• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Libéristes contre populaux en finale du championnat d’Europe

Libéristes contre populaux en finale du championnat d’Europe

Les sophistes s’ingénient depuis plus de 2 000 ans à maquiller des réalités triviales ou répugnantes sous des fards qui se veulent plaisants. Chaque culture y est allée de son génie propre pour élaborer des recettes sucrées propres à satisfaire les appétits des gogos avides de délicatesses, mais qui ne font que couvrir le goût amer de leur condition sous un édulcorant.

Qu’il s’agisse de l’ »understatement » britannique qui masque sous des apparences polies et modestes une conviction intime de supériorité, du « politiquement correct » américain hypocrite qui espère donner le change en imposant le terme « homme de couleur » pour remplacer le mot « nègre » tout en maintenant le cap plus ou moins avoué d’une suprématie blanche ou qu’il s’agisse de la vieille langue de bois française dont se servent les énarques pour neutraliser ou adoucir les choses avec des mots (« la situation conjoncturelle préoccupante fera l’objet de la mise en œuvre sans concessions des problématiques de bon sens ! »), le dénominateur commun à ces ressources stylistiques est de cacher sous des formules faciles à retenir ou ronflantes une certaine obscurité de l'argumentation et des buts recherchés.

Tribuns et journalistes sont des virtuoses du maniement de ces parlers creux destinés à dissimuler une vérité désagréable tout en feignant de la décrire. Les deux succès du hit-parade depuis quelques mois sont les mots « populiste » (pour ne plus dire « fasciste ») et « libéral » (pour éviter de dire « capitaliste »), utilisés pour tenter d’éclairer les ignorants que nous sommes sur l’origine de la nouvelle ligne de démarcation politique qu’ils perçoivent en Europe, et pour remplacer l'ancienne ligne entre la gauche et la droite. 

D'un côté, se trouve le camp de Merkron (Merkel-Macron), les libéristes, et de l'autre, celui d'Orbvini (Orbán-Salvini), les populaux. A moins que ça ne soit le contraire.

En fait, au-delà de leurs différences sur des questions telles que la zone euro, Merkel et Macron sont bien les champions du « libre-échange » des marchandises, et des êtres humains pour optimiser le ratio prix d’achat/prix de vente (du travail, des matières premières et des produits finis) à l’origine de la réalisation de profits conséquents pour leurs commanditaires. L’euphémisme admis par les communicants est le mot « libéral ».

Au-delà de leurs divergences, le dirigeant hongrois Orbán et le vice-premier ministre italien Salvini préconisent tous deux des solutions nationales « illibérales » (sic) et sont donc taxés de « populistes (sous-entendu « démagogique », sous-sous-entendu « non-démocratique »).

Le nouveau premier ministre espagnol Pedro Sánchez et le président du conseil européen Donald Tusk appartiennent clairement au camp Merkron, tandis que le CSU de Bavière, le parti autrichien de la liberté, le Parti du Droit et de la Justice (PiS) en Pologne sont en face, chez Orbvini.

Quelles que soient leurs appellations et leurs attributions exhibées ou camouflées, l’affrontement entre Merkronismus et Orbvinismo va être déterminant ces prochains mois pour les destinées de l’Union Européenne. Alors que les appareils politiques se préparent aux élections européennes de l'été 2019, le plus grand parti du Parlement européen, le Parti populaire européen, s'accroche désespérément au parti Fidesz d'Orbán et fait même des ouvertures furtives au PiS de Pologne, par peur du camp Orbvini et scelle de nouvelles alliances pour le concurrencer pendant que l’intéressé, Salvini, joue sur l’ambiguïté du nom de son parti, la Lega (Ligue), pour envisager "une Ligue des ligues d'Europe" qui n’ont de commun que le nom. Même une chatte sortant de Science-Po n’y retrouverait pas ses petits.

Pourtant, toutes les fractures à l'intérieur de l'UE sont loin de se situer sur la faille sismique Merkron-Orbvini : les désaccords sur la zone euro et le prochain budget européen relèvent davantage de la géographie et de l’histoire et non des clivages politiques, et le Brexit est un match hors-championnat qui se joue à 27 contre un. Mais pour la presse télécommandée et les JT, les deux camps sont bien définis.

Pour l'instant, l'équipe Orbvini a quelques points d’avance. L'équipe Merkron a l'air aussi fatiguée que les équipes de football allemandes et espagnoles de la Coupe du monde, en appliquant avec acharnement la tactique et la technique de jeu de leurs managers, mais en ne réussissant pas à marquer. De ce fait, l'avenir de l’entraineur Merkel est très incertain, alors que le coach autrichien Kurz, est devenu un acteur de premier plan louchant ouvertement vers Orbvini.

La question de l'immigration, autour de laquelle le camp d'Orbvini rassemble ses partisans, est à la fois réelle et symbolique. Après l'élargissement de l'UE en 2004, plus de 2 millions d'Européens de l'Est sont allés en Grande-Bretagne et de réelles inquiétudes concernant le logement, l'emploi, les soins de santé et les écoles ont contribué au vote sur le Brexit. Après la décision de Merkel de 2015 sur les flux migratoires, un grand nombre de réfugiés sont arrivés en Allemagne en peu de temps. L'Italie, l'Espagne et la Grèce se sont débrouillées comme elles l’ont pu sans trop d'aide de la part de leurs partenaires du nord de l'Europe, pour accueillir un grand nombre de réfugiés et de migrants.

Or, l'immigration est une question symbolique sur les plans de la culture et de l'identité, et même si les niveaux ont chuté de façon spectaculaire depuis 2015, cela ne rassure pas les gens sur les changements qu’ils ont constatés et attribués à ce phénomène surmédiatisé, même si les vraies causes de leurs malheurs sont ailleurs. En 2017, 50% des personnes interrogées dans l'UE était d'accord avec l'affirmation selon laquelle « il y a tellement d'étrangers dans notre pays, parfois je me sens comme un étranger ». En Italie, ce chiffre était de 71%.

La crise de l'Europe « libérale » est principalement le résultat des forces créées par le « libéralisme » lui-même. Ce sont le marché « libre », l’ouverture des frontières, l'européanisation et la mondialisation qui ont produit ces changements rapides et visibles dans les sociétés européennes.

Surfant sur ce mécontentement, les nationalistes assurent qu’il suffit de relever le pont-levis pour reprendre le contrôle et restauration un passé idéalisé de plein emploi et de solidarité nationale alors que leurs adversaires s’échinent à convaincre qu’ils contrôlent toujours la situation. Et pendant ce temps-là, la Méditerranée qui se trouve à deux pas joue avec les galets : la « révolution numérique » continue à destabiliser les structures professionnelles et commerciales sans que les-uns ni les autres n’y trouvent à redire, trop occupés qu’ils sont à twitter et échanger sur facebook.

Nous ne sommes qu'au début d’un bouleversement que les structures politiques traditionnelles n’ont pas été préparées à prendre en compte, et nous sommes confrontés à une cible en évolution rapide en raison du rythme de la « révolution numérique ». 

Dans un avenir prévisible, il est illusoire de croire qu'une identité transnationale ou supranationale puisse être concurrentielle. La question est de savoir s’il faut abandonner les nations aux nationalistes. Mais la solution n’est certainement pas une nouvelle salve de détricotage des institutions existantes dont l’affaiblissement se traduit par le succès des imposteurs.

Si un retour au passé est illusoire en même temps qu’impossible, un sursaut de lucidité sur la pertinence et le maintien des états-nations en même temps que la limitation du rôle des structures supra-nationales à ce qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être, des alliances contractuelles, est nécessaire. La sortie des pièges concoctés, mis en place et exploités par les groupes de pression économiques et financiers n’est pas une condition suffisante pour reconstruire des nations altérées, mais une condition nécessaire pour commencer à panser les plaies.


Moyenne des avis sur cet article :  4.33/5   (6 votes)




Réagissez à l'article

3 réactions à cet article    


  • Jean Roque Jean Roque 9 juillet 2018 18:52

     
    SOROS, SPÉCULATEUR - NÉGRIER,
    CE PHILANTHROPE SUPRÊME IDOLE GOCHO :

     
    (Open Society de Popper...)
     

    « Quant à la Loi, à la piété [antiraciste] et à la Religion, qui elles aussi ont prêché ce principe de solidarité, nous savons qu’elles l’ont simplement escamoté pour en couvrir leur marchandise - leur prescription à l’avantage du conquérant, de l’exploiteur, [du Seigneur Mondialiste], et du prêtre [le prébendier négrier du Capital, payé par lui à coté de la journalope...] »
     
    Piotr Kropotkine - La morale anarchiste [modernisée]


    • Parrhesia Parrhesia 9 juillet 2018 20:21
      >>>... le maintien des états-nations en même temps que la limitation du rôle des structures supra-nationales à ce qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être, des alliances contractuelles, est nécessaire.<<<

      On ne saurait mieux dire !
      Le retour à cette sagesse, peut-être transitoire mais toujours vitale pour un minimum de plusieurs décennies (et sans doute plus), représente la seule voie de salut pacifique contre la prise d’un pouvoir humainement dévastateur par la secte mondialiste !!!

      Très bonne soirée, Clark Kent !

      • zygzornifle zygzornifle 10 juillet 2018 10:05

        Rothschildlisme contre Populisme , les premiers sont déterminés ont la finance la police l’armée pour eux et on la rage de gagner « un pognon de dingue » quitte a tout défoncer , les second ont le nombre pour eux mais ne sont meme plus capable de lever le petit doigt quand Macron leur fait les poches .....

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON



Publicité



Les thématiques de l'article


Palmarès



Publicité