Lady d’Arbanville, la belle endormie
C’est à un chanteur et auteur-compositeur londonien, Cat Stevens, que l’on doit la création, au début des « seventies », de cette chanson devenue un incontournable classique de la musique pop. Près d’un demi-siècle plus tard, les accents émouvants de cette triste complainte restent profondément gravés dans la mémoire des anciens...
Né en 1948 dans le quartier de Marylebone d’un père chypriote grec et d’une mère suédoise, Steven Demetre Giorgiu débute sa carrière en 1966 sous un nom de scène, Cat Stevens, inspiré par les « yeux de chat » qu’une jeune admiratrice voyait en lui. En 1969, Cat Stevens est atteint d’une grave tuberculose. Entre durée d’hospitalisation et temps de convalescence, il est contraint de mettre sa carrière entre parenthèses jusqu’au début de l’année 1970. Entretemps, il a rencontré Patricia d’Arbanville, une jeune mannequin et actrice américaine débutante qui est devenue sa petite amie.
En 1970, alors que Cat Stevens se remet de sa maladie, Patti d’Arbanville décroche son premier véritable rôle de cinéma au côté de Michel Simon dans La Maison du cinéaste français Gérard Brach. Cat Stevens est alors follement amoureux de la jeune femme. Hélas pour lui, Patti d’Arbanville ne ressent pas la même attirance pour le musicien. Privilégiant sa carrière cinématographique, elle se détache inexorablement du musicien. Cat Stevens en conçoit une immense déception et décide de transcrire dans une chanson le sentiment que cet amour non partagé lui inspire.
Ainsi naît, dans une version single et dans l’album Mona Bone Jakon, My Lady d’Arbanville, une superbe complainte dans laquelle la jeune femme ne se réveille pas du profond sommeil dans lequel elle est plongée : « Pourquoi dormez-vous si paisiblement ? » (Why do you sleep so still ?) questionne l’amoureux qui espère encore que la belle se réveillera le lendemain. Hélas ! le cœur de l’endormie est inaudible, ses lèvres évoquent la froidure de l’hiver et sa peau est devenue si blanche... L’amoureux prend alors conscience que la dame est dans un cercueil, mais il est persuadé que son amour pour elle, symbolisé par une rose, ne mourra jamais : « This rose will never die ».
Très vite, Cat Stevens comprend que sa relation avec la jeune actrice est terminée. Dès lors, il compose une autre chanson, elle aussi inspirée par son amour pour Patti d’Arbanville : Wild World, l’un des titres de l’album Tea for the Tillerman. Dans cette chanson, Steven conseille à son ex-petite amie de prendre bien soin d’elle-même et lui souhaite de se faire de nombreux amis sympathiques tout en la mettant en garde contre la méchanceté de ce « monde sauvage ». Quelques années plus tard, Cat Stevens abandonne la musique pop pour se convertir à l’Islam sous le nom de Yusuf Islam.
La chanson My Lady d’Arbanville a été reprise, traduite ou transposée de nombreuses fois. La reprise la plus connue est incontestablement celle du célèbre chanteur gallois Tom Jones ; quant à la plus belle transposition, elle est due au talent de la chanteuse italienne Gigliola Cinquetti.
Liens musicaux :
My Lady d’Arbanville par Cat Stevens (1970)
Lady d’Arbanville par Dalida (1970)
Lady d’Arbanville par Gigliola Cinquetti (1983)
Wild World par Cat Stevens (1970)
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