La désinformation dans toute sa splendeur
La désinformation dans toute sa splendeur.
Certains médias en font des tonnes ces derniers temps sur la « conversion » de l’égérie allemande de « Die Linke »( plus ou moins le pendant allemand des Insoumis ), Sahra *Wagenknecht à la préférence nationale dans ce qu’elle a de plus grotesquement d’extrême-droite bornée.
Prenant en compte les appréhensions légitimes de la population devant un risque de submersion, risque certes fantasmé mais qui est prégnant dans une partie de l’opinion, et partant du constat qu’un fait même largement surestimé est plus têtu qu’un lord-maire et que pour en contrer les nuisances, il faut en analyser sans complaisance à la fois les causes et les effets donc faire preuve de pédagogie, elle a lancé un mouvement « Aufstehen ! ( se lever , debout !) » pour essayer de ramener vers la Gauche les esprits perdus séduits par le parti d’Extrême-droite « Alternatice für Deutschland » dont certains membres se réfèrent ouvertement à l’idéologie nazie.
Cette initiative se heurte au sein de sa famille politique à une aile que l’on qualifiera de plus dogmatique qui n’est pas loin de considérer comme un sacrilège de prêter l’oreille aux doléances – même infondées – d’une partie de la population, souvent la moins bien lotie, celle aux dépens de qui s’est largement structuré le miracle des excédents budgétaires allemands et d’essayer de déconstruire ces fantasmes sans nier les faits en apportant une réponse de gauche qui ne soit donc pas construite sur la haine de l’autre.
Il y a quelques années en France, Jean Jaurès avait lui aussi fait l’objet d’une appropriation par le FN dont certains élus pour parfaire la mystification ont été jusqu‘à mettre ou maintenir le buste de Jean Jaurès dans leur bureau public. L’outrance eut beau être manifeste et les valeurs défendues par ces gens aux antipodes de celles qui ont toujours supporté le combat du grand tribun socialiste, il faut bien admettre qu’une partie du peuple traditionnellement de Gauche s’est laissée prendre à la logomachie ouvriériste de la juteuse affaire de famille des millionnaires de Saint Cloud.
Rien n’est plus aisé que de s’en prendre au capitalisme, en tant qu’abstraction qui se nomme, dans leurs discours et selon les circonstances et les auditoires, mondialisme ou ploutocratie ou encore Bruxelles, mère de tous les maux. Ce monstre fut autrefois du temps de l’Extrême-Droite plus intellectuelle d’avant-guerre bien identifié ( les Juifs portaient la responsabilité de tous les excès du capitalisme ) et cette campagne bien orientée déboucha sur les épurations ethniques d’un passé pas tellement éloigné où le simple ouvrier misérable fut assimilé au banquier richissime sous prétexte d’une pseudo-solidarité communautaire.
Loin de moi l’idée de réduire ad hitlerum le discours de ces gens qui disent en partie des vérités sur le grand capital sans avoir d’ailleurs la moindre intention ni capacité de l’empêcher de sévir. Ils semblent plutôt commissionnés pour reporter la vindicte populaire sur ceux qui viennent chez eux d’abord victimes chez eux du capitalisme transnational. Ces misérables, vrais damnés de la terre, sont attirés par l’eldorado européen que leur dépeignent via leurs moyens de diffusion ceux qui ont toujours un coup d’avance voire une décennie et qui préparent aujourd’hui les nouvelles chaînes d’exploitation de demain, à savoir les dirigeants des grandes entreprises.
Pour en revenir à Jaurès, tandis que Clémenceau alors ministre de l’Intérieur considérait que les travailleurs étrangers n’avaient rien à faire dans les manifestations politiques ( ce qui peut se concevoir ) et syndicales ( ce qui est aberrant ) , déjà à l’époque le grand tribun s’opposait à ce discours car il considérait que les immigrés ( qu’on appelait alors étrangers ) devaient pouvoir s’organiser et lutter « sans crainte d’expulsion contre l’arbitraire qu’il fût bêtement administratif ou violemment policier »
Déjà à l’époque ceux qu’on appelait la Gauche ne partageaient donc pas tous la même sensibilité sur ces questions qui sont devenues cruciales aujourd’hui au point d’occulter les vrais problèmes de la société qui n’ont rien à voir avec l’identité mais tout avec la précarisation sociale à l’ordre du jour sans que cela soit explicitement avoué.
Pour Jaurès ( comme pour Madame Wagenknecht ) les maîtres mots du combat de l’émancipation populaire doivent être « liberté » et « solidarité » ; Jaurès est probablement un des premiers à insister sur la puérilité des thèmes de la préférence nationale qui, déjà de son temps, s’inscrivaient en faux devant les réalités des conditions économiques et étaient porteurs de divisions favorisant le patronat.
Mais il n’était pas dupe et savait aussi qu’il convenait de s’opposer à ce que la main d’œuvre étrangère ne fût pas utilisée aux seules fins d’avilir les salaires et les conditions de travail.
Certes la Gauche doit sortir de l’angélisme et cesser de se soumettre en quelque sorte au nom de ses valeurs humanistes à l’appel d’air qu’insuffle subtilement dans des pays de misère la propagande capitaliste pour se doter d’une armée de réserve taillable et corvéable à faible coût, elle doit plutôt dénoncer de manière incessante les instigateurs intéressés de cette déportation et les empêcher de nuire mais aussi s’ouvrir à ceux qui fuient la guerre ou la famine qui sont l’une et l’autre les dégâts collatéraux, fruits amers de l’impérialisme.
Cette attitude d’accueil est au demeurant de mille coudées moralement supérieure aux vociférations haineuses de personnes qui ne se résignent pas à ce que leur pays suive sa vocation historique, celle d’être un pays d’accueil qui a connu de tous temps le changement y compris ethnique.
Mais il faut aussi entendre les récriminations, les plaintes du petit peuple qui finit par penser que la somme de ses malheurs vient d’un surcroît d’immigrés alors qu’elle n’est que la résultante d’un système qu’il continue à affermir en se prêtant aux calculs sordides d’aventuriers seulement motivés par l’appât des honneurs et des gains qui les accompagnent.
Le fondateur de la Ligue du Nord, Umberto Bossi, l’homme qui voulait balayer la crasse de Rome, n’était en fait qu’un vulgaire escroc débarqué en toute hâte de son parti non pour ses actes mais parce qu’il était sous le coup de poursuites judiciaires et le fondateur de Pegida en Allemagne n’est qu’un repris de justice condamné pour des délits de droit commun.
On évoquera pour mémoire et sans faire d’autres commentaires que le RN ( ex FN ) est sous le coup d’une instruction judiciaire pour détournements supposés de fonds européens.
La France Insoumise connaît en son sein un débat sur les deux lignes, l’une humaniste bon teint défendue entre autres par Clémentine Autain et une autre, celle de Kuzmanovic, chargé par Mélenchon de vendre les idées des Insoumis au sein de milieux a priori réfractaires sinon hostiles.
Le fait que Kuzmanovic n’ait pas été très prudent dans ses initiatives et se soit laissé entraîner à la fréquentation, fortuite dit-il, de gens – identitaires purs et durs – a contraint Mélenchon a rappeler à l’ordre ceux qui se laisseraient aller même avec les meilleures intentions à des accommodements douteux.
Maintenant on se gardera de faire un procès d’intentions malsaines à Kusmanovic mais en gardant néanmoins à l’esprit que l’histoire de France est remplie de personnalités au parcours sinueux commençant à gauche voire à l’Extrême-gauche puis faisant les beaux jours de l’Extrême-droite, Florian Philippot en est un exemple des plus récents passant du mouvement de Chevènement au Front National de Marine Le Pen.
En résumé il suffit de relire et de s’inspirer de Jaurès car c’est encore dans les vieilles marmites que l’on fait la meilleure soupe.
En effet tout est dit dans Jaurès qui éclaire de bien des lumières critiques la bienveillante attitude de Madame Merkel face au flot de réfugiés faisant à la fois preuve de bon cœur mais aussi d’un sens aigu de la complaisance aux desiderata des forces capitalistes d’une Allemagne dont la démographie en chute libre menace à court terme la pérennité de ses sites de production.
Tout est dit chez Jaurès mais sans l’appel à la haine raciale qui déforme de manière hideuse le message des populismes de Droite et engage parfois de bonnes personnes dans des voies sans issue.………………………………………………………………………………………………………............................................
* ) Sahra avec le « h » devant le « r », prénom d’étymologie arabe qui signifie brune au teint fauve qui lui vient de son ascendance iranienne.
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