elle permettre l’intégration des populations émigrées ? Quant à la France, son problème face à cette question, est simple et douloureux : « Comment intégrer des jeunes qui n’aiment pas la France dans une France qui ne s’aime pas ? » (p. 74). L’accélération soudaine de l’Histoire, quand celle-ci se produit, signe la défaite de l’action politique, qui doit alors se contenter de courir après les événements avant de sombrer avec eux : « Si l’Europe a bien un message à transmettre au monde, c’est bien celui-là » (p. 43). Message peut-être modeste, mais s’il était entendu, peut-être resterait-il encore quelque crédit et quelque chance de ne pas voir l’histoire condamner l’homme à jamais et sans rémission ?
II-Un refus de tout angélisme européen
Autant dire ici les choses clairement : je ne souscris pas exactement aux propos précités et refuse l'angélisme d'une Europe - et d'une France - qui seraient responsables du malheur du monde et, en l'espèce, du retour de ces bonnes vieilles pratiques des économies esclavagistes sahariennes et barbaresques qui ont précisément profité d'une éclipse européenne pour renaître. Reprenons les questions précitées auxquelles nous apportons les réponses qu'elles appellent.
- Le problème de l’Europe, c’est qu’après avoir été la grande pourvoyeuse d’idées dans le monde, il faut reconnaître que ces dernières n’y naissent plus et que celles qui restent n’ont plus assez de force pour convaincre. Comment pourrait-elle, dans ces conditions, influencer les autres ?Au nom de quoi pourrait-elle permettre l’intégration des populations émigrées ? La réponse est simple : en s'affirmant comme une civilisation qui n'a précisément rien à concéder au monde auquel elle a imprimé sa manière d'être, de vivre, de penser et dont elle peut tirer fierté face à tous ceux qui ne cessent de la critiquer tout en s'efforçant de venir y vivre pour profiter de ses richesses et de son bien-être, et qui donc n'y ont pas leur place et y sont d'autant moins les bienvenus qu'ils y entrent et y vivent en toute illégalité.
- Quant à la France, son problème face à cette question, est simple et douloureux : « Comment intégrer des jeunes qui n’aiment pas la France dans une France qui ne s’aime pas ? » Là encore la réponse est très simple : en signifiant à cette jeunesse qui est parfaitement identifiée que la France, loin de ne pas s'aimer, bien au contraire, et surtout fidèle à son essence et à son identité, comme l'Europe toute entière, ne se pliera pas à leurs desiderata et que le monde ne demandant qu'à être visité, qu'ils ne se privent surtout pas de quitter le pays s'il ne leur convient pas, et encore moins d'y entrer en usant et abusant des fausses qualités de réfugiés,migrants, demandeurs d'asile que leur concèdent des droits démocratiques dévoyés .
Car pour revenir aux pratiques d'esclavagisme et de trafic d'êtres humains, voilà que M.Alpha Condé, président de la Guinée et président en exercice de l’Union africaine, qui se dit "indigné" face à la vente d’esclaves en Libye, condamne ce qu’il qualifie de « commerce abject » et de « pratique d’un autre âge ». Grâce lui en soit rendue ! L’Union africaine usera, ajoute-t-il, de tous les moyens à sa disposition pour mettre un terme à cette « ignominie ». Dont acte, là encore, mais le propos serait louable si l'intéressé n'en rajoutait pas une louche en déclarant - comme par hasard -, que « Ce sont les Européens qui ont demandé aux Libyens de bloquer les gens là-bas, donc, il y a aussi la responsabilité de l’Europe. » CQFD.
Si l'on ajoute le fait que la situation des migrants en Libye a été maintes fois dénoncée par le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme M. Zeid Ra'ad Al Hussein, lequel a comme par hasard là encore jugé « inhumaine » la coopération de l'Union européenne avec ce pays (la Libye), le concert d'indignation relayé par les chefs d'Etat africains qui "s'indignent" soudainement de cette situation qu'ils ne peuvent sérieusemet ignorer s'apparente au comportement de l'Hôpital qui se fout de la Charité.
Le président du Niger qui s’est dit « fortement choqué » a ainsi demandé ( à qui ? on ne sait) que le sujet soit mis à l’ordre du jour du sommet Union Africaine-Union Européenne prévu en Côte d'Ivoire fin novembre à Abidjan.
M.Mahamadou Issoufou à qui l'on fera cependant crédit d'avoir été le premier chef d’Etat africain à réagir en publiant un message sur son compte Twitter serait ainsi fort inspiré de suggérer à ses collègues d'Afrique et d'Europe une solution immédiate. en plaidant pour un arrêt de l'émigration africaine vers l'Europe.
III- S'agissant de responsabilité, la solution serait en effet très simple, qui consisterait :
- Pour la France et en priorité, à mettre en place un examen général sous forme d'Etats Généraux de l'Immigration qui aurait pour objet de vérifier sous contrôle de la Nation toute entière si l'immigration est optimale, c'est-à-dire de vérifier dans tous ses aspects (statistiques et origines ethniques et religieuses, i.e. ce "point aveugle" soigneusement évité) l'impact et les conséquences réelles d'une immigration en France et en Europe, plus précisément les réels avantages et les réels inconvénients tant pour les migrants que pour les pays d'accueil d'une politique d'immigration et de ses modalités, considérée comme un privilège dans ses dimensions de raisonnabilité, d'efficacité, de durabilité, d'avantages et de coûts.
- A déclarer sans attendre les résultats la fin immédiate de toute immigration d'origine Africaine et Orientale en Europe et la mise en place de manère souveraine - rapide, pacifique, au besoin contraignante mais en tout cas non négociable -, d'un retour aux pays d'origine d'une immigration imposée aux Européens par leurs dirigeants, contre leur volonté, sans les consulter.
- A demander aux populations européennes si elles ne préfèreraient pas plutôt recevoir et accueillir une immigration slave et/ou hispanique - de tradition chrétienne, catholique, protestante, orthodoxe, étendue à d'autres populations orientales maronite, chaldéenne, copte etc., ou encore asiatique - de tradition bouddhiste, shintoïste, plutôt que et uniquement musulmane, d'origine orientale ou africaine.
- A inviter les chefs d'Etat africains concernés à donner à l'UE mandat, sous contrôle des Nations Unies, de prendre en charge l'administration de tous les pays d'émigration, tels la Libye et les pays d'Afrique sub-saharienne, pour fixer définitivement en amont en Europe et en Afrique les mouvements migratoires en éradiquant passeurs, trafiquants d'esclaves, routes et marchés.
- A procéder à la mise en place sous contrôle conjoint de l'Union européenne, de l'Union africaine et des Nations unies d'un tribunal international ayant compétence intercontinentale - y compris en Europe -, pour arrêter et condamner à perpétuité avec confiscation de leurs biens toutes personnes faisant partie de cette chaîne de commandement parfaitement identifiée – du dirigeant politique Européen ou Africain à leurs éxécutants, des mafias à leurs complices et obligés, banques, fournisseurs, transporteurs etc.–, impliquées dans les migrations incontrôlées et leurs conséquences sous forme de trafic d'êtres humains et d'esclavagisme.
Avec l'Afrique et les Proche et Moyen-Orient, parions que la charge de travail sera réelle.
On souhaitera vivement que les autorités des dits pays dont les malheureux ressortissants sont désormais asservis mettent tout en oeuvre pour les "racheter" à leurs ravisseurs esclavagistes.
IV- Un mal très ancien et des pratiques millénaires
Comme l'explique Roger Botte (Centre d’études africaines EHESS-IRD), dans un remarquable article intitulé : « Les réseaux transsahariens de la traite de l’or et des esclaves au haut Moyen Âge : VIIIe-XIe siècle », de fait, un commerce proprement dit implique une certaine continuité dans le temps – douze siècles pour la traite transsaharienne –, un volume assez significatif, des réseaux de transport, des points de vente au sud et des marchés de redistribution au nord, le contrôle politique enfin des espaces, des différentes aires de parcours et des entrepôts par des tribus ou des États qui en assurent la sécurité.
L’organisation des flux commerciaux impliquait en outre l’existence d’États ou de villes marchandes aux débouchés nord et sud de chaque axe transsaharien. Au nord, on peut citer parmi ces pôles très actifs, même s’ils furent variables dans le temps : Fès, Marrakech, Tlemcen et son port Huneyn près d’Oran, Kairouan, Tripoli, Le Caire. Au sud, on comptait également des pôles et des États très actifs : Takrûr, Diafûn(u), Ghâna, Mâli, Gao, Kano, les capitales du Bornû, Agadès, Tombouctou (créée au XIIe siècle par les Touaregs), etc. La création de grandes villes relais ibâdites au haut Moyen Âge (Tâhert, Wâdî Rîgh, Sadrâta, Sijilmâsa, Ghadamès, Zawîla…) constitue entre le milieu du VIIIe siècle et le milieu du XIe siècle un des éléments du prodigieux mouvement urbain que connaît alors la Berbérie.
Les problèmes logistiques auraient sans doute compromis le commerce transsaharien s’il n’y avait eu des étapes-relais sur les routes commerciales entre le Bilâd as-Sudân, d’une part, et le Maghreb d’autre part. C’était des havres, des lieux de repos, des endroits où changer éventuellement de caravaniers, de guides ou d’escortes, des stations où s’approvisionner en eau et en vivres frais, etc. On y trouvait en effet des ressources en eau abondantes, les dattes fournissaient un aliment appréciable pour le voyageur et l’animal de transport. C’était aussi parfois des points de rupture de charge des caravanes en provenance du Bilâd as-Sûdân, avant leur régulation vers les ports caravaniers du nord – ainsi le Tuwât a-t-il joué un rôle majeur dans la redistribution tous azimuts des esclaves. Les marchands pouvaient aussi acquérir dans ces oasis-relais les produits du Bilâd as-Sûdân, notamment les esclaves, sans avoir à y aller. C’est d’ailleurs une des caractéristiques du commerce du Sahara tout entier de ne se faire que par des centres jouant le rôle d’intermédiaires successifs.
Du Kânem au Bornou, du Tibesti au Soudan, du Fezzân au bassin du lac Tchad, du Bilâd as-Sûdân à la Tripolitaine et à la Cyrénaïque, c'est toute l'Ifrîqiya qui participe et tire avantage d'une économie esclavagiste où de nos jours les pistes et les marchés sont remplacés par les camions, les armes automatiques, les smartphones, l'argent liquide, les transferts bancaires électroniques, le tout au profit de criminels de sac et de corde mais aussi d'organisations étatiques et d'ONG pétries de bonne conscience et de charity business qui, de part et d'autre de la Méditerranée, tirent d'immenses et juteux profits d'un commerce immonde.
Manifestement, rien n'a changé...
Sources et références :
Roger Botte, « Les réseaux transsahariens de la traite de l’or et des esclaves au haut Moyen Âge : VIIIe-XIe siècle », L’Année du Maghreb, VII | 2011, 27-59.
Roger Botte, « Les réseaux transsahariens de la traite de l’or et des esclaves au haut Moyen Âge : VIIIe-XIe siècle », L’Année du Maghreb [En ligne], VII | 2011, mis en ligne le 01 janvier 2013, consulté le 20 novembre 2017. URL : http://anneemaghreb.revues.org/1106  ; ; DOI : 10.4000/anneemaghreb.1106
Thérèse Delpech, L’ensauvagement Le retour de la barbarie au XXIe siècle, Paris, Grasset/Fasquelle, 2005, 366 p.
Marion Duvauchel, « Thérèse Delpech, L’ensauvagement Le retour de la barbarie au XXIe siècle », Questions de communication [En ligne], 12 | 2007, mis en ligne le 12 avril 2012, consulté le 19 novembre 2017. URL : http://questionsdecommunication.revues.org/2553
http://edition.cnn.com/2017/11/14/africa/libya-migrant-auctions/index.html
http://www.rfi.fr/afrique/20171118-guinee-libye-union-africaine-alpha-conde-refugies-esclavag
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/libris/3303331280750/3303331280750_EX.pdf
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