Convergence des luttes ou disparition des grèves ?
Si vous vous intéressez à la sociologie vous savez sûrement que selon E.Durkheim, le lien social est synonyme de cohésion sociale, c'est ce que l'on appelle aujourd'hui la cohésion sociale. La cohésion sociale, est un certain nombre de valeurs et de normes auquel adhère l'ensemble des membres de la société pour "vivre ensemble". E.Durkheim distingue de ce fait la société traditionnelle de la société moderne. Dans une société traditionnelle les individus sont liés par des liens de similitude,ce sont les croyances du groupe qui prédominent sur les croyances de l'individu. La cohésion sociale repose ici sur la ressemblance.Dans les sociétés modernes les individus sont liés par des liens de complémentarité. La cohésion sociale repose ici sur l'interdépedance. En effet les sociétés modernes sont marquées par l'apparition de la division du travail et l'individualisme (conception philosophique qui cherche à privilégier les intérêts des individus par rapport au groupe).
Si on valide la conception d'E.Durkheim et qu'on la prend en compte, on constate que l'individualisme entre en totale contradiction avec le syndicalisme ou l'organisation d'une quelconque grève dans la mesure où la grève repose sur une valeur qui est la solidarité (corporatiste, national, international) ;or du fait de l'individualisme, tous les individus ne partagent pas cette valeur. En effet l'individualisme pouvait se developper de deux manières : Particulariste ou Universaliste. La forme universaliste prône l'autonomie de l'individu qui pratique le lien éléctif (on constate une plus grande liberté de choix dans les relations familiales par exemple). Si l'individualisme se developpe de manière particulariste on assiste alors à l'émergence du "chacun pour soi" et de l'égoïsme qui va faire reculer le syndicalisme (car on ne croit plus en l'action collective ou on ne se sent pas concerné, on pense aux intérêts de sa corporation...). Cela ne semble pas evident mais la France n'est pas exclue de ce processus.
En France la grève devient légale en 1864. De la Commune de Paris en 1871 jusqu'à la ZAD de NDDL, les mouvements sociaux en France ont toujours été nombreux (éxcepté entre 1940 et 1944). Certains d'entre eux ont marqué l'histoire comme la grève du Front Populaire de 1936 qui a réussi a décrocher une augmentation de 12% des salaires ainsi que l'application de la semaine de 40 heures et de 15 jours de congés payés.Et à l'image de mai 1968 qui était "contre la dictature Gaulliste", on a vu se mettre en place un mai 2018 "contre la dictature Macronniste". Beaucoup espèrent ou esperaient une convergence des luttes, quand d'autres voient les grèves peu à peu disparaître. De nombreux leaders politiques et syndicaux ont appelé à la convergence des luttes c'est-à-dire l'addition des luttes (cheminots, étudiants, fonctionnaires...). François Ruffin avait d'ailleurs déclaré lors d'une interview dans les studios de Médiapart qu'il fallait faire la fête à Macron le 5 mai 2018, ceci dans l'espoir d'une convergence des luttes mais le déclin est réel.
En France selon la DARES, on est passé de plus de 4 millions de journées individuelles non-travaillées en 1976 à moins de 200.000 en 2004 ! Les causes de cette très large diminution ne sont pas uniquement l'individualisme. Parlons tout d'abord du Paradoxe d'Olson : Face à un conflit l'individu est confronté à deux choix, il y a des coûts individuels à participer au conflit et en même temps les gains tirés du conflit profite à tous même à ceux qui n'y ont pas participé. L'individu rationnel va choisir d'être un passager clandestin, c'est-à-dire qu'il va profiter de l'issu du conflit sans y participer. Un problème se pose : si tout le monde raisonne comme cela, les conflit sociaux risquent de disparaître. Paralellement on assiste au developpement du chômage. Les chômeurs sont d'ailleurs pour K.Marx une armée de réserve qui va faire pression sur les salariés et tirer les salaires à la baisse : les salariés ont notamment peur de perdre leur emploi. A cela s'ajoute la désyndicalisation ainsi que l'individualisation des carrières et des salaires. L'OCDE remarque qu'en 1975, 22% des salariés étaient syndiqués contre 8% en 2008.
Comme pour confirmer un tel raisonnement, E.Macron avait déclaré en conseil des ministre qu'il ne voyait "toujours pas de convergence des luttes", il a aussi mit en avant "un soutien croissant au réforme ferroviare". Il insiste également sur la mobilisation en baisse ses derniers temps. Peut-être peut-on espérer que la mobilisation du 26 mai constituera un tournant vers la convergence des luttes.
Je vous laisse avec cette citation d'un auteur dont la pensée refait surface depuis que la banque Naxitis a déclaré que depuis que le capitalisme éxistait il était passé par toutes les étapes décrites dans Le Capital.
"L'Histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire de luttes de classes"
Karl Marx (1818-1883)
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